e-ID : quels enjeux ?

Nous voterons le 7 mars sur le projet de loi fédérale sur l’identité numérique. Une loi pour laquelle le Conseil fédéral a opéré un choix radical en donnant la possibilité à des entreprises privées de délivrer des passeports suisses numériques (e-ID). En 2020, formellement, j’ai repris la responsabilité des services informatiques de la Ville de Genève et fait figurer la transition numérique dans le nom du département. Par ceci, j’ai surtout voulu signifier l’importance du portage politique d’une démarche que j’avais déjà entreprises depuis plusieurs années, à savoir la volonté d’une transition numérique responsable, audacieuse et créative pour le secteur public. C’est dans l’esprit de cette transition que j’aimerais développer quelques courts billets de blog autour des enjeux de cette identité numérique.

1er constat, partagé d’ailleurs par un journaliste du Temps du 1er février : parmi les enjeux des votations du 7 mars, celui de ce futur passeport numérique manque singulièrement de débat politique. Pourtant, les enjeux nous concernent toutes et tous. Ils déploieront aussi des conséquences sur un temps très long.

Pourquoi cette absence (relative) de débat ? C’est le chapitre que je souhaite aborder avec ce texte. Les autres suivront successivement jusqu’au 7 mars.

En échangeant autour de moi et avec les services municipaux de la Ville de Genève, je constate qu’il y a certainement une mécompréhension. Nous avons en effet déjà plusieurs solutions d’identification (plus ou moins performantes, d’ailleurs) qui permettent par exemple d’accéder à des services publics (inscrire son enfant au parascolaire, réserver un terrain de sport ou un livre dans une bibliothèque) ou privés (on pense bien sûr à tout le domaine du e-commerce, mais aussi aux identifications bancaires plus sécurisées par exemple). Ces identifications gagneraient assurément – pour les collectivités publiques genevoises – à pouvoir être harmonisées. Qu’on puisse accéder avec un même identifiant aux différents services de l’Etat par exemple.

A contrario, pour le secteur privé, nous avons déjà des « providers d’identité ». Vous pouvez utiliser votre compte Google ou Facebook, pour accéder à d’autres services, des achats en magasin par exemple, sans avoir à s’inscrire avec un identifiant spécifique. C’est ce modèle qu’a choisi le Conseil fédéral en déléguant cette tâche à des entreprises privées. On y voit naturellement un gage de flexibilité et une économie de moyens. On peut considérer que c’est un choix naturel et pratique, puisque nous utilisons déjà au quotidien de multiples identifiants.

En réalité, cela procède d’une très mauvaise compréhension de ce qu’on entend par « passeport numérique ». Celui-ci n’est pas simplement un identifiant nous permettant de réserver un court de badminton (pour cela un login avec un courriel et un code suffisent), ni même ce qui nous permet de nous connecter pour des transactions de e-banking. Il s’agit véritablement de ce qui constituera notre identité officielle numérique. Un équivalent de notre passeport ou notre carte d’identité.

Dans le futur, nous pourrons signer des initiatives, voter et nous porter candidat.e.s à une élection via ce sésame numérique. Elle nous servira à nous identifier comme légitime bénéficiaire de prestations sociales par exemple. Nous devrons peut-être l’employer pour passer une frontière (geste dont on prend conscience depuis quelques mois qu’il n’est pas forcément anodin). On ne peut donc pas la comparer à un simple login, mais devons la mettre en regard de notre actuel passeport. Un document délivré de manière exclusive par l’Etat, en lien avec les cantons et les communes.

Je reviendrai ultérieurement sur les questions de protection des données et de business-model, mais souhaitais commencer cette série de blogs par ce rappel du sujet même de la votation du 7 mars. En tout état de cause, ceci montre en tout cas qu’un débat élargi et approfondi est nécessaire sur la meilleure manière d’appréhender notre avenir numérique, individuel et collectif.

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commentaire supplémentaire ajouté le 4.2.21:
Je me réjouis de constater les nombreux commentaires suscités par ce billet de blog, qui prouvent qu’un réel débat sur ce projet de loi et plus globalement sur ces enjeux numériques est nécessaires. Quelques précisions: je suis personnellement opposé à ce projet de loi et ma volonté avec ce billet était justement de mettre en évidence la différence fondamentale qui existe entre ce qui constituera notre identité citoyenne officielle, et de simples login d’accès à des services privés.
Je poursuivrai avec d’autres dimensions problématiques de cette loi, dont les aspects relatifs aux données, au modèle d’affaire ou aux tâches qui devraient rester propres aux collectivités publiques.

(source: https://www.eid-referendum.ch)

Discours du 1er août 2020

Discours du Maire, prononcé à l’occasion de la fête nationale organisée par la Ville de Genève – seul le prononcé fait foi

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Madame la présidente du Conseil municipal (Albane Schlechten)

Monsieur le Conseiller administratif , cher collègue, cher Alfonso,

Madame la vice-présidente de la section genevoise de l’Association suisse des infirmières et infirmiers (Patricia Borrero)

Mesdames et Messieurs les élu-e-s et représentant-e-s des autorités fédérales, cantonales et municipales vivant en Ville de Genève

Chères habitantes et chers habitants de notre belle villede Genève

Bienvenue à toutes et tous !

[En dialecte alémanique]: à tous nos amis originaires de Suisse alémanique, j’adresse mes chaleureuses salutations et vous remercie de votre présence. Comme vous l’entendez, j’ai quelques origines alémaniques et c’est d’autant plus un plaisir de célébrer notre fête nationale avec vous. Mes origines multiples – alémaniques, extra-européennes et surtout romandes ! – sont un bon exemple de la belle diversité qui caractérise notre pays et notre ville.

Cari amici ticinesi, siamo molto lieti di celebrare con voila nostra festa nazionale. Condividiamo elementi relativialla nostra cultura latina, che si esprime co bene neimomenti conviviali.

Ladies and gentleman, I would like also to express my warmest welcome wishes to our international guests, reminding that Geneva is proud of being a very diverse and international city, and also aware of the responsibilities it gives to us. I wish you to spend a nice Swiss National Day!

 

Je suis particulièrement heureux que nous puissions être réunis aujourd’hui pour commémorer ensemble la Fête nationale suisse, ici au cœur du Jardin botanique dont je salue le directeur Pierre-André Loizeau et ses équipes. Une Fête nationale dont on se souviendra à coup sûr comme celle de la lutte contre le coronavirus.

Je tenais à ce que nous puissions malgré tout honorernotre tradition et rappeler ce qui nous unit, habitantes et habitants de toute la Suisse.

