Dans un arrêt du 23 février 2021 (TF 1B_602/2020 du 23.02.2021) rendu public le 16 mars 2021 sur le site internet du Tribunal fédéral, les juges de Mon-Repos ont admis le recours du propriétaire de deux smartphones et d’une tablette saisis par les autorités de poursuite pénale, propriétaire qui contestait la levée des scellés sur ces objets. Notre Haute Cour a estimé, contre l’avis du Ministère public de Zürich-Limmat, et du Tribunal cantonal zurichois, que le propriétaire de ces appareils avait été suffisamment précis dans la description des éléments ressortant de sa sphère privée contenus sur ces supports, et qu’un tri devait donc être effectué.
Les faits à la base de cet arrêt
Le Ministère public zurichois a, lors d’une perquisition au domicile d’un prévenu, saisi notamment deux téléphones portables et une tablette. Ces appareils ont été mis sous scellés à la demande de leur propriétaire.
Il faut savoir qu’à l’occasion d’une perquisition, la mise sous scellé d’éventuels moyens de preuve peut être obtenue lorsque la personne intéressée fait valoir son droit de refuser de déposer ou de témoigner ou pour d’autres motifs, tels que les secrets commerciaux, le secret professionnel qui entoure la relation avec son avocat ou encore les secrets privés dignes d’être protégés.
Ici, le prévenu a indiqué que les objets en question ne pouvaient être ni perquisitionnés ni séquestrés parce qu’ils contenaient des documents très personnels (photos intimes de sa petite amie et de son ex-femme, conversations avec des membres de sa famille, etc.) ainsi que des échanges avec ses avocats.
Le ministère public a demandé la levée des scellés et la perquisition des supports de données. Le Tribunal des mesures de contrainte zurichois a approuvé cette demande et a ordonné la levée des scellés et la remise des appareils au ministère public pour exploitation. L’autorité cantonale estimait en effet que le prévenu n’avait pas suffisamment étayé ses objections à la levée des scellés. Elle a estimé qu’il n’était pas nécessaire d’effectuer un tri, car le prévenu n’avait selon elle pas rendu suffisamment vraisemblable son intérêt au secret.
Le prévenu a recouru au Tribunal fédéral en invoquant principalement la violation des articles du Code de procédure pénale consacrés à la mise sous scellés et aux restrictions au séquestre (248 et 264 CPP).
Position du Tribunal fédéral
Le Tribunal fédéral rappelle que selon sa jurisprudence le propriétaire d’enregistrements et d’objets saisis à des fins de perquisition qui a déposé une demande de mise sous scellés a l’obligation d’étayer suffisamment les intérêts au secret qu’il invoque (au sens de l’art. 248 al. 1 CPP). Notre Haute Cour précise que ceci est particulièrement vrai en présence d’un grand volume de données.
Si la personne concernée ne respecte pas son obligation de collaboration et de motivation dans le cadre de la procédure de levée des scellés, le Tribunal des mesures de contrainte n’est pas tenu de rechercher d’office les obstacles matériels à l’investigation de ces supports. Les intérêts au secret dont se prévaut l’intéressé doivent être au moins brièvement décrits et rendus vraisemblables.
En l’espèce, le Tribunal fédéral considère que le recourant a indiqué de manière suffisamment précise sur quels appareils ou dans quelles applications se trouvent les fichiers problématiques. Il avait en effet indiqué dans quelles applications se trouvaient ces fichiers, sans avoir pu être plus précis, n’ayant plus accès aux dossiers concernés.
Contrairement à l’avis de la juridiction inférieure, le Tribunal fédéral retient qu’il ne peut être reproché au recourant de se contenter d’affirmer en termes généraux que les téléphones portables contiennent des informations touchant à sa sphère privée et intime. On ne voit pas comment le plaignant aurait pu décrire plus précisément ces éléments.
De même, le Tribunal fédéral a estimé que le recourant a respecté son obligation de collaboration et de motivation en ce qui concerne la correspondance qu’il avait échangé avec son avocat. Il a démontré de manière suffisamment concrète que ces échanges avec ses deux avocats, soumise au secret absolu, se trouvaient sur les trois supports de données saisis dans les cinq apps “Photos”, “Whatsapp”, “Threema”, “Téléphonie” et “Email” . Les noms de ces représentants légaux étant connus, il était aisé de procéder à une recherche des mots pertinents.
On ne voit pas dans quelle mesure on aurait pu ou dû attendre du plaignant que le prévenu fournisse des informations supplémentaires. L’autorité aurait donc dû passer au crible les objets saisis à la recherche de l’existence de la correspondance soumise au secret et l’écarter. En déclarant au contraire que le Ministère public était en droit, par le biais de l’ordonnance attaquée, de fouiller le matériel saisi dans son intégralité et d’utiliser les connaissances ainsi obtenues dans la procédure pénale contre le plaignant, l’autorité cantonale violé le droit fédéral.
Conséquences pratiques
Cette décision est à saluer. Elle aura certainement une grande importance pratique, en allégeant les exigences souvent très élevées, et parfois même – on le voit ici – démesurées, des autorités de poursuites pénales à l’égard des ayants-droits dont des objets sont visés par une perquisition et qui souhaitent s’opposer au séquestre de tout ou partie de ceux-ci pour les motifs prévus par le Code de procédure pénale.
Avec ce genre de décision on protège une fois de plus les escros.
A chacun de vos excellents articles, le justiciable réalise que la justice dans notre pays ne s’obtient qu’aux termes de batailles acharnées, très couteuses, et seules les personnes qui possèdent des ressources abondantes peuvent se défendre correctement. Dans un monde parfait la justice devrait être gratuite tout comme les services des pompiers. Par contre, les services des notaires, très juteux, devrait être assurer par l’Etat pour compenser les dépenses juridiques offertes gratuitement.