Artemis, les missions habitées en perspective

Partie le 16 novembre de la Terre, la mission Artemis 1 a placé en orbite lunaire la capsule Orion de la NASA et le module de service ESM de l’ESA, qui lui permet de fonctionner. Les tests successifs sont positifs ; tout va bien à bord ! Ce succès donne de la substance à ce qui n’était jusqu’à présent qu’un rêve, le retour de l’homme sur la Lune.

Le vaisseau est allé explorer l’orbite qui sera utilisée lors des missions suivantes, à commencer par Artemis II et Artemis III. Il s’agit d’une « DRO » (Distant Retrograde Orbit) et c’est une « première » puisqu’on ne l’a jamais utilisée. Elle a l’avantage d’être très stable en raison de l’interaction qu’elle permet avec les points de Lagrange (Terre-Lune) L1 et L2, donc très peu consommatrice d’énergie. On l’appelle « rétrograde » parce que la rotation se fait dans le sens opposé à celui de la Lune autour de la Terre. Elle est circulaire et se situe à environ 64.000 km de la Lune (Terre-Lune = 385.000), entre les deux points de Lagrange, en dehors de l’influence directe de la Lune (d’où le terme « distant »). Dans le cas d’Artemis 1, Orion parcourra entre une et une DRO et demi. Pour se placer sur cette orbite, il a fallu effectuer un survol de la Lune à seulement 128 km d’altitude. Lors d’Artemis II, le même vaisseau, composé de la capsule Orion et de son ESM parcourra cette même orbite avec quatre astronautes. Lors d’Artemis III, le Starship « Human Landing System » (HLS) y sera assigné un bon moment (jusqu’à 90 jours) avant de recevoir ses quatre passagers venant de la Terre grâce à un dispositif semblable à celui d’Artemis 1, pour en descendre ensuite deux sur la Lune. Si un jour on construit la Lunar Gateway, ce sera aussi sur cette orbite qu’elle évoluera (et elle servira pour les missions Artemis successives) à moins que le Starship SLS ne puisse être finalisé. Dans ce cas on adopterait une orbite de halo (un peu moins stable que les DRO) qui permettrait un périapside proche (3000 km) pour un apoapside identique (64.000 km).

Le voyage en cours a pour avantage de permettre d’étudier sans risque humain le comportement de la capsule Orion et son ESM sur cette orbite un peu spéciale, de tester les manœuvres à effectuer  par le module de service (nombreuses corrections de trajectoire), de tester les systèmes de pressurisation, chauffage et refroidissement à l’intérieur de la capsule, de tester le système de télécommunication (l’orbite DRO permet de rester en contact constamment avec la Terre) et d’observer les conséquences des éventuels impacts de micrométéorites (ou, dans le voisinage de la Terre, de débris orbitaux).

Le voyage continuant paisiblement après un départ tumultueux, nous pouvons réfléchir aux perspectives qu’il ouvre.

Le retour sur la Lune

Puisque la NASA a réussi la première partie de la mission d’Artemis I, nous pouvons penser qu’elle aura une suite, c’est-à-dire une série de missions du même nom, comme on a eu les missions Apollo. Après une préparation très longue, nombreux (dont moi-même) étaient ceux qui doutaient de la capacité du SLS à prendre son envol. Avec le « Block 1 » (version actuelle du lanceur), on dispose maintenant de la possibilité technique de mener à bien Artemis II.

Pour ce qui est d’Artemis III, celle qui doit amener à nouveau des hommes sur la Lune, c’est un peu plus compliqué. Il faudra encore que le Starship HLS soit finalisé, c’est-à-dire que SpaceX puisse déjà faire voler son « Starship-standard » au moins une fois en orbite autour de la Terre. On en est toujours aux tests de mise à feu statique des moteurs Raptor (test réussi de 14 moteurs fonctionnant ensemble mi-novembre mais on n’en est pas encore aux 29 prévus pour le vol orbital). Une fois le Starship-standard testé, il faudra construire le Starship-station-service et plusieurs Starship-tankers et surtout réussir à transférer les ergols (LOx et Méthane liquide) de quatre voyages de tankers successifs dans le Starship-station-service puis de ce dernier dans le HLS. La réussite n’est pas certaine et c’est pour cela qu’on peut encore douter de la date prévue de 2025 pour Artemis III. En effet, malheureusement, le module de service ESM n’a pas la capacité comme l’avait le module des missions Apollo, de transporter depuis la Terre, avec la capsule, un module d’atterrissage sur la Lune incluant un module de retour en orbite pour ensuite repartir pour la Terre avec la capsule laissée en orbite. Si le HLS fonctionne, il sera positionné en orbite lunaire, attendra l’arrivée de la capsule Orion+ESM lancée par le SLS et portant les astronautes, descendra ces derniers sur le sol lunaire et les remontera jusqu’à la capsule Orion+ESM restée en attente sur l’orbite DRO, afin que l’ensemble Orion+ESM retourne vers la Terre (où seule atterrira la capsule, sans son ESM).