Le 1er Août est un moment hautement symbolique. Une occasion de nous rappeler ce qui nous unit, la solidarité qui nous anime, l’entraide qui nous cimente. Ces valeurs qui sont cardinales dans notre société et que nous devons, plus que jamais, mettre en exergue dans la situation présente et, surtout, concrétiser sur le terrain, pour toutes et tous.

C’est pour cette raison que j’ai proposé, cette année, à l’Association suisse des infirmières et infirmiers d’intervenir comme invitée d’honneur de la Ville de Genève, et je remercie sa section genevoise, représentée par Mme Patricia Borrero, d’avoir donné suite à cette invitation. Je tenais à rendre hommage à une des professions dont les compétences ont été et sont toujours vitales pour lutter contre la pandémie qui nous est tombée dessus. Ce n’est pas la seule, bien sûr, mais le fait qu’elle soit principalement féminine et basée sur le soin et l’attention aux autres en font un symbole, un emblème. Je pense aussi aux vendeuses des magasins de première nécessité, aux aides à domicile, au personnel de nettoyage, et à de nombreuses autres.Mais les infirmières et les infirmiers ont été en première ligne pour soulager, soigner, apporter confort et réconfort. Je veux ici les en remercier très sincèrement, en mon nom et au nom des autorités de la Ville de Genève, et insister sur la nécessité de valoriser enfin cette profession.

Cette Fête nationale ne ressemble à aucune autre, parce que nous avons dû intégrer strictement les consignes sanitaires afin de nous protéger toutes et tous. C’est donc une fête épivardée que nous allons vivre, au cœur des quartiers de la ville. Une fête pour prouver que l’espace public, quand nous nous l’approprions pour en faire un lieu convivial, est un espace où l’on peut se sentir bien les uns avec les autres, en sécurité. Un lieu où l’échange et le dialogue s’épanouissent.

Les arts de la rue que nous avons conviés pour vous émerveiller, vous faire rire, réfléchir ou même peut-être pleurer d’émotion, incarnent cet esprit festif et rassembleur que nous espérons voir se répandre dans les parcs et sur les places aujourd’hui.

Dans les années 80, nous avons subitement dû nous plier à l’impératif de l’amour safe, quand le sida s’est répandu et a frappé si injustement, si brutalement. Aujourd’hui, nous allons devoir inventer la fête safe.Toutes les questions qui se sont posées à l’époque, les angoisses et les discriminations contre lesquelles la société a dû mobiliser ses forces et ses ressources, sont de retour.

Nous traversons une période instable, inconfortable, dangereuse même sous certains aspects. Les conséquences de cette pandémie ne sont pas seulement sanitaires, elles sont économiques, sociales, politiques, humaines, et elles vont durer. Aujourd’hui, c’est en veillant à rester solidaires les uns des autresque nous pourrons continuer notre route, construire notre avenir. C’est en appliquant ce qui fait la force de notre pays, notre capacité à travailler ensemble, notre recherche du compromis, notre ouverture et notre tradition d’accueil et d’attention aux plus faibles, quenous pourrons nous réinventer et faire face aux défis d’aujourd’hui et demain, la pandémie bien sûr, mais aussi l’urgence climatique ou la montée des inégalités.

Je tiens à remercier les artistes qui jouent aujourd’hui, pour vous. Celles et ceux qui font vivre les arts et la culture ont été extrêmement fragilisés avec cette crise, étant le premier domaine qui a subi de fortes restrictions, et qui sera probablement le dernier à en sortir complètement. Ils ont clairement besoin d’un soutien fort et affirmé des collectivités publiques, afin de préserver ce savoir-faire. Je salue la force et la créativité qui leur permettent d’inventer des univers nouveaux, de nous montrer que le monde auquel nous aspirons est possible. Que ce quotidien qui change sans cesse peut être apprivoisé. Comme le disait Samuel Beckett, « il n’y a que l’éphémérité qui dure ».

Je remercie également Stéphanie Gautier et Antoine Frammery qui ont relevé le défi de vous proposer, en un temps record, une programmation COVID compatible bien sûr, adaptée à tous les âges. Une programmation qui n’a rien de lisse ou de consensuelle, vous l’avez peut-être déjà expérimentée cet après-midi.

Un grand merci encore à toutes celles et tous ceux qui ont pris part à l’organisation et enfin, bien sûr, à vous toutes et tous qui êtes là aujourd’hui.

Je vous souhaite un très bon 1er Août !

Vive Genève, vive la Suisse !

(re)tisser les fils de notre vivre-ensemble

Le printemps aura été marqué par le confinement dû à la crise sanitaire. Avec l’été, les activités redémarrent progressivement, mais le domaine culturel reste durement touché. De nombreux festivals ont été annulés, de même que bien d’autres événements. Pour les artistes, mais aussi le personnel actif dans la technique ou toutes celles et tous ceux qui rendent possible la magie de la culture, l’avenir est pour le moins incertain et le présent toujours difficile.

Divers soutiens exceptionnels ont été débloqués par les collectivités publiques, ainsi que la garantie de toutes les subventions publiques au domaine. Mais ça ne suffira pas. J’ai donc souhaité réaffecter une partie des budgets non-utilisés pour lancer un appel à projet, d’une part, et mandater l’équipe de la Fête de la musique, d’autre part, pour programmer 50 concerts qui ponctueront les soirées estivales du lundi au vendredi, dans différents lieux de la Ville. Des propositions que vous trouverez réunies dès le 1er juillet sur l’app et le site www.geneveenete.ch .

Car au-delà des aides, les artistes ont besoin d’exercer leur profession. Et le public de se retrouver face à un concert, un spectacle ou une exposition. Pas via un écran, mais pour de vrai.

Nous devons retisser les fils de notre vive-ensemble et cette offre estivale devrait y participer. Elle n’a pas la prétention de résoudre tous les problèmes. L’effort doit être collectif et se poursuivre, en témoigne l’action « Alerte rouge pour la culture » d’hier soir. Ces moyens mis pour la culture ne sont pas de la charité, mais un investissement pour le domaine culturel. Un investissement qui servira à préserver les compétences extraordinaires dont recèle notre région en la matière. Un investissement social, solidaire et responsable, pour notre qualité de vie et pour notre vivre-ensemble.

Alerte Rouge - Grand théâtre de Genève

Texte de positionnement des magistrat.e.s PS des communes genevoises

Soutien à l’économie locale, à la transition écologique et aux populations les plus précaires

Alors que Genève fait probablement face à la pire récession connue depuis les années 1930, les autorités cantonales annoncent un plan d’austérité d’une ampleur sans précédent. Cette politique profondément anachronique renforce le risque d’une crise économique et sociale durable qui détruira les emplois, anéantira nos PME et aggravera la situation des plus fragiles.

