Tous perturbés?

La semaine dernière, une étude menée conjointement par la RTS et le magazine Bon à Savoir, montrait que les enfants romands étaient largement contaminés par des perturbateurs endocriniens.

Cette étude est un coup de sonde. L’urine de 33 petits et jeunes romands a été analysée pour y chercher différents composés dont le bisphénol A ou les phtalates.

Sans surprise, tous les enfants avaient des taux plus ou moins élevés de perturbateurs endocriniens dans leur urine. Et nul doute qu’il en irait de même si on analysait notre propre urine.

Cela confirme une fois de plus que nous baignons dans une soupe chimique. Et que les substances auxquelles nous sommes exposés quotidiennement peuvent entrer dans notre corps, que ce soit par notre alimentation, par la respiration ou par la peau.

Mais revenons un peu en arrière. Que sont ces fameux perturbateurs endocriniens?

Cette notion est apparue pour la première fois au début des années 1990. C’est la chercheuse Theo Colburn qui met en lumière ces substances qui perturbent le fonctionnement du système hormonal.

Certes, les substances elles-mêmes ne sont pas nouvelles. Par exemple le fameux DDT, l’insecticide qui a fait l’objet du livre Silent Spring de Rachel Carson, en fait partie. En 1990, il est déjà interdit dans les pays occidentaux.

Mais ce que montre Theo Colburn, et les chercheurs de l’époque, c’est que ces substances peuvent mimer les hormones. En clair, elles prennent leur place et induisent des effets “non voulu” par le corps lui-même.

Exposés à des stades clés de développement, par exemple pendant la phase de différentiation sexuelle lors de la gestation, les individus peuvent développer des caractéristiques à la fois mâles et femelles. Cela a été montré notamment chez les poissons.

Les perturbateurs endocriniens peuvent agir comme des hormones sexuelles, mais également comme des hormones tyroïdiennes. Ou encore ils peuvent avoir une action sur différentes glandes à l’origine de la production d’hormones, réduisant ou augmentant leur production.

En 1996, Theo Colburn va en faire un livre, “Our stolen future” (notre futur volé), qui pose notamment la question des effets sur la fertilité humaine, à long terme, de ces fameux perturbateurs endocriniens.

Car ce que remettent aussi en question ces substances, c’est le principe de Paracelse.

Depuis le début des études toxicologiques, les chercheurs sont partis de l’hypothèse que la dose faisait le poison. Le fameux principe de Paracelse. En clair, plus l’exposition de l’individu est élevée, plus l’effet est important.

Or les perturbateurs endocriniens bousculent cette hypothèse. Il semble en effet qu’ils puissent exercer des effets toxiques à de très faibles doses. Parfois même les effets à très faibles doses sont plus importants que ceux observés à une dose plus élevée. La dose ne fait plus le poison.

La conséquence de cette observation, c’est qu’il n’est plus possible de fixer des valeurs seuils en dessous desquels l’exposition est dite sans effets. Et donc que toute exposition à des perturbateurs endocriniens peut être problématique.

En continuant ce raisonnement, cela signifie que les substances reconnues comme perturbateurs endocriniens doivent être interdites.

Pas si simple.

D’abord, les agences gouvernementales semblent peu enclines à reconnaître cette nouvelle relation entre la dose et les effets. Ainsi au début du mois de février 2021, l’Endocrine Society, qui regroupe 18’000 spécialistes du système hormonal, critique sévèrement l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) pour la non prise en compte de cette relation dans un projet de rapport sur les substances chimiques (via Le Monde).

Ensuite la définition des perturbateurs endocriniens fait débat. Après plus de 10 ans de tergiversations, l’Union européenne accouche enfin d’une définition en 2017.

Reste que cette définition est très contraignante. En effet, pour être déclaré “perturbateur endocrinien”, il faudra démontrer, entre autre, que la substance a un mode d’action qui altère une ou des fonctions du système hormonal. Mais surtout, il faudra démontrer que les effet toxiques observés à l’échelle de l’individu sont une conséquence directe de ce mode d’action.

Or il est très compliqué de faire un lien entre le mode d’action (par exemple la liaison de la substance avec un récepteur hormonal) et des effets observés (par exemple une baisse de la fertilité). Ce qui laisse la place ouverte aux controverses.

De plus cette définition ne considère que l’être humain, et non les espèces de l’environnement.