Il y a donc un « petit » bémol, la faisabilité du Starship, à ajouter à la faisabilité de la suite de la série des missions Artemis (après la deuxième). Mais le plus gros problème semble quand même avoir été la démonstration de faisabilité du SLS. En effet, au cas où le Starship ne pourrait pas fonctionner, on pourrait reconsidérer les propositions de Blue Origin ou d’Aerojet Rocketdine qui étaient des alternatives au HLS. Par contre si le Starship-standard fonctionne, on ne voit pas bien l’intérêt de persister à utiliser le SLS. Celui-ci ne peut pas permettre d’arriver sur la Lune et d’en repartir seul ; le Starship, lui, le pourrait. Par ailleurs un lancement de SLS coûte plus de 4 Milliards de dollars et n’est pas réutilisable (on ne sait pas encore pour le Starship mais les tout premiers ne devraient coûter qu’environ 1 milliard). On ne peut donc pas dire que ce soit satisfaisant ! Ce SLS ressemble beaucoup à une solution d’urgence pour passer le relai au Starship aussitôt que possible.

Si le Starship fonctionne on n’aura donc pas besoin de SLS, ni d’Orion avec son ESM, ni d’atterrisseur lunaire, ni de véhicule pour repartir de la Lune, ni de rien d’autre. Mais si SpaceX ne parvient pas à finaliser son Starship, il semble préférable (mais toujours non indispensable !) de disposer d’un Lunar Gateway, genre de Station Spatiale Internationale parcourant de façon stable et pérenne l’orbite DRO et pouvant être utilisée comme relais entre un MAV (Moon Ascent Vehicle) et un ERV (Earth Return Vehicle). C’est encore une complication car le Gateway est très loin d’être prêt mais dans l’attente du Starship, la doctrine n’est pas complètement arrêtée.

La course à la Lune

L’urgence qui justifie l’utilisation de cet SLS, très imparfait, c’est la concurrence chinoise. Les Chinois ont un « Chinese Lunar Exploration Program » (CLEP) et il avance sans doute plus vite que le craignaient les Américains. Les Chinois ont exécuté avec succès les phases 1 et 2 de ce programme (missions orbitales puis atterrissages avec sondes puis rover). Parallèlement leur phase 3 (retour d’échantillons) s’est aussi déroulée avec succès. La phase 4, est en cours de préparation. Cette phase qui comportera les missions Chang’e 6, 7 et 8 (Chang’e étant la Déesse de la Lune) vise l’exploration robotique du Pôle Sud de la Lune, tout comme l’Artemis III des Américains, et la première, Chang’e 6, doit se dérouler en 2024 (Les Américains doivent mener leur mission robotique préparatoire en 2023 et Artemis III, avec équipage, doit avoir lieu en 2025). Chang’e 6 raménera des échantillons de cette même zone. Elle sera effectuée par une fusée CZ-5 (Chang zheng, Longue marche) identique à celle qui a déposé le premier rover chinois dans les Basses Terres du Nord de Mars. Il y a donc peu de doute que cette mission aura lieu. Les vols habités qui suivront, dans le cadre de la phase suivante du CLEP, doivent être menés avec une nouvelle version de la CZ-5, la CZ-5G. Avec cette fusée, la Chine prévoit une première mission habitée sur le Pôle Sud de la Lune au début des années 30. Leurs capacités se rapprochent donc vite de celles des Américains et leur objectif est le même, le Pôle Sud.