Pourtant, l’Etat n’a pas hésité à s’endetter de près de 3 milliards pour sauver la banque cantonale genevoise alors que les taux d’intérêts avoisinaient les 4% dans les années 2000. Alors que le PIB genevois a quasiment doublé en 20 ans pour dépasser désormais les 100’000 francs/habitant.e.s et que les taux d’intérêts sont devenus nuls ou négatifs, la droite cherche à réduire la dette par tous les moyens en pleine urgence écologique et sociale.

A l’ère des taux négatifs, le débat classique qui oppose hausse d’impôts et baisse des dépenses publiques n’est pas d’actualité. Dans ce contexte, tout en maintenant une gestion prudente et raisonnable, les pouvoirs publics devraient stimuler l’activité avec la dette qui, exprimée en pourcentage du PIB, sera mécaniquement réduite une fois la croissance retrouvée. C’est la manière la plus pragmatique de fonctionner aujourd’hui : le secteur public a un rôle anticyclique naturel à jouer en soutenant l’investissement dans la transition écologique, en favorisant la consommation dans l’économique locale et en protégeant les populations plus précaires.

A l’aube d’une crise économique et sociale sans précédent (l’économie genevoise devrait se contracter de plus de 6% en 2020), le plan d’austérité annoncé par la conseillère d’Etat en charge des finances va aggraver la crise économique, accroître le taux chômage et couper dans les prestations publiques. C’est à la fois irresponsable et contraire aux chemins suivis par nos voisins. Par exemple, l’Allemagne pourtant connue pour sa rigueur budgétaire, et pays autrement plus endetté que la Confédération et le canton de Genève, a présenté début juin un plan de relance qui engage, en tout, jusqu’à 1230 milliards d’euros, soit plus de 15’000 € par habitant.e.s.

Le canton ne peut pas faire comme si la crise sanitaire de ce printemps et ses conséquences n’existent pas. Les seuils de déficits et les mécanismes de gestion financière conjoncturelle inscrits dans la loi sur la gestion administrative et financière ne sont plus adaptés à l’ère post-COVID-19.

Il est urgent que le gouvernement cantonal se montre à la hauteur de la situation afin d’éviter une catastrophe économique et sociale qu’annonce cette politique d’austérité, et de renoncer à un report massif des charges cantonales sur les communes, sans quoi ces dernières se retrouvent seules à devoir porter le soutien à l’économie locale, à la transition écologique et aux plus précaires. (le plan financier quadriennal du Conseil d’Etat prévoit un report de 90 millions dont 20 millions en 2021).

Nous, Magistrat.e.s socialistes communaux, nous nous engageons à défendre des budgets responsables, solidaires et à la hauteur de l’effort public nécessaire à enrayer la crise.

Nous appelons les député-e-s de tout bord à suspendre le frein à l’endettement et au déficit cantonal afin de sortir de cette impasse et donner à notre canton la possibilité de développer des prestations de qualité pour répondre aux besoins de la population, et de ne pas annuler les efforts budgétaires communaux.

 

Guylaine Antille, Conseillère administrative PS

Jean-Luc Boesiger, Conseiller administratif PS

Skander Chahlaoui, Adjoint au Maire PS

Ornella Enhas, Conseillère administrative PS

Elisabeth Gabus-Thorens, Conseillère administrative PS

Sami Kanaan, Conseiller administratif PS

Carole-Anne Kast, Conseillère administrative PS

Christina Kitsos, Conseillère administrative PS

Stéphanie Lammar, Conseillère administrative PS

Nathalie Leuenberger, Conseillère administrative PS

Salima Moyard, Conseillère administrative PS

Michel Pomatto, Conseiller administratif PS

Martin Staub, Conseiller administratif PS

 

 

Un engagement solidaire et responsable, aujourd’hui et demain

Par Sami Kanaan, Frédérique Perler, Christina Kitsos et Alfonso Gomez, candidat·e·s Socialistes et Vert·e·s au Conseil administratif

La période de crise extraordinaire que nous vivons actuellement sur les plans sanitaire, humain, social et économique marquera inévitablement un changement historique. La facture sociale et économique est d’ores et déjà colossale. Nous devons, dès aujourd’hui, tout faire pour l’alléger et des premières mesures ont été prises rapidement par les collectivités publiques aux niveaux fédéral, cantonal et municipal. Cet effort collectif devra aussi être l’occasion d’effectuer un bilan lucide de cette crise et de repenser nos priorités.

Notre capacité de résilience ne dépendra pas seulement de la force de notre solidarité et de notre discipline collective, mais de celles et ceux qui sont au front. Elles et ils se donnent sans relâche pour prendre soin de nous toutes et tous, et pour permettre à la collectivité de continuer à répondre aux besoins vitaux.

Nous pouvons, et devons, applaudir haut et fort leur engagement. En tant qu’élu·e·s, notre devoir de reconnaissance doit aller bien au-delà. Nous savons à quel point le service public, tout le réseau associatif et les professions féminines sous-payées sont aux premières loges pour faire face à une crise exceptionnelle dans toutes ses dimensions, et pour tenter d’en atténuer ses effets sur toute la population. Après la crise, il sera crucial de relancer de manière équitable, solidaire et durable notre vie collective, en mettant en place des solidarités qui préservent à la fois les êtres humains et notre environnement. En effet, nous vivons déjà depuis de longues années des éléments d’une crise majeure et permanente, due aux excès de l’ultralibéralisme, d’une globalisation effrénée et incontrôlée : urgence climatique, crises économiques, inégalités croissantes, conflits larvés ou déclarés, etc.

Ce virus accentue les différences sociales et les inégalités. Les ressources pour y faire face ne sont clairement pas réparties de manière équitable. Par exemple, les personnes ayants des lieux d’habitations peu adaptés, partageant peu de pièces à plusieurs, vivent dans des conditions plus difficiles. Comment feront les enfants des familles n’ayant pas les moyens matériels et pédagogiques pour aider leurs enfants pour le suivi scolaire en période de confinement ? Comment feront les personnes isolées ? Comment feront les familles monoparentales pour assurer le télétravail, les courses et les devoirs ? Comment éviter une croissance de la violence domestique et la maltraitance juvénile ? Comment éviter une stigmatisation des jeunes et des aîné·e·s ?

Et, paradoxalement, certains gouvernements « profitent » de cette période d’état d’urgence pour instaurer des lois d’exceptions, des outils de surveillance généralisée, des restrictions des libertés individuelles, justifiables peut-être, en partie, à court terme mais certainement pas au-delà.

