Bien plus que la loi sur le cinéma : un choix de société !

Dernier rappel avant dimanche : nous voterons sur une révision de la loi sur le cinéma (LCin). Une proposition qui n’aurait jamais dû s’appeler « Lex Netflix », car ce n’est pas le sujet, et qui dépasse en réalité largement le domaine du soutien aux productions cinématographiques, car elle est emblématique de la manière dont le numérique influence la redistribution des richesses.

En quelques mots : nous votons sur la révision de la LCin, en y incluant, pour faire court, une obligation pour les entreprises qui diffusent du contenu (et des publicités ciblées sur la Suisse) sur les réseaux numériques d’investir 4% de leur chiffre d’affaire dans des séries et films suisses (ou co-produits en Suisse). Une obligation similaire à celle déjà existante pour les entreprises suisses et notamment la SSR (l’UDC devrait donc s’en réjouir…) et qui concerne donc également les opérateurs pour la téléphonie et internet qui diffusent des contenus (films, séries, jeux, etc.).

Au-delà du fait qu’il s’agisse – argutie argumentative – d’une taxe ou non (à mon sens non, les entreprises investissent en Suisse et retirent des profits de leurs productions comme elles le feraient n’importe où), j’aimerais rappeler un élément : nous sommes là typiquement face à une situation ou des entreprises multinationales basées à l’étranger génèrent des bénéfices, notamment en ponctionnant nos données privées pour vendre de la pub, et ne contribuent en rien au bien commun de là où elles tirent leurs bénéfices. De plus, la révision de la LCin contribue à l’emploi en Suisse, en générant des recettes pour des projets ancrés en Suisse dans des métiers divers qui ont beaucoup souffert de la crise Covid, et contribue à développer la compétitivité de la production culturelle aussi en Suisse même et à l’étranger, en renforçant leur diffusion et leur visibilité, et donc le rayonnement de notre pays. Ceci est bienvenu afin de ne pas miser seulement sur le chocolat et les montres (même si j’adore le chocolat et respecte la beauté de nos produits horlogers !). Cette étude de Ernst & Young de 2019 l’avait bien montré: pour 1 franc investi, c’est 3.1 francs qui reviennent à l’économie suisse !

Le processus est en réalité exactement le même que pour les GAFA (Google, Facebook, Amazon, etc.), que tout le monde politique, y compris à droite, fait semblant de critiquer. Pourtant, lorsqu’une proposition concrète est sur la table, l’UDC, une partie du PLR et surtout les Verts Libéraux la refusent.

Car cette LCin n’est en réalité pas en lien avec un développement récent type Netflix. On peut même dire que la plateforme américaine investit plutôt plus que d’autres dans le cinéma. C’est un problème qui remonte à… 2001 (si si : https://www.letemps.ch/no-section/pub-suisse-m6-presse-publicitaires-doutent-discours-alarmiste-tsr ). A ce moment, la chaîne privée française M6 décide de diffuser son contenu standard en Suisse, mais en proposant l’achat de fenêtres publicitaires ciblées sur le public suisse. La RTS (TSR à l’époque) était-elle alarmiste ou précurseuse ?

Aujourd’hui, si le PLR, l’UDC et les Verts libéraux s’opposent à cette révision de la Loi sur le cinéma au mépris de toutes leurs grandes déclarations de patriotisme économique, c’est parce qu’ils entendent bien ne pas s’arrêter au cinéma, et s’opposer à une plus juste contribution des entreprises, là où elles créent de la valeur, de même qu’ils se préparent au démantèlement de la SSR, pilier vital pour notre pays fédéraliste , plurilingue et pluriculturel. Nous votons donc véritablement sur un enjeu de société plus large et je vous encourage vivement à rappeler l’importance de celui-ci autour de vous !révision de la loi sur le cinéma - LCin

Le budget de la Ville, un acte politique et des choix

Avec sa proposition de budget 2020 pour la Ville de Genève, dans la continuité de l’engagement solidaire et responsable pour lequel il a été élu, le Conseil administratif a tenu à marquer sa volonté de soutenir activement les politiques publiques essentielles à notre Cité, notamment en matière sociale, familiale, culturelle et sportive.

Ainsi, outre des moyens conséquents pour la petite enfance (poursuite de l’effort nécessaire pour augmenter l’offre de places en crèche), pour les sans-abris et autres personnes précarisées, pour les associations qui se battent pour l’égalité entre femmes et hommes, pour le plan de lutte contre le harcèlement de rue, le Conseil administratif a introduit dans ce budget la dernière tranche d’augmentation de la subvention nécessaire au fonctionnement de la nouvelle Comédie qui ouvrira ses portes et ses scènes en 2020 à la Gare des Eaux-Vives.

Un budget pour la nouvelle Comédie

Au budget 2019, le Conseil municipal avait accepté la première tranche d’augmentation, qui se montait à 2.5 millions ; cette fois, il s’agit d’un montant de 4.3 millions, afin d’arriver à un montant global de 12.58 millions de soutien public nécessaire afin que cette institution puisse pleinement concrétiser ses missions en matière de création théâtrale et se mettre au niveau des institutions suisses et européennes de référence. Je précise néanmoins que l’apport public restera plutôt dans le bas de la fourchette en comparaison avec d’autres institutions comparables en Suisse, à Lausanne, Berne, Zurich ou Bâle.

