Pour la NASA d’aujourd’hui, le succès n’est pas une option

L’approche par la NASA des vols spatiaux habités met hors de portée l’objectif de l’atterrissage sur la Lune en 2024. Son projet de Lunar Orbital Platform-Gateway est une complication plus qu’inutile, donc une erreur.

Article de Robert Zubrin, ingénieur en astronautique, président-fondateur en 1998 de la première Mars Society, aux Etats-Unis, et président de Pioneer astronautics. Il a été publié dans la National Review le 12 juin 2019. Il est ici traduit et commenté par moi-même.

L’administration Trump a proposé une nouvelle initiative audacieuse, nommée Programme Artemis, qui prévoit d’envoyer des astronautes sur la Lune en 2024 et sur Mars en 2033. Comme l’a précisé Jim Bridenstine, administrateur de la NASA, dans une présentation le 23 mai, ce programme doit comporter quelque 37 lancements d’ici 2028. Ils commenceront en octobre 2020 par le lancement inaugural du SLS (Space Launch System), le nouveau lanceur lourd de l’agence.

Malheureusement le programme tel qu’il est prévu actuellement a très peu de chances de réussir car il semble être conçu d’abord pour servir de mécanisme de distribution de fonds plutôt que pour atteindre des objectifs dans l’espace. On l’a compris très clairement lorsque Bridenstine a déclaré qu’une des conditions de base du programme serait que toutes les missions habitées utilisent le SLS et la capsule d’équipage Orion, qui n’ont encore jamais volé, plutôt que des alternatives beaucoup moins chères qui, elles, ont volé. De plus, avec ses 26 tonnes, l’Orion est si lourd que le SLS ne pourrait pas le transporter sur une orbite lunaire basse avec suffisamment d’ergols pour pouvoir revenir sur Terre. Donc, plutôt que d’utiliser le Dragon de SpaceX (qui avec ses 10 tonnes, offre cependant un espace habitable 50% plus grand que celui de la capsule utilisée par le programme Apollo pour la Lune), une capsule que le SLS ou le Falcon Heavy (déjà opérationnel et beaucoup moins cher) pourraient transporter sans problème (150 millions de dollars contre plus d’un milliard de dollars – pour le SLS – par lancement), la NASA propose de construire une nouvelle station spatiale, nommée Deep Space Gateway (ou plus récemment Lunar Orbital Platform-Gateway), en orbite haute autour de la Lune, en tant que base intermédiaire entre la Terre et la Lune pour Orion. La NASA tente de justifier la Gateway avec des platitudes telles qu’ « elle fournira un centre de commandement», «elle créera de la résilience» ou encore «elle établira une présence stratégique autour de la Lune». Mais cela n’a aucun sens ! En réalité, le fait est qu’une station spatiale en orbite lunaire est un passif et non un actif. On n’en a pas besoin pour assister les vols à destination de la Lune et on n’en a certainement pas besoin, contrairement à ce que prétend la NASA, comme base intermédiaire pour les vols à destination de Mars. Cela coûtera une fortune à construire et une fortune à entretenir et cela imposera de nombreuses contraintes négatives – allant de significatives à sévères – en termes de propulsion et de gestion du temps, à toute mission obligée de s’en servir – comme elles le seront sûrement toutes pour éviter que l’inutilité de Gateway apparaisse évidente au Public.

