Une quarantaine si peu diplomatique

Médiation sur la visite de Sebastian Kurz à Berne…

Tout était prêt, pour mai dernier. Les billets réservés depuis janvier, l’avion aussi. Destination Vienne pour un week-end placé sous le sceau de l’art lyrique, à la Staatsoper. Trois œuvres au programme dont un Guillaume Tell garni des plus scintillantes promesses, avec une prise de rôle de Juan Diego Florez. Puis est venu ce que l’on sait et tout s’est écroulé. Le virus avait vaincu…

Ce n’était que partie remise m’étais-juré. Rebelotte donc pour septembre, programme moins prestigieux mais hautement attractif. Entre opéra et Apfelstrudel, tout s’annonçait sous les meilleurs auspices ! Et puis patatras, à nouveau… Est-ce une deuxième vague, la suite de la première, un rebond au milieu d’un malheur sans fin ? Peu importe, l’anxiété est à son comble et le 11 septembre, rideau. Vienne est inscrit sur la liste rouge, celle des territoires maudits. Pas question de risquer une quarantaine au retour de la capitale autrichienne. Annulation donc, un arrangement est trouvé avec Swiss ; pour les billets, on repassera : remboursés la première fois, raté cette fois…

Dommage, dommage, triste automne. Puis l’incompréhension : notre monde, déjà fou avant la pandémie, encore plus pendant, marcherait-il définitivement sur la tête, notre pays compris ? Le 16 septembre, hier donc, la presse annonce une visite à Bene prévue le vendredi 18 septembre de… Sebastian Kurz. Oui, le chancelier de l’ « Alpenrepublik », comme on dit là-bas… Avais-je loupé une page ? Le gouvernement autrichien avait-il été déclaré en exil, quelque part entre Klagenfurt et Graz, un peu comme le gouvernement de Gambetta réfugié à Tours en 1870 après la défaite contre les troupes prussiennes ?

Pas que je sache… Or doncques Sebastian Kurz est attendu à Berne. Ce n’est pas une plaisanterie. C’est dans nos journaux. Une visite de travail de 10 jours, me suis-je dit, quarantaine oblige… Que nenni ! Un jour !!! Simonette Sommaruga, censée le recevoir sera-t-elle vêtue de son élégant scaphandre ? On ne sait jamais, le virus… Et zoom ? Et Webex ? Pour le « Fussvolk » ? Ils parleront pandémie : un witz ?

Pendant ce temps, ruminant mon week-end viennois tombé dans les eaux du Danube proche, je m’interroge. Je n’ai pu aller à Vienne car je risquais un retour compliqué pour cause de quarantaine… Et Kurz ? Il va faire comment ? Question trop naïve, je l’admets… Mais bon, qui va me rembourser mes billets d’opéra ? Le paquet législatif voté par les Chambres prévoit-il ce cas subtilement complexe ? Je crois que ce sera un don à la Staatsoper, un peu forcé certes, mais ce n’est pas grave : cette honorable maison pourra ainsi réinviter Florez, en d’autres temps…

Je saurai me consoler. J’irai à Florence, dans un pays où on peut encore aller, aux dernières nouvelles. Machiavel y est né et y est mort, cela soulage…

Olivier Meuwly

Docteur en droit et ès lettres, Olivier Meuwly est auteur de plusieurs ouvrages portant sur l'histoire suisse, l'histoire des partis politiques et l'histoire des idées. Auteur notamment d'une biographie du Conseiller fédéral Louis Ruchonnet (1824-1893) et de l'ouvrage: «La droite et la gauche: Hier, aujourd'hui, demain». Essai historique sur une nécessité structurante (2016). Son dernier livre: "Une histoire de la démocratie directe en Suisse" (2018).

Une réponse à “Une quarantaine si peu diplomatique

  1. Cher Ami,

    De Moscou où je réside, j’ai suivi avec intérêt ton interview sur RT France à propos de l’initiative et du référendum en Suisse. Il m’arrive de temps à autre de me livrer ici à cet exercice et Je pense que tu as très bien expliqué un sujet qui malgré la concision et sa simplicité des articles constitutionnels est très mal compris à l’étranger.

    Amitiés H!
    Arnaud

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