Gianni Infantino est notre champion du monde

Au lendemain de la finale, tout le monde s’accorde à dire que le Mondial 2018 a été un très grand cru aussi bien au niveau du jeu, de l’état d’esprit que de l’organisation. Si l’équipe de Suisse s’est arrêtée en cours de route, un Suisse, Gianni Infantino, est allé jusqu’au bout de l’aventure et est le chef d’orchestre de cette belle réussite.

Malheureusement, on constate, alors que Gianni Infantino est sans doute l’un des Suisses occupant l’une des fonctions les plus importantes au monde, que les autorités suisses tentent d’en parler le moins possible et que la presse helvétique le critique. Par exemple, Florian Müller écrit dans le Matin Dimanche du 15 juillet ce commentaire à la limite de la caricature nauséabonde : « Ce brave Gianni Infantino, le torse bombé entre deux souverains, trop fier de s’autoproclamer grand entremetteur de l’aréopage des dirigeants de ce monde. ». Navrant, désolant…

Il est temps que nos dirigeants et nos journalistes abandonnent cette attitude qui avait déjà été la leur lors de l’élection du président de la FIFA au mois de février 2016 et soutiennent Gianni Infantino pour deux raisons essentielles.

Tout d’abord, contrairement à ce que d’aucuns essaient de faire croire, Gianni Infantino a commencé et continue à réformer la FIFA qui n’a plus rien à voir avec l’ère Blatter. En second lieu, fils d’immigrés italiens arrivés comme saisonniers en Suisse, il est la preuve vivante qu’il est possible en Suisse de réussir en une génération, non seulement sur le terrain, mais également dans les sphères dirigeantes.

Bravo Gianni, tu es notre champion du monde et nous sommes fiers de toi.

 

Impartialité de la SSR : Témoignage

A quelques jours de la votation sur l’initiative « No Billag », je tiens à faire part de mon expérience personnelle concernant l’impartialité de la SSR.

L’un des arguments répétés à cor et à cri par les initiants est que la SSR est un repère de gauchistes diffusant des informations pas objectives et politiquement orientées. Or, mon expérience démontre que cet argument est tout à fait erroné.

Tout d’abord, les journalistes sont tout à fait libres d’avoir leurs propres idées et convictions politiques. S’agissant d’un métier ayant trait par définition à l’actualité, il me paraît même assez normal qu’il y ait plus de gens politiquement engagés parmi les journalistes qu’au sein d’autres corps de métier. Personnellement, je me suis toujours défini comme un social-démocrate de droite et il m’importe peu qu’un journaliste de la SSR soit de gauche ou de droite dans la mesure où il informe le public de manière objective.

Or, et je pense être un bon exemple, mon expérience démontre que tel est le cas. En effet, à partir du début des années 2000, la presse, et notamment la SSR, a commencé à s’intéresser à la problématique de l’imposition d’après la dépense, appelée également impôt à forfait, qui permet à des ressortissants étrangers n’exerçant pas d’activité lucrative sur le sol helvétique d’être imposés, non pas sur leur revenu et leur fortune, mais sur leurs dépenses. Ce système est par définition réservé aux personnes étrangères fortunées. S’il y a bien une chose qui est claire, c’est que les partis de gauche sont opposés à ce système d’imposition et que j’en suis un ardent défenseur. Or, malgré le fait que sur ce point j’étais en total désaccord avec la position notamment du parti socialiste et des Verts, je n’ai cessé d’être interviewé et d’être invité à des émissions par les journalistes de la SSR aussi bien à la radio qu’à la télévision. Cette impartialité des journalistes de la SSR s’est notamment manifestée dans le cadre de la campagne concernant l’initiative qui tendait notamment à supprimer l’imposition à forfait que le peuple a rejetée à environ 60% le 30 novembre 2014. Si les journalistes de la SSR avaient adopté le comportement que leur reprochent les défenseurs de l’initiative « No Billag », ils m’auraient beaucoup moins, voire pas, invité et m’auraient remplacé par des personnes connaissant moins le sujet et, par conséquent, moins aptes à défendre cette forme d’imposition.

J’espère de tout cœur que l’initiative « No Billag » sera rejetée le 4 mars prochain avec un score en tout cas équivalent à celui du 30 novembre 2014 !

