C'est ma tournée!

Visite de nouvel an à Jacky Blot, fameux vigneron du val de Loire (troisième et dernier épisode)

Jacky Blot peut aujourd’hui savourer son succès. Il y a trente ans, il s’est montré précurseur en choisissant de réaliser, à contre-courant des tendances de l’époque, des vins plus épurés, plus digestes, plus naturels et plus authentiques. Cela au moment où les pionniers de la nouvelle cuisine épousaient eux aussi cette voie, mais dans le domaine culinaire. Et si ces choix peuvent sembler une évidence aujourd’hui, Jacky Blot lui-même n’aurait jamais imaginé, voilà encore 15 ans, que son travail à la Taille aux Loups rencontrerait un tel succès.

Un vieux loup de terre

A l’époque, le bio a aussi été pour lui une évidence alors que personne ou presque n’y croyait, mais si Jacky a les pieds bien ancrés sur terre, il n’a pas forcément la tête dans les étoiles. Il ne cache pas, par exemple, son scepticisme (pour ne pas dire plus !) vis à vis de la biodynamie, cette pratique culturale qui prône de travailler en fonction des astres, et où l’on utilise des potions homéopathiques. « Trop ésotérique, trop sectaire !», juge celui qui avait 20 ans en 1968. Il ne fait pas non plus mystère de ses doutes sur les vins dits naturels, avec en principe très peu (voire pas du tout) de soufre (SO2), « ce qui les rend trop souvent déviants », estime Jacky, pas franchement admiratif non plus de « la petite Greta Thunberg » qui lui porte sur les nerfs.  « Il faut bien que jeunesse se passe ! », conclut notre vieux loup de terre.

Autant dire que prendre la suite d’une si forte personnalité qui marche avant tout à l’instinct n’est jamais simple.  La fille de Jacky – une Sciences Po – en a d’ailleurs fait l’expérience… avant – à son grand regret -, de jeter l’éponge. Son frère Jean-Philippe, après des études viti-oeno et deux longs séjours professionnels à Bordeaux puis en Nouvelle Zélande, a eu plus de succès. Douze ans que le père et le fils travaillent ensemble. Ils ont racheté des vignobles à Montlouis, Vouvray, mais aussi à Bourgueil où ils produisent un joli rouge bio – le domaine de la Butte – à la fois fruité, élégant, boisé et charpenté. Ils sont aussi en train de creuser de nouvelles caves afin de répondre à l’agrandissement du domaine, mais aussi parce que, rappelle Jacky, « ces vins ont un potentiel de garde important. Ces caves vont nous permettre de proposer des millésimes de plus de dix ans à nos clients. »

Le grand défi du réchauffement climatique

Mais pour Jean-Philippe, l’enjeu véritable, c’est le réchauffement climatique. « Autrefois on vendangeait fin octobre, aujourd’hui début septembre. Or à cette période de l’année, les températures peuvent monter très vite et il faut se montrer super réactifs pour vendanger les raisins pile à maturité. Autant dire qu’arriver à mobiliser en deux jours plus d’une centaine de personnes, sans parler du matériel, n’est pas une petite affaire ! »

Ce sera demain à Jean-Philippe, et à lui seul, de relever ce défi.

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