Biodiversité & entreprises, une dynamique mondiale qui rappelle celle pour le climat
Entre les grèves du climat et le prochain cadre mondial pour la biodiversité des Nations Unies, les entreprises prennent lentement mais sûrement une place primordiale, comme pour le climat. Qui se souvient encore de l’époque où le climat n’était pas un enjeu de la politique suisse ?
La France, pionnière de la standardisation “biodiversité & entreprise”
Le début de l’année a vu apparaître une norme française pour standardiser l’intégration de la biodiversité dans le secteur privé. Cette norme remplit plusieurs besoins propres au secteur privé : adaptabilité, complémentarité et reconnaissance.
- Elle s’adapte à toute taille d’entreprise : une grande entreprise pourra l’appliquer soit à l’une de ses unités soit à l’ensemble du groupe ; une microentreprise pourra démarrer sa politique environnementale par la biodiversité.
- Elle est complémentaire et cohérente avec les normes environnementales ISO tel que la norme 14001, facilitant son intégration à un SME existant. De même, elle permet d’intégrer d’autres directives telles que celles des « Science-Based Targets for Nature » ou des initiatives nationales « Entreprises & Biodiversité ».
- Elle est reconnue par l’ensemble des acteurs (français) de la conservation et permet ainsi de travailler avec un langage et une méthodologie commune. De ce fait, une entreprise pourra valoriser aisément l’application de cette norme auprès des clients mais aussi développer des partenariats sur cette base.
Et pourquoi pas une norme mondiale ?
La création d’une norme ISO sur les démarches biodiversité est fortement souhaitable car elle fournira une méthodologie de portée mondiale. Afin d’être largement appliquées, ce standard pourrait présenter les caractéristiques suivantes.
En premier lieu, cette norme ISO doit être adaptée aux entreprises qui ont une activité internationale. De ce fait, elle doit être cohérente avec futur cadre mondial pour la biodiversité (de la Convention pour la Diversité Biologique).
Deuxièmement, les outils et approches vont encore évoluer ces prochaines années. Ces développements devront être valorisé dans la norme ISO, afin de s’assurer que le secteur privé bénéficie aussi des dernières connaissances de la recherche scientifique. Les tendances liées à l’état de la biodiversité ne devraient, elles, pas changer durablement.
Troisièmement, le secteur privé commence à développer les ressources financières et les connaissances pour mettre en œuvre des démarches biodiversité. Une norme ISO devrait donc s’adapter à cette montée en puissance qui s’opère actuellement au sein des entreprises.
Finalement, la diversité des systèmes politiques représentés au sein de l’ISO est sûrement un grand défi, car la conservation engage généralement fortement les autorités. Trouver le bon niveau d’interaction entre les entreprises et les planifications gouvernementales pourrait être un défi.
Quelle adaptation pour la Suisse ?
La pertinence de créer une norme SVN sur la biodiversité est peut-être à confirmer. Quoiqu’il en soit, il serait bon de garder à l’esprit certaines spécificités helvétiques.
La conservation de la biodiversité est majoritairement de la responsabilité des cantons. Ce sont aussi eux qui gèrent la majorité des moyens financiers à disposition. De ce fait, une norme SVN devrait prévoir un lien avec les politiques publiques cantonales et leurs plans d’actions.
Un environnement propice à l’innovation est une condition pour impliquer les entreprises. Au regard du commentaire ci-dessus, une norme suisse devrait combiner le temps long des administrations avec le temps court de l’économie.
La reconnaissance d’une potentielle norme par toutes les parties prenantes de la conservation (y.c. ONGs et milieux académiques) est essentielle. Son élaboration devrait donc intégrer cette nécessité, afin que les entreprises puissent ensuite s’appuyer sur cette légitimité.
Une norme suisse, une importante contribution à la conservation
Une telle norme en Suisse pourrait accélérer l’engagement du secteur privé et faire évoluer la conservation, en Suisse, vers une version 2.0. En effet, l’élaboration d’une telle norme nécessitera des solutions qui n’existent pas actuellement. Cet air frais s’accompagnera sûrement de nouvelles perspectives, financières et opérationnelles, pour la biodiversité suisse.