Il faut sauver le soldat suisse ATS

A l’heure où tous les regards se tournent sur l’Initiative No Billag, les dirigeants de l’Agence Télégraphique Suisse (ATS) qui ont brillé par leur incapacité à anticiper le changement pendant de nombreuses années en profitent pour dépecer notre agence de presse nationale en licenciant à tour de bras et pour transférer le centre décisionnel en Autriche. Leur objectif est clair : tout faire avant le 4 mars 2018.

Cette manière de faire est tout simplement scandaleuse et la passivité des partis de droite l’est tout autant.

S’il est bien un pays où il est impératif d’avoir une agence de presse nationale, c’est bien la Suisse. En effet, dans un Etat composé de vingt-six cantons et où coexistent quatre langues nationales, seule une agence de presse nationale garantit la circulation de l’information sur tout le territoire et dans toutes les communautés. Par ailleurs, l’ATS est pour notre pays la garantie d’une certaine neutralité de l’information ce qui est impératif pour un Etat dont l’ADN est la démocratie directe.

De plus, il est fondamental que l’actionnaire de référence, par conséquent le centre décisionnel, reste en Suisse et ne soit pas transféré en Autriche. En effet, comme nous avons eu l’occasion malheureusement de le voir avec l’Hebdo, une fois que les décisions se prennent à l’étranger, les paramètres purement économiques et de rentabilité l’emportent sur les critères culturels et politiques helvétiques.

Pratiquement, je propose que la Confédération qui est un des abonnés importants de l’ATS exige d’ici la fin de la semaine de la part de ses dirigeants qu’ils suspendent les licenciements et la restructuration en cours et que la question du financement et de la structure de l’ATS soit abordée dès le 5 mars en espérant que l’Initiative No Billag ait été rejetée.

La Suisse sur la liste grise : une grave erreur politique de l’UE

Avec une certaine surprise, nous avons appris hier que l’UE avait mis la Suisse sur la liste grise notamment en raison du fait qu’elle n’avait pas encore mis en œuvre son renoncement aux statuts spéciaux de certaines sociétés en matière fiscale.

Cette manière de faire est une erreur à la fois technique et politique. Tout d’abord, même s’il est vrai que le rejet de la RIE III a ralenti la mise en œuvre du programme fiscal destiné à remplacer les statuts spéciaux, en aucun cas cette votation n’a été une remise en cause des engagements de la Suisse à l’égard de l’Union européenne. Ceci dit, les personnes et les partis qui ont lancé le référendum contre la RIE III devraient prendre acte de la position de l’UE et prendre plus en considération, si une telle idée devait les reprendre à l’avenir, des conséquences de tel acte non seulement en Suisse, mais également, voire peut-être surtout, auprès de notre partenaire européen. En second lieu, cette mise sur la liste grise est le pire message que l’UE pouvait donner aux ressortissants helvétiques, qui, comme moi, soutiennent et s’engagent contre les initiatives de l’UDC destinées à remettre en cause la libre circulation des personnes, et plus généralement les relations bilatérales entre la Suisse et l’UE. En effet, pour que la majorité des citoyens de notre pays vote en faveur de ces relations bilatérales, il est important non seulement que notre partenaire européen soit vu comme un voisin important et solide, mais également qu’il soit perçu émotionnellement comme un ami. Or, quoi de plus inamical que d’agir comme l’a fait la Commission européenne hier ? D’aucuns nous diront que la Suisse n’est pas sur la liste noire, mais uniquement sur la liste grise qui regroupe des Etats sous surveillance. Dont acte. Ceci dit, soit un couple se fait confiance sur ses promesses et sur ses intentions, soit tel n’est pas le cas et, dans cette seconde hypothèse, il ne s’agit pas d’un couple qui entretient des relations amoureuses ou amicales. En effet, qui considérerait qu’un couple dont l’un des deux fait suivre son conjoint par un détective privé est un couple qui fonctionne bien ?