La NASA a eu raison de choisir le pôle sud de la Lune pour son atterrissage puisque les ressources en glace d’eau qui s’y trouvent pourraient être transformées en carburant/comburant hydrogène/oxygène. Cela pourrait permettre aux véhicules d’excursion lunaire d’explorer la Lune ou de décoller et de revenir directement en orbite terrestre, où ils pourraient être facilement ravitaillés en carburant. Cela rendrait l’ensemble du système de transport pleinement réutilisable donc beaucoup plus performant et économique. Cela libérerait également nos capacités de transport lourd de la partie la plus massive du service logistique lunaire et nous permettrait par ailleurs d’entreprendre plus rapidement des missions vers Mars. Mais placer la base en orbite lunaire plutôt qu’à la surface de la Lune rendrait ces ressources potentielles inutiles, car il faudrait plus d’ergols pour hisser la glace jusqu’à la Gateway, qu’on pourrait en produire à partir de la glace en surface. De plus, comme elle gaspille des milliards de dollars pour des motifs purement politiques, pour la construction de la Gateway et le lancement d’un vol SLS à l’automne 2020 sans aucune charge utile significative, la NASA n’a plus suffisamment d’argent pour financer le développement d’un atterrisseur lunaire – ce qui est réellement nécessaire si on souhaite atterrir sur la Lune. L’agence a donc demandé une augmentation de son financement, ce à quoi la Maison-Blanche a répondu avec un baiser de mort – c’est-à-dire une exigence selon laquelle les fonds doivent provenir d’un budget éducatif (le « Pell Grants ») dont le montant doit être alloué par le pouvoir législatif. Cela garantit le rejet du Congrès puisqu’il est sous contrôle démocrate.

Apparemment, le succès n’étant pas une option, la priorité est d’attribuer le blâme à « quelqu’un ».

L’ingénierie est l’art de rendre l’impossible possible. La bureaucratie est l’art de rendre le possible impossible. En choisissant la bureaucratie plutôt que l’ingénierie, les planificateurs de l’administration américaine ont transformé l’exploration de l’espace par l’homme, de « mission » en « vision ».

La question est fondamentalement la suivante: la NASA aura-t-elle un plan axé sur un objectif ou un plan axé sur l’intérêt de ses fournisseurs? Un plan axé sur des objectifs conduit à dépenser de l’argent pour « faire des choses ». Un plan axé sur des fournisseurs conduit à faire des choses pour dépenser de l’argent. Au cours du demi-siècle suivant la fin du programme lunaire Apollo les programmes d’exploration planétaire robotique ainsi que ceux d’astronomie spatiale de la NASA ont accompli des performances extraordinaires, car ils sont restés axés sur des objectifs. En revanche, le programme NASA de vols habités spatiaux est devenu très vite axé sur l’intérêt de ses fournisseurs et on l’a laissé dériver. Si nous laissons la NASA persister dans ce mode, nous n’atteindrons pas la Lune en 2024 ni Mars en 2033. Mais si nous insistons pour que notre programme spatial dans son ensemble vise des objectifs précis, exploitant pleinement les ressources spatiales pour réduire le nombre de lancements et la révolution spatiale des entreprises pour réduire drastiquement leurs coûts, nous pourrons non seulement atteindre ces objectifs longtemps espérés mais encore les dépasser largement pour véritablement commencer l’histoire de l’humanité en tant qu’espèce multi-planétaire.

Tel est le choix devant nous.

Robert Zubrin

Commentaire de Pierre Brisson :

Robert Zubrin veut corriger le programme d’exploration de l’espace par vols habités de la NASA et il a raison. Il est très décevant de constater que cette magnifique machine qu’est la NASA, dotée d’excellents ingénieurs, d’excellents chercheurs et de (relativement) beaucoup d’argent, persiste à ronronner prudemment en termes de vols habités.

Les raisons sont probablement en grande partie, l’institutionnalisation d’une entreprise qui était aventureuse lors de sa création et qui à force de grossir et de dépendre d’une direction très politique, est devenue une administration comme une autre, c’est-à-dire un organisme qui pense avant tout à sa survie c’est-à-dire qui est devenu « risk-adverse », ce qui est un comble pour une entreprise supposée couvrir l’entièreté du sujet de l’exploration spatiale, c’est-à-dire aussi un organisme inséré dans un tissu économique, social et politique qui la force à soutenir les entreprises locales en les faisant travailler quels que soient les besoins dictés par la finalité qui devrait éclairer la vision de ses dirigeants, l’exploration spatiale, par vols habités aussi bien que robotiques.

