Petite chimie du quotidien

Du cuivre à revendre!

En ce début d’année, parlons un peu de la pollution par les métaux, thème que je n’ai pas beaucoup abordé jusqu’à maintenant.

Les problèmes de pollution métalliques et leurs impacts sur l’homme et l’environnement ne sont pas nouveaux. Au Moyen-Âge déjà, les tanneries rejetaient leurs effluents dans les rivières, et notamment du chrome, très toxique pour le vivant. Actuellement, 1.8 millions de personnes dans le monde, et notamment en Inde et au Bangladesh, sont encore impactées par les effluents de tanneries (source: worstpolluted).

L’arsenic est également un problème pour la sécurité d’approvisionnement en eau dans le monde. Plusieurs communes valaisannes sont d’ailleurs concernées, ceci à la suite de la révision de la valeur limite de l’OMS pour l’eau potable. Notons cependant que dans le cas de l’arsenic, il ne s’agit pas d’une pollution environnementale. L’arsenic présent dans l’eau est de source géogène, non liée à des rejets anthropiques.

Mais parlons un peu du cuivre. C’est un métal qui pollue de manière récurrente nos cours d’eau. On connaît la source de pollution agricole, le cuivre étant utilisé dans la vigne pour lutter contre le mildiou. Mais en milieu urbain, on en trouve également beaucoup. Et ceci n’est pas dû au traitement de la vigne.

En 2011, nous avions établi un bilan du cuivre rejeté par la région lausannoise dans la Baie de Vidy. En tout, 1500kg y sont rejetés chaque année, dont quelques 900kg finissent dans les sédiments.

La majorité de ces rejets se font lors des pluies, soit environ 10kg par évènement de pluie.

Mais pourquoi le cuivre est-il emmené par la pluie?

Si on regarde en détail les sources de pollution, on s’aperçoit qu’environ 1000kg/an sont liés au trafic routier. En premier lieu l’usure des lignes aériennes de bus qui entraîne une pollution de 670kg/an. L’usure des freins des voitures contribue quant à elle pour pas moins de 140 kg/an.

Ces particules de cuivre se déposent sur les routes et sont entrainées vers le milieu naturel par les pluies. En effet, en milieu urbain, une grande parties des eaux de route est rejetée directement dans les cours d’eau lors d’évènements pluvieux.

Il existe des solutions pour limiter ces rejets. Le nettoyage des routes en est un. Il permet de récupérer les poussières et d’éviter la pollution des eaux. Un autre système consiste à placer des “chaussettes” filtrantes dans les bouches d’égouts. Assez cher, et demandant un entretien régulier, ce système n’en est pas moins efficace.

Les bateaux contribuent quant à eux pour près de 43kg par an. En effet, les coques sont maintenant recouvertes de cuivre pour éviter le développement d’algues ou de coquillages. Bien moins toxique que les précédents produits “anti-foulings” comme le tributhylétain ou l’irgarol, le cuivre n’en est cependant pas moins également un polluant.

Mais dans la région lausannoise, c’est l’usage du cuivre pour les toitures et les chenaux qui contribue le plus à la pollution de la Baie de Vidy. Pas moins de 840 kg par an sont ainsi entrainés par les eaux de pluie.

Dans la construction, le cuivre est utilisé pour limiter le développement d’algues ou de moisissures sur les toitures ou dans les évacuations d’eau. Comme pour les bateaux, ce métal est utilisé pour son action toxique. Il n’est donc pas surprenant qu’il puisse ensuite être également toxique pour l’environnement.

Comme dans le cas des routes, il existe des solutions pour retenir le cuivre au bas des façades par des matériaux filtrants. Malheureusement, cette pratique n’est que rarement mise en place.

Avec les estimations que nous avons faites, nous pouvons évaluer le pollution des sédiments de la Baie de Vidy à 250 mg/kg en moyenne, ce qui n’est pas loin de la réalité. Or cette valeur se situe en dessus des valeurs d’effets pour les organismes aquatiques. Le cuivre a donc certainement un impact non négligeable sur la biologie de la Baie.

Le cuivre, mais également d’autres métaux comme le zinc, peuvent donc être un problème pour nos écosystèmes en milieu urbain. Comme dans le cas des eaux de routes, des solutions sont cependant possibles pour réduire les charges de ce qui est rejeté dans les eaux. A nous de les mettre en place!

 

Référence:

Chèvre et al. 2011. Substance flow analysis as a tool for urban water management. Water Science and Technology 63: 1341-1348.

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