Bien que je considère que la construction européenne soit l’une des plus belles réalisations politiques du XXème siècle, l’attitude de la Commission et des fonctionnaires européens concernant les sujets fiscaux commence à devenir de plus en plus agaçante. D’une part, l’UE joue les gendarmes avec les Etats tiers et se montre très laxiste avec ses membres. Le jour où l’échange automatique d’informations sera en vigueur entre la Suisse et l’UE, je me réjouis de comparer le fonctionnement de ce système entre par exemple la France et la Suisse et la France et la Grèce…D’autre part, la Commission donne la désagréable image d’être une adepte de la détestable attitude « fort avec les faibles, faible avec les forts ». En effet, comment peut-on expliquer que des grandes puissances, qui ne pratiquent pas l’échange automatique d’informations, ne soient concernées ni par la liste noire, ni par la liste grise…Enfin, les commissaires et les fonctionnaires européens qui ne cessent de jouer les donneurs de morale en déclarant urbi et orbi que la planification fiscale, même légale, appauvrit les Etats font preuve d’une hypocrisie qui laisse songeur. En effet, comme l’écrit Amid Faliaoui, rédacteur en chef du journal belge Trends-Tendances dans l’édition du 16 novembre : « et puis, il y a aussi l’hypocrisie de ceux qui fustigent toute cette évasion fiscale. Les commissaires européens sont schizophrènes car ils fustigent la fraude mais profitent, en tant que fonctionnaires européens, d’une fiscalité plus douce que le commun des mortels. Par ailleurs, leurs collègues de l’OCDE qui sortent régulièrement des rapports sur la fraude fiscale oublient juste de rappeler qu’eux-mêmes paient moins d’impôts et de cotisations sociales que les autres fonctionnaires. (…) Gardons juste à l’esprit que les Tartuffe de Molière ne sont pas morts ».

Pour conclure, je dirai que j’ai l’impression que de nombreuses personnes en Europe, y compris les commissaires et les fonctionnaires, ont toujours vécu dans l’idée que la bonne situation économique de la Suisse était due uniquement au secret bancaire. Aujourd’hui, ils n’arrivent pas à admettre et à voir que tel n’est pas le cas. Comme certaines étoiles qui continuent à briller alors qu’elles sont mortes depuis des milliers d’années, les commissaires et les fonctionnaires européens continuent à voir la Suisse et sa place financière comme elles étaient avant 2009 alors que celles-ci n’existent plus de la même manière vu les profondes modifications qui ont été opérées.

Pourquoi Caniveau.ch ?

Depuis plusieurs années, nous constatons que nous sommes relativement impuissants pour lutter contre les propos racistes et antisémites sur internet.

Par conséquent, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) en Suisse a décidé de créer le site caniveau.ch. Son but est, dans le respect de la législation, de mettre en exergue les propos racistes et antisémites qui auraient pu être tenus sur les réseaux sociaux. Il ne s’agit en aucun cas de délation ou de dénonciation, mais simplement d’une mise en exergue. L’objectif est de responsabiliser les auteurs de tels propos qui auront, il faut le préciser, la possibilité de demander, moyennant le respect de certaines conditions, le retrait du site.

En agissant de la sorte, la Licra est consciente qu’il ne s’agit pas de la solution qui va tout résoudre. Elle entend uniquement apporter un moyen supplémentaire pour lutter contre le racisme et l’antisémitisme sur les réseaux sociaux.

 

Rejet de la RIE III : la leçon à tirer

Comme partisan de la RIE III qui, malgré ses défauts, aurait stabilisé le système fiscal helvétique et accordé un avantage compétitif à la Suisse, je ne peux être que déçu du résultat sorti des urnes dimanche dernier.

Cependant, étant également un grand partisan de la démocratie directe, je prends acte de ce résultat. Bien qu’il ne corresponde pas à ce que je souhaitais, je suis heureux qu’il soit clair et net et non pas du genre 49,5 % contre 50,5 des voix. Rendant hommage aux vainqueurs, je ne peux toutefois m’abstenir de sourire lorsque j’entends certains d’entre eux louer la sagesse et la clairvoyance du peuple suisse lorsque son vote va dans leur sens et dénoncer sa manipulation et le populisme lorsque tel n’est pas le cas. Personnellement, je respecte la volonté populaire quel que soit le résultat.

Au moment de faire le bilan de cet échec, la leçon qui s’impose à mon sens est de constamment garder à l’esprit que le système helvétique ne permet ni au Conseil fédéral, ni au parlement, ni au peuple d’aller trop loin. Or, il ne fait aucun doute qu’en l’occurrence le peuple suisse a considéré que la droite parlementaire n’a pas assez respecté les demandes émanant de la gauche. A ce titre, il est intéressant de comparer la votation sur le RIE III avec celle du 30 novembre 2014 sur l’initiative populaire fédérale « Halte aux privilèges fiscaux des millionnaires (abolition des forfaits fiscaux) ». Tout en étant conscient du fait que ces sujets fiscaux ne sont pas tout à fait comparables et que dans un cas il s’agit d’une initiative, et dans l’autre d’un référendum, il est néanmoins important de souligner que dans le cas de l’imposition d’après la dépense, le parlement avait, afin notamment de désamorcer l’initiative, durci les conditions de cette forme d’impôt avant la votation. Par conséquent, on constate que lorsque le parlement prend en compte les critiques, le peuple le suit, alors que lorsqu’il tente le coup de force et fait la sourde oreille, les citoyens l’arrêtent.

