Cher Guy Boley,

Dans un monde de séduction publicitaire, vous avez fait fort. Le titre : “quand Dieu boxait en amateur”, est un crochet du droit, directement au cœur. Ce n’est pas douloureux, c’est tout le contraire. C’est une sensation joyeuse. Ces cinq mots déchainent une terrible envie. Envie de le lire, vite et tout de suite. Honnis soit la 4e de couverture, on verra plus tard. Comme l’argent, le titre ne fait pas le bonheur, mais il y contribue fortement.
On apprend, d’ailleurs, dans “la grande table” d’Olivia Gisbert sur France Culture *, que vous avez failli appeler votre ouvrage : “opérette, branlette et majorette” ! Cela m’aurait beaucoup fait rire. A priori les éditeurs moins, tant pis. Le monde ne s’emballe plus !
Ce n’est évidemment pas ce que l’on peut appeler un livre de sport. Je fais ici, une petite incartade à l’esprit de ce blog, même si le noble art y est bien souvent évoqué, sublimé, inspirant.
On a les médailles que l’on mérite. Votre père, à qui vous rendez un vibrant hommage dans cet ouvrage, fut, dans des temps anciens, champion de France de boxe amateur. Mais il est des titres sans gloires ni paillettes. Pas même une ligne dans Wikipédia. Qu’importe, c’est à Besançon, en ses terres, qu’il partagera sa ceinture de champion et bien d’autres choses.
Homme multiple votre paternel ! Un jour forgeron, Héphaïstos bourguignon. Un temps chanteur d’opérette dans la cuisine familiale pour quelques voisins cheminots. Un chanteur du rail en somme ! Et puis, pour quelques bigotes Bisontines et surtout par amitié, il fut le Fils de Dieu, sacrifié sur la croix dans la salle paroissiale. Habité dans l’œuvre théâtrale d’une vie : “la passion de notre Seigneur Jésus-Christ” !
Il y a l’ami Pierrot, que votre père a connu sur les bancs d’école. Aux jeux d’enfants, ces deux-là, préféraient, l’amour des mots. Pas votre grand-mère, a priori, qui dû élever seul ce fils lettré : “les livres ça vous zigouille les méninges et vous abîmes les yeux”. Ce lien fraternel, solide, malgré des chemins divergents. L’un mania le marteau et l’enclume, l’autre le missel et les confessions. Une amitié forgée à la croix de bois pour l’un et à la croix de fer pour l’autre.
J’ai adoré, par petites touches, subtiles, votre humour désopilant qui se glisse entre les lignes. Juste ce qu’il faut de drôleries pour en faire un livre à sourire. Un livre joyeux. Subtilement écrit.
Cher Guy Boley, il vous fallait tuer le père, vous l’avez fait en l’oubliant dans vos jeunesses utopiques et révolutionnaires de mai 68. Désormais, avec cet ouvrage, vous le ressuscitez. Tiens, ça me rappelle quelqu’un !
Pourquoi la résurrection ne serait que l’apanage d’un seul et unique !

“Quand Dieu boxait en amateur”
Guy Boley
Grasset

*La Grande Table – 27/09/18

Sebastien Beaujault

Rédacteur web freelance, ici je vous parle de littérature sportive. Et plus généralement de la culture et du sport. Du livre de sport, de la bande dessinée de sport et même, parfois, de documentaire sportif. Malheureux à plus de 3 mètres d'un livre.

Une réponse à “Cher Guy Boley,

  1. je viens par hasard de tomber sur votre article (pas rapide, le mec se prétendant ex-boxeur !) ; votre critique m’a enchanté ; et, dussé-je vous enlever des illusions, mon père a bien fait de la boxe, mais s’il a été effectivement champion de France, ce fut en gymnastique, pas en boxe ; la fiction peut se permettre de telles petites malversations pour la beauté de la dramaturgie…
    cordialement,
    Guy Boley

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