Or le Pôle Sud offre des possibilités très intéressantes mais qui sont rassemblées dans « un mouchoir de poche ». Il s’agit de s’installer dans un site éclairé au moins 90% du temps par le Soleil (n’oublions pas que sur la Lune les nuits durent 14 de nos jours, qu’on ne peut utiliser les panneaux PV et qu’alors il y fait extrêmement froid !). Ce site doit a priori être situé au sommet d’un mur de cratère et aussi proche que possible d’un gisement de glace d’eau. On en a constaté la présence dans le fond de quelques cratères qui, dans cette région, ne sont jamais éclairés par la lumière du Soleil (PSR, Permanently shadowed Region) et ont ainsi pu conserver toute l’eau qu’ils ont reçue depuis la formation de la Lune, très probablement via des comètes de passage. Le plus connu de ces cratères est celui de « Shackleton ». Comme la sphère de la Lune est beaucoup plus petite que celle de la Terre, la surface de ses régions polaires sont également beaucoup plus restreintes. Et si l’on veut se trouver sur un terrain à peu près plat, en surface duquel on puisse se déplacer relativement facilement plutôt que sur une crête, il y a encore moins de surfaces possibles. Un site privilégié est le pont (« ridge ») qui joint les murs du cratère Shackleton à ceux du cratère voisin, « de Gerlache », un rectangle d’une dizaine de km2 seulement. Ce bout de Lune, très bien exposé est ensoleillé au maximum. Il est à proximité immédiate de plusieurs PSR et il est probable que son sous-sol immédiat contienne aussi de la glace (voir photo ci-dessous). Il risque donc d’être très disputé. Pour commencer c’est là que les Américains veulent envoyer en 2023, leur rover VIPER (pour « Volatiles Investigating Polar Exploration Rover ») qui doit mesurer précisément, en volume et qualité, les gisements d’eau accessibles…Ce que veulent faire aussi les Chinois avec un autre rover qui sera apporté par Chang’e 7 en 2024 !

Les Etats-Unis adhèrent bien sûr à la convention internationale qui interdit l’appropriation par un pays, d’un territoire dans l’espace (Outer Space Treaty, article 2). Mais en même temps ils se sont donnés le droit d’exploiter les ressources « locales » et ont fait savoir qu’ils pourraient protéger leur champ d’activité par une « no interference zone ». Les Chinois ne manqueraient pas de faire de même mais la situation serait catastrophique pour les Etats-Unis s’ils arrivaient second. Les Européens quant à eux savent qu’ils ne sont pas dans la course mais ils veulent y participer et proposent donc (idée lancée par Johann Wörner, directeur de l’ESA, en 2015) un « village lunaire » qui serait développé par l’ensemble des nations spatiales, en coopération, sans avoir aucunement les moyens de l’imposer. On est donc dans le flou complet et les Etats-Unis ne veulent manquer pour rien au monde d’être les premiers même robotiquement, dans leur petit coin de paradis, faute, autrement, de ne pas avoir le droit d’y accéder.

Alors, « On a marché sur la Lune (version 2) » est dans tous les esprits mais c’est surtout pour des raisons politiques. La Lune n’étant qu’à un peu plus d’une seconde lumière de la Terre, on peut y travailler, faire des recherches, par robots interposés. L’homme c’est un peu le folklore ou le rêve de Tintin. Ce n’est pas le cas de Mars ou, contrairement à la Lune, on doit subir un long « time-lag » (3 à 22 minutes dans un seul sens) pour mener toute action. Ce n’est pas du tout la même chose. Mais Mars, hélas, est encore loin, dans le temps, puisque la Lune doit servir de terrain d’essai avant le grand départ. Et j’ai peur, encore une fois, qu’on l’oublie en commençant à jouer sur la Lune !

Illustration de titre : Capture d’écran NASA lors du passage d’Orion à quelques 138 km de la surface de la Lune.

Illustration ci-dessous : architecture de la mission Artemis III sans Gateway. Crédit NASA. Pourquoi les passagers ne partiraient-ils pas de l’orbite terrestre avec le SLS une fois que le HLS aurait rempli son réservoir ? Il suffirait en fait que le Starship ne soit pas un HLS mais un starship équipé d’une protection thermique lui permettant de revenir se poser sur Terre.

https://blogs.nasa.gov/artemis/

https://en.wikipedia.org/wiki/Starship_HLS

https://en.wikipedia.org/wiki/Starship_HLS#/media/File:Artemis_III_CONOPS.svg

https://www.thespacereview.com/article/3418/1

https://www.nasa.gov/feature/orion-will-go-the-distance-in-retrograde-orbit-during-artemis-i

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Index L’appel de Mars 22 11 03

Pierre Brisson

Pierre Brisson, président de la Mars Society Switzerland, membre du comité directeur de l'Association Planète Mars (France), économiste de formation (Uni.of Virginia), ancien banquier d'entreprises de profession, planétologue depuis toujours.

