Le nouveau casier judiciaire informatisé suisse a fait débat

Le nouveau droit du casier judiciaire est entré en vigueur le 23 janvier 2023. Il est intéressant de se pencher sur ses progrès… et ses manques

La communication est passée quasiment inaperçue. Le 19 octobre dernier, le Conseil fédéral décidait de fixer au 23 janvier 2023 l’entrée en vigueur du nouveau droit du casier judiciaire. Cette innovation nous concerne tous, l’extrait de casier judiciaire pouvant être requis lorsque l’on postule pour un nouvel emploi, voire même parfois pour un nouveau logement.

La principale nouveauté est la numérisation de la procédure d’inscription et de consultation, qui s’inscrit dans une informatisation toujours plus importante de la justice. Un processus réjouissant, le but étant que cette dernière soit plus efficace et rapide. Le Conseil fédéral assure que le système informatique lié au casier judiciaire permettra d’enregistrer et de gérer les données du casier judiciaire de manière sûre, simple et rapide. Selon le gouvernement, les tribunaux, les ministères publics et les autorités d’exécution des peines auront à l’avenir la possibilité de saisir d’un simple clic les données au sein de Vostra depuis leur propre système informatique, au lieu de les enregistrer manuellement.

Des avantages pour le système judiciaire suisse, donc, mais aussi pour les particuliers : le prix de l’extrait de casier judiciaire est passé de 20 à 17 francs.

Il est intéressant de parcourir la synthèse des résultats de la consultation. On y voit d’abord que les délais de saisie des données dans le casier judiciaire ont divisé les parties prenantes à cette consultation. L’idée de passer à une semaine de délai avait été évoquée. Mais la plupart des avis récoltés ont été négatifs: de nombreux participants avaient la conviction que le raccourcissement du délai à une semaine n’aurait pu être respecté qu’à condition d’augmenter les effectifs, «mais que cette charge supplémentaire n’en vaut pas la peine étant donné que la nouvelle réglementation n’apportera aucune valeur ajoutée visible», selon la synthèse publiée par l’administration fédérale. Finalement, le Conseil fédéral a renoncé à raccourcir les délais de saisie des données dans le casier judiciaire; les autorités de poursuite pénale des cantons auront deux semaines, comme aujourd’hui.

La question des violences domestiques

Un autre point sur lequel il convient de s’arrêter concerne les violences domestiques. On remarque que quatre participants à la procédure de consultation ont demandé l’ajout d’une mention «violences domestiques» aux procédures en cours (modification de l’annexe 4 AP-OCJ)50. Selon le canton de Bâle-Campagne, cela aurait permis d’évaluer les risques, d’établir les priorités dans la lutte contre la criminalité et de lutter contre les féminicides. Bâle-Campagne, comme les Grisons, estiment que les autorités qui ouvriront une procédure pour violences domestiques auraient vu plus rapidement qu’une autre procédure pour violences domestiques était déjà en cours. Mais leur demande n’a pas été suivie.

Selon des chiffres publiés début 2022 par l’Office fédéral de la Justice, 1’154’055 jugements concernant 796’605 personnes étaient alors inscrits au casier judiciaire au 28 février 2022. Rappelons que sont notamment inscrits au casier judiciaire les jugements pour crime ou délit, lorsqu’une sanction est prononcée. Mais aussi les jugements pour contravention, notamment lorsqu’une amende de plus de 5000 francs est prononcée ou lorsqu’un travail d’intérêt général de plus de 180 heures est prononcé. C’est aussi le cas lorsqu’une interdiction d’exercer une activité, une interdiction de contact ou une interdiction géographique sont prononcées.

Miriam Mazou

Miriam Mazou est avocate à Lausanne et fondatrice de l'Etude Mazou Avocats SA. Elle est membre de la Fédération Suisse des Avocats (FSA), de la Société suisse de droit pénal (SSDP), de l'Ordre des Avocats Vaudois (OAV) et a été membre du Conseil de l'Ordre des Avocats Vaudois. Avocate spécialiste FSA en droit pénal, elle est l'auteure de nombreuses publications et donne régulièrement des conférences dans ce domaine, plus particulièrement en matière de criminalité économique. Elle est également Chargée de cours à l’Université de Lausanne.

3 réponses à “Le nouveau casier judiciaire informatisé suisse a fait débat

  1. C’est difficile d’obtenir une radiation des poursuites après une décision ultérieure par le tribunal qui rend les poursuites inexécutables, si le créancier ne les abandonne pas.

  2. Chère Madame, je vais vous confier un petit secret :

    Tous les terminaux utilisés par l’administration sont équipés de système d’exploitation Windows, tout a été construit dans un environnement Microsoft !

    Dans ces conditions, non seulement il est totalement impossible de garantir la moindre sécurité au niveau du contenu des données mais il est également impossible de garantir un fonctionnement capable de résister à des attaques extérieures.

    Windows est une sorte d’imposante jungle introduite dans la pagination de la mémoire d’un ordinateur, même Microsoft n’a pas la moindre idée de comment cela fonctionne dans son ensemble, de plus. c’est par les mécanismes de protection que s’introduisent la plupart des attaques.

    Si ce n’est pas déjà fait, du moins pas encore revendiqué, un jour vous apprendrez que l’ensemble des fichiers confidentiels du département de la justice fédérales auront été extraits, dupliqués et feront l’objet de chantages à la rançon !

    Cela ne pourra en être autrement

  3. Je dirais en préambule que ces symptômes de vouloir systématiquement tout informatisé, parfois au service de magnats bien souvent, teintés idéologies sectaires, relève de l’incompréhension de nos politiques ou alors de leur complicité.

    D’un coté, une volonté de vouloir contrôler en temps réelle chaque secteur de nos sociétés, tout en laissant des voies royales aux “ennemis” par le biais de hacking répétés et profond et de l’autre coté, pour finalement paralyser les accès aux utilisateurs, je m’explique ; Avant cette course folle et impersonnelle orchestrées par ces machines, nous pouvions, en cas de, appeler ou nous rendre facilement dans les administration et nous informer, intervenir sur les dossiers qui nous concernaient, cela était accessible et relativement facile, d’autre part, il me semble que nous avions à faire à beaucoup moins de préposés et que nous n’avions pas des délais d’attente astronomiques au bout d’un automate téléphonique ou coincés sur un formulaire qui systématiquement nous oblige de répéter en remplissant des cases déjà 1’000 fois enregistrées dans les “mémoires” de l’administration, de nous heurter à des fonctionnements douteux nous obligeant à tout recommencer si le délai est dépassé ou si la connexion est interrompue ou je ne sais quoi.

    La plupart du temps, un simple appel de 30 secondes suffisait pour se mettre en conformité avec les administrations et tout le monde était gagnant, cela évitait également bien des énervements et des incompréhension et pour preuve, depuis qu’aux USA, des machines gèrent les votations, il faut parfois attendre plusieurs semaines voir plusieurs mois pour, enfin, obtenir des résultats, de plus des systèmes douteux semblent intervenir par le truchement de ces machines dans les résultats.

    Pour l’ensemble des validations et des tâches administratives, avec ces machines, ce sera comme avec les élections aux USA et dès lors pas moyen de corriger des erreurs commises par ces nouveaux dieux de silicium !

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