Yverdon-Les-Bains: l’avenir dans le rétroviseur?

Quand la gauche et la droite font alliance, ce n’est pas toujours pour le meilleur. Preuve en est l’accord abracadabrantesque conclu entre le PS et le PLR à Yverdon-les-Bains: tu me laisses créer une centaine de nouvelles places d’accueil parascolaire dit la gauche, tu me laisses construire un parking souterrain de 1000 places sous la Place d’Armes dit la droite. Donnant-donnant. Comme s’il y avait une relation logique entre ces deux investissements! Après que le Conseil communal a accepté, en mars dernier, la construction de ce parking devant la gare (la partie verdoyante de la Place d’Armes sur notre photo), des Yverdonnois résistants récoltent des signatures en vue d’un référendum contre ce projet. Ils reprochent notamment à ce dernier d’entraîner une augmentation de 35% du trafic dans un centre-ville déjà largement saturé.

Saut périlleux arrière

«Une telle construction va permettre d’offrir un bel espace paysager à la population et garantir un nombre suffisant de places de stationnement au centre-ville dans les prochaines années», écrit la Municipalité dans un communiqué. En fait, aucun arbre digne de ce nom ne pourra jamais pousser dans une terre de 60 centimètres d’épaisseur. «Le bel espace paysager» n’aura vraiment rien d’attrayant lors des étés qui, conséquence du réchauffement climatique, seront toujours plus longs et chauds. La concession de 70 ans attribuée à des entreprises privées pour réaliser ce parking ressemble plutôt à un saut périlleux arrière dans le 20ème siècle. Quel contraste avec la politique visionnaire suivie par un nombre croissant de villes, comme par exemple Oslo! En 2020, la capitale norvégienne aura supprimé l’essentiel des voitures particulières du centre-ville, en dehors de celles pour handicapés. «Les gens commencent à s’habituer à l’idée que la ville devrait être pensée pour les gens et non pas pour les voitures», souligne la conseillère municipale écologiste Hanna Marcussen, en charge du développement urbain.

Retour vers le futur

Au lieu d’entreprendre de gros et coûteux travaux auxquels participeront des camions, dont les innombrables allers et venues ne vont certainement pas favoriser le petit commerce, la droite et la gauche auraient été bien inspirées de s’entendre autrement: en favorisant des parkings à l’extérieur de la ville complétés par quelques parkings silos intra-muros, et surtout en développant massivement des transports publics confortables et conviviaux ainsi que de vraies pistes cyclables dont la ville est singulièrement dépourvue. Il est encore temps, pour les Yverdonnois, de faire un retour vers le futur.

(Trait libre publié dans Echo Magazine du 17 avril 2019)

 

 

 

 

 

Philippe Le Bé

Désormais auteur, Philippe Le Bé a précédemment été journaliste à l’ATS, Radio Suisse internationale, la Tribune de Genève, Bilan, la RTS, L'Hebdo, et Le Temps. Il a publié trois romans: «Du vin d’ici à l’au-delà » (L’Aire),« 2025: La situation est certes désespérée mais ce n’est pas grave » (Edilivre) et "Jésus revient...en Suisse" (Cabédita)

2 réponses à “Yverdon-Les-Bains: l’avenir dans le rétroviseur?

  1. Cher Monsieur Le Bé,
    J’ai toujours pensé que le code déontologique de tout journaliste impliquait de jeter un regard objectif sur une problématique. Mais là, c’est vrai, c’est un blog…et vous êtes l’époux d’une des cinq membres du comité qui demande le référendum populaire.
    Votre présentation appelle quand même un certain nombre de correctifs, ainsi que je l’ai dit hier soir auprès de M. Doll qui aligne en public les mêmes arguments que les vôtres.
    1) L’accord “abracadabrantesque” PLR-PS est juste le fruit d’un constat. Pour votre information, la gauche n’est pas majoritaire à Yverdon-les-Bains! La droite est le fier porte-drapeau du “Tout à la voiture” et emporte tous les votes liés à la mobilité, que ce soit devant la population (rappel de Stop aux Bouchons), devant le Conseil ou au sein de la Municipalité. Donc ce parking, cher Monsieur, on l’avait dans la pomme de toutes façons. L’analyse pragmatique du PS yverdonnois fut de nous demander “Ce parking de 1000 places on le veut tout sec? Ou assaisonné de toute une série de garanties liées à la mobilité, à la suppression des places en surface, et… de places d’accueil de l’enfance qui manquent cruellement à la population yverdonnoise ?”
    Les faits nous ont donné raison puisque la droite du Conseil communal a voté comme un seul homme l’acceptation du parking. Et oui, l’UDC se devait bien sûr de soutenir le PLR en ces temps de campagne Dessauges. Donnant donnant quoi!
    2) Les arbres majeurs du parc sont prévus d’être plantés, selon le projet lauréat issu du concours d’aménagement, dans les lieux où la couche de terre sera bien supérieure aux 60 cms décriés. Des fosses seront aussi créées afin de permettre ces plantations. Ne vous en faites pas, toutes ces questions ont été posées et amplement discutées par la commission au hoc.
    3) Un certain nombre de garanties ont été aussi obtenues quant à l’aménagement cyclable, au déplacement des matériaux d’excavation et aux mesures de modération du trafic futur de la Rue des Remparts. Je vous laisse peut-être porter une nouvelle vision sur la séance du conseil communal. Elle a peut-être été trop rapide pour vous la première fois. Ou alors prenez le temps de lire attentivement les rapports de majorité et de minorité de la commission, publiés sur le site de la commune.
    Alors, pensez-y… Là où ça se passe c’est au Conseil communal. Libre à chacun d’y accéder pour participer au débat et tenter d’infléchir certaines directions qui ne lui conviennent pas. Et bien sûr c’est dans les urnes qu’on décide de l’avenir d’une cité?

    Cordialement
    Pascale Fischer

    1. Ce que je trouve attristant dans cette réponse, c’est la courte vue de son autrice. Elle semble ne jamais se poser la question «et dans deux ans ? ou dans 5 ?, ou dans dix ?». Fait-on de la politique pour éternellement faire des compromis, pour enchaîner des moindres maux à l’infini ?
      Imaginons qu’en 2021 une gauche portée par l’urgence climatique se retrouve majoritaire. Majoritaire, mais enchaînée légalement et surtout politiquement à un parking qu’elle a soutenu. Et qui pèse de tout son poids contre toute avancée en matière de circulation, parce que désormais, il faut «nourrir le monstre» et lui assurer son comptant de clients.
      Courte vue suicidaire.

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