On est donc bien loin d’avoir des outils pour légiférer sur les perturbateurs endocriniens.

Alors que faire?

Comme déjà mentionné plusieurs fois, si on ne peut échapper aux substances chimiques, on peut cependant tenter de diminuer son exposition. En faisant attention à son alimentation, aux cosmétiques utilisés, aux détergents, etc…

L’émission “On en parle” a consacré son guichet de mercredi 10 février aux questions des parents dont les enfants ont été testés. Avec des pistes de solutions.

Reste que le citoyen lambda, vous, moi, ne pouvons pas faire grand chose pour éviter l’exposition via notre veste, traitée avec des perfluorés, ou notre canapé, traité avec des retardateurs de flamme organophosphates. Ces traitements ne sont pas déclarés.

Il faudrait donc faire des choix politiques forts pour avancer dans ce domaine.

Peut-être une bonne nouvelle? L’Union européenne, dans sa stratégie pour un monde sans pollution chimique, semble décidée à s’attaquer aux perturbateurs endocriniens.

Dossier à suivre.

 

Nathalie Chèvre

Nathalie Chèvre est maître d'enseignement et de recherche à l'Université de Lausanne. Ecotoxicologue, elle travaille depuis plus de 15 ans sur le risque que présentent les substances chimiques (pesticides, médicaments,...) pour l'environnement.

22 réponses à “Tous perturbés?

  1. Je suis père et ce sujet m’inquiète.
    Je trouve que les politiques n’ont pas assez de courage, ou plutôt j’ai l’impression qu’ils écoutent plus leurs sponsors et les lobbys qu’ils ne s’occupent du bien de tous.
    Un minima, sans passer par l’interdiction, c’est d’informer le consommateur. On devrait mieux connaitre la composition de ce que l’on achète.
    Je pense qu’il faudrait aussi renforcer la responsabilité juridique des industriels sur les futurs causes possible de tous ces produits.
    Si le risque procès/indemnisation devient plus important que les profits possibles, les produits qu’ils vont vendre vont évoluer.

    1. Je ne peux qu’être d’accord avec vous. Travaillant dans ce domaine depuis plus de 20 ans et étant moi-même maman, je trouve que les choses avancent très lentement. Voir reculent parfois. Et je constate aussi que ce n’est pas du tout une priorité pour les autorités de manière générale. Seules les associations de consommateurs arrivent à faire pression dans certains cas. Comment changer cela? A ce stade je ne sais pas.

  2. L’illustration est belle, est-elle de vous?
    On ne sait s’il s’agit de Soja Beans (OGM) ou d’un dessin d’artiste.

    C’est dommage qu’on ne puisse envoyer des pics sur ces blogs du Moyen-Age de référence, j’ai un traitement différent du soja/spermato, sur verre recyclable 🙂

    1. L’illustration n’est pas de moi. C’est une image libre de droit issue d’une base de données.

  3. Un grand merci pour vos articles que je trouve toujours très intéressants et utiles. Je suis toujours contente lorsque je découvre sur la page du Temps un nouvel article de votre part ; même si les sujets sont toujours un peu alarmants, j’apprends toujours quelque chose, et je suis en même temps heureuse de lire des articles un peu plus scientifiques que d’ordinaire sans devoir passer par des revues spécialisées (celles-ci étant, de plus, souvent rédigées en anglais). Mille mercis!

    1. Merci beaucoup pour votre message. Un feedback important pour moi car je n’ai pas vraiment de moyens de savoir si mes articles sont lus et si ils sont utiles.

  4. Bonjour.

    Oui, vos articles sont lus. Je suis toutefois étonnée (peut-être ai-je raté quelque chose) que personne, vous y compris, ne parle jamais des effets extrêmement délètres des radiations et de l’électrification extrême et en constante augmentation dans lesquelles nous baignons au quotidien (5G, 4G+, 4G, 3G, ondes hertziennes, satellites, etc. etc. etc.). Les effets néfastes sur la santé (interférences sur les canaux de Calcium, blocage de certains processus enzymatiques, usure extrêmement rapides des stocks de NAD+, induction de symptômes “grippaux”, respiratoires et cardiovasculaires, etc.) sont très bien documentés , notamment dans les pays de l’ancien bloc soviétique, certains pays d’Asie et la Finlande. Un livre exceptionnel sur le sujet (1/3 du livre est fait de références scientifiques par ailleurs) est le livre de Fistenberg, “The Invisible Rainbow”. Etant ingénieure de formation moi-même, je mesure régulièrement les ondes électromagnétiques en Suisse et toutes les normes sont totalement dépassées (pas par “antenne” par exemple, mais en prenant en compte le “tout”). Au centre de Lausanne, à titre d’exemple, on est à plus de 10x le seuil autorisé ce qui est absolument scandaleux – Swisscom et les autres opérateurs le savent très bien, ils les mesurent aussi.

