Si l’on va sur Mars, l’établissement que l’on y créera recherchera inéluctablement son autonomie

Certains de mes amis, partisans comme moi de l’exploration de Mars par vols habités, ne partagent pas mon opinion sur le caractère indispensable et quasiment inéluctable d’un établissement permanent et autonome sur la planète-rouge (du moins autant qu’il lui sera techniquement possible de l’être). Je leur réponds.

Il y a plusieurs raisons de vouloir envoyer des hommes sur Mars. La première ou plutôt la plus immédiate, c’est l’exploration scientifique de la planète. On voit bien qu’avec le décalage temporel résultant de la finitude de la vitesse de la lumière, l’exploration robotique est difficile puisque la distance de 56 à 400 millions de km entre les deux planètes couplée avec les 300.000 km/s de la lumière, impose un temps minimum de 5 à 45 minutes entre l’envoi d’un ordre et le retour de l’information sur Terre rendant compte de ses conséquences. Il en résulte qu’aucune action ne peut être menée en direct sur Mars, contrairement à ce qu’on peut faire sur la Lune. Puisqu’on peut quasiment aujourd’hui envoyer des hommes sur Mars et surtout qu’on devrait pouvoir le faire demain, notamment grâce au Starship d’Elon Musk, une présence humaine représenterait donc un avantage difficilement contestable par rapport à la situation présente, au moins dans ce domaine.

Mais si on va sur Mars, je suis convaincu qu’on aura de plus, intérêt à s’y installer et voici pourquoi.

1) Le premier voyage sera hasardeux et de toute façon dangereux car il n’y aura pas de « comité d’accueil » à l’arrivée. Cela posera problème notamment pour aider les passagers à effectuer les tâches les plus basiques dans le contexte d’une pesanteur retrouvée. Une équipe restant après cette « première » sera plus que bienvenue pour que l’arrivée de la seconde mission se passe dans de meilleures conditions.

2) La mission « n » devra repartir de Mars avant que la mission « n+1 »y parvienne. En effet les départs vers Mars à partir de la Terre ne peuvent avoir lieu que dans une fenêtre d’un mois tous les 26 mois, le voyage dure 8 à 9 mois dans un rapport idéal masse transportée/énergie dépensée (orbite de transfert de Hohmann) mais on peut le réduire à 6 mois en consommant plus d’énergie et en transportant moins de masse, tout en gardant une trajectoire de libre-retour. Ensuite le séjour sur Mars ne peut durer moins de 18 mois (à moins de repartir après deux ou trois semaines seulement mais au prix d’un séjour dans l’espace beaucoup plus long qu’à l’aller, d’un passage périlleux dans l’environnement de Vénus et d’une vitesse plus élevée, dangereuse, à l’approche de la Terre). Et à nouveau le retour sur Terre mettra six mois. On aura donc une mission de 6 + 18 + 6 mois = 30 mois. En clair la mission « n » quittera Mars 24 mois après son lancement mais surtout la mission « n+1 » ne pourra arriver sur Mars qu’après 32 mois (26 + 6). Donc, il ne faut pas rêver, il y aura un hiatus de temps important entre le départ de Mars et l’arrivée de la mission suivante sur Mars. Ceci implique, outre l’absence du comité d’accueil déjà mentionné, l’absence d’une présence pour entretenir les équipements laissés sur place (et les conditions environnementales martiennes sont très dures, selon les critères terrestres).

3) Toute importation depuis la Terre sera impossible entre deux fenêtres de lancements. Il faudra donc disposer de stocks mais surtout faire le maximum avec les ressources locales pour produire les ressources dont on aura besoin. En effet, outre la contrainte des fenêtres, et la nécessité pour certains produits de n’être pas trop vieux pour être consommés, le transport de masse et de volume depuis la Terre posera toujours problème car la capacité d’emport de nos fusées n’est pas illimitée et ne le sera jamais. Je rappelle que le Starship ne pourra transporter que cent tonnes jusqu’à la surface de Mars ; c’est à la fois beaucoup par rapport à aujourd’hui et très peu par rapport aux besoins d’une communauté installée sur place. Il faudra donc développer au maximum l’ISRU (In Situ Resources Utilisation) y compris l’ISPP (In Situ Propellant Production), deux principes mis en évidence par Robert Zubrin au début des années 1990 et repris ensuite par la NASA qui restent incontournables.

L’ISRU servira à produire à partir de matières martiennes, le maximum de produits semi-finis dont on aura besoin, telles que poutres et poutrelles en métal, plaques de verres, plaque de silicium (pour les panneaux solaires) mais aussi matières plastiques, tissus, nourriture, poudres pour les imprimantes 3D (objets divers et pièces de rechange) et, dans la mesure du possible, les machines pour obtenir ces produits ou du moins les éléments les plus massifs dont on aura besoin pour les encadrer, supporter ou protéger.

L’ISPP, ce sera la production à partir du gaz carbonique de l’atmosphère martienne, et le stockage, de méthane et d’oxygène qui seront les ergols utilisés par les fusées interplanétaires (le retour sur Terre !) ou planétaires (pour aller n’importe où sur Mars). Le méthane brûle très bien dans l’oxygène (bonne Isp) et la production des deux gaz utilise une technique éprouvée et facile à mettre en œuvre (réaction de Sabatier) moyennant un peu d’hydrogène (une partie pour dix-huit) que l’on trouvera dans la glace d’eau martienne (électrolyse).

4) Mais ce ne seront pas seulement les produits que l’on ne pourra faire venir de la Terre quand on le voudra, ce seront aussi les personnes. En effet il faudra contrôler les robots, faire fonctionner les machines, surveiller les cultures (algues, poissons, plantes), organiser les constructions, contrôler leur viabilité et leur salubrité. Par ailleurs, les personnes vivant sur Mars seront évidemment le bien le plus précieux de l’établissement. Pour les maintenir en bonne santé, il faudra non seulement disposer de médicaments et d’instruments médicaux divers mais aussi de médecins dans toutes les spécialités possibles. Il s’agira d’abord de chirurgiens car il est quand même délicat de confier son corps à des machines non contrôlées en direct par l’homme, mais aussi des infirmiers pour appliquer les directives de médecins examinant depuis la Terre les diverses données biologiques recueillies sur place. Enfin, les scientifiques venant sur Mars auront besoin de toutes sortes de services techniques, dont en particulier ceux de spécialistes des télécommunications ou d’informaticiens. Et « tout le monde » aura besoin de « bricoleurs », c’est-à-dire d’ingénieurs/mécaniciens/chimistes capables de résoudre un problème apparemment insoluble et qu’on n’aura pas prévu, parce qu’ils auront les capacités intellectuelles et manuelles pour le faire.