11 réponses à “Artemis, les missions habitées en perspective

  1. Oui, après la mission d’Artemis I, “nous pouvons penser qu’elle aura une suite”. Ne pas se laisser impressionner par les critiques! Le voyage vers la lune et l’établissement d’humains sur ce satellite vont dans le sens de l’histoire. Les Chinois s’y mettent fort à propos et leur prestige sera multiplié par mille s’ils réussissent. A condition qu’ils ne se lancent pas dans une guerre imbécile, leur hégémonie dans le monde sera longue…”j’ai peur, encore une fois, qu’on l’oublie!” . “jouer sur la Lune” n’ a rien de méprisable et il faut commencer par le commencement, il y a beaucoup à apprendre dans des conditions plus protégées. C’est plus accessible que mars qui sans l’ombre d’un doute sera l’étape suivante inexorablement, plus ou moins tard, si l’humanité survit. Pour établir une colonie durable, il faut un processus bien maîtrisé et fiable. Vous gardez un grand respect pour Musk et son starship capable d’atterrir. Mais on aimerait connaître les noms de ses ingénieurs. Musk doit être un patron exigeant et efficace mais qui sont les cerveaux derrière lui? Font -ils des confidences? On peut espérer que, si les Chinois font de gros progrès, les gens de Musk confieront leurs secrets à la NASA pour la récupération de vaisseaux sur terre… Décidément les points de Lagrange fascinent les Américains mais c’est à juste titre, ils vont pouvoir évaluer leur intérêt. “rester en contact constamment avec la Terre”: formidable! Bon enfin, il y aura le retour à travers l’atmosphère pour les cosmonautes. Là un progrès technologique dans le freinage serait intéressant. Comment les ingénieurs voient-ils l’avenir lointain? Maîtriser, dominer un peu plus les forces de la mécanique céleste pour faire un trajet plus direct? Des gens étudient des moteurs plus rapides, ont-ils de l’espoir? Dommage que l’Europe n’en soit pas, la guerre nous a terrassés pour longtemps. Vaut-il mieux que nous coopérions de façon définitive avec l’Amérique ou une émulation, une compétition serait-elle fructueuse pour tous dans un futur lointain avec une super ariane 6?

    1. « Nous pouvons penser qu’il y aura une suite » : hélas, tout le monde ment dans cette affaire. On parle d’occupation permanente de la Lune alors qu’aucune mission n’est financée après Artémis III qui se bornera à rester 3 jours de plus qu’Apollo 17. Ce vol est annoncé depuis 5 ans à des dates successives faisant fi de toute crédibilité. Son équipage sera choisi sur des critères de sexe et de couleur de peau qui ne devraient pas trouver place dans une mission aussi complexe et dangereuse. Le SLS serait l’avenir quand il n’est qu’un bric à broc de sous-ensembles et technologies des années 1970 que son coût rend mort-né. La NASA le présente comme le plus puissant lanceur de tous les temps alors qu’il l’est un tiers de moins que Saturn 5. La Gateway servira à simplifier les alunissages mais ne sera pas prête pour le seul aujourd’hui assuré. Le démonstrateur du Starship HLS doit atterrir dans moins de 2 ans alors que sa définition n’est toujours pas connue. Le choix de ce lander, l’offre la plus risquée, ne répond à aucune logique par rapport aux objectifs affichés. Et ce Starship non destiné à revenir sur Terre n’aura guère que le nom (et peut-être l’étage inférieur) de commun avec son homonyme dit standard. Enfin, on serait bien en peine d’expliquer en quoi tout cela nous rapproche de Mars.

      Les décideurs américains savent bien sûr tout ça. Mais visiblement la cohérence qui sous-tend leurs choix n’est pas celle qu’ils affichent. Elle semble plutôt dictée par des intérêts politiciens et industriels à court terme. Dont semble faire partie le souci de chaque administration de défaire ce que la précédente a fait.