    Or, ce sujet est totalement ignoré et complètement tabou. Quiconque en parle est automatiquement classé dans le “complotisme” ou simplement ignoré si pas insulté ou au minimum nommé d’urluberlu. C’est clair que c’est beaucoup plus “arrangeant” pour certains de faire ainsi que de voir la vérité.

    Nous baignons dans ces radiations cancérigènes et anti-métaboliques constamment, dormons avec et n’avons jamais de répit, or, silence complet. Ces radiations sont bien plus nocives (malgré ce que les soi-disants “experts” autoproclamés veulent bien nous faire croire) que la grande majorité des pesticides et autres toxines environnementales pourtant personne n’ose jamais réellement aborder le sujet. Des statistiques extrêmement claires démontrent par ailleurs le lien absolument évident entre “l’électricifcation” d’une région et le taux de cancers par habitant, notamment chez les enfants. Les autorités le savent, puisqu’elles ont elles-mêmes publié certaines de ces statistiques. Alors ?

    Qu’en pensez-vous ? A quand un article détaillé dans ce domaine ? Le livre que je vous ai indiqué peut être un très bon point de départ pour quiconque souhaite se pencher sur la chose.

    Je ne peux que vous encourager de continuer à faire ce que vous faites et vous pencher également sur le problème “électromagnétique” car il fait partie intégrante (probablement la partie la plus importante même) de la “toxicologique environementale”.

    A noter également que ces radiations ne sont pas seulement nocives pour l’être humain, mais également pour les animaux et l’environnement en général (d’ailleurs, le “réchauffement” climatique n’est-il pas “normal” sachant que nous sommes tous littéralement dans un micro-ondes ? Plutôt qu’accuser (faussement) le CO2 ne devrions-nous pas voir et se pencher sur ce qui est évident ?).

    1. Merci pour votre message. Les effets à long-terme des radiations auxquelles nous sommes exposés de multiples manières mériteraient d’être étudiés, vous avez raison. Mais ce n’est pas mon domaine de compétences. Ma recherche est consacrée au risque des substances chimiques de synthèse sur l’environnement. J’ai choisi de parler de ce que je connais le mieux.

    2. Bonjour,

      Ce serait volontiers pour des sources fiables de ce que vous avancer. Je suis relativement sceptique sur le sujet et de la documentation m’intéresserait. Je n’ai jamais lu de lien « évident » concernant l’électricité et des cancers.

      Que faire également des autres radiations et ondes naturellement présentes dans notre environnement ?

      Merci d’avance,

      1. Bonjour AJ,

        Commencez par lire le livre de M. Arthur Firstenberg “The Invisible Rainbow”. Il est très complet avec de très nombreuses sources “fiables” y compris celles du gouvernement suisse (des centaines de références). Vous ne pourrez qu’en sortir convaincu, je vous l’assure.

        Je ne vais pas resortir ici ces centaines de sources alors que l’auteur a déjà fait ce travail monumental dans le livre cité. Le lien est absolument évident depuis des décennies mais caché et ignoré car l’argent passe avant la santé (malgré ce qu’on nous fait croire avec la crise actuelle).

        Intéressant de noter également que les épidémies annuelles de la grippe, de la grippe espagnole, grippe de Hong Kong, etc. correspondent parfaitement dans le temps et l’espace avec des hausses drastiques ou “bonds” d’électrification de notre société dans le même temps et espace (décrit avec très grand détail et minutie dans le livre avec références également).

        L’auteur a par ailleurs parfaitement prévu et expliqué la crise actuelle du “Corona”, et le livre a été écrit juste avant la crise (il y explique même les fameuses “vagues” et tout le cirque qui va avec, sous un angle très différent de ce lui conté par les médias et la propagande de peur actuelle) – un angle qui explique absolument tout ce qui est inexplicable selon la théorie officielle et qui montre ce qui se passe réellement et sous nos yeux. Je vous assure que beaucoup de choses incompréhensibles vous seront très claires et logiques une fois le livre achevé (à condition d’avoir l’esprit ouvert et simplement accepter d’observer ce qui se passe juste devant vous au quotidien).