Enfin il faudra des services pour s’occuper de toutes ces personnes : des conditionneurs pour les produits alimentaires (pasteurisation, appertisation, congélation, gestion des stocks), des cuisiniers-restaurateurs, des administrateurs, des conseillers financiers, des assureurs, des personnes capables de s’occuper de l’éducation des enfants…ou des défunts.

En fait nous avions calculé avec Richard Heidmann (dans une étude publiée en 2018 dans le Journal of the British Interplanetary Society), qu’une base martienne opérationnelle devrait compter quelques 1000 personnes (y compris environ 500 visiteurs renouvelées à chaque cycle et pourvoyeurs de revenus pour la colonie). C’est sans doute ce qu’il faut envisager « pour tourner » en conditions de sécurité acceptables tout en générant une rentabilité suffisante pour continuer.

Toutes ces personnes nécessaires à l’entretien des hommes et des équipements, c’est à dire au fonctionnement de la base, ne pourront pas venir en même temps que les clients et repartir avec eux. Cela ne serait pas rationnel compte tenu de ce qui a été dit plus haut (entretien des équipements et accueil des nouveaux arrivants) et cela demanderait trop de vaisseaux qui ne pourraient rien transporter d’autre (la recherche de l’autonomie ne veut pas dire qu’on l’atteindra tout de suite ni que des échanges n’auront pas lieu).

5) Un dernier facteur à prendre en considération, lié à la distance, à l’espace et à Mars, est le fait que les hommes qui iront sur Mars devront subir les contraintes d’un long voyage (dans tous les cas plusieurs mois), d’une exposition non négligeable aux radiations spatiales (on pourra en supporter la dose sans problème pour un seul voyage ou deux, mais certainement pas pour cinq ou six), et les conséquences d’une accoutumance à une pesanteur nettement plus faible que sur Terre. Il y aura donc des personnes, spécialistes des sciences martiennes, économiquement intéressées à vivre sur Mars parce qu’ils y auront leur activité et leurs liens sociaux (le boulanger !) ou simplement amoureux de Mars, qui après un premier séjour, décideront de revenir et d’y rester. Ces personnes-là voudront un maximum de confort et de commodités et ils s’efforceront, dans leur intérêt propre, de disposer de tous les équipements nécessaires.

Mars ne sera ni la Station Spatiale Internationale d’où il est possible de revenir en moins de 30 heures, ni l’Antarctique qui, certes peut se trouver isolée mais dont l’isolement ne va durer que quelques semaines ou, au pire, quelques petits mois d’hiver. C’est pour cet isolement que naturellement de plus en plus d’autonomie sera souhaitable voire indispensable pour l’établissement humain sur Mars.

Illustration de titre : la Base Alpha imaginée par Elon Musk, crédit SpaceX

Lecture : The Case for Mars chez Free Press, dernière édition, 2011 (Robert Zubrin, créateur de la Mars Society aux Etats-Unis, marssociety.org)

Pour (re)trouver dans ce blog un autre article sur un sujet qui vous intéresse, cliquez sur:  Index L’appel de Mars 22 06 10

Pierre Brisson

Pierre Brisson, président de la Mars Society Switzerland, membre du comité directeur de l'Association Planète Mars (France), économiste de formation (Uni.of Virginia), ancien banquier d'entreprises de profession, planétologue depuis toujours.

51 réponses à “Si l’on va sur Mars, l’établissement que l’on y créera recherchera inéluctablement son autonomie

  1. Votre article est passionnant, mais – excusez-moi – je trouve que c’est un conte de fée.

    Il y a de forte chance que l’expérience tourne très mal. La concentration d’êtres humains dans des conditions de vie très difficiles (comme vous le dites, sans commune mesure avec un séjour en Antarctique) provoquera à coup sûr des conflits. Il y aura des luttes de pouvoir, des querelles en tout genre qui ne pourront se régler par l’expulsion des fâcheux. Pour être franc, je ne crois pas à votre vision idyllique d’une communauté harmonieuse dans un environnement aussi hostile.

    1. “je ne crois pas à votre vision idyllique d’une communauté harmonieuse dans un environnement aussi hostile” Et pourquoi cela? L’expérience montre que les difficultés “externes” aident souvent une communauté à se souder et à se “serrer les coudes”. Les populations les plus solidaires sont généralement aussi celles qui vivent dans les conditions les plus difficiles. C’est au contraire quand la vie est trop facile que l’on voit les comportements égoïstes prendre le dessus et les conflits naître (chacun voulant encore plus pour lui). Les membres d’une communauté martienne sauront que la survie de tous dépendra du fonctionnement harmonieux de celle-ci et que les comportements égocentriques ne pourront y être tolérés. Bien entendu, on n’enverra pas non plus “n’importe qui” sur Mars mais des gens au profil sélectionné ayant un haut degré d’empathie et une grande capacité de collaboration. Il ne faut quand même pas être trop pessimiste et négatif concernant toute l’espèce humaine!

      1. Une autonomie technique avant une indépendance politique et les premiers conflits inter humains car un homme martien deviendra bien vite ce que l’américain fut au britannique… un étranger.

        1. Vous avez peut-être raison car l’éloignement, les conditions de vie, les problèmes spécifiques susciteront des intérêts différents…mais nous n’en sommes pas encore là.
          Plus que tous les autres groupes humains, les Martiens auront intérêt pendant très longtemps à maintenir de bonnes relations avec les Terriens sauf bien sûr si un accident interrompt ces relations.

    2. Les psychologues peuvent débattre du sujet pendant des années et sortir plusieurs opinions mais la psychologie que l’on étudie depuis plus d’un siècle n’est quand même pas une science nulle.
      On aura certainement un récit palpitant au retour sur l’évolution des relations de ces douze individus entre eux et de leurs relations avec la Terre et on rapportera probablement des désaccords voire quelques conflits.
      Cependant je pense, au contraire de vous, que l’on peut se préparer psychologiquement au voyage, que l’on peut observer le comportement des uns et des autres avant le départ (seuls et ensemble), donc choisir ceux qui sont a priori capables de partir ensemble et de survivre ensemble. Je pense qu’on pourra leur donner des conseils avant de partir et une fois qu’ils seront partis en fonction de profils psychologiques qui seront connus. Je crois que des personnes raisonnables peuvent maîtriser leurs conflits et je ne crois pas du tout que l’environnement qu’ils affronteront sera un facteur suffisant pour empêcher le départ et la réussite de la mission.
      Je pense aussi que l’environnement hostile peut être compris par les personnes qui le subissent et que cela peut faire taire les manifestations d’hostilité et réduire les tensions internes au groupe. Je me réfère notamment à l’histoire des “survivants des Andes”, ces rugbymen uruguayens qui ont survécu dans les sommets andins dans des conditions tout à fait extrêmes, sans se battre.

