En 2021, nous célébrons le 10 ans de la médiation dans le code de procédure civile suisse. Toute affaire civile, par exemple concernant la famille, le voisinage, le travail, etc. peut quitter la procédure en cours, tenter une médiation et le Tribunal ratifiera l’accord trouvé en médiation. Les avantages de cette nouvelle philosophie de justice alternative sont nombreux :
- les parties décident elles-mêmes du résultat et du processus, le/la Juge le ratifiera, pour autant qu’il respecte le cadre légal
- la médiation peut prendre en compte les aspects non juridiques du litige, par exemple les émotions, les besoins, l’avenir, le contexte, etc.
- la médiation est totalement confidentielle. Selon la loi, les juges ne peuvent pas prendre en compte les éventuelles violations de la confidentialité concernant une médiation et les médiateurs et médiatrices jouissent du secret professionnel
- la médiation est plus rapide – 2 à 3 mois environ – contrairement à une procédure judiciaire qui dure facilement 1 année ou 2, voire nettement plus
- la médiation est moins coûteuse, en moyenne, elle dure 3 à 5 séance à 1h ou 1h30 à des tarifs horaires qui varient entre 150.- et 250.-. Ensuite, la facture est divisée par deux, chaque partie en porte seulement la moitié
- le taux de réussite de la médiation est autour de 75% selon la Fédération Suisse des Associations de Médiation
- la relation des parties peut rester intacte, ce qui est souvent pas le cas après une procédure judiciaire
- la médiation est plus agréable, elle se fait au rythme des parties, dans un esprit constructif, gagnant-gagnant, sans casse-têtes juridique et sans lettres méchantes qu’on recevrait entre deux audiences au Tribunal. Les séances se font au cabinet du médiateur, avec un café habituellement…
- la médiation reste totalement volontaire. Si souhaité, une partie peut unilatéralement mettre un terme à la médiation, sans besoin de justification
Ainsi, quel que soit la situation, tenter une médiation est fortement recommandé. Au pire, on s’arrête après la première séance, tout reste confidentiel et au niveau de l’investissement, cette tentative se limite à une heure de temps et environ CHF 100.- de dépenses par partie, tandis que les chances de réussite sont à 75% !
Pourquoi alors autant d’affaires continuent à partir en justice plutôt qu’en médiation ? Il y a bien sur le fait que la médiation ne soit pas encore très bien connue, beaucoup de travail reste à faire pour promouvoir la médiation comme véritable alternative à la justice traditionnelle. Voire même de renverser la logique et de considérer carrément la médiation plutôt que la Justice comme véritable tradition humaine, approche constructive et durable de transformation des conflits par excellence. Ces sont bien sûr avant tout nos habitudes qui empêchent cela pour le moment. Le fameux « on a toujours fait comme ça » s’applique là aussi, on s’accroche à ce qu’on connait. On peut pourtant observer un changement dans certains pays. En France par exemple, dans quelques juridictions, la médiation est devenue un préalable obligatoire à l’accès au système judiciaire pour quelques affaires familiales, par exemple : le lieu de résidence de l’enfant, l’autorité parentale, la contribution à l’entretien. Quant aux litiges pécuniers, l’obligation d’une tentative de médiation s’applique à toute affaire dont le montant est inférieur à 5’000 EURO.
Mais il y a un autre élément important que fait que certains préfèrent la Justice à la médiation : le sentiment de sécurité. L’avocat nous protège, il est de notre côté. Ce besoin correspond à la théorie d’escalade des conflits selon l’autrichien Friedrich Glasl : à partir d’un certain degré d’escalade des conflits, les parties cherchent des alliés et l’avocat se propose tout naturellement pour remplir cette fonction. Il est plus simple de faire la guerre que de faire la paix. La médiation demande un effort émotionnel et une attitude constructive vis-à-vis des conflits : il faut comprendre le conflit comme faisant naturellement partie de la vie en communauté. Ce qui est important ce n’est pas son existence, mais la façon dont nous le gérons.