L’éclosion de la nouvelle Comédie représente un engagement très fort de notre Cité pour la culture en général, pour le rayonnement culturel de Genève, et pour la vie d’un nouveau morceau de ville tel qu’il se dessine aux Eaux-Vives. Mais elle doit être aussi le catalyseur de nouveaux liens approfondis entre le riche terreau culturel genevois et un public renouvelé. Enfin, précision d’importance, cette augmentation a pu se faire sans devoir couper ailleurs dans les budgets culturels, ce qui n’est pas la moindre des choses, au vu des craintes légitimes qui avaient été émises.

Il aurait également été légitime que le Canton participe à cette aventure et des signaux positifs ont été émis par le Conseil d’Etat entré en fonction en juin 2018 (Discours de St-Pierre, Programme et de législature, projet de Message culturel), malheureusement pas encore suivis d’effets concrets. Tôt ou tard, le Canton devra enfin assumer ses responsabilités dans ce domaine !

Reste à souhaiter que le Conseil municipal accepte à son tour de voter ces moyens ; je suis confiant dès lors que la majorité des groupes reconnaît l’enjeu. De plus, aussi bien les votations référendaires de 2016 et 2017 contre les coupes dans les budgets culturels, que le vote massif en faveur de l’initiative populaire pour une politique culturelle cohérente et concertée le 19 mai 2019 (83% de oui !), montrent bien l’attachement profond des Genevoises et des Genevois à une politique culturelle ambitieuse, diversifiée et inclusive. Je saisis l’occasion pour rendre hommage à toutes celles et tous ceux qui se sont battus avec beaucoup d’énergie et d’assiduité pendant des décennies pour que ce projet se réalise, notamment au sein de l’Association pour la Nouvelle Comédie (ANC) et de la Fondation d’art dramatique, et aux directions successives de la Comédie, qui ont su faire vivre cette institution à son adresse actuelle au Boulevard des Philosophes malgré ses limites structurelles, tout en s’engageant activement sur le chemin de la nouvelle Comédie. La codirection actuelle, Natacha Koutchoumov et Denis Maillefer, en fonction depuis l’été 2018, ont pris le relais de cet engagement collectif et s’engagent très concrètement avec beaucoup de talent et d’énergie pour réussir cette formidable mue !

Un engagement accru pour la culture

Dans ce projet de budget 2020, le Conseil administratif a aussi intégré d’autres de mes propositions, comme un soutien accru à la belle scène de théâtre pour petits et grands enfants, le Théâtre Am Stram Gram, mais aussi les Cinémas du Grütli qui jouent un rôle essentiel pour faire vivre le patrimoine cinématographique, les deux festivals de cinéma qui contribue activement au rayonnement de Genève comme ville de culture, de cinéma, de droits humains et d’innovation numérique, le FIFDH et le GIFF. Il y aura des moyens accrus pour les ensembles de musique classique, le festival Antigel et le MAMCO, un des piliers de la rénovation prochaine du Bâtiment d’art contemporain (BAC).

Un engagement pour le sport : développement et nouvelles infrastructures

Et le sport n’est pas en reste puisqu’après avoir annoncé deux soirées ouvertes au public à la Piscine des Vernets et au vu de l’ampleur de la demande en natation, le projet de budget prévoit les moyens pour deux soirées ouvertes au public à la Piscine de Varembé, de même que les moyens pour exploiter l’espace rénové où se trouve le Boulodrome, le mur de grimpe et les cabines de squash. Par ailleurs, un fonds spécifique dédié aux mesures du Plan Genre et Sport, prévoyant de renforcer la place légitime des femmes dans le sport, est inscrit dans le projet de budget.

Cela me permet de rappeler que, hors budget de fonctionnement, l’effort en matière de sport s’exerce beaucoup  sur le plan des investissements puisque les crédits pour plusieurs gros projets seront bientôt déposés au Conseil municipal : Centre sportif des Eaux-Vives, Maison du Sport à Vernier, et Halle couverte de tennis à Vernier.

Renforcer le service public, face aux défis d’aujourd’hui et de demain !

Plus largement, j’insiste sur le fait que Genève, ville-centre d’une agglomération transfrontalière de près d’un million d’habitantes et d’habitants, et 2ème ville de Suisse, ville internationale, fait face aujourd’hui et demain à des défis considérables. Comme dans d’autres agglomérations en Suisse ou ailleurs, nous constituons à la fois le moteur d’une région, le centre économique, social et culturel de la vie collective, mais aussi par conséquent le réceptacle principal d’attentes importantes et nombreuses, avec de fortes charges de ville-centre, dans un monde qui change rapidement et se complexifie. Les inégalités sociales se creusent, le changement climatique constitue une urgence avérée qui a des impacts à brève échéance, la transition numérique s’accélère et concerne directement le service public, la diversification du tissu économique et de l’innovation  doit être renforcée afin de préserver une prospérité durable et partagée, et nous devons tenir compte de contraintes budgétaires et de charges difficilement compressibles.

Après deux législatures marquées par une droite dure destructrice et incompétente, il est indispensable de redonner à notre Ville une majorité constructive et progressiste au Conseil municipal, lors des élections municipales en mars et avril 2020.