      1. Faut le faire tout de même comparer une expérience traumatique qui a vu des gens manger des morts et donc vivre dans une condition extrêmement précaire avec mars, faut le faire.

        1. Vous n’avez jamais entendu parler du “worst case scénario”?
          J’utilisais la comparaison pour montrer qu’on pouvait garder le contrôle de soi au sein d’un groupe soumis à des conditions extrêmes, sans que personne au sein du groupe n’utilise de moyens totalitaires pour y parvenir.

    3. Cela serait intéressant de rapprocher mars de terre en propulsant 1 lune dessus.en calculant bien collision pr réduire 53millions km entre 2 planète.ou même ceres.idem pr venus..

      1. Cela, vous voyez, c’est “n’importe quoi”. On ne peut pas jouer avec les planètes comme avec des boules de billard!

  2. Une grande part de l’argumentation citée en faveur d’une autonomie sur Mars repose sur les contraintes des vols depuis la Terre, notamment rareté (points 2 et 3) et exposition aux radiations (point 5). Contraintes auxquelles on pourrait sans doute ajouter coût de ces vols et autres risques : apesanteur prolongée, absence du support médical significatif à bord, etc.

    Ces contraintes, coût compris, découlent in fine d’une seule : la durée de ces voyages. Un transit plus rapide les réduirait, et avec elle le besoin d’une structure permanente nécessairement très coûteuse.
    Or si cette durée se compte aujourd’hui en mois, cela ne découle pas d’une loi de la nature mais des limites des propulseurs (chimiques) actuels. Sur le plan théorique, rien n’exclut des durées de vol réduites à quelques semaines, voire quelques jours. Les solutions sont identifiées : moteurs nucléaires thermiques, nucléaires électriques, magnétoplastiques, photoniques, etc. La question est seulement de savoir quand elles seront disponibles. Apparemment, pas tout de suite.

    Un gouvernement donnant aujourd’hui son feu vert à une mission et peut-être implantation sur Mars devra donc expliquer pourquoi il ne peut pas attendre ces propulseurs qui simplifieraient grandement l’opération. Hors 3ème guerre mondiale déclenchée (et encore …), il n’est pas sûr qu’il sache le faire. Et donc pas sûr qu’il puisse donner ce feu vert.

    1. Comme Monsieur Brisson le sait, je suis un chaud partisan de la propulsion nucléaire, qui me semble effectivement indispensable si on veut un jour voir s’établir une “bouture” de l’Humanité sur Mars. Ce type de propulsion permettra de réduire le temps de transit, mais quand même pas jusqu’à quelques semaines (et moins encore à quelques jours si on ne veut pas basculer alors vers la Science Fiction)! Une autre condition indispensable est donc à mon avis la création d’une gravité artificielle pendant le voyage. Ces deux développements technologiques devraient par conséquent se voir accorder une certaine priorité aujourd’hui, ce qui n’est malheureusement pas suffisamment le cas. Mais comme on dit: “l’appétit vient en mangeant”, si on attend d’avoir à disposition les capacités technologiques idéales pour aller sur Mars, on n’y ira jamais car la motivation sera trop lointaine. Comme dans le défrichement de tous les nouveaux territoires, les premiers pionniers devront se contenter de conditions assez spartiates et aventureuses, qui s’amélioreront au cours du temps avec la dynamique que susciteront ces premières explorations. Il en a toujours été ainsi; les “découvreurs” de l’Amérique n’ont pas attendu la mise au point des Boeings et Airbus pour faire le voyage et ces avions n’auraient pas vu le jour si le goût des voyages lointains n’avait pas été créé par de premiers courageux explorateurs!

      1. Les découvreurs de l’Amérique cherchaient les Indes, puis un Eldorado plus ou moins fantasmé. Dans tous les cas, avec un espoir de retour rapide sur investissement, des coûts somme toute limités, et des bailleurs de fonds ne s’encombrant pas de l’avis de leurs sujets. Quant à l’avion, on n’imaginait même pas qu’il puisse exister un jour : il n’y avait donc aucune raison de l’attendre pour engager ces entreprises.

        Rien de tout cela n’est vrai pour une colonie martienne. Sa justification reste hypothétique, son coût serait faramineux, les gouvernements devront en convaincre les contribuables qui sont aussi leurs électeurs, et nul ne peut prétendre ignorer l’impact inéluctable des progrès de la technique à plus ou moins brève échéance, de l’intelligence artificielle aux propulseurs.

        La comparaison n’est donc pas valide.

  3. Peut-être suis-je trop pessimiste et j’espère que c’est vous qui avez raison. Mais des expériences de confinement sur Terre ont révélé des problèmes importants, sur le plan sexuel notamment (harcèlement d’une participante, fait que les organisateurs ont d’ailleurs voulu camoufler). La nature humaine étant ce qu’elle est je conserve de gros doutes sur cette aventure inédite en tous points. Votre vision s’apparente un peu à celle des communistes qui voulaient créer un “homme nouveau”, et qui n’ont réussi qu’à générer de dociles paresseux. Quant à la primauté du groupe sur l’individu, c’est un scénario qui s’apparente furieusement à des idéologies totalitaires.

    1. Je pense que dans une aventure comme celle-ci, la cohésion du groupe sera très importante. La mission serait mise en forte difficulté si un nombre significatif de membres (à déterminer) ne jouait pas le jeu. Dans un petit groupe chacun a son importance (en dehors de quelques redondances souhaitables) et la coopération est incontournable. Ceci ne veut pas dire que l’individu doive être sacrifié, bien au contraire car c’est en respectant ses membres qu’un groupe est le plus fort et le plus efficace*. Difficile “dosage” je l’admets mais je crois qu’on est très loin du totalitarisme que vous mentionnez.
      *Notamment la vie en groupe n’exclut pas la la consultation des membres et la prises des décisions importantes en commun (c’est comme cela que les “survivants des Andes” ont survécus – je connais bien l’un d’entre eux).

  4. Vous donnez comme objectif premier au voyage vers Mars l’exploration scientifique mais je persiste à penser que faire survivre l’humanité est le vrai but. C’est sur terre que les choses risquent de tourner très mal et très vite. Vous êtes informés de certains discours de responsables russes. On peut faire mine de les prendre pour des extravagances visant à nous faire peur uniquement et “ce qui est excessif est dérisoire”. Seulement, je crains que les Russes soient en train de s’auto-intoxiquer et en viennent à s’aventurer vers leurs rêves impérialistes. “la roulette russe”. Toutes ces armes qu’ils possèdent, leur illusion de puissance, leur désir de tenter le diable et leur mépris des conséquences sont très inquiétants. Alors, ce sera l’hiver nucléaire sur toute la planète Terre. Allons-nous avoir le couteau sur la gorge et être contraints de faire partir des gens pour survivre dans un enfer plus vivable que la Terre? Les survivants martionautes auront le couteau sur la gorge et seront condamnés à s’entendre, à s’entraider. Ils vivront pendant un très long laps de temps dans des conditions terribles, misérables. Pouvez-vous être certains que je suis trop pessimiste? Sur Mars il faudra s’enterrer pour survivre aux radiations, ils auront une vie comme à Montréal avec des sorties pour la recherche de minerais. Ce serait bien d’avoir encore un peu de temps devant nous pour trouver comment fabriquer et stocker de l’antimatière en quantité suffisante pour un vaisseau rapide.

