Les journaux se sont largement fait l’écho des bons résultats des Verts et des Vert’libéraux lors des dernières élections fédérales. Les sceptiques prédisent déjà que cette vague verte va simplement s’écraser sur le sable et que, dans 5 ans, cet excellent score va être effacé.
Alors, comment est-ce que cette nouvelle configuration du Parlement peut-elle permettre d’ancrer la Suisse dans une logique forte de développement durable ?
Les initiatives politiques actuelles sont principalement des actions tactiques basées sur des mesures dissuasives comme l’introduction de la taxe au sac pour augmenter le taux de recyclage. Dans la même logique, on a beaucoup débattu ces derniers mois de l’introduction d’une taxe pour les vols en avion. Si la Suisse veut maintenant devenir exemplaire, il est temps de mettre en place un vrai leadership et de définir une stratégie du changement.
Huit étapes pour un obtenir un changement durable
Je propose aux Verts et aux Vert’libéraux d’unir leur force et de développer une stratégie du changement en utilisant les huit étapes décrites par John Kotter dans son livre « Alerte sur la banquise ». En effet, dans la politique, mais également dans le monde des entreprises, les programmes de changement aboutissent rarement à un succès car certaines étapes ont été omises. John Kotter propose les huit étapes suivantes :
- Créer un sentiment d’urgence
- Réunir l’équipe de pilotage
- Développer la vision et la stratégie de changement
- Communiquer pour faire comprendre et adhérer
- Donner aux autres le pouvoir d’agir
- Produire des victoires à court terme
- Persévérer
- Créer une nouvelle culture
Les excellents résultats des Verts au Parlement sont la conséquence de la première étape : créer un sentiment d’urgence. Les lanceurs d’alertes tels que Greta Thunberg, les rapports alarmistes de la communauté scientifique et les grèves du climat ont permis de propager ce sentiment d’urgence.
Développer la vision et la stratégie de changement est maintenant une étape essentielle. Il me semble judicieux que cette nouvelle « délégation verte » au Parlement précise en quoi l’avenir sera différent avec leurs actions et surtout explique comment cet avenir peut devenir une réalité.
Lors de l’élaboration de ce plan, une des questions importantes spécifiées dans le livre de John Kotter est : disposons-nous d’un chemin crédible pour y parvenir ? Si l’on prend l’exemple de la stratégique énergétique 2050 acceptée par le peuple en 2017, elle promet la sortie du nucléaire et la promotion des énergies renouvelables. Cependant on peut questionner la mise en œuvre : un seul projet éolien a vu le jour depuis l’acceptation de la stratégie 2050 alors que la page d’accueil contient une photographie d’éolienne ! Le plan d’action aurait par exemple dû intégrer un mécanisme pour assurer une pesée d’intérêt globale dans le but de réduire les oppositions.
Donner aux autres le pouvoir d’agir est également une des étapes importantes. Il faut laisser le champ libre et soutenir ceux qui veulent transformer la vision en réalité. Nous avons la chance d’avoir, dans notre pays, de nombreux ambassadeurs de la durabilité. Raphaël Domjan est un excellent exemple, avec son projet SolarStratos. Il cherche à démontrer que, grâce à l’énergie du soleil, il est possible d’aller plus haut qu’un avion fonctionnant aux énergies conventionnelles.
Développer des avions qui émettent moins de CO2 est une solution plus attractive que d‘augmenter le prix de billets pour empêcher la classe moyenne de partir en vacances et de découvrir le monde.
Ces ambassadeurs du changement comme Raphaël Domjan produisent des victoires, montrent la voie et inspirent d’autres citoyens à s’investir dans la mise en œuvre du changement.
De la fable à la réalité
Le livre de John Kotter illustre ces huit étapes de la conduite du changement au travers d’une fable. Elle décrit comment une colonie de pingouins devient nomade pour garantir sa survie suite à la fonte des glaces du pôle Nord. Cette analogie ne peut être mieux choisie dans le contexte de la protection du climat. Le réchauffement climatique rendra certaines régions du monde invivables. Bloquer les frontières avec de nouvelles règles d’immigration est inutile. Appliquons plutôt les bonnes pratiques de la gestion du changement pour faire de la Suisse un leader du développement durable.
Selon un proverbe chinois, « quand souffle le vent du changement, certains construisent des murs, d’autres des moulins ». On n’a pas été très bon pour construire des éoliennes (plutôt que des moulins), peut-être qu’avec un Parlement plus vert qui met en place une vraie stratégie du changement, l’impact sera à la hauteur de nos attentes.
Le livre de John Kotter est disponible chez Payot : https://www.payot.ch/Detail/alerte_sur_la_banquise_-john_kotter__holger_rathgeber-9782744066979