La coopération au développement, un devoir et une chance

La coopération au développement suisse est efficiente, crédible, ciblée et se construit avec des partenaires de terrain responsables, structurés, en fonction d’une analyse des situations et des priorités. Elle vise à l’autonomie des populations et se projette dans la durée. Nous pouvons en être fiers.

Alors que notre monde a tout à fait les moyens de répondre aux besoins élémentaires de tout être humain, 820 millions d’humains ne mangent pas à leur faim, 750 millions n’ont pas pu aller à l’école, 750 millions doivent vivre avec moins d’1,9 $ par jour (seuil de la pauvreté absolue) et 850 millions n’ont pas de toit digne de ce nom. La moitié de l’humanité n’a pas accès aux soins nécessaires et 785 millions de personnes ne disposent pas d’une eau potable de qualité hygiéniquement sûre. La coopération est une contribution essentielle pour remédier à ce scandale quotidien.

Dans le contexte actuel de changement climatique, de destruction de bases naturelles de l’existence (menaces sur la biodiversité, le cycle de l’eau, les sols, etc.), de mauvaise gouvernance et de migration forcée, ces actions sont particulièrement indispensables pour permettre aux populations du Sud de pouvoir vivre dignement au pays, droit que chacun.e de nous réclame comme une évidence pour soi-même.

Ces thématiques sont aujourd’hui au cœur des 17 Objectifs de développement durable, et de leurs 169 cibles, retenus voici exactement 4 ans, le 25 septembre 2015, par l’Assemblée générale des Nations Unies, dans l’Agenda 2030. Ce document lie tous les Etats et la Suisse y a également souscrit ; la coopération est une des clés de sa mise en œuvre.

La coopération, un engagement citoyen…

De très nombreuses ONG, petites et grandes, reflètant l’engagement citoyen, s’impliquent dans des projets en partenariat avec des communautés dans le Sud. Comme l’indique la Fédération genevoise de coopération dans sa prise de position sur le projet de message 2021-2024 sur la coopération internationale de la Suisse, « chaque projet est le fruit d’une étroite collaboration entre les organisations membres de notre Fédération et leurs partenaires au Sud. Ces projets permettent d’améliorer de façon durable les conditions de vie des communautés défavorisées et combattre les inégalités à travers le droit à la santé, l’éducation, les emplois locaux, la valorisation de ressources locales, l’autonomie agro-alimentaire et énergétique. Ils reposent sur une mobilisation et la participation active des populations concernées, en collaboration avec les autorités locales. » (https://fgc.federeso.ch/system/files/attachments/news/fgc_consultation_message_2021-24_2019.07.18.pdf)

Les collectivités publiques de tout niveau, communes, cantons et Confédération soutiennent par leur financement ces projets, et les expertisent par leurs propres organes techniques et financiers ou ceux des Fédérations cantonales de coopération.

…en partenariat avec les collectivités publiques

La politique étrangère suisse est définie par l’article 54 de la Constitution qui dit en particulier : « La Confédération (…) contribue notamment à soulager les populations dans le besoin et à lutter contre la pauvreté ainsi qu’à promouvoir le respect des droits de l’homme, la démocratie, la coexistence pacifique des peuples et la préservation des ressources naturelles. »

Aux termes de la loi qui la régit, la coopération vise à soutenir « les efforts des pays en développement en vue d’améliorer les conditions de vie de leurs populations ». Selon la loi, «la coopération au développement et l’aide humanitaire internationales expriment la solidarité qui figure au nombre des principes régissant les relations de la Suisse avec la communauté internationale et répondent à la situation d’interdépendance qui existe entre les diverses parties du monde. »

Le devoir de cohérence

Cette philosophie correspond à notre responsabilité de pays aux ressources provenant essentiellement d’autres parties du monde. Ce qui se traduit notamment par une empreinte carbone deux fois plus importante que le CO2 émis depuis le territoire national, et par une empreinte écologique trois fois plus importante que ce à quoi nous aurions droit. Comme le dit l’Office fédéral de la statistique, « la consommation suisse par personne est 2,8 fois plus grande que les prestations et ressources environnementales globales disponibles par personne. Nous vivons donc aux dépens des générations futures et d‘autres régions du globe ».

En 1970, les pays industrialisés se sont engagés lors de l’Assemblée générale de l’ONU à accorder au moins 0,7% de leur revenu national brut (RNB) au financement d’actions de coopération au développement. Cinquante ans plus tard, ils sont à peine une demi-douzaine à atteindre l’objectif. Suite à une pétition signée par plus de 200’000 personnes et déposée en mai 2008, le parlement suisse a fixé l’objectif à 0,5% pour notre pays.

Investir dans la coopération c’est investir dans l’équilibre du monde

Malheureusement, le projet de message du Conseil fédéral sur la coopération internationale de la Suisse mis en consultation ce printemps comporte de graves risques de recul. Citons, entre autres :

1) L’accent mis sur les intérêts économiques suisses à court terme, qui peuvent tout à fait être à l’opposé des intérêts des plus démunis du monde.
2) Une répartition floue entre aide humanitaire et aide au développement, au détriment de cette dernière, soit du plus long terme.
3) Une diminution de l’engagement financier qui passerait du 0,5% du RNB postulé par la parlement à 0,45% voire à 0,4%, très loin du 0,7% convenu.
4) Une contribution de la coopération à la mise en œuvre de l’Agenda 2030 minimisée voire occultée, or il n’y a pas de durabilité sans coopération – tout comme il n’y a pas de coopération sans durabilité.

Il est à espérer que, suite aux réponses reçues au cours de la consultation, la version finale du message apporte les correctifs nécessaires et réaffirme clairement qu’il est dans notre intérêt à tous que soient combattues les inégalités et les menaces environnementales dans le monde. Nous vivons tous sur la même planète et la dignité humaine est indivisible. Investir dans la coopération c’est investir dans l’équilibre du monde.

René Longet

Licencié en lettres à l’Université de Genève, René Longet a mené en parallèle d’importants engagements, dans le domaine des ONG et du monde institutionnel, pour le vivre-ensemble ainsi qu'un développement durable. Passionné d’histoire et de géographie, il s’interroge sur l’étrange trajectoire de cette Humanité qui, capable du meilleur comme du pire, n’arrive pas encore bien à imaginer son destin commun.

2 réponses à “La coopération au développement, un devoir et une chance

  1. Merci pour ce petit aiguillon de rappel que nous avons la chance d’être né du bon côté de la barrière et qu’il est de notre devoir moral de partager .
    Dans l’espoir que les nouveaux élus que l’on va envoyer à Bern dans 20 jours ont bien lu le message et s’engagent à l’appliquer

Les commentaires sont clos.