    1. “Ce serait bien d’avoir encore un peu de temps devant nous”, mais l’avons-nous? Je regarde régulièrement ces temps les TV d’état russes (Первый канал en particulier) et, effectivement, on ne sait pas s’il faut en rire ou en pleurer tellement c’est outrancier dans la surenchère guerrière. Le dogme étant qu’on va tout détruire pour pouvoir “repartir d’une page blanche” (sic) et peu importe les pertes, même russes, car: “les Russes iront au paradis, alors que. les Occidentaux, dégénérés et tarés, iront eux en enfer” (re-sic)”. Donc pour que Mars serve de “base de repli” pour une Humanité en risque d’auto-destruction sur Terre, il faudrait que les établissements permanents dont parle Monsieur Brisson existent DEJA. Or on en est encore bien loin, et ce n’est pas dans un climat de conflit généralisé que la priorité va être accordée à ce genre d’entreprise (si même les développements nécessaires ne vont pas être, momentanément en tout cas, totalement arrêtés).

      1. Mars doit-elle servir de “base de repli” pour nous protéger d’une partie de l’humanité décidément devenue invivable (ces dangereux méchants qui jouent à la roulette russe) ou des effets environnementaux résultant d’un nouveau conflit mondial ?

        Si c’est pour la 1ère raison, le problème est qu’on ne voit pas en quoi le transfert d’une planète sur une autre apporterait quelque garantie que ce soit. Il y a des méchants en tout lieu et à toute époque. Caïen s’est manifesté dès la 2ème génération, et après un certain temps les sociétés “idéales” ont toujours tourné au fiasco. M. Jean Vernet évoque plus haut l’échec avéré des expériences de confinement sur Terre, ce qui ne semble soulever aucune commentaire : ne faudrait-il pourtant pas s’en inquiéter ?

        Si c’est pour la 2ème raison, fuir le désastre écologique, en quoi la création ex-nihilo d’une colonie dans un monde aussi lointain et hostile physiquement que Mars serait-elle plus économique que dans quelque coin préservé de la Terre ? Et comme en saurions-nous déjà assurés, sans rien connaître de ce désastre annoncé ?

        Il est à prévoir que ce seront quelques unes des questions de bon sens sui seront posées quand viendra le moment d’engager ou non les investissements astronomiques qu’appelleraient ces travaux préventifs de base martienne, et que les réponses qui leur seront données n’iront pas dans le sens d’une décision positive. Pour un certain temps encore, le rêve d’un Eden martien semble bien utopique.

        1. Il est évident qu’il y a des méchants partout. Mais surtout l’ambiguïté est chez tous les humains. On peut être méchant pour une raison, à un moment seulement etc… Le séjour sur Mars n’apportera rien à ce sujet. Le but est, pour moi du moins, d’établir un établissement servant à la sauvegarde de l’espèce humaine pendant un temps plus ou moins limité. Vous avez vu des textes sur l’extinction des dinosaures, on a beau chercher, on n’a trouvé aucun point préservé des effets du météore. Par contre si de humains sont sur Mars, ils pourront revenir sur terre quand les effets seront terminés, ce qui peut être très long. Dans les circonstances actuelles, je pense plutôt aux bombardements nucléaires. L’Occident (US, Europe…) sera totalement atomisé et on nous rajoutera certainement un supplément pour être bien sûr que rien ne subsiste. Vu les SNLE, les bases dispersées sur le globe, les éventuels avions réchappés, on peut croire que la Russie entière sera aussi atomisée. Et puis ces jolies bombes qui ont coûté tant d’efforts à fabriquer, vous croyez vraiment qu’il n’y aura jamais quelqu’un qui en aura marre de serrer les dents pour être sage, gentil et patient, demain ou dans cent ans? Que se passera-t-il pour les pays qui n’auront pas reçu de bombe? Ils seront aussi irradiés par le déplacement du nuage, sa puissance irradiante, leurs habitants mourront. Sera-ce jusqu’au dernier? Certains pourront-ils survivre en s’enfermant dans des grottes? Je n’y crois pas. Dès lors avoir quelques individus sur Mars pourraient revenir pour repeupler la terre longtemps après. Dans des abris antiatomiques? Tout dépend de la durée de la radioactivité. Je crains qu’elle soit longue et contamine les eaux souterraines donc toutes les cultures où qu’elles soient. Tout le monde reconnaît que le séjour sur Mars pose d’énormes problèmes. On a déjà une petite idée avec le confinement dans les bases antarctiques. Mais ce qui compte essentiellement, c’est la conscience du but de cette épreuve, de son importance vitale. J’ose espérer que, s’il y a des tueries sur Mars, certains pourront soit les arrêter, soit les fuir. Et ils auront des lois avec punitions convaincantes. Quant aux confinements dans des grottes, ils sont très artificiels, l’isolement n’est pas une fin en soi, sinon on cherche un moyen de s’occuper! Mars ne sera pas un Eden mais ressemblera au bout d’épave auquel s’accroche un naufragé pour ne pas mourir, sans lequel le malheureux disparaîtrait noyé. Certains dans ce blog font rêver: “moteurs nucléaires thermiques, nucléaires électriques, magnétoplastiques, photoniques, etc.”. Mais il y a l’antimatière. On sait déjà en fabriquer un tout, tout petit peu. Il faudrait progresser sur ces technologies. Serait-ce utile de poursuivre plusieurs lièvres à la fois? A discuter pour voir ce qui est le plus facile.

  5. Je pense que, quoiqu’il arrive, il faut réfléchir à une solution minimaliste et rapide à mettre en œuvre, c’est-à-dire à une sorte de sous-marin nucléaire petit enfermé dans une grotte martienne et une possibilité de retour vers la terre toute prête ou non. Mr Brisson nous dit qu’il faut un grand nombre de personnes pour faire repartir l’espèce humaine mais un couple sur Mars est l’extrême minimum en cas d’hiver nucléaire.

      1. Je suis d’accord avec Pierre-André Haldi. Nous avons eu Adam et Eve une seule fois. Depuis, la consanguinité pose des problèmes insurmontables. Je crois qu’une population de mammifères en danger d’extinction est condamnée pour des raisons purement génétiques si elle descend en-dessous de 500 individus.