        Bonne lecture !

        1. Bonjour Nathalie,

          Merci pour votre réponse rapide. Je vais y jeter un oeil.

          Beaucoup de personnes avaient justement prédit l’arrivée d’une pandémie, ce n’était qu’une question de temps.

          J’ai l’esprit ouvert, mais reste toujours sur mes gardes face à ce que j’observe et ce que je lis. L’observation peut être l’ennemie de ce qu’il se passe réellement.

          Mais vous sembler suggérer un lien de causalité avec ceci (ce qui est très difficilement prouvable généralement) et il ne semble ne pas avoir vu qu’il y avait consensus sur la question des radiations. J’ai fait quelques rapides recherches afin de vérifier s’il y avait consensus et il semble que l’OMS n’indique rien allant dans ce sens, malgré qu’il y ait besoin d’études supplémentaires.

          Un peu de lecture sur le sujet ne fera pas de mal par conséquent, mais je reste cependant sur mes gardes. Un esprit ouvert, c’est un esprit qui sait écouter les preuves qui le dérange et non pas qui accepte sans preuve des idées qui lui plait, n’est-ce pas?

          1. Merci AJ et Nathalie. Je trouve le débat sur les effets des ondes tout-à-fait important. Par contre, comme ce n’est pas le propos de mon article de blog, je suggère cependant que vous le continuez en mp. Je peux volontiers vous communiquer vos mails réciproques.

    3. bonjour Nathalie,
      Merci pour vos informations toujours très intéressantes. J’ai une question au sujet de ces perturbateurs endocriniens : je suppose que nombre d’entre eux sont absorbés par les êtres vivants par l’intermédiaire de l’eau et que les stations d’épuration ancienne génération ne doivent pas être très efficaces pour les éliminer au contraire de celles de la nouvelle génération. Dès lors, l’achèvement du déploiement de ces futures stations étant agendé à 2040, ne serait-il pas bien d’accélérer le mouvement. Ceci aurait également un effet bénéfique sur la multitude d’autres micropolluants que nous balançons par tonnes dans nos eaux sans en connaître la portée sur l’
      Environnement et notre santé ? Merci et meilleures salutationd

      1. Bonjour, je ne suis pas convaincue que la plupart des pertubateurs endocriniens soient absorbés par l’eau. Les études sur les pesticides montrent que l’alimentation est un vecteur plus important. De plus, l’exposition via la respiration n’est quasi pas étudiée. Or pour l’air intérieur et les poussières, c’est certainement crucial.Par contre, il est clair que l’amélioration du traitement des eaux usées va également améliorer la qualité de nos ressources en eau.

  5. Bonjour,
    Le sujet des perturbateurs endocriniens et l’évolution de la réglementation au niveau de l’Union Européenne a été traité de manière extrêmement fouillée par la journaliste S.Horel. Cela a donné lieu à un documentaire visible ici : https://www.dailymotion.com/video/x29brxa (où on apprend que les pesticides perturbateurs endocriniens représentent 40% du business de l’agrochimie)
    et au livre “Intoxication” (dont le titre résume bien le contenu)
    https://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Intoxication-9782707188694.html
    Si après tout cela vous n’êtes par encore complètement dégouté :
    – l’invention d’une “science” par l’EFSA où on écrit la conclusion avant d’avoir fait l’étude :
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2016/11/29/perturbateurs-endocriniens-la-fabrique-d-un-mensonge_5039862_3244.html
    – les lobbies à l’œuvre :
    https://www.editionsladecouverte.fr/lobbytomie-9782707194121

  6. Bonjour à toutes et tous,
    Depuis un bon moment déjà je suis persuadé de l’ampleur des dégats.
    Ce qui me semble tout à fait évident c’est la mauvaise foi dans l’abandon radical des responsables politiques de leur mission première qui est protéger les citoyens. La lacheté devant le harcèlement des lobbies inconscients et à courte vue me donne envie de vomir.
    Et les citoyens abrutis de faux débats et de propagande de continuer à voter pour des baratineurs sans scrupules.
    J’en suis rendu à prier pour que le virus mette à genoux toute cette spirale infernale. Le chantage aux emplois a bon dos.
    Belle journée

  7. Bonjour Nathalie,

    Merci pour ce billet.
    Je me renseigne sur l’environnement depuis 10 ans, je suis rh.
    Je suis atteint d’un trouble neurodéveloppemental (TOC-TDAH).
    Cherchant la cause ou les facteurs de risques, je me suis plongé dans les livres d’André Cicollela et de Barbara demeneix. Certaines études épidémiologiques pointent du doigt le bisphénol et les phtalates dans le développement de l’autisme et de troubles neuro-développementaux.