Heureusement l’Amérique dans son tréfonds et dans son imaginaire, reste l’Amérique, c’est-à-dire le pays de la Nouvelle Frontière, le pays de l’entreprise, le pays de la liberté et de l’audace. Pour l’exprimer, davantage que son administration qui se fossilise, il y a les entrepreneurs privés, les Elon Musk, les Jeff Bezos et autres, pour lesquels même le ciel n’est pas la limite. Ce sont eux qui en fin de compte vont tout emporter et nous conduire sur la Lune et sur Mars parce qu’ils ont la volonté de le faire et parce qu’ils en ont les moyens financiers.

image à la Une: Orion approchant le Deep Space Gateway, crédit NASA.

Pour (re)trouver dans ce blog un autre article sur un sujet qui vous intéresse, cliquez sur:

Index L’appel de Mars 19 06 14

Le dernier livre de Robert Zubrin, “The Case for Space, how the revolution in spaceflight opens up a future of unlimited possibilities” a été publié chez Prometheus books le 11 juin.

Pierre Brisson

Pierre Brisson, président de la Mars Society Switzerland, membre du comité directeur de l'Association Planète Mars (France), économiste de formation (Uni.of Virginia), ancien banquier d'entreprises de profession, planétologue depuis toujours.

15 réponses à “Pour la NASA d’aujourd’hui, le succès n’est pas une option

  1. Et si l’Europe, de son côté, se décidait aussi à avoir enfin un programme spatial habité propre, digne de l’importance politico-économique qui reste malgré tout encore la sienne? Même si cela doit passer initialement par la mise en place d’un “village lunaire”, mais alors cessons de seulement en parler (avec de beaux dessins!) et mettons-nous à la tâche résolument et rapidement!

  2. Si Zubrin a raison de montrer l’absurdité d’une station orbitale autour de la lune, il n’empêche que le besoin d’une station existe.

    Dans tous les cas de figure, il faut changer de véhicule entre la terre et la lune, cela implique de laisser toujours au moins un véhicule en orbite. Et si l’on prend le Crew Dragon de SpaceX utilisé par Zubrin dans sa démonstration, on voit que ce vaisseau a une autonomie de 7 jours en mission et de 6 mois en mode docking. A moins que Zubrin n’ait prévu que des séjour de moins de 7 jours sur la lune on voit que la proposition de laisser le vaisseau en attente autour de la terre n’est assurée

    Ensuite Zubrin prévoit de faire le plein du véhicule lunaire en orbite terrestre pour permettre à se dernier de disposer de carburant pour l’alunissage. Cela implique que le vaisseau terrestre doit disposer de l’infrastructure pour le transfert du carburant.
    Ce dernier point, s’il est bien confirmer, montre une nouveau besoin: celui d’une station service en orbite basse. Stocker et transférer du carburant nécessite une infrastructure qui dépasse la capacité actuelle des vaisseaux existants. Il semble bien qu’au lieu d’une station habitable en permanence définie par la NASA, une version réduite à la fonction de gare routière et de station service soit nécessaire.

    Cette version simplifiée de la vision de la NASA pourrait être une voie de sortie politique de la situation actuelle: Zubrin émet beaucoup de critiques concernant la stratégie de la NASA, mais il oublie de mentionner que la NASA est un organisme fédéral que les politiques utilisent pour transférer de l’argent fédéral dans leur Etat d’origine. Les politiques sont d’ailleurs très sensibles au lobbying des entreprises du secteur astronautiques qui cherchent à faire payer à la NASA un maximum de développement. Il est fort à parier que même si la NASA changeait de stratégie et remisait le SLS, Orion et la station orbitale lunaire dans les tiroirs, les politiques des Etats où ces développements ont lieu n’accepteraient pas ce changement qui risque de mettre en péril les activités de la NASA dans leur Etats.

    Il faut donc laisser un os à ronger et plutôt que de continuer sur la version luxueuse de la station orbitale lunaire, une station technique en orbite basse terrestre pourrait résoudre bien des problèmes et répondre au besoin exprimé ci-dessus.