        1. D’autant plus que nous n’avons même PAS eu Adam et Eve, ce n’est qu’une jolie légende! Nous ne savons pas à ma connaissance exactement comment se crée et développe une nouvelle espèce et à partir de combien d’individus. Si c’est vraiment à partir d’un seul couple (dont les deux composantes auraient simultanément subi la même mutation par rapport à l’espèce d’origine?!), il faudrait statistiquement énormément de chance pour que leurs descendants échappent à la dégénérescence génétique.

  6. On pourrait penser à emmener une banque de sperme, d’ovules? L’intervention sur l’ADN avance mais pas encore au point: CRISPR/Cas9. Assurer le succès de cette mission pose d’autres problèmes encore

  7. Cela voudrait dire implanter chez la femme un ovule qui n’est pas le sien. Pas inenvisageable finalement

    1. Ah bon? Jamais entendu parler du don d’ovule?! Maintenant, que cette pratique soit légalement interdite dans certains pays est une autre histoire.

  8. Oui, je connais mal. Les femmes n’ont pas besoin de la présence d’un médecin ou de gros appareillage. Mais durée de conservation du sperme humain congelé: très longue. Durée de conservation des ovules humains congelés: 10 ans selon loi et cela semble poser plus de problèmes. Mais a-t-on déjà repéré des cavernes sur Mars?

  9. Bonjour Monsieur,

    Votre propos est passionnant et ne peut qu’interpeller toutes celles et tous ceux qui sont résolument concernés et intéressés par la science et ses perspectives. Et je suis de ceux-là.
    Les domaines d’études sont si vastes et si variés qu’ils ne pourront que faire progresser les sciences.

    Toutefois, une question ( que les plus enthousiastes trouveront triviale) s’impose à mon esprit.
    Nous vivons une ère fort complexe, mêlant de nombreuses incertitudes et de nombreux enjeux. Sans être exhaustif, crise sanitaire, crise climatique, possible crise économique, crise alimentaire, crises démocraties versus autocraties ou théocraties……et maintenant une guerre aux implications considérables.

    Ma question, de profane, est strictement logistique. À l’heure de ces bouleversements et des coûts financiers qu’ils impliquent, ils semblent déjà difficile de tout assumer. ( Sans parler de résoudre)

    La conquête de Mars est-elle un objectif tenable d’un point de vue budgétaire ? Réaliste financièrement ?
    N’avons-nous pas quelques urgences bassement terrestres auxquelles nous ne semblons déjà pas en capacité de répondre ?

    Ma question n’est pas polémique. J’espère un éclairage. Le coût est-il calculé par les spécialistes, et opportun ?

    Vous remerciant,

    1. Je pense qu’on ne peut consacrer toutes les ressources de la Terre à l’ensembles des “urgences bassement terrestres”. Certaines personnes ne pourraient y contribuer car elles ne sont pas formées pour cela et il est fort douteux qu’il y ait suffisamment d’objets à tous les stades de leur développement qui pourraient avancer moyennant finance et travail. Dans toute recherche, dans tout développement il y a des goulots d’étranglement et cela ne sert à rien de dépenser davantage pour les surmonter. Pensez à la guerre en Ukraine. Vous voyez bien que le monde entier ne peut s’arrêter de tourner sous prétexte que cette guerre se déroule sous nos yeux. Certaines personne peuvent y faire quelque chose, d’autres non.
      Par ailleurs, si vous voulez définir des priorités, qui va le faire? Selon quels principes? Si vous m’interrogez ou si vous interrogez Elon Musk, nous vous dirions qu’installer l’homme sur Mars est une priorité car nous considérons que nous avons besoin d’une planète-B, que Mars pourrait être cette planète et que nous devons entreprendre cette installation sans attendre, compte tenu des dangers qui menacent d’extinction la civilisation technologique actuelle.
      Les montants à considérer pour l’installation de l’homme sur Mars sont importants mais ne sont pas énormes selon les standards actuels. Plusieurs experts les ont chiffrés à une cinquantaine de milliards, dépensés sur 30 ans. Vous pouvez retrouver le détail de l’évaluation dans plusieurs de mes articles de blog (voir index). Mais bien sûr plusieurs évaluations sont possibles. On peut aller aux Etats-Unis en bateau à voile ou en Boeing 747.
      En fin de compte si je crois que l’impulsion et une bonne part du financement doivent venir de personnes privées (Elon Musk, Jeff Bezos…) c’est que les sommes en cause peuvent être, sans difficultés insurmontables, réunies par ces personnes, sans attendre les décisions des Etats qui sont soumis à toutes sortes de contraintes ou de pressions qui peuvent entraver leur décision.

      1. Bonsoir Monsieur, et merci pour votre réponse.

        Je suis navré de n’être point aussi visionnaire que vous, ou qu’Elon Musk et Jeff Bezos.

        Je n’ai pour autant jamais prétendu qu’il fallait définir des priorités, pas plus que je ne sais qui pourrait les définir, et selon quels critères. ( Messieurs Musk et Bezos seraient-il du reste légitimes à le faire ?)

        Vous dîtes que l’hypothèse d’une planète-B est une priorité .
        Cette hypothèse fait-elle consensus dans la communauté scientifique ?

        Les montants annoncés pour ce projet font-ils consensus ?

        Peut-on craindre qu’il y ait dans cette quête passionnante, de ces emballements que l’on observe parfois dans le secteur des nouvelles technologies ( où certains résultats ne sont pas la hauteur des budgets investis, n’offrent pas les avancées vantées comme évidentes, et se résument à un engouement lié à un joli récit dans l’air du temps )?

        Je me pose des questions simples qui n’appellent finalement pas de prosélytismes pour ou contre l’installation sur Mars.
        Juste des éléments pour comprendre, sachant parfaitement que science, recherche et scientifiques sont déjà vastement à l’oeuvre devant les urgences de notre planète.

        Vous remerciant,

    2. On ne peut en effet pas consacrer toutes les ressources de la Terre aux seules “urgences bassement terrestres”, et du reste on ne le fait pas : l’humanité consacre d’énormes budgets à la science et la recherche. Il n’en faut pas moins définir des priorités parmi ces investissements de longue haleine. Et l’on ne voit pas aujourd’hui de gouvernements ou d’organisations internationales plaider pour l’établissement prioritaire d’une colonie martienne. Ce projet reste pour l’instant au stade de l’agitation médiatique de quelques sociétés (ou milliardaires) et de discussions de salon comme la nôtre.