C’est pourquoi nous tenons à réaffirmer nos valeurs qui fondent le Parti socialiste et les Vert e·s., valeurs plus que jamais d’actualité en ces temps de crise :

  • la promotion d’un service public fort et efficace, doté de moyens en adéquation avec les tâches qu’il doit assumer avec un personnel suffisant ;
  • le soutien au tissu associatif, qui joue un rôle essentiel, complémentaire au service public en matière de solidarité et d’inclusion ;
  • une réelle amélioration des bas revenus et des conditions de travail des branches précarisées, notamment à travers l’instauration d’un salaire minimum ;
  • la collectivisation, en tout temps, aussi bien des pertes que des bénéfices des grandes entreprises ;
  • le soutien à l’économie locale (par exemple à l’agriculture contractuelle de proximité, et la mise en place de circuits de production plus courts, constatant qu’ils sont aujourd’hui trop globalisés) ;
  • une société durable et solidaire.

A ce jour, nous nous engageons résolument sur les axes suivants :

A court terme :

  • Pour les travailleuses et travailleurs des secteurs public et privé qui doivent rester au front, en très grande majorité des femmes, souvent à bas revenus, dont nous dépendons fortement en cette période de crise ; elles et ils doivent voir leurs conditions de travail et leur protection améliorées substantiellement, et de manière durable ;
  • Pour les familles et les ménages en général, incluant les seniors, les jeunes en difficulté, les migrant·e·s récemment arrivé·e·s, les personnes en situation de handicap, les personnes vulnérables, etc., afin qu’elles et ils bénéficient de mesures de soutien effectif, en appui ou en complément aux solidarités naturelles, afin que personne ne reste au bord du chemin (un domaine où l’échelon municipal est en première ligne !) ;
  • Pour les victimes de violences domestiques et de maltraitances, dont l’exigence de confinement exacerbe les risques, par un renforcement des outils de détection et d’intervention ;
  • Pour le maintien du dispositif dédié aux sans-abri ;
  • Pour un rétablissement rapide, dès que possible, du plein exercice des droits démocratiques et du fonctionnement des instances parlementaires.

A plus long terme :

  • Pour la mise en œuvre aussi large que possible de mesures de relance et d’appui des entreprises de proximité, des entreprises sociales et solidaires, des entreprises non polluantes et responsables socialement et cela sur la base des décisions déjà annoncées par les autorités fédérales, cantonales et municipales ;
  • A revoir, à la lumière du bilan de cette crise, notre préparation effective et notre anticipation des potentielles crises à venir, en termes de santé publique, d’équipements, de dépendance aux chaînes d’approvisionnement à l’étranger, de formation de personnels locaux en suffisance, etc. ;
  • Pour une révision, sur la base de ce bilan, de la manière dont les richesses sont générées, captées et redistribuées, afin que le travail ne doive pas encore et toujours porter seul la charge de l’effort collectif face au capital, aussi en tenant compte de la numérisation accrue des flux de production et de prestations que cette crise va générer, et son impact sur l’emploi ;
  • Pour une réforme durable du système de santé, vers une caisse maladie publique unique ;
  • Pour une accélération rapide du développement des outils numériques au service de l’intérêt général, sur une base transparente, éthique, sécurisée, équitable et démocratique ;
  • Pour la mise en place sans délais d’un plan climat en Ville de Genève qui permettra de faire face aux futurs défis que ne manqueront pas de provoquer les changements climatiques.

D’une manière générale, nous nous engageons, au-delà de cette crise sanitaire et de ses conséquences, à rappeler que l’urgence climatique et les inégalités sociales restent au cœur de nos préoccupations, en vue d’un monde plus juste, solidaire et durable, auquel les collectivités locales peuvent très activement contribuer.

Prenez soin de vous et de vos proches, et respectez les consignes : sortez le moins possible ! Et gardons pleinement notre soutien et nos pensées pour celles et ceux qui doivent travailler : personnel soignant et médical, pharmacies, alimentation, logistique, sécurité, nettoyage, poste, conciergeries, etc.

Ensemble nous sommes plus fort.e.s !

La grave crise sanitaire qui nous met toutes et tous à rude épreuve transforme radicalement notre quotidien, nos fonctionnements ainsi que ce que l’on croyait être des acquis individuels et collectifs, aussi bien dans notre vie privée que dans nos engagements professionnel ou politique. Cette crise exige de chacune et de chacun de s’engager pour la collectivité selon ses compétences et ses ressources ; d’autant plus quand on est élu municipal.

Évidemment, il faut d’abord et toujours honorer le travail de toutes celles et tous ceux qui sont au front ; le personnel soignant et sanitaire au sens large, y compris dans les pharmacies, mais aussi le personnel dans les magasins alimentaires et les autres secteurs nécessaires, ceux dans la logistique, la sécurité publique et privée, les transports, la poste, la voirie et le nettoyage, etc. Ces personnes n’ont d’ailleurs pas toujours des conditions adéquates de protection face à ce virus. Les employeurs privés doivent absolument prendre leurs responsabilités et renforcer leurs efforts en la matière ! Enfin, je pense qu’il faut prêter une attention particulière à celles et ceux – y compris les indépendant.e.s ou les employé.e.s précaires – dont le revenu chute brutalement en cette période.

Une crise qui exacerbe les inégalités

Comme toujours, les villes sont aux premières loges du quotidien de la population. Les règles générales ne se décident pas au niveau des communes, même pour les grandes villes; elles relèvent de la responsabilité de la Confédération, en cette période d’état d’urgence, et subsidiairement des cantons. Mais nous, à Genève comme dans les autres villes suisses, devons autant que possible adapter vite et bien notre fonctionnement pour répondre aux besoins vitaux de la population en milieu urbain.

Face à cette crise, encore plus qu’en période « normale », les conditions de travail et de confinement ne sont pas les mêmes pour tous et toutes. Lorsque l’on demande à la population de rester chez soi, une partie d’entre nous peut le faire mais pas tou.te.s ; une partie a plus d’espace ou de ressources que d’autres. Ces situations renforcent les inégalités déjà existantes ; je pense ici aux parents qui doivent faire du télétravail tout en s’occupant de leurs enfants, ou aux personnes vulnérables ou en situation précaire, que ce soit celles à faible revenu, les familles monoparentales, les sans-abri, les migrant.e.s récemment arrivé.e.s, les travailleuses et travailleurs sans engagement fixe ou sur appel, les personnes âgées seules, les personnes en situation de handicap, les personnes qui ont déjà des problèmes de santé… bref, toutes celles et tous ceux qui ont besoin de soutien. Et certaines statistiques montrent que le télétravail est accessible pour 60% des personnes à haut revenu contre seulement 9% des personnes à bas revenu, dont le métier impose une présence physique sur le lieu de travail.