    Le problème, comme vous devez le savoir, est que les industriels ont tout intérêt à cacher les effets de leurs produits sur la santé des gens. On en vient à ne plus savoir qui croire (Le documentaire la fabrique de l’ignorance explique très bien ceci).

    Ma question est très simple au vu de votre métier : se pourrait t-il que l’explosion de maladies neurodéveloppementales soit dûe à l’exposition des mamans durant la grossesse ?

    Qui a concrètement intérêt à faire retarder le consensus sur les PE ? Quel est exactement le rôle de l’afis en france vis à vis des industriels (cf les gardiens de la raison).

    J’espère que vous pourriez m’aider dans ma démarche d’information.
    Merci 🙂

    1. Bonjour, si vous avez lu les écrits de Mme Demeneix, vous savez que les perturbateurs endocriniens, dont ceux que vous citez, sont effectivement mis en cause dans nombre de maladies. Mais qu’il est complexe de mettre en évidence un lien de cause à effet. Pour les maladies neurodéveloppementales, j’avais lu que les pesticides orthophosphates, utilisés comme phytosanitaires, mais aussi comme plastifiants, retardateurs de flamme et autre, étaient mis en cause par des études suggérant “qu’une exposition précoce à des taux faibles de pesticides organophosphorés via l’alimentation pourrait favoriser le risque de survenue d’un trouble attentionnel”: https://bvs.anses.fr/sites/default/files/BVS-mg-013-Schroeder.pdf. Pour ma part, je travaille sur les effets toxiques sur les espèces de l’environnement. Ce qui est différent de l’être humain. Mais ma doctorante est en train de regarder les effets multigénérationnels de tels pesticides sur des microcrustacés. Ce qui pourrait nous donner des indices pour l’Homme? Qui a intérêt à retarder le processus? Je pense que les lobbies industriels y sont bien sûr pour quelque chose. Mais il n’existe pas énormément de littérature sur le sujet. Le livre “Toxiques légaux” de Henri Boullier est intéressant dans ce sens: https://www.editionsladecouverte.fr/toxiques_legaux-9782707199713. Enfin je ne connais pas assez le système français pour connaitre l’afis. J’espère avoir pu vous aider en partie.

      1. Nathalie,

        Il y a un excellent documentaire qui a été diffusé sur Arte cette semaine et qui concerne la fabrique de l’ignorance. A partir du cas d’école inventé par l’industrie du tabac à partir des années 50, il montre comment la boîte à outils des scientifiques recrutés par l’industrie du tabac est utilisée par les industries des pesticides (dans le cas des néonicotinoïdes), de l’amiante, des CFC etc. Le cas emblématique du bisphénol A y est également décrypté, on apprend, en autres, que dans ce cas les industriels utilisent dans leurs études “scientifiques” une souche de rats de laboratoire qui est justement peu sensible aux dérèglements hormonaux induits par les perturbateurs endocriniens…dont le bisphénol fait partie.

        Le documentaire intitulé “La fabrique de l’ignorance” est visible en replay jusqu’au 23 avril 2021 :

        https://www.arte.tv/fr/videos/091148-000-A/la-fabrique-de-l-ignorance/

        Par ailleurs, les effets délétères du bisphénol ont également fait l’objet d’un documentaire au sujet de l’apparition de malformations chez les chimpanzé ougandais.
        “C’est encore assez mystérieux pour nous… note primatologue française Sabrina Krief professeure au Muséum national d’histoire naturelle . Les chimpanzés mangent souvent le long de la route, car ils sont attirés par ces zones herbacées. Et même s’ils aiment surtout les fruits, ils mangent aussi au sol cette herbe qui se trouve peut-être contaminée par les bouteilles en plastique. C’est assez incroyable de se dire que les chimpanzés se trouvent exposés au cœur de la forêt tropicale, non seulement à des pesticides mais aussi à une pollution plastique que l’on n’aurait jamais penser atteindre jusque dans le cœur de cette forêt.” C’est en récoltant soixante-dix poils dans les nids de chimpanzés que la scientifique, a fait une découverte troublante…

