Cher Grégory Nicolas,

que la vie est douce à l’ombre des grands arbres. Des tilleuls ? L’on peut s’y retrouver avec les très proches, pour partager un excellent Morgon. Le temps est à la discussion. Autour du vin, du vélo, des hommes et…des équipiers.
Ces docteurs ès labeur, ces travailleurs. Ils sont vingt et cent, ils sont des milliers. Ils sont sans fleurs ni couronnes. Sans baisers à l’arrivée, sans Miss beauté à leurs côtés. Sans podiums, sans trophées sur la cheminée. Sans palmarès, sans lignes dans les livres d’histoire du cyclisme.
Qu’importe, ils sont invisiblement vivants. Invisiblement présents. Pour la plupart, ils sont et ont voulu, en toute conscience, être serviteur. Comme un sacerdoce. L’ombre et l’anonymat comme habits de Chœur. Pour le commun des spectateurs, les équipiers sont des prises accessoires.
Au fil des pages, vous entrez en intimité chez ses sans grades. Vous avez voulu écrire un livre sur le vélo, sans doute. Il en ressort, je pense, bien plus. Un livre sur l’amitié. Sur ses liens forts qui les unis. Sur la persévérance et le dépouillement des corps et des âmes. Sur le don De soi.
Sachez que votre écrit est universel. Je veux dire en cela que nous avons tous quelque part, à l’ombre d’un arbre généalogique, un Père Boshat. Un Louison Bobet qui rentre, dans l’estaminet et salue la compagnie.
Nous avons tous, croisé, sur un terrain de jeu, un Perrig Quéméneur, que l’on a honni et avec qui, quelques années plus tard, l’on se lie. Un Pierre Roland qui convole en juste noce avec une cousine. Pas peu fier que nous sommes, d’avoir un héros sportif dans la famille. On n’a pas très loin, un exemplaire et rassurant, Axel Domont.
Et puis un livre ne serait pas à conseiller, s’il n’y avait pas à l’intérieur, des instants à vous arracher les viscères. Clément Chevrier, devenu fil de fer. Plus léger que l’air. Vouloir voler, ne pas pédaler, voler dans les montées. Au risque et péril d’un corps décharné. Témoignage troublant. Sujet tabou ?
A force d’opiniâtreté, de volonté, vous vous surprenez à suivre l’équipe de France aux championnats du monde. Pas derrière les mains courantes, pas dans les salles de presse, non au saut du lit. Vous côtoyez les meilleurs. Ceux dont on a tellement parlé cet été. Et par là-même, vous rencontrez la statue du commandeur. Légendes vivantes du vélo. Gardien du dogme et des idées : Cyrille Guimard. A vous lire, sans doute pas l’homme que l’on imagine. Sans doute tendre et touchant.
Cher Grégory Nicolas, sachez qu’un jour, il nous faudra nous retrouver, à l’ombre des grands arbres, un tilleul ? A déguster un sublime Morgon. Vous me parlerez de vin, de l’art, les lendemains de cuite, d’un cafetier corse qui hait les Bretons, du départ de Waddle de Marseille et surtout…des équipiers.
Sébastien Beaujault

“Équipiers”
Grégory Nicolas
Hugo sport

Sebastien Beaujault

Rédacteur web freelance, ici je vous parle de littérature sportive. Et plus généralement de la culture et du sport. Du livre de sport, de la bande dessinée de sport et même, parfois, de documentaire sportif. Malheureux à plus de 3 mètres d'un livre.