Solidarité et responsabilité des collectivités publiques

Heureusement, de nombreuses solidarités naturelles se sont mises en place, dans les immeubles, dans les quartiers, via les ascenseurs ou les réseaux sociaux, etc. Le rôle d’une ville comme la nôtre doit être de soutenir et compléter ces actions autant que possible, et de veiller à ce que personne ne reste au bord du chemin. En ma qualité de membre de l’exécutif de la Ville, avec mes quatre collègues, nous sommes évidemment « sur le pont » depuis fin février, avec les collaboratrices et collaborateurs de la municipalité, pour répondre à ces besoins prioritaires.

Sur mandat du Conseil administratif, tous les services de l’administration ont établi des « plans de continuité d’activité » afin de se concentrer sur les missions vitales, en tenant compte des priorités actuelles et des absences dues aux maladies ou au soutien de proches de personnes malades ou vulnérables.

Du côté de la culture et du sport, tous les événements ont dû être annulés pour des raisons légales afin d’éviter les rassemblements. Mais cet arrêt brutal d’activités a un important coût humain et financier. Dans le département que je préside, mes équipes et moi avons agi rapidement pour accompagner cette suspension d’activités aussi bien dans les théâtres, les salles de sports et les musées, et autres festivals et évènements. Cela a impliqué des arbitrages politiques, notamment sur le maintien des subventions et des commandes, afin de préserver l’existence même du tissu culturel et sportif qui se montre encore plus créatif que jamais. Les questions sont nombreuses, car nous ne savons pas combien de temps cela va durer. Il faudra ensuite être capable de redémarrer vite et bien : l’action culturelle et sportive sera d’autant plus essentielle à ce moment, même si, aujourd’hui, cela paraît abstrait. J’ai souhaité entamer aussi sans attendre une réflexion sur les actions possibles dans ce contexte, comme renforcer l’offre des bibliothèques en ligne ou via livraison, développer l’offre culturelle en ligne comme évoqué au 19h30 de la RTS ce lundi soir, en fédérant de nombreux musées, festivals, scènes culturelles, autour du hashtag #CultureChezVous.

Un grand merci à la fonction publique municipale

Sur le plan municipal, l’enjeu est surtout de donner aux missions essentielles de la municipalité toutes les ressources dont elles ont besoin, notamment dans le domaine de l’action sociale au sens large : service minimal de garde dans la petite enfance et le parascolaire, accueil d’urgence (sans-abri et autres), plan communal de solidarité (par exemple pour les personnes seules et vulnérables, etc.). Ceci peut signifier des réaffectations temporaires de personnel municipal à des tâches indispensables, mais autres que celles exercées en temps normal, tout en préservant bien sûr leur santé et en limitant les risques au maximum. Ce dispositif se met en place ces jours, de même que l’alignement de toutes les ressources de communication au service de ces missions essentielles, des éléments de la chaîne logistique, ou des ressources informatiques (notamment pour le télétravail). Je rends hommage au personnel municipal qui est à pied d’œuvre dans cette période !

Depuis le déclenchement du dispositif municipal de gestion de crise, le Conseil administratif s’est d’ailleurs réuni fréquemment et demeure en contact permanent pour transposer les instructions fédérales et cantonales au fur et à mesure, mais aussi pour agir en tant que collectivité publique (protection du personnel et des usager.e.s, mesures de soutien à l’économie, mesures sociales auprès des plus précarisé.e.s, mais aussi découlant du confinement, mesures de soutien aux entités subventionnées, mesures de soutien aux parents pour les crèches, informations sur l’adaptation des prestations municipales, etc.). Ce travail doit se faire avec les associations et autres institutions auxquelles je rends aussi hommage.

Ensemble pour un engagement créatif et pragmatique

Cette période demande un engagement particulier, à la fois intensif, créatif, humble et pragmatique ! Et il faudra rapidement anticiper l’après-crise, car la facture humaine, sociale et économique sera colossale. Par ailleurs, il faudra en tirer aussi les conséquences sur le plan politique, concernant l’importance du service public et du tissu associatif, les revers de la globalisation, la répartition des ressources et la gestion des inégalités, la nécessité d’utiliser les technologies numériques à bon escient, ainsi que de la capacité à mieux anticiper les crises, qu’elles soient sociales, économiques, climatiques ou sanitaires.

En attendant, comme le martelait le Conseiller fédéral Alain Berset sur Instagram, Facebook et Twitter : restez chez vous le plus possible ! Ensemble nous devons tout entreprendre pour vaincre cette pandémie ! Ensemble nous sommes plus fort.e.s !

60 ans seulement! exposition d'affiches de la Ville de Genève sur l'histoire du suffrage féminin

Égalité de genre : retour aux sources

La vague de réactions qu’a suscité la féminisation des panneaux de signalisations et des noms de rues m’incite à affirmer que beaucoup disent vouloir défendre le concept d’égalité de genre aujourd’hui, mais parfois de manière assez incohérente, voire peu sincère. Parfois c’est simplement une incompréhension de ce concept ! Cet engagement doit pourtant absolument se poursuivre, de manière décidée, car le combat n’est de loin pas encore gagné.

Tant des hommes que des femmes, souvent de droite, mais parfois aussi de gauche, se sont par exemple inquiété.e.x.s de la place qui restera aux hommes suite à l’amélioration de la visibilité des femmes dans l’espace public en Ville de Genève. On peut lire, en autre : « oui…mais, gare aux excès » et « oui…mais, la manière me choque » ou encore on qualifie les projets « d’inutile et dispendieux ».

Une personnalité politique qui se reconnaîtra peut-être va jusqu’à affirmer que la visibilité donnée aux femmes ne doit pas se faire « au détriment des hommes ».

Ces réactions, révélatrices d’un état de panique irrationnel, et surtout d’une vraie peur de perdre de la visibilité et de l’espace, donc du pouvoir, me laissent tant perplexe que choqué. Elles constituent paradoxalement la preuve incontestable que ces mesures sont adéquates, utiles et nécessaires. Non suffisantes bien sûr, mais Sandrine Salerno n’a jamais affirmé autre chose que le fait qu’il s’agit d’une action symbolique dans le cadre d’une politique bien plus large de l’engagement municipal pour l’égalité et la diversité, menée depuis des années par le Conseil administratif de la Ville de Genève.

Historiquement les politiques réformistes soutenant l’existence des femmes dans l’espace public sont attaquées. Elles dérangent car elles remettent en cause la socialisation genrée de nos sociétés, tellement intégrée dans les mentalités que trop de gens ne s’étonnent pas du tout de la place substantielle accordée aux hommes dans plein de domaines et de l’invisibilisation des femmes qui en résulte.