    1. Votre commentaire sur le ravitaillement en ergols en orbite terrestre m’a intéressé. C’est une question à laquelle j’ai un peu réfléchi et je me demande s’il ne serait pas préférable d’envisager un système “d’échange standard” de réservoirs (remplacement de réservoirs vides par des réservoirs pleins amenés en orbite, venant se “clipper” sur le vaisseau) plutôt qu’un transfert en apesanteur de liquides cryogéniques, potentiellement problématique, surtout dans la cas d’un vaisseau habité (les opérations de ravitaillement en carburant sont en principe interdites en aviation avec des passagers à bord).

      1. @Pierre-André Haldi: et que faire de réservoir vide ? SpaceX montre qu’une conception intelligente intégrant la réutilisation permet de réduire les coûts. Il serait dommage de rater une économie sur le long terme en visant une simplification du système initial.

        Le concept de station service permet de résoudre le problème du remplissage en présence de personnes: si on dispose d’un réservoir en orbite, on peut faire le plein au moment où personne n’est à bord du vaisseau.

        1. Les réservoirs vides pourraient être renvoyés sur Terre. C’est d’ailleurs ce que prévoit Elon Musk pour son BFR. Après la mise en orbite basse terrestre du vaisseau interplanétaire, il est ravitaillé en ergols par trois BFR tankers qui ensuite retournent sur Terre. Pas besoin de station service (qui de toute façon devrait être approvisionnée).

          1. Bonjour Mr Brisson, est ce qu’il ne serait pas plus simple, pour ce qui concerne la re-conquête de la Lune, de produire les ergols directement sur la Lune. Et au lieu de concevoir un atterrisseur lunaire qui soit dit en passant n’existe pas à ce jour, se servir de la Crew Dragon ou d’une Federatsia russe comme vaisseau de transport qui assurerait aussi les fonctions d’atterrisseur Lunaire. Il lui suffirait de remplir ses réservoirs pour décoller de la Lune et de repartir en direction de la Terre. Cela me parait bien plus simple à mettre en oeuvre, sans demander des investissements aussi colossaux que ceux proposés par les USA. Plus besoin de station en orbite lunaire , plus besoin de concevoir un atterrisseur, plus besoin de fusée SLS. Le CNES à déjà mis au point un système efficace pour extraire l’oxygène du régolite Lunaire afin d’alimenter les futures stations lunaire Cela peut aussi servir de comburant pour un atterrisseur. Resterait à produire l’hydrogène avec la glace des pôles. Cela semble tout de même plus simple et moins coûteux. Et pour alimenter les futures station en électricité , il y a le projet Kilopower dont un prototype à déjà validé le concept. A mon sens, le plus important serait d’invalider ce concept d’avoir un vaisseau pour faire le voyage vers la Lune et un atterrisseur.

          2. Merci de votre commentaire.
            Vous reprenez là le projet “Lune direct”, originellement “Mars Direct” de Robert Zubrin, dont l’un des principes majeurs est l’utilisation des ressources locales (“ISRU”). Il est évident que cela apporterait une économie énorme de masse à extraire du puits de gravité terrestre et donc d’énergie pour s’extraire de ce puits. Le principe avait d’ailleurs été adopté par mike Griffin, Administrateur de la NASA de 2005 à 2009.
            Ceci dit il serait beaucoup plus facile d’utiliser les ressources martiennes que les ressources de la Lune. Il y a beaucoup plus de glace d’eau accessible sur Mars que sur la Lune et en plus on a du gaz carbonique dans l’atmosphère martienne qui peut aussi fournir du carbone et donc du méthane avec l’hydrogène de l’eau.
            En fait il serait plus difficile de vivre sur la Lune que sur Mars. Le seul avantage de la Lune c’est sa proximité qui fait que (1) les voyages sont moins longs (trois jours au lieu de six mois) et (2) que l’on peut y accéder quand l’on veut au cours de l’année (et non uniquement lors des fenêtres synodiques qui s’ouvrent tous les 26 mois).
            Pour ce qui est de l’énergie, oui bien sûr il faut compter sur le nucléaire et mieux que Kilopower, miser sur le projet Megapower du même Department of Energy. Lisez sur mon blog les deux articles suivants: https://blogs.letemps.ch/pierre-brisson/2018/02/20/krusty-offre-a-elon-musk-une-vraie-chance-de-transformer-son-essai/ et https://blogs.letemps.ch/pierre-brisson/2019/05/25/megapower-un-reacteur-nucleaire-dun-nouveau-type-qui-nous-permettra-de-vivre-sur-mars/