      Pour ce qui est du coût, le montant cité de 50 milliards sur 30 ans correspond au bas de la fourchette. Très peu y croient dans l’industrie spatiale, où les estimations sont plutôt 20 à 50 fois plus élevées. Et historiquement, les devis spatiaux (même en haut de fourchette) ont toujours été dépassés. De toute façon, même à 50 milliards, l’investissement des Etats semble nécessaire : E. Musk n’est pas riche à ce point. Il n’est d’ailleurs pas sûr qu’il y ait beaucoup de personnes privées réellement prêtes, le jour venu, à renoncer à tout pour s’enfermer dans ce qui s’apparente tout de même à une prison aseptisée …

      1. Elon Musk est en train de consacrer 40 milliards à l’achat de Twitter et installer l’homme sur Mars est le rêve de sa vie. Donc je crois que vous sous-estimez l’envie et les capacités de certains à mener ce projet à son terme. Par ailleurs, je suis banquier et je sais que ces projets sont rarement le fait d’un seul homme. Les financements, ça se montent. Il y a des leaders, des garants, des participants. Il y a suffisamment de personnes déterminées aux Etats-Unis pour que le projet réussissent sur le plan financier. Ce qui manque encore c’est la finalisation technologique. Ce sera différent quand le Starship pourra voler.
        Je ne vais pas reprendre ici le décompte des sommes nécessaires. Mais je persiste à dire que 50 milliards n’est pas un chiffre trop bas. Les mêmes personnes qui se moquent de ces prévisions ne croyaient pas un instant que les lanceurs pouvaient être récupérables et que le prix d’un lancement pouvait être divisé par 10. Elon Musk l’a fait.

        1. L’installation de l’homme sur Mars est le rêve de beaucoup de personnes, mais on ne s’en rapprochera qu’en distinguant entre rêve et réalité.
          Musk a effectivement montré la possibilité de réduire le coût de l’accès à l’orbite basse, quoique dans un rapport 2 plutôt que 10 et sans publier de chiffres sur la rentabilité de ses fusées récupérables. Cela ne signifie pas qu’il aurait raison pour les lanceurs superlourds et Mars, domaine où il n’a à ce jour rien démontré. Il annonce par ailleurs occasionnellement que sa société Space X est au bord de la faillite.
          Le programme Artémis qui consiste à déposer 2 personne sur la Lune pendant 6 jours est aujourd’hui budgété à 30 milliards de dollars, hors développements SLS et Orion (du même ordre de grandeur). Et même à ce coût, de gros doutes subsistent sur sa faisabilité. Cela donne une idée de ce que nécessiterait l’installation permanente, incomparablement plus complexe, de centaines de personnes sur Mars 1000 fois plus loin. L’estimation que vous rappelez ne s’appuie pas sur des offres fermes ou des calculs validés par un organisme indépendant, mais sur des déclarations qui n’engagent personne et semblent plutôt relever de la publicité (pour Space X ou son propriétaire).
          La levée de fonds pour Twitter n’est pas pour un investissement à fonds perdus mais pour une machine a cash. Le contexte est donc différent.

          1. L’installation de l’homme sur Mars ne devrait pas être le fruit d’un investissement à fonds perdus. Si c’était le cas, elle ne pourrait pas être pérenne. Non! Les personnes qui iront sur Mars devront produire des richesses ou dépenser celles qu’ils auront produites sur Terre.
            Pendant longtemps la première source de revenus des Martiens ou des personnes ayant investi sur Mars, sera la vente de séjours sur Mars (pour toutes sortes de raisons, y compris la Science) et des services qui vont avec. Croyez-moi, il y aura des clients et après une phase de lancement, il y aura un retour sur investissement positif, notamment avec le nombre qui grossira avec le temps et qui permettra des économies d’échelle.
            Ceci dit, je suis aussi certain que vous ne serez pas convaincu car vous avez décidé par principe, de ne pas l’être.

  10. “Cela vous voyez, c’est n’importe quoi”, cela s’applique aussi parfaitement à la volonté de reproduction sur Mars de la complexité infinie de la vie sur terre.
    Rien que survivre à un aller-retour sur Mars se fera au mieux au prix d’une nettement moins bonne santé au retour, vous le dites vous-mêmes.
    Quant à la recherche scientifique, comme le disait Barack Obama, son avenir se situe dans l’exploration des 2 kg de graisse que nous avons entre les 2 oreilles.
    “Que servirait-il à un homme de gagner l’univers, s’il venait à se perdre lui-même et à causer sa propre ruine ?”

  11. Bonjour Monsieur,

    Je ne sais si , “par principe”, certains ne sont pas nécessairement “convaincus”, mais je vois que vous,vous l’êtes, et particulièrement par le projet d’Elon Musk ( et même par son idée de développer le tourisme sur Mars ).
    Souffrez que d’autres puissent être à la fois enthousiasmé(e)s par la science et par Mars, et développer aussi une interrogation critique plus prudente à l’endroit de Monsieur Musk. (Certains peuvent même bien le connaître personnellement et émettre des réserves fondées)

    Des clients, on en trouve, pour tout et n’importe quoi du reste.
    je vous crois donc aisément, il sera facile d’en convaincre car séduire des clients est chose très courante, même pour les produits les plus improbables. Marketing, modes, egos et autres enthousiasmes sont là pour alimenter ces démarches d’achat.

    Cela suffit-il à donner une légitimité non négociable à cette aventure ?

    Et surtout, cela apportera-t-il avec certitude une faisabilité financiere au projet ?

    1. Qui donne une légitimité à telle ou telle action? Ceux qui l’entreprenent et qui peuvent l’assumer financièrement.
      La morale pourrait également être à considérer mais je ne vois pas au nom de quel principe moral une telle action pourrait être contestée. Si elle l’était je ferais objection et on se retrouverait dans la première considération (capacité à mener à bien le projet).

      1. Dans mon message précédent, par « fonds perdus », je n’entendais pas en pure vanité, mais sans espoir de rentabilité à quelques années au contraire d’une acquisition comme Twitter. On ne peut donc comparer les deux.

        Par ailleurs, je n’accuse pas d’obstructionnisme quand une opinion diffère de la mienne. Et crois mes intervention argumentées et non réduites à des affirmations “de principe”.

      2. “Qui donne une légitimité à telle ou telle action? Ceux qui l’entreprenent et qui peuvent l’assumer financièrement”.

        L’argument se veut certainement cynique et pragmatique, donc imparable.
        Il est en tout cas facilement catégorique et réducteur.

        Mais fort heureusement il y a eu des cas où l’esprit d’entreprendre et les moyens de le faire n’ont pas suffit à légitimer un projet. Fort prudemment, des remparts, souvent fragiles je le concède, ont été conçus pour modérer, non le progrès, mais des soifs inextinguibles ou des ambitions.

        Par ailleurs,je n’ai jamais employé le mot “morale” pas plus que je n’y ai pensé. Qui serais-je pour le faire ?