Il y a à peine plus de 60 ans le vote des femmes semblait inconcevable en Suisse. Il y a encore un peu moins de 20 ans, un exécutif sans membres féminins n’aurait choqué personne. De même, au début dans années 2000, le pourcentage de femmes cadres restait négligeable.

C’est grâce à des politiques volontairement genrées et des réponses systémiques – changements législatifs, quotas sur les listes, suivi des carrières féminines, encouragements à s’investir, valorisation des temps partiels, solutions de garde pour les enfants, etc. – que la situation commence à s’améliorer.

Pour chaque poste à responsabilité à repourvoir, chaque rue à nommer et chaque personne à élire, il existe une femme qui est aussi engagée, capable et expérimentée qu’un homme. Antonio Hodgers, en tant que responsable du Département en charge de la nomenclature des rues, rappelait lors de la conférence de presse que l’argument disant « Oui mais il n’y a pas assez de femmes connues pour nommer des rues à leur nom » tombait très vite si on menait une recherche adéquate. C’est de notre responsabilité collective de créer des structures d’opportunités non biaisées pour permettre ce changement.

En ce 8 mars 2020, il faut rappeler que l’égalité de genre est une revendication réparatrice essentielle qui nécessite une redistribution du pouvoir entre les femmes et les hommes. Ce changement de paradigme peut faire peur à certains mais je suis confiant que, malgré les réticences, c’est la voie à suivre et c’est la voie qui sera suivie. Les femmes comme les hommes ont en réalité tout à y gagner, à ouvrir leur champ des possibles.

On doit concevoir le renforcement de la position des femmes dans notre société et la réalisation de l’égalité de genre comme un rééquilibrage nécessaire et salutaire pour notre Ville et c’est dans cet esprit que ma collègue Sandrine Salerno et moi avons travaillé ensemble durant les deux dernières législatures. C’est dans ce cadre que sont nés la Semaine de l’Egalité (actuellement en cours, 10ème édition !), le plan d’action Genre & sport, les différentes campagnes de lutte contre le sexisme, le plan de lutte contre le harcèlement de rue, mais aussi que des soutiens ont pu se développer, comme celui au Festival Les Créatives, tellement important sur la scène culturelle. Citons également les actions spécifiques menées par Sandrine Salerno en tant que Maire, comme cette collaboration avec le collectif l’Escouade autour des noms de rue. Tout ceci et nombre d’autres actions, s’inscrivent dans une politique municipale de promotion de l’égalité et de la diversité qui a été exemplaire et novatrice en tant que collectivité publique et qui l’est toujours.

En cette journée internationale des femmes, je m’engage à continuer de mener ce combat pour l’égalité entre femmes et hommes en Ville de Genève lors de la législature 2020-25, avec un esprit ouvert et plein d’espoir.

Je souhaite un magnifique et combatif 8 Mars à vous tout.e.x.s

 

Nous avons la responsabilité d’offrir la possibilité d’un avenir à chaque enfant

Le lundi 13 janvier, un groupe de militant.e.s et des jeunes mineurs non-accompagnés sans domicile fixe, ont investi la Maison des arts du Grütli. Un geste destiné à attirer l’attention sur une problématique trop longtemps ignorée, ou tout cas largement sous-estimée. Un geste un peu désespéré face à une situation inacceptable, voyant des adolescents mineurs dormir dans la rue ou dans des conditions qui ne pouvaient plus durer.

Une occupation qui a réussi. Elles et ils ont réussi à attirer l’attention sur la situation de ces jeunes, dont le statut est clairement protégé par la Convention de l’ONU relative aux droits de l’enfant, dont nous venons de marquer les 30 ans en novembre 2019. Vendredi, grâce à l’engagement exceptionnel des équipes de la Ville de Genève (mon département et celui de ma collègue Esther Alder, en charge de l’action sociale), avec l’appui précieux d’Olivier Baud, ancien secrétaire général de la FOJ comme expert et médiateur, nous avons pu trouver un lieu temporaire sûr où dormir pour ces jeunes gens, et leur éviter de dormir à la rue. Ils ont pu être officiellement enfin enregistrés au SPMI. Une rencontre a pu être agendée avec la Délégation compétente du Conseil d’Etat.

Mais ce n’est aucunement une solution. Si l’occupation a pris fin, ce qui est en soi positif car le Grütli n’était certainement pas un lieu adéquat pour héberger des mineurs dans la durée, nous restons mobilisés pour qu’il leur soit proposé un encadrement pédagogique et des lieux d’hébergement adaptés et durables. Comme cela a toujours été précisé, et alors que la Ville fournit déjà un effort de plus 12 millions de francs par année pour l’accueil d’urgence des sans-abris, l’enjeu des MNA est clairement du ressort des autorités cantonales. Le Collectif a démontré sa détermination à faire avancer cette cause et sa volonté à travailler de concert pour trouver des solutions. J’espère vivement que le Conseil d’Etat saura la saisir au bond, prendre ses responsabilités et mettre les moyens nécessaires pour que plus aucun jeune mineur ne se retrouve laissé à lui-même.

Une position qui est d’ailleurs valable aussi bien pour les migrant.e.s que pour toutes et tous les jeunes qui habitent à Genève. L’enjeu n’est pas seulement un logement décent, besoin existentiel pour tout être humain, mineur ou pas. La formation est une étape qui détermine souvent toute notre vie. Il est de notre responsabilité de contribuer à leur donner la possibilité de se construire un avenir.

(photo Jasmine Caye)

Le Léman Express : essentiel et bienvenu. Mais insuffisant !

La densité de trafic automobile à Genève devient franchement inquiétante. Elle a des conséquences négatives sur tous les plans : sur l’environnement bien sûr, mais aussi sur la santé, l’économie, la qualité de vie. La nécessité d’inverser le cap paraît évidente mais cette surcharge semble s’aggraver et s’installer dans la durée. Le Léman Express qui devient enfin réalité dans une semaine va certainement améliorer la situation, mais sera-ce suffisant ? De loin pas ! Il faut imaginer et concrétiser une histoire ambitieuse et positive pour notre transformation urbaine !

 

Ce dimanche le réseau du Léman Express sera enfin inauguré, plus de 100 ans après ses prémisses. Il apportera certainement une contribution précieuse au transfert modal de la voiture privée vers les transports publics. Le Léman Express contribuera à diminuer la charge de trafic mais cela ne suffira de loin pas ! Ce n’est que le premier pas d’un nécessaire développement de l’offre ferroviaire régionale afin d’avoir un réseau complet et dense digne de ce nom. Car le changement d’habitudes ne se fera que si des solutions efficaces et abordables sont proposées. Et ce n’est qu’à cette condition que, parallèlement, il sera légitime de prendre des mesures coercitives de réduction du trafic individuel motorisé. Car la prise en compte de l’urgence climatique ne pourra se faire que dans la justice sociale. Le mouvement des gilets jaunes en a témoigné !

