Formule magique ou soporifique?

Ils se comptaient sur les doigts d’une seule main les députés vaudois du PLR, lundi 8 novembre dernier au Swiss Tech Convention Center de l’EPFL. Tous leurs autres collègues de parti n’avaient pas estimé utile de participer aux premières Assises vaudoises du climat organisées par la Conseillère d’Etat Jacqueline de Quattro, elle aussi libérale-radicale. Et pourtant l’événement était et reste exemplaire. Pour faire face au dérèglement climatique dont les effets sont déjà largement perceptibles en Suisse, promouvoir une approche locale, en l’occurrence cantonale, c’est le bon sens même. C’est aussi la démarche du célèbre climatologue français Hervé Le Treut. Après avoir été impliqué dans le comité du suivi de l’accord de Paris sur le climat (COP 21), ce dernier a choisi de se focaliser sur la Nouvelle Aquitaine, un territoire à bonne échelle pour prendre des décisions concrètes et visibles.

Désert de débat

Le temps presse. Si les émissions de gaz à effet de serre (GES) continuent à augmenter de 2% par an, les 3 à 4 degrés de température supplémentaires rendront certains endroits de la planète invivables d’ici quelques décennies. La question climatique comme l’effondrement de la biodiversité devraient être la priorité des priorités de la Berne fédérale. Au lieu de cela, pour succéder aux conseillers fédéraux sortants Doris Leuthard et Johann Schneider-Amman, on se demande s’il faut une ou deux femmes, de centre droit ou de centre gauche, et on se focalise sur les candidat(e)s déjà choisi(e)s par le PLR et le PDC. Dans ce désert de débat, la formule magique qui fait la fierté du pays prend des allures de formule soporifique. On est fin prêt à s’entendre mais on n’a quasiment rien à se dire.

Devoir d’État

Pourtant, si les cantons ont leur part de responsabilité et d’action, la Confédération a un rôle moteur essentiel à jouer. Tous les partis (et non seulement les Verts), dans les chambres comme au Conseil fédéral, devraient se mobiliser pour faire de la nouvelle loi sur le CO2 un outil vraiment efficace: en y intégrant des objectifs de réduction des émissions de GES pour le secteur financier; en fixant une date à partir de laquelle vendre des voitures à essence ou au diesel ne serait plus possible; en taxant le kérosène des avions, etc. Concernant la biodiversité, un plan de sortie des pesticides de synthèse utilisés dans l’agriculture devrait être fixé, une cartographie précise des zones naturelles à protéger dans tout le pays devrait être dressée, etc. Les solutions foisonnent. Les prendre au sérieux et les réaliser, c’est un devoir d’État.

(Trait libre diffusé dans Écho Magazine de mercredi 28 novembre 2018)

 

 

Philippe Le Bé

Désormais auteur, Philippe Le Bé a précédemment été journaliste à l’ATS, Radio Suisse internationale, la Tribune de Genève, Bilan, la RTS, L'Hebdo, et Le Temps. Il a publié trois romans: «Du vin d’ici à l’au-delà » (L’Aire),« 2025: La situation est certes désespérée mais ce n’est pas grave » (Edilivre) et "Jésus revient...en Suisse" (Cabédita)