        Mais je ne vois pas de réponse argumentée au lien possible entre tourisme et faisabilité financiere . Je n’ai que l’espoir d’apprendre.

        Je respecte vos convictions, vos visions et vos espoirs.
        Puisse tout ceci trouver sa cohérence au bénéfice de tous.

        Dans l’acceptation sereine de la contradiction, du débat, des questions et des doutes des autres.

        1. Avec mon “collègue”, Richard Heidmann, polytechnicien et fondateur de l’Association Planète Mars, le membre français de la Mars Society, nous avons fait des calculs aussi précis que possible. De ces calculs il ressort qu’un voyage aller et retour sur Mars pourrait, à l’horizon vingt cinq ans (dix fenêtres de tirs) après le vol du premier Starship et avec une population de 1000 habitants sur place (avec des retours et des allers), ne couterait qu’un million de dollars (pour l’acheteur). Somme à laquelle il faudrait ajouter diverses dépenses de “fonctionnement” très variables selon l’activité de la personne concernée. Mais on pourrait vraisemblablement faire un séjour de 30 mois (voyage et séjour sur la planète compris) pour moins de deux millions de dollars. Pour référence un séjour dans l’ISS (voyage compris) coûte environ 50 millions de dollars (pour l’acheteur).
          Il y a un marché pour cela car beaucoup de gens seraient près à payer cette somme pour cet objet. Je les appelle “touristes” mais la plupart irait pour faire autre chose que se promener. J’ai développé le sujet dans plusieurs de mes articles de blog. Voyez l’index.
          NB: j’ai développé le point “légitimité” (un peu sec) après un premier envoi. Vous le trouverez ci-dessous.

          1. Si quelqu’un propose ce prix, il faut l’accepter de suite.

            En bon commerçant, on peut même ensuite le réduire à zéro : il suffirait, sur le chemin, de faire un stop sur la Lune refacturé 30 milliards à la NASA, le prix d’Artémis pour 2 personnes.

            Il ne reste plus aux industriels qu’à confirmer …

          2. Ne vous moquez pas! Personne ne proposera ce prix avant que les premiers vols tests du Starship aient été effectués avec succès et vous le savez très bien. Il n’est donc évidemment pas question de le proposer maintenant. C’est une estimation compte tenu de toutes sortes de paramètres que je ne veux pas discuter ici car ce n’est pas le sujet de mon article de cette semaine. Vous ne l’avez peut-être pas remarqué mais ce sujet c’est l’autonomie d’une collectivité martienne.
            Je suppose, ici, que le coût du voyage devienne abordable rapidement si le Starship est finalisé et il y a de très bonne raisons de l’espérer. Autrement la discussion sur l’autonomie n’aurait pas d’objet. Mais rien n’interdit de l’évoquer.
            Vous voulez me tourner en ridicule mais c’est vous qui l’êtes en voulant absolument m’engager dans cette discussion de manière superficielle.

          3. Je ne résiste pas au plaisir de répondre à votre remarque sur le prix d’une mission martienne dont le coût serait réduit à zéro du fait d’un voyage sur la Lune facturé trente milliards pour deux personnes.
            Cette remarque est proprement absurde. Comment pouvez-vous comparer le prix d’un vol expérimental (donc sur vaisseau unique) couvrant tous les frais de recherche et de construction préalables, au prix d’un vol devenu presque régulier sur des vaisseaux spatiaux largement réutilisables et qui serviraient à un maximum de voyageurs (sans doute pas cent comme l’espère Elon Musk mais peut-être une vingtaine)?!
            Par ailleurs, votre idée de faire un stop-over sur la Lune et donc de descendre dans un nouveau puits de gravité pour en remonter presqu’aussitôt alors que l’on vient de s’affranchir de la pesanteur terrestre, pour aller faire (quoi?) sur la Lune, me parait hautement fantaisiste. Dans ces conditions vous allez effectivement dépenser des fortunes. Dans cette hypothèse je crois que les industriels se régaleraient mais je ne pense pas qu’ils puissent le faire sur plusieurs vols car il n’y aura plus aucun client, sauf peut-être la NASA (qui ne me semble pas très économe de ses deniers quand elle paye des fournisseurs qui représentent beaucoup d’emplois).

          4. Merci pour cette réponse.

            J’espère vivement que le programme scientifique et humain de vos éminents coreligionnaires est aussi prometteur que votre étude de marché.

            Je leur poserai donc la question. Tout comme je lirai plus avant vos autres interventions.

            Pour recentrer, l’autonomie d’une collectivité martienne me passionnerait certainement, ne serait-ce que d’un point de vue sociologique et psychologique, l’entente entre “colons” faisant certainement partie des sujets de recherche.

            Et l’entente entre les humains est un exercice délicat. Très délicat. Le déplacement le résoudra-t-il ?

            Vous souhaitant le bonsoir Monsieur !

  12. Je ne me moque pas.

    J’essaye de faire comprendre qu’on ne peut pas mettre sur un même plan des chiffres livrés dans des congrès à des fins médiatiques (et les extrapolations qui en découlent), et ce sur quoi les industriels sont prêts à s’engager, c.à.d le monde réel.

    Quand on constate un rapport 20 entre les deux, il ne faut pas l’occulter. Il faut traiter les premiers avec prudence et raisonner aussi en tenant compte des seconds. C’est ne pas le faire qui serait superficiel.

    Ces remarques s’appliquent bien à l’autonomie d’une base martienne, dont le coût, notamment du voyage, est un paramètre essentiel.

    1. Je suppose dans cet article que le coût du voyage plus séjour sur Mars sera acceptable et qu’il y aura des gens qui pourront se les payer. Si dans l’avenir cette hypothèse ne peut être confirmée, évidemment qu’il ne sera pas question d’autonomie. Mais encore une fois ce n’est pas le sujet de cet article. J’en ai écrit d’autres ou je présente les raisons de considérer que le coût du voyage sera acceptable. Je ne veux pas tout mélanger. Si mon hypothèse d’aujourd’hui ne vous plait pas, il n’y a pas de discussion possible.