        2. Je vois que Pierre vous a déjà répondu et je l’en remercie; en effet, dans mon idée les réservoirs vides seraient ramenés sur Terre (c’est ce que j’ai voulu dire par “échange standard”). Et cette façon de faire évite le transfert en apesanteur de liquides cryogénies, qui n’a pas encore été réalisé et pourrait bien poser quelques problèmes.

          1. @Pierre-André Haldi et @Pierre Brisson: merci de ne pas mélanger les concepts:

            Le concept du BFR implique justement le transfert en apesanteur de liquides cryogéniques.

            Le problème, c’est que le concept de réservoirs implique un système de protection thermique pour l’entrée dans l’atmosphère ainsi qu’un système de refroidissement pour maintenir le carburant/oxydant en phase liquide. A moins de faire le changement de réservoir en même temps que le transfert d’astronautes afin de réduire le temps d’attente en orbite au minimum

            L’utilisation d’une station service permet justement d’éviter tous ces petits détails qui n’apparaissent nullement dans la description de Zubrin:

            – un Crew Dragon arrive à la station, le transfert d’astronautes vers le vaisseau lunaire est effectué et le vaisseau lunaire quitte la station service.
            – le Crew Dragon transfert le carburant qu’il a en cargo (il faudrait savoir si cela est possible) dans le réservoir de la station service qui dispose d’un système de refroidissement qui maintient le carburant/oxydant sous forme liquide
            – le Crew Dragon reste plusieurs jours/semaines/mois en mode docking (la durée de service en mode docking d’un Crew Dragon est de 6 mois, en mode de vol, donc sans station orbitale, la durée de service est de 7 jours, source: https://en.wikipedia.org/wiki/Dragon_2)
            – le vaisseau lunaire revient avec l’équipage qui est transféré vers le Crew Dragon et retour sur terre. Le vaisseau lunaire est connecté au stockage de carburant/oxydant de la station qui est prêt à faire le plein juste avant l’arrivée du Crew Dragon suivant.

            Je vous laisse écrire votre procédé en incluant les contraintes suivantes:
            – stockage de carburant implique un système cryogénique pour maintien sous forme liquide (tout véhicule qui serait équipé de ce type d’installation serait de facto plus lourd et donc devrait payer un coût en carburant supplémentaire
            – on devrait éviter autant que possible le transfert de carburant/oxydant en présence d’astronautes ( SpaceX prévoit de le faire avec le Crew Dragon, mais on ne disposera pas de système d’éjection sur le vaisseau lunaire).
            – un Crew Dragon ne peut pas rester plus de 7 jours en vol sans support d’une station orbitale
            – pour raison de sécurité, il n’est guère judicieux de ne pas laisser un Crew Dragon en orbite tant qu’il y a des astronautes sur la Lune
            – les raisons qui réduisent la durée de service du Crew Dragon en mode vol ont une très grande probabilité de s’appliquer au vaisseau lunaire.

          2. Je pense que Pierre-André Haldi vous répondra de son côté pour donner ses arguments.
            Quant à moi, je pense que transférer des ergols d’un réservoir pour le stocker dans une station service puis le ressortir pour alimenter un vaisseau interplanétaire et entre temps maintenir dans la station service les ergols à une température adéquate tout en évitant les fuites au maximum, pose aussi problème, en fait les mêmes problèmes que l’approvisionnement par des tankers venus de Terre juste avant l’injection interplanétaire mais en les aggravant. A cet égard, le clippage de réservoirs plutôt que le transfert d’ergols, comme proposé par Pierre-André, pourrait être une bonne solution.
            Pour ce qui est du problème des passagers pourquoi ne pas les monter dans le vaisseau spatial depuis la Terre après que le plein d’ergols ait été fait, en maintenant toutefois un équipage minimum (deux personnes?) pour assurer que les manœuvres nécessaires à l’approvisionnement en ergols se passe bien (docking, fonctionnement des pompes, etc…).