      Le drame est que la concurrence bien réelle de la Chine est identifiée depuis des années sans que cela semble changer quoi que ce soit.

      1. Monsieur Baland, je partage une partie de vos critiques mais je vous trouve un peu sévère.
        Il est positif que le SLS ait pu voler même si, je vous l’accorde, ce n’est pas une fusée aussi performante que l’était la Saturn V il y a plus de 50 ans!
        Par ailleurs il est vrai que cette extravagance de la NASA d’insister sur le fait d’envoyer dans l’espace une femme, et qui plus est une noire, plutôt simplement qu’un “homme” (au sens neutre), est bien conforme à un racisme toujours prégnant et à un ultra-féminisme complètement débile mais, hélas, “dans l’air du temps” aux Etats-Unis. Cependant on peut espérer raisonnablement qu’Artemis III aura bien lieu et que l’homme soit une femme noire, jaune ou bleue, m’indiffère au fond totalement (même si cela m’agace que l’on insiste sur ce détail).
        Enfin certes aller sur la Lune ne nous rapproche pas physiquement de Mars, puisque la Lune tourne autour de la Terre, mais sortir de l’emprise de la gravité terrestre pour nous éloigner enfin de l’orbite basse terrestre depuis si longtemps (50 ans! fin des missions Apollo), nous démontre l’ambition de la NASA de sortir véritablement du cercle vicieux de l’ISS dans lequel elle s’était enfermée par facilité. Bien sûr cela est largement dû à l’aiguillon chinois mais pas seulement. Je suis convaincu qu’une bonne partie de l’opinion publique américaine le souhaite ardemment.
        Pour ce qui est des financements du programme Artemis, il est déjà bien d’avoir une visibilité jusqu’à Artemis III c’est à dire le retour de l’homme sur la Lune. Il est vrai que la suite dépend de plusieurs facteurs, dont la réussite de cette troisième mission mais cela donne le temps au Starship de continuer son évolution et aussi aux Chinois d’affuter leur aiguillon. Je pense que ce sont des raisons suffisantes pour espérer.

        1. En janvier 1945, mon père était jeune adolescent en Poméranie; son père travaillait sur un projet particulier avec Wernher von Braun à Peenemünde. Lors d’un dîner chez le célèbre savant, mon père l’a entendu dire: “Nous irons sur la Lune.” Ce fut chose faite en 1969. Et en 2022, plus de cinquante ans plus tard, M. Pierre Brisson écrit que la fusée Saturn V qui a été conçue par Dr v. Braun et son équipe est plus performante que la fusée SLS. C’est tout simplement incroyable. Manque-t-il au sein de la NASA, actuellement, un visionnaire comparable à Wernher von Braun? Ou bien, a-t-elle perdu une partie de son savoir-faire en matière de lanceur lourd car elle s’est concentré sur d’autres technologies?

  2. Tous ces progrès scientifiques et d’ingénierie sont passionnants. Ce qui l’est moins et affligeant, c’est cet avertissement d’une « no interférence zone ». Les esprits politiques terrestres me semble encore resté bien ancré dans le passé.

  3. Cette architecture de mission pour le moins complexe semble en effet plus relever de la volonté de justifier l’existence du programme SLS/Orion (et accessoirement de la Lunar Gateway) que du souci de définir une utilisation optimale et rationnelle des divers véhicules spatiaux mis en jeu. Limiter en particulier le Starship à un rôle ”d’ascenseur lunaire”, qui plus est à usage éventuellement unique, ne met guère en valeur toutes les potentialités du transporteur spatial qu’entend développer SpaceX. Pourquoi par ailleurs faire voyager en parallèle l’équipage de la Terre à la Lune dans une capsule relativement exigüe alors qu’il pourrait le faire en principe plus confortablement dès le départ de la Terre à bord du Starship qui doit de toute façon lui aussi effectuer ce trajet? Si (c’est évidemment un gros “SI”) le Starship tient ses promesses, il pourrait théoriquement prendre en charge les astronautes de la NASA dès leur départ de la Terre, les transporter sur la Lune, les faire atterrir et les abriter durant leur séjour, et enfin les ramener sur notre planète, en utilisant un seul engin spatial plutôt que de faire appel en plus au coûteux lanceur SLS, à la capsule Orion et à la station Lunar Gateway. On peut s’étonner que SpaceX se soit prêtée à une entreprise aussi tarabiscotée, si ce n’est pour profiter de l’opportunité d’obtenir un certain financement public pour le développement de son vaisseau géant.