  13. Et rebelotte pour la colonisation de la planète rouge !
    Si on peut envisager des missions prolongées sur Mars, pour l’instant ,c’est le cas le plus optimiste que l’on peut considérer..
    Ensuite, cela dépendra des expériences accumulées et de la situation socio-économique sur Terre, dont dépendra la suite des opérations… l’autonomie totale n’étant pas envisageable avant des siècles …
    Il ne faut pas brûler les étapes et de toutes manières, nous avons le temps d’accomplir ces missions , aucune échéance à respecter …dans mille ou cent mille ans , peu importe …
    Il a fallu 100 mille ans à l’homme pour quitter l’Afrique, encore 100 mille pour gagner l’espace , alors ce ne serait pas illogique de penser qu’il faudrait 100 mille ans de plus pour occuper une autre planète…

    1. Personne n’investira jamais ni temps ni argent dans un projet dont l’horizon de réalisation serait 100 mille ans. Au-delà de quelques décennies au plus, aucun projet de développement n’est viable, et il n’y a en conséquence aucune motivation à commencer à simplement entreprendre quoi que ce soit. Ce qui a fait le succès du programme Apollo c’est le génial “We choose to go to the Moon IN THIS DECADE” du Président Kennedy. Aurait-il déjà ajouté ne serait-ce qu’une décennie supplémentaire que ce programme aurait sans doute avorté en cours de route (ne serait-ce qu’en raison de l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle administration du parti opposé comme on en a eu d’abondants exemples encore récemment précisément dans le domaine spatial).
      Et par ailleurs, ce n’est pas nécessaire. Nous avons plus à disposition les techniques et connaissances pour aller sur Mars aujourd’hui que ce n’était le cas en 1962 pour aller sur la Lune quand le Président Kennedy a précisément prononcé le discours cité ci-dessus. Bien sûr, les conditions des premières expéditions seront assez spartiates (on n’est pas allé “aux Amériques” au début en Boeing ou Airbus, comme je l’ai déjà mentionné plus haut!), mais elles s’amélioreront au fil du temps, poussé par la dynamique créée par ces premières explorations, comme les “steamers” ont remplacé les premières inconfortables caravelles, puis les avions ces derniers, grâce au progrès technique et en réponse à une demande croissante d’effectuer de tels voyages. Attendre d’avoir réuni les conditions “optimales” pour entreprendre de nouvelles explorations, c’est repousser celles-ci aux Calendes grecques et ne jamais les voir se réaliser!

  14. “Enfin il faudra […] des personnes capables de s’occuper de l’éducation des enfants…”

    On relève avec intérêt cet “enfin” au sujet des personnes chargées des tâches éducatives. Après tout, avec la dévalorisation systématique du métier d’enseignant(e), quoi d’étonnant si leurs collègues expatrié(e)s sur Mars viennent en toute dernière fin de série après assureurs, conseillers financiers, administrateurs, cuisiniers-restaurateurs, gestionnaires de stocks et autres experts ès congélation, appertisation et pasteurisation?

    Encore heureux qu’il n’ait pas été question de police martienne, car entre flic et prof, on ne sait pas ce qui est pire. Flic, c’est meilleur pour l’image de marque, d’après Claude Duneton.

    On peut aussi supposer qu’au contraire des dix genevois envoyés par Calvin chez les Topinambous d’Amazonie pour dresser le bon Sauvage selon les normes de son Académie, les futurs pédagogues de l’espace n’auront pas à chercher leurs ouailles parmi la population indigène, et donc pas à craindre d’en être mangés, scalpés ou écorchés vifs.

    En revanche, s’il est un trait de caractère qu’ils pourraient avoir gardé de Gaïa, leur Terre originelle, n’est-ce pas celui de l’art de la “disputatio”? Les dix envoyés de Calvin au Brésil, à peine débarqués et alors que leur premier souci aurait dû concerner leur survie dans un milieu hostile, n’avaient-ils pas eu qu’une chose en tête: se disputer avec l’envoyé du roi de France Villegagnon et sa faction catholique déjà sur place sur l’interprétation de la Cène? De même, ne peut-on pas craindre que les futurs pédagogues de l’espace, plutôt que de se préoccuper de leur survie, seront tentés de se perdre en débats interminables sur la meilleure approche pédagogique à adopter dans l’élevage des petits martionautes?

    Faudra-t-il leur appliquer une méthode socio-constructiviste, générative transformationnelle ou skinnerienne? Piagetienne ou Vigotskyste? Holistique ou autoritaire et normative? Centrée sur l’élève ou sur le prof? Et qui va décider des programmes et méthodes à adopter – l’Instruction publique ou l’école privée? Cesla Amarelle, promue conseillère pédagogique de la “Mars Society”, ou Elon Musk?

    A voir combien ce genre de débat ne cesse de diviser l’école depuis Socrate – le divin fripon “inepte ès tous offices de la res publicque” que décrit Rabelais dans le prologue de son “Gargantua” n’avait-il pourtant pas trouvé la formule idéale et la plus économique possible avec son “gnôti té auton” – connais-toi toi-même (et après débrouille-toi, car moi je t’ai donné la recette et maintenant je me tire), la future école martienne promet d’alimenter les causeries de chaumières pendant encore quelques années-lumière.

    Sauf si Elon Musk impose sa méthode à lui – par exemple en obligeant les enseignant(e)s d’expliquer à leurs élèves que les pyramides d’Egypte ont été construites par les extra-terrestres… Là, alors, y aura-t-il encore quelque possibilité de se disputer?

    1. Au début de l’installation de l’homme sur Mars, il y aura en effet peu d’enfants. Bien sûr il faudra s’en occuper et bien s’en occuper mais la première tâche sera la survie de la communauté (petite) d’où la priorité donnée ici aux techniciens.
      Quant aux policiers pourquoi pas. Je n’ai pas votre dédain/mépris de la fonction. Le milieu viabilisé sera très fragile et exposé à toutes sortes de défaillance. Dans ce milieu la (bonne) conduite des habitants sera très importantes (c’est à dire vitale) et oui, il faudra une surveillance.
      Pour le contenu de l’éducation, j’opte pour les bonnes vieilles méthodes, “très réac”. Ce qui compte c’est que dans ce milieu il y aura énormément de gens éduqués (surtout ingénieurs évidemment mais aussi scientifiques divers, planétologue, biologistes, médecins…) et que donc les enfants disposeront de tous les atouts nécessaires pour apprendre intelligemment ce dont ils auront besoin.

      1. Merci pour votre réponse. La formule “entre flic et prof, on ne sait pas ce qui est pire” et ce qui suit est maladroite, je vous l’accorde. Elle n’est pas de moi mais, comme indiqué, de Claude Duneton, ancien enseignant et auteur (1935-2012). Je l’ai citée de mémoire, car je n’avais pas le texte originel sous les yeux. Après vérification, le voici:

        “Flic ou prof, qu’est-ce qui est pire? Flic, c’est meilleur pour l’image de marque, paraît-il”.

        Désolé si ma citation bancale a prêté à équivoque (je ne suis pas certain que le métier de policier soit plus enviable ni plus facile que celui d’enseignant. Je serais d’ailleurs bien le dernier à le mépriser ou avoir du dédain pour lui, tout au contraire).

        Ceci dit, on voit en effet mal comment une communauté dont la survie même dépendra en grande partie de la conduite de ses habitants pourrait se passer d’une autorité de surveillance, aussi “policés” et bien formés ses habitants soient-ils. Peut-être le sujet d’un prochain blog?

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