Votations fédérales : Des résultats très clairs pourtant rien n’est joué!

A première vue, guère de points communs entre les trois sujets soumis à votation de ce dimanche. Mais à y regarder de plus près, les ressemblances sont fortes:

 

D’une part, les scores sont tous entre 60 et 65% – autre chose que sur les résidences secondaires ou l’immigration.

D’autre part, paradoxalement, sur les contenus, rien n’est définitif, il s’agit à chaque fois d’un résultat d’étape. Un vrai paradoxe!

 

Qu’on en juge :

 

AVS. Concilier prévention de la paupérisation des aînés et charge supportable pour la génération économiquement active demeure l’enjeu sur le plus long terme. Et comme pour l'assurance maladie, l’allongement de l’espérance de vie a un coût. Si on part de l’idée que les actuels actifs seront également les futurs bénéficiaires d’une retraite qui leur permette de vivre, le cadre du contrat intergénérationnel est posé. Mais ne nous leurrons pas. Il ne sera pas possible d’éviter le débat sur la manière de définir les contributions.

 

Le financement devra tôt ou tard prendre en compte la productivité de l’ensemble des facteurs économiques et pas se limiter à la seule masse salariale. On ne pourra pas organiser la solidarité intergénérationnelle en excluant de la formule de calcul une bonne partie de ce qui constitue l’économie, et la faire reposer sur les seules contributions des personnes physiques. Le rejet de l’initiative AVS + ne saurait clore le débat.

 

Economie verte. Le refus de l’initiative a été largement interprété comme un refus du peuple suisse d’un délai considéré comme trop contraignant pour effectuer un virage, dont la nécessité est par ailleurs reconnue. C’était aussi la première fois qu’un large public était confronté à des notions comme l’empreinte écologique. Mais l’idée fera son chemin tant il est inconcevable de prétendre consommer trois fois plus que ce à quoi nous avons droit.

 

Et cette approche est nettement plus appropriée que l’obsession démographique à la Ecopop. Finalement quoi que décide le législateur, fût-ce le peuple tout entier, il n’en reste pas moins qu’il ne saurait modifier par décision politique les lois de la physique ou de la chimie. Les enjeux globaux comme le changement climatique ou l’érosion de la biodiversité imposeront tôt ou tard leur agenda. Nous devrons donc nous tenir prêts.

 

Enfin la loi sur le renseignement. Le juste équilibre entre liberté et sécurité est un vieux débat de société, et le vote n’a pas exactement suivi le clivage gauche-droite. Il s’est trouvé des personnalités de gauche soucieuses du droit à la sécurité pour tous défendant la loi, et des personnalités de droite l’attaquant au nom de l’intangibilité de la liberté individuelle face à l’Etat.

 

Au final, tout va se jouer sur l’éthique et la manière de la mise en œuvre, et le vote populaire n’est en rien un blanc-seing pour une toute-puissance policière ou une nouvelle accumulation de fiches aussi ringardes et blessantes qu’inutiles… Là aussi le débat ne fait que commencer.

 

Donc trois étapes de franchies – mais à chaque fois, suite  au prochain numéro. Intéressant de voir aussi que ces trois enjeux ne se posent nullement seulement en Suisse, mais reflètent un questionnement universel – auquel nous avons la grande chance de pouvoir répondre à travers des décisions prises démocratiquement.

René Longet

Licencié en lettres à l’Université de Genève, René Longet a mené en parallèle d’importants engagements, dans le domaine des ONG et du monde institutionnel, pour le vivre-ensemble ainsi qu'un développement durable. Passionné d’histoire et de géographie, il s’interroge sur l’étrange trajectoire de cette Humanité qui, capable du meilleur comme du pire, n’arrive pas encore bien à imaginer son destin commun.