Vu la fin de l’Hebdo, il s’agit du dernier blog que j’écris pour cet hebdomadaire et continuerai pour le compte du Temps. Je tiens à remercier les journalistes de l’Hebdo, et plus particulièrement son rédacteur en chef, pour tout ce qu’ils ont fait au courant de ces dernières années. Je ne peux que fustiger Yvan Perrin qui s’est réjoui de la disparition de l’Hebdo car ce journal ne partageait pas les positions de son parti. Cela démontre à quel point la liberté d’expression n’est qu’un cache-sexe pour l’UDC lorsque ce parti la brandit notamment pour s’attaquer à l’article 261 bis CP.

Leonard part, Donald arrive

Leonard Cohen, l’homme de cœur, sensible et élégant est parti hier pour un monde que l’on espère meilleur, alors que Donald Trump, l’homme de la haine, raciste et vulgaire est arrivé avant-hier à la Maison Blanche pour un monde que l’on craint pire. Tout un malheureux symbole !

Outre le dégoût pour ses idées, l’élection de Donald Trump suscite en moi les sentiments et réflexions suivants.

Tout d’abord, je suis sidéré de constater comment une grande partie de la presse se montre soudain clémente à l’égard d’un personnage qui a tenu les propos les plus inadmissibles et outranciers à l’égard des femmes et des personnes d’une autre race dès qu’il se montre légèrement moins excessif et plus poli. En quelque sorte, cela revient à être plus indulgent à l’égard d’un méchant qui pour un moment seulement devient un peu gentil, qu’à l’égard d’un très gentil qui l’a toujours été et qui le sera toujours. Cela me fait penser à Marguerite Yourcenar qui écrivait dans L’œuvre au noir « cette prudente remarque fit ressentir à Zénon à l’égard de son compagnon de voyage cet élan presque excessif de sympathie que cause la moindre opinion modérée exprimée par un homme dont la position ou la robe ne permettait pas d’en espérer autant ».

En second lieu, c’est un double mythe issu de la Seconde Guerre Mondiale entretenu sans doute à tort qui s’est effondré. D’une part, nombreux sont les Européens qui durant de nombreuses années se sont consciemment ou inconsciemment dits que si leur continent était attaqué les Etats-Unis seraient toujours là pour les défendre. Or, désormais, avec Donald Trump, seuls les Etats-Unis comptent. D’autre part, comme l’on fait un certain nombre de Juifs durant les années 30 alors que l’antisémitisme enflammait l’Europe, les Etats-Unis sont longtemps apparus comme un pays où certaines libertés et valeurs étaient garanties et où l’on pourrait toujours se réfugier. Il faut aujourd’hui prendre conscience à la lumière de ce qui se passe que ce refuge de dernier recours n’en est plus un. Il résulte de ce double constat que l’Europe doit prendre elle-même en main la propre défense de ses intérêts aussi bien dans le domaine économique que militaire, ce qui passe irrémédiablement par une Europe plus unie, et qu’il faut dans le quotidien se battre aujourd’hui et ici pour défendre les valeurs qui nous sont chères et auxquelles Donald Trump s’attaque Outre-Atlantique. C’est à cela que je m’attelle et c’est à cet édifice que j’essaie d’apporter ma pierre en qualité de président de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) en Suisse.

Enfin, à l’heure où la droite française choisit son champion qui malheureusement affrontera sans doute Marine Le Pen lors du second tour des élections présidentielles, la victoire de Donald Trump sur Hillary Clinton nous enseigne qu’une femme ou un homme politique impopulaire un jour l’est pour toujours et qu’à l’heure actuelle un candidat impopulaire ne l’emporte plus contre un homme ou une femme politique populiste.

