Les mois de décembre et janvier sont souvent des mois propices à partir en Inde pour faire un voyage de terrain et profiter du pays. Cette année, c’est autrement qu’il faut voyager, par le cinéma, la littérature, la musique ou ses propres souvenirs.
En parcourant Netflix à la recherche d’évasion, je suis tombée sur une série dont le titre “A Suitable Boy” m’a tout de suite interpelée. A Suitable Boy, Un garçon convenable en français, est un roman écrit en 1993 par l’auteur indien Vikram Seth. Un best-seller de 1212 pages dans sa traduction française, qui met en scène les destins croisés de quatre familles (les Khans, les Chatterjis, les Mehras et les Kapoors) dans l’Inde des années 50, juste après l’Indépendance.
L’histoire commence à Brahmpur:
“Toi aussi tu épouseras un garçon que j’aurai choisi”, dit d’un ton péremptoire Mrs Rupa Mehra à sa fille cadette.
Ignorant l’injonction maternelle, Lata s’absorba dans la contemplation du grand jardin de Prem Nivas brillamment éclairé. Tous les invités s’étaient regroupés sur la pelouse. “Hum”, dit-elle. Ce qui ne fit qu’irriter un peu plus sa mère.
En suivant le périple de Mrs Mehra pour trouver un garçon convenable à sa fille, le lecteur est plongé dans les histoires d’amour de Lata, mais aussi dans la société de l’Inde des années 50 avec tous les défis qu’elle a à affronter, dont les premières élections nationales de 1951-52. Au fil des 19 chapitres, c’est une galerie de personnages qui se présente et de multiples intrigues qui se tissent mêlant amitié, amour, politique, liens familiaux, normes sociales, enjeux de sociétés. C’est aussi de nombreux lieux qui sont parcourus, Brahmpur, Calcutta, Delhi, Lucknow ou Rudhia.
Créée pour le compte de la BBC en juillet 2020, la série que diffuse Netflix est en six épisodes. Sur la base du roman de Vikram Seth, l’adaptation est réalisée par Andrew Davies (Bridget Jones, House of Cards), sous la direction de la réalisatrice Mira Nair (Salaam Bombay!, Monsoon Wedding). Transcrire un tel roman à l’écran est une gageure, puisque de nombreuses intrigues sont obligatoirement passées sous silence. La composition du scripte par Andrew Davies et les choix opérés par Mira Nair ont soulevé la critique indienne qui accuse la série d’avoir été réalisée principalement pour un public occidental et de passer trop rapidement et sans ligne claire sur des problèmes comme les conflits entre hindous et musulmans.
Néanmoins et malgré ces critiques justifiées, le visionnage de ces six épisodes est plaisant et offre une belle échappatoire à notre quotidien quelque peu morose de ce début d’année 2021. L’esthétique est soignée et le casting soutient magnifiquement la série. Tanya Maniktala campe une Lata fraîche et souriante, alors que Tabu prête ses traits à la courtisane Saeeda Bai, dont les ghazals ravissent son auditoire et le spectateur.
La série a également ceci de bon qu’elle donne l’envie de retourner au livre. Je dois avouer qu’il trônait fièrement dans ma bibliothèque depuis plusieurs années. Je l’avais commencé mais jamais fini. Aujourd’hui, j’ai l’envie de le reprendre et je suis contente de savoir qu’il m’accompagnera pendant de nombreuses heures de ce mois de janvier.
Par ailleurs, la citation de Voltaire choisie par Vikram Seth pour introduire son ouvrage répond parfaitement à notre époque: “Le superflu, cette chose si nécessaire…”.
Un grand merci pour le tuyau et tous mes voeux.
De l’Inde, je ne connais que l’aéroport, pour un stop à Munbai avant l’Asie et ses vitrines fracassées et ses nettoyeuses dormant sur leur balai, des odeurs envoûtantes, mais qui sait, un jour?