        3. @CREBAT: Il n’y a absolument aucun “mélange de concepts” dans les commentaires de Pierre Brisson et moi-même. Le principe “d’échange standard de réservoirs” reprend essentiellement le schéma conçu par Elon Musk, avec la seule différence d’éviter le transfert de liquides cryogéniques en apesanteur, que beaucoup de spécialistes considèrent être un des points délicats (il y en a d’autres) du concept d’Elon Musk. Pour le reste, il n’y a pas de différences fondamentales dans les contraintes au niveau technique/structurel entre un réservoir amené en orbite (en fait. 3 dans la proposition d’Elon Musk) pour ensuite transférer son contenu, ou un réservoir (ou 3) directement destiné à remplacer un réservoir vide. Et cela pose certainement moins de problèmes que le maintien dune “station service” (qu’il faut aussi de toute façon ravitailler) en orbite.

          1. @Pierre-André Haldi: “Le principe “d’échange standard de réservoirs” reprend essentiellement le schéma conçu par Elon Musk”.

            C’est justement ce point qui me dérange et que je qualifie de mélange de concepts: schéma conçu par Elon Musk n’intègre absolument pas tout un système de transfert de réservoirs en orbite entre 2 vaisseaux, mais uniquement un transfert de liquide, probablement à l’aide d’une conduite flexible. Le concept de réservoir amovible est neuf et doit être clairement développé : Est-ce que les réservoirs sont auto-propulsés pour se déplacer entre les vaisseaux ou un bras robotisé fait le travail, le réservoir vide est récupéré par le système de transport du réservoir plein ou redescend sur terre de lui-même car étant équipé d’une protection thermique.

    2. Je ne crois pas que nous ayons besoin d’une station orbitale intermédiaire entre la Terre et la Lune (ni entre la Terre et Mars). C’est aussi le point de vue de Robert Zubrin.
      Une telle station, appelons la “SOI” suppose de l’entretien (comme pour l’ISS), peut-être une présence humaine permanente, et une remise en altitude périodique (avec consommation d’énergie) car la gravité terrestre exerce une contrainte non négligeable à 450 km d’altitude (ou à 600!). A cela il faut ajouter l’absence de pesanteur et les radiations dont on se peut moins bien se protéger dans une SOI que sur la Lune ou sur Mars…Sans compter avant toute chose l’assemblage dans l’espace de cette SOI.
      Le plus simple si on veut aller sur la Lune ou sur Mars, c’est d’y aller en direct. Avec le BFR ou le SLS (si on parvient à le construire) on peut décomposer le voyage en plusieurs parties: (1) le lancement pour placement en orbite terrestre avant injection sur orbite translunaire ou transplanétaire, avec un premier étage qui va être récupéré sur Terre (et réutilisé); (2) le lancement du “reste” avec un second étage et un habitat (Crew Dragon par exemple) ou simplement un second étage incorporant l’habitat (hypothèse BFR); la version second étage plus habitat permet éventuellement une deuxième récupération sur Terre et une descente plus facile (car moins massive) sur la Lune et surtout sur Mars – en raison de l’atmosphère; (3) la descente sur la Lune ou sur Mars (EDL) de l’habitat avec éventuellement le second étage toujours attaché (version BFR). Ce modèle me semble plus simple, plus économique et plus rationnel.
      Pour ce qui est des considérations économico-politiques qui effectivement empêchent la NASA de raisonner en termes d’objectif plutôt que de satisfaction des fournisseurs, c’est bien contre quoi s’élève Robert Zubrin et dont il en est tout à fait conscient. C’est aussi pour cela, comme je l’écris, que la solution, c’est à dire en fait le déblocage de la situation, passe par les entrepreneurs (Elon Musk, Jeff Bezos et autres) qui n’ont pas les mêmes préoccupations ni les mêmes contraintes.

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