        “Dans ces poils, on trouve du bisphénol A et du bisphénol S”

        L’analyse des échantillons révèle une pollution par le plastique. En cause, les bouteilles jonchant le bord de la route. L’équipe de cette titulaire d’un doctorat en écologie et chimie des substances naturelles en a ramassé 5 000 sur cinq kilomètres ! “Dans ces poils, on trouve du bisphénol A et du bisphénol S, une des traces de polluants plastiques”

        A voir aussi en replay:

        https://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-2/13h15/13h15-du-dimanche-14-fevrier-2021_4273217.html

  8. Bonjour Adil,
    L’AFIS est au cœur des controverses depuis de nombreuses années. Vous pourrez trouver des infos complémentaires en suivant le lien suivant :

    http://wiki.reopen911.info/index.php/AFIS

    Le meilleur résumé a sûrement été fait par l’astrophysicien Aurélien Barrau :

    » Quant-à-moi, du point de vue scientifique, je me sens à peu près aussi représenté par l’AFIS qu’un lapin de garenne par l’amicale des chasseurs du coin. »

    Ensuite, il existe des spécialistes du débunkage du discours de leurs membres, ici par exemple :
    https://factsory.org/ et sur twitter https://twitter.com/factsory
    mais en fait, comme leur posture est, sous couvert de science, totalement idéologique la discussion tourne court.

    Enfin, sur le livre “Les Gardiens de la raison” une recension a été faite ici :

    https://zet-ethique.fr/2020/09/27/recension/

    On pourra tout de même objecter que son auteur s’attarde sur l’ergotage systématique des gardiens de la raison sur des points qui sont totalement anecdotiques par rapport à la situation actuelle. Le fait qu’un chiffre erroné fut avancé au cours d’une émission télévisée sur le taux de résidus de pesticides dans les aliments a tourné en boucle pendant des mois sur les sites internet et dans les forums. Cela n’est pas sans rappeler ce qui s’était passé à propos du tabagisme passif où une étude déterminante contenait aussi un chiffre faux qui a engendré un déferlement de critiques alors qu’en privé, comme l’ont ensuite montré les documents de l’industrie du tabac, les scientifiques de big tobacco reconnaissaient la validité de l’étude. En l’occurrence, les résidus de pesticides peuvent être en dessous des normes réglementaires cela n’indique rien quand à leur innocuité réelle. L’allusion à Séralini est aussi sur ce point un marqueur évident de l’emprise des agences de communication dans le discours public. Par exemple, chaque article traitant des pesticides, des perturbateurs endocriniens dans Le Monde est abondamment et immédiatement commenté par des individus anonymes qui tentent de discréditer les journalistes auteurs (qui sont souvent, par ailleurs, les auteurs du livre sus mentionné). Le paroxysme fut atteint quand a éclaté la polémique sur le glyphosate et souvent la référence à Séralini servait à appuyer leur démonstration comme étant de la mauvaise science ou “junk science” dans leur dialectique. La référence omniprésente à la Science n’est pas le fruit du hasard, mais reflète au contraire une très bonne connaissance des éléments de décrédibilisation déployés depuis 50 ans par toutes les industries qui ont été mises en cause. Le complotisme avancé par l’auteur de la recension figure également parmi les éléments de langage de ces gardiens de la raison où les gens de l’Afis figurent en bonne place et qui est repris ici sans réflexivité.

    Les auteurs du livre ont publié une tribune intitulée “Faut-il debunker ces pseudos debunkers qui nous debunkent” pour mettre fin à la polémique et, depuis, il me semble que les critiques se sont tues.

    https://aoc.media/analyse/2020/12/01/faut-il-debunker-ces-pseudo-debunkers-qui-nous-debunkent-les-gardiens-autoproclames-de-la-science-1-2/

    “Les gardiens de la raison” est finalement un très bon livre qui met au jour tous les stratagèmes de la manipulation et l’idéologie sous-jacente. Les gens de l’AFIS n’y sont donc pas épargnés.

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