Que de larmes ont coulé sur mon visage en écoutant les chansons de Leonard Cohen ; elles ont également coulé en écoutant les résultats des élections américaines. Ce n’était malheureusement pas les mêmes larmes ! Un grand monsieur est parti, un sale type est arrivé.

De la subtilité du système suisse

Outre le fait qu’elle est excellente, la décision du Conseil national concernant la mise en œuvre de la décision populaire du 9 février 2014 a le mérite de mettre en exergue la subtilité du système helvétique.

Elle renvoie dos à dos à la fois l’UDC qui croit qu’il est possible de définir notre politique à coup d’affiches et de slogans et ceux, du type François Cherix, pour qui, comme l’écrivait Joseph Macé-Scaron « le populiste, c’est toujours l’autre ! », et qui considèrent que le système helvétique est une facilitation des excès du populisme.

En effet, la démocratie directe à la sauce suisse est subtile dans la mesure où, vu qu’il n’existe pas au niveau fédéral d’initiative législative, mais uniquement constitutionnelle, il appartient au parlement, sur proposition du Conseil fédéral, de mettre en œuvre les décisions populaires.

Alors que chez la plupart de nos voisins, le système est un ménage à deux composé du parlement et du gouvernement, notre pays n’est pas, comme d’aucuns le prétendent, un vieux célibataire composé du seul peuple, mais un ménage à trois où gouvernement, parlement et citoyens cohabitent.

Comme l’a très bien dit récemment le Conseiller national PLR Fathi Derder sur les ondes de la RTS, la politique suisse est une « mécanique très très fine ».

UBS : too big to speak?

Suite à une perquisition effectuée dans les bureaux de la banque UBS à Francfort, plusieurs dizaines de milliers de données bancaires relatives aux années 2006 à 2008 concernant des clients domiciliés aussi bien en Suisse qu’à l’étranger ont été saisies par les autorités allemandes. Cette perquisition, qui semble-t-il a eu lieu il y a plusieurs années, a refait surface il y a quelques semaines suite à la publication dans la Feuille fédérale du 26 juillet faisant état d’une demande d’assistance administrative de la part de la France.

Que ces informations aient été volées ou transmises par erreur en Allemagne, il paraît plus que vraisemblable que le droit pénal suisse a été violé soit intentionnellement, soit par négligence. De toute manière, les clients sont en droit de savoir en vertu des règles sur le mandat la raison pour laquelle les données les concernant se sont retrouvées à Francfort.

Au lieu de respecter ses obligations légales à l’égard de ses clients, l’UBS préfère se terrer craignant sans doute des actions en responsabilité civile et de déplaire à la France en fournissant des éléments permettant de s’opposer à la demande d’assistance administrative de notre voisin. En effet, l’un des moyens pour provoquer le rejet de la demande d’assistance française est d’établir qu’elle se fonde sur des renseignements obtenus par des actes punissables au regard du droit suisse.

Si l’UBS ne devait pas se mettre à table dans les prochains jours, il appartiendrait aux autorités administratives, civiles et pénales de se saisir de l’affaire. La FINMA devra agir comme elle l’a fait dans l’affaire HSBC.

On est également en droit d’attendre des milieux politiques qu’ils somment l’UBS de s’expliquer. En effet, il n’existe pas de principe too big to speak !

UBS : une demande d’assistance française d’une ampleur sans précédent

Par courrier du 5 juillet 2016, l’UBS a informé les personnes encore clientes qu’elle avait reçu de la part de l’Administration fédérale des contributions (AFC) une ordonnance de production concernant des personnes domiciliées en France ayant un compte ouvert auprès de son établissement en Suisse.

Les informations dont dispose la France qui lui ont permis de demander l’assistance administrative lui ont été remises par les autorités allemandes. En effet, le ministère public allemand a saisi des données suite à une perquisition effectuée auprès de l’UBS à Francfort. Comme l’indique l‘AFC dans une lettre d’information datée du 10 juin 2016, la France dispose de la référence d’un certain nombre de comptes bancaires portant un code « domicile : France » attribuée par la banque UBS.

Les autorités françaises requièrent les noms, prénoms, date de naissance et adresse du titulaire du compte, de son ayant droit économique et de toute autre personne venant aux droits et obligations de ces deux dernières qualités. Elles portent sur le solde des comptes au 1er janvier des années 2010 à 2015.