    1. Merci Pierre-André,
      Il n’y a aucun doute que SpaceX se soit prêtée à cette architecture de mission tarabiscotée pour profiter de financements de la NASA et aussi pour écarter ses rivaux privés (Blue Origin notamment). C’est de bonne guerre, comme on dit.
      Comme je l’écrivais, je doute très fort que l’utilisation du SLS perdure si le Starship peut voler. Disons que, outre le besoin d’arriver sur la Lune avant les Chinois, cela aura sauvé l’honneur de la NASA d’avoir pu mener à terme son projet Ares. Après Artemis 3 (sans Gateway), elle pourra présenter le passage au Starship comme une évolution “naturelle” et elle aura du même coup donné satisfaction aux nombreux fournisseurs dont bien sûr Boeing, qui ont travaillé dur (et pour beaucoup d’argent) sur le projet.
      Il reste effectivement un “SI” à lever, la possibilité du Starship à voler.

  4. Oui, le futur des missions artemis n’est pas défini ni assuré comme une partition de musique. Un beau désordre, des cafouillages, sont les symptômes d’une activité passionnée. Mais comme pour tout ce qui est difficile, nous avons besoin d’avoir le couteau sur la gorge, les Américains comme les Européens. Les Chinois, jusqu’à présent, apportent une saine concurrence. Cependant, respectueusement monsieur BALAND, pouvez-vous prétendre qu’il n’y aura pas un matin, à une date que j’espère très lointaine, où nous nous réveillerons en entendant aux infos qu’un énorme météore nous arrive dessus, qu’un virus va exterminer inévitablement tout le monde, qu’une explosion volcanique va nous plonger dans l’obscurité pour des années ou que des fous se lancent dans une guerre totale? Vous vous placez dans une réflexion à court terme, vous voudriez avoir des certitudes sur l’avenir. Mais comme disait Hugo: “l’avenir est à Dieu”. On peut ne pas avoir l’esprit d’aventure, préférer vivre comme dans le passé ou dans un cocon. Mais on se sentirait mieux si la possibilité d’avoir quelques exemplaires d’humains vivant sur la lune, prêts à redémarrer la vie sur notre planète devenait une réalité. Oui, il faut se donner beaucoup de temps pour l’établissement de colons sur la lune, oui ce sera brouillon, oui il y aura des catastrophes. Mais cela se fera, demain ou dans un siècle. Que l’action des américains soient dictée par des “intérêts politiciens et industriels”, c’est un peu vrai mais respectable. Je ne peux croire que les gens qui travaillent sur ces projets ne soient pas habités par la soif de connaissance, le désir de créer d’apporter leur pierre au destin des hommes, leurs atavismes de pionniers de l’ouest ou la simple recherche de sensations nouvelles qui évitent de tourner en rond. Oui, le passage par la lune est une étape vers mars mais réussir cela, sera plein d’enseignements et nous rassurera pour des voyages lointains… Reste ce foutu problème des rayons cosmiques mais une solution est possible du côté de l’hydrogène qu’on met déjà en poudre.

    1. Si l’on veut des colons sur la Lune, dépenser 23 milliards de dollars pour développer un lanceur obsolète n’est pas le meilleur moyen.

      C’est une réflexion de long terme.

    1. Je serais très heureux, et fier, d’avoir pu contribuer à susciter ou renforcer l’intérêt des jeunes Suisses pour l’espace!
      Pour ce qui est du nouvel astronaute, le Dr Marco Sieber, je pense qu’il a effectivement une chance d’aller sur la Lune, à partir du moment où l’ESA obtiendra un siège pour faire ce voyage à bord d’un des vaisseaux de la NASA. Ce n’est pas encore certain car pour le moment la contribution physique de l’ESA aux vols du SLS (l’European Service Module) est utilisée pour payer la contribution de l’ESA à l’ISS et l’ESA n’a aucun moyen propre de mener seule des vols habités. Mais il serait étonnant que l’ESA ne cherche une opportunité pour participer à cette belle aventure en montant à bord des SLS ou des Starships. Je suis donc confiant que ça évolue favorablement.

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