Un Comité unitaire pour soutenir le projet CEVA

En 2004, je siégeais au Grand Conseil en tant que député socialiste. Une époque où pratiquement personne – en dehors d’un petit cercle de passionné-e-s – ne parlait de ce qui allait devenir le CEVA (devenu « Léman Express »). Avec Gabriel Barrillier, alors député du Parti radical (devenu PLR) et secrétaire général de la Fédération genevoise des métiers du bâtiment (FMB), nous avons décidé de créer un Comité unitaire afin de défendre et promouvoir ce projet. Comme Robert Cramer le racontait encore récemment dans le Temps, le projet de raccordement ferroviaire Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse a failli ne jamais ressortir de l’oubli total où il se trouvait. Lui-même a compris l’enjeu bien avant d’autres élues et élus de l’époque. Il a ensuite fait preuve d’opiniâtreté et de talent pour transformer une utopie en une réalité politique et institutionnelle, puis opérationnelle.

Mais il fallait aussi rassembler un front large autour d’une idée ambitieuse, surtout à Genève où les dossiers des transports ont une fâcheuse tradition à polariser le monde politique. Ce Comité Pro CEVA a rassemblé tous les partis de l’époque sans exception, les organisations économiques et syndicales, le TCS et l’ATE, sans oublier le rôle clé de l’association Alprail et de son infatigable promoteur, Sig Maxwell, décédé il n’y a pas si longtemps.

Sous la coprésidence de Gabriel Barrillier et la mienne (puis avec Elisabeth Châtelain, députée socialiste, qui m’a remplacé), nous avons ainsi pu créer un front très large en soutien au projet. Une mobilisation qui s’avérera précieuse par la suite, lorsqu’il fallut faire face aux vents contraires, aussi bien pendant les débats parlementaires que, surtout, dans l’opinion publique.

Réseau ferroviaire régional : encore beaucoup à faire !

15 ans plus tard, le Léman Express va être inauguré, ce dimanche 15 décembre 2019. J’entends encore maintenant certaines voix prétendre qu’il sera vide. Je fais le pari qu’il sera vite saturé ! A chaque voix qu’une nouvelle offre ferroviaire régionale efficace et de qualité a été mise en place dans notre région, les trains ont été vite pleins, même lorsque les parkings-relais (P&R) n’étaient pas encore disponibles. Cela a été valable aussi bien entre Genève et la Plaine qu’entre Genève et Coppet, ou chez nos voisins entre Evian-Thonon et Annemasse.

Aujourd’hui, le Léman Express n’est pas l’aboutissement d’une démarche ; c’est un premier pas, certes important, mais largement insuffisant. Le prochain chantier de grande ampleur sera l’extension de la gare Cornavin avec 2 puis 4 voies souterraines supplémentaires, chantier que certains contestent encore au nom d’une vision passéiste du transport régional. Faut-il rappeler que, pendant que certains esprits frondeurs bien genevois s’amusent à couper les cheveux en 4 juste pour exister, les autres cantons avancent et obtiennent des soutiens fédéraux ?

Pour le réseau régional, nos voisins français doivent accélérer la mise à niveau de ce réseau sur le plan technique et sur le plan de l’offre, par exemple pour améliorer la desserte sur Annecy, ou, en collaboration avec la Suisse, rétablir une liaison complète sur la rive sud du Lac Léman (la liaison dite du Tonkin). Il devient également impératif de prévoir une réelle offre ferroviaire sur l’Ouest du Canton, vers le pays de Gex, plusieurs options étant possibles. Et sur le territoire genevois, des plans existent heureusement, par exemple pour créer une halte à Châtelaine, créer une connexion directe entre l’axe en provenance d’Annemasse et l’aéroport et une tangente vers l’aéroport depuis la Suisse, ainsi qu’une liaison ferroviaire diamétrale telle qu’annoncée par le Canton. A ces projets ferroviaires indispensables et urgents s’ajoute la nécessité d’accélérer la réalisation des projets de tram.

Des mesures drastiques de réduction du trafic automobile, socialement équitables

Encore qui concerne le trafic automobile, rappelons 4 chiffres :

  1. Un bon tiers des véhicules privés en circulation à Genève font en moyenne moins de 3km pour leurs déplacements.
  2. 95% des 600’000 passages quotidiens de la frontière avec la France se font en voiture.
  3. Pendant les vacances scolaires on considère qu’il y a 7 à 10% de véhicules en moins qui circulent, et l’effet est déjà très net sur la situation dans les rues.
  4. Plus de 40% des ménages de la Ville de Genève n’ont pas (ou plus) de voiture (dont moi d’ailleurs).

Il faut un programme ambitieux de réduction du trafic automobile classique en ville, avec des mesures à la fois dissuasives et incitatives. La dissuasion passe notamment par une réduction massive des nombres de places de stationnement, une augmentation substantielle des taxes sur les véhicules les plus puissants et les plus polluants (en attendant leur interdiction), l’instauration d’un péage urbain, entre autres. Mais il est impératif d’accompagner ceci de mesures fortes et crédibles pour aider à la transition et éviter un impact social rédhibitoire. Il faut envisager des incitations financières sur la conversion vers des moyens de transport individuel moins polluants (vélo, vélo à assistance électrique, voire même scooters électriques), ainsi que les réseaux d’auto-partage (à motorisation alternative) et une baisse des tarifs des transports publics, voire la gratuité ciblée (enfants et jeunes, seniors, personnes en recherche d’emploi…). Les outils numériques faciliteront de plus en plus ces approches, s’ils sont utilisés de manière transparente, accessible et éthique. Le produit du péage et des taxes susmentionnées doit servir à financer ces mesures qui entraîneront de toute manière à terme des économies importantes, directes et indirectes.

Une évolution forte de notre organisation sociale et urbaine !

De plus, il faudrait imaginer des mécanismes fortement incitatifs pour soutenir les entreprises dans une approche plus créative et flexible de l’organisation du travail (possibilité de varier ses horaires, télétravail, lorsqu’on en a la possibilité et que c’est un choix), bien accompagnée en termes de protection des droits du travailleur / de la travailleuse et qu’un suivi adéquat est mis en place.