Cette demande d’assistance administrative est d’une ampleur sans précédent dans la mesure où les données saisies en Allemagne portent sur plus de 35'000 comptes (pas seulement des comptes de personnes domiciliées en France). Il sied de préciser que la saisie a porté également sur des données relatives à des comptes de personnes suisses domiciliées en Suisse et qui n’ont jamais été domiciliées à l’étranger…

Cette affaire pose deux types de question.

Tout d’abord, il appartiendra aux autorités judiciaires de déterminer dans quelle mesure la responsabilité de l’UBS est engagée. En effet, comment est-ce possible que des données relatives à des comptes ouverts en Suisse se soient trouvées dans un établissement de la banque en Allemagne ? Soit il s’agit de données volées, soit il y a eu une faute de la banque.

En second lieu, il est très important que les personnes concernées par la demande d’assistance française s’opposent à la transmission des données par l’AFC à la France. En effet, trois arguments principaux permettent de considérer que cette demande d’assistance administrative est illégale.

Premièrement, il résulte de la dernière modification de la Convention entre la Suisse et la France conclue le 9 septembre 1966 en vue d’éliminer les doubles impositions en matière d’impôt sur le revenu et sur la fortune et de prévenir la fraude et l’évasion fiscales que pour des demandes de renseignement relatives à des faits survenus avant le 1er février 2013, il est nécessaire que la France fournisse « le nom et une adresse de la personne faisant l’objet d’un contrôle ou d’une enquête et, si disponible, tout autre élément de nature à faciliter l’identification de la personne (date de naissance, état civil…) ». Ce n’est que pour les faits survenus après le 1er février 2013 que les informations concernant l’identité de la personne faisant l’objet d’un contrôle peuvent résulter de la fourniture d’autres éléments que le nom. Par conséquent, aucune information ne peut être communiquée pour la période allant du 1er janvier 2010 au 1er février 2013 puisque la France ne dispose pas du nom des titulaires des comptes, mais que de références bancaires.

En second lieu, dans sa version actuelle, l’article 7 lit. c de la Loi fédérale du 28 septembre 2012 sur l’assistance administrative internationale en matière fiscale (LAAF) stipule qu’il n’est pas entré en matière sur une demande d’assistance administrative lorsque celle-ci « viole le principe de la bonne foi, notamment lorsqu’elle se fonde sur des renseignements obtenus par des actes punissables au regard du droit suisse ». Or, comme je l’ai mentionné ci-dessus, les données se sont trouvées en Allemagne de toute manière contrairement au droit suisse, soit parce qu’elles ont été volées, soit parce qu’elles ont été fournies à une autre entité bancaire que l’entité helvétique en violation du secret bancaire.

Enfin, si mes informations sont exactes, les données ayant été saisies en Allemagne et remises à la France datent de 2006 et de 2008. En d’autres termes, les autorités font une extrapolation en considérant que les personnes domiciliées en France qui possédaient un compte entre 2006 et 2008 en possédaient encore un en 2010. Or, ceci est un cas de fishing expedition dans la mesure, où de nombreuses personnes, ont peut-être fermé leur compte entre 2008 et 2010.

Pour faire valoir leurs droits, il est fondamental que les personnes domiciliées à l’étranger désignent un représentant en Suisse autorisé à recevoir des notifications de l’AFC ou fournissent une adresse actuelle en Suisse et s’opposent à la transmission de leurs données en France. Outre les trois arguments principaux mentionnés ci-dessus, il est possible d’invoquer des arguments propres à chaque cas, notamment, concernant le lieu de domicile du titulaire du compte. Le problème est que l’UBS informe uniquement les personnes qui sont toujours clientes. Il importe que les autres contactent la hotline de la banque au numéro suivant : +41 61 276 46 15.

Pour conclure, je suis personnellement choqué que l’AFC soit entrée en matière sur une telle demande. Dans tous les cas, cette position laxiste devrait pousser nos parlementaires à ne pas accepter d’assouplir les conditions de l’article 7 c LAAF mentionnées ci-dessus comme le demande le Conseil fédéral dans son message du 10 juin 2016 concernant les demandes d’assistance administrative portant sur des données acquises en violation du droit suisse. Par ailleurs, j’ose espérer que l’UBS bien que prise entre le marteau et l’enclume vu la procédure ouverte contre elle en France défendra ses clients notamment en leur fournissant toutes les indications nécessaires prouvant comment les données fondant la demande d’assistance française se sont retrouvées dans l’une de ses filiales allemandes.