Il y a une attention particulière à accorder au transport professionnel sous toutes ses formes, à la fois pour faciliter ses besoins lorsqu’il est légitime, tout en favorisant une transition du trafic croissant de livraisons dues aux achats en ligne sur des véhicules moins polluants. Le nombre de camionnettes est en effet en train d’exploser en Suisse. Prendre des mesures pour relocaliser le commerce est ainsi tout autant une mesure écologique qu’économique, en favorisant un commerce de proximité.

Au niveau du trafic, à court terme, il faut passer rapidement toute la ville en zone 30 km/h (ce qui entraînera déjà une baisse significative du bruit et des risques), et multiplier massivement les zones piétonnes ou à priorité piétonne dans les cas où le passage de véhicules reste indispensable. En attendant, un passage au 30 km/h généralisé la nuit, comme dans les villes vaudoises, et comme je l’ai moi-même proposé pour Genève, serait un premier pas important vers moins de nuisances de bruit, très néfastes pour la santé !

Une amélioration réelle de la qualité de vie pour toutes et tous, sans exception !

Enfin, cette évolution doit impérativement s’accompagner d’une réelle amélioration visible et mesurable de la qualité de vie pour toutes et tous : moins de bruit, moins de nuisances, plus d’espaces urbains accessibles et conviviaux, des activités collectives dans l’espace public, ce qui passe aussi bien par un aménagement urbain offensif et ambitieux qu’une promotion active de l’occupation positive de l’espace public (culture, proposition sociales, sportives, animations, …), pour toutes les catégories de la population, qui peut bénéficier pleinement de ces améliorations ! Ces mesures doivent s’inscrire dans une histoire convaincante et séduisante, qui fasse envie à une majorité ! La transition climatique ne se fera que si elle est socialement juste, souhaitée et vécue positivement !

 

« Nous, saisonniers, saisonnières… » : devoir de mémoire et acte de mobilisation

La Ville a inauguré, ce mardi 29 octobre, au Commun du Bâtiment d’art contemporain, une exposition très forte, consacrée aux saisonnières et saisonniers à Genève, exposition visible jusqu’au 24 novembre. L’impulsion pour ce projet provient d’une motion votée à une large majorité par le Conseil municipal de la Ville de Genève en septembre 2014, sur la base d’un texte déposé à l’origine par le groupe socialiste.

Cette exposition résulte de la mobilisation de compétences et de talents aussi bien historiques qu’artistiques, avec l’alliance du Collège du travail, des Archives contestataires et du Collectif Rosa Brux, afin de rendre hommage à ces femmes et ces hommes, tout en leur donnant la parole. Les historiennes et historiens documentent, analysent, mettent en perspective, et les artistes nous incitent à voir les choses autrement, nous bousculent parfois, amènent un regard décalé et créatif.

Genève est souvent citée comme berceau des droits humains, un lieu au service du dialogue pour la paix et le progrès, un carrefour des idées et des talents. C’est incontestablement aussi une cité multiculturelle, et j’aime la comparer à une belle mosaïque, très riche, avec plus de 40% de résident-e-s étranger-e-s de tous horizons, et 70% de personnes titulaires d’au moins une autre nationalité. Pourtant, il faut également faire face au revers de la médaille, aux faces sombres de notre histoire, aux manquements, aux iniquités et autres inégalités que Genève a couvertes et même souhaitées, dans le cadre d’une politique suisse de l’immigration qui reste une des plus restrictives d’Europe.

Comme le disait Tahar ben Jelloun : « On est toujours l’étranger que de quelqu’un. », une citation tirée du Racisme expliqué à ma fille. Des générations d’étrangers, à Genève, se sont succédées et ont été différemment étiquetées et traitées. Bien vus et acceptés, lorsqu’ils étaient fortunés et lettrés, ou au contraire stigmatisés et filtrés. C’est l’histoire même des migrations. Durant la deuxième partie du 20ème siècle la Suisse a décidé de faire appel aux personnes venant d’Italie, puis d’Espagne, du Portugal, d’ex-Yougoslavie…

L’exploitation du travail humain n’est pas en soi une rareté, malheureusement, dans notre monde, hier et aujourd’hui, bien au contraire. Ce qui est particulièrement choquant dans l’histoire des saisonnières et des saisonniers, c’est ce statut officiel, le système inique mis en place. Parce qu’il s’agit bien d’un système, voulu et assumé, ancré dans des lois et des dispositifs formels, qui ne considère plus les personnes comme des êtres humains à part entière, mais réduits à des outils de production. Max Frisch l’a tellement bien dit avec sa célèbre phrase : « Nous attendions des bras et ce sont des hommes qui sont venus. » C’est particulièrement choquant que l’on puisse imaginer des hommes et des femmes non pas pour ce qu’ils et elles sont mais uniquement pour une petite partie de leur être, leur dimension purement productive. A Genève, dans les années 70, on comptait jusqu’à 10’000 titulaires de ce permis, chiffre qui redescendait brutalement dans les années de basse conjoncture, la Suisse « exportant » ainsi le chômage vers les pays d’origine[1].

L’exposition concilie des éléments « objectifs », issus des archives, avec toutes les traces « formelles » laissées par l’histoire, les documents administratifs, les affiches, etc., et la parole des concerné-e-s ou de leurs enfants et petits-enfants, sans oublier un formidable matériel photographique très marquant. Ainsi on donne, tardivement certes, la parole à ceux et celles qui, à l’époque, n’avaient aucun droit à la parole.

En ma qualité d’élu municipal en charge de la culture, j’ai tenu à soutenir très activement cette démarche, car il s’agit d’une formidable contribution à la fois artistique et historique pour générer et diffuser ce travail de mémoire. Cette exposition est nécessaire, même si c‘est un acte modeste face au poids de cette histoire. Ce pan de notre histoire, nous devons y faire face, pour ne pas infliger de double peine à celles et ceux qui ont subi ce statut imposé. Double parce qu’ils et elles ont été une première fois niés quand ils subissaient ce statut et travaillaient dans l’ombre et au noir. Les cantonner dans l’oubli, c’est la deuxième peine.

Pour toutes celles et tous ceux qui se retrouveront dans cette histoire, pour toutes celles et tous ceux qu’elle renforcera dans leur volonté de lutter pour que les droits humains, et pour tous ceux et toutes celles, plus jeunes peut-être, qui découvriront la vie des saisonniers et des saisonnières à Genève, je rends hommage aux porteurs de ce projet, mais également aux artistes et historien-ne-s qui s’y sont impliqué-e-s, et bien évidemment aux saisonniers et saisonnières ou enfants de saisonniers et saisonnières qui ont accepté de témoigner.

Exposition "Nous saisonnières, saisonniers"
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[1] « 1970- 2009: 40 ans d’observation conjoncturelle à Genève », OCSTAT, Genève, 2010