Oh ! réveillez-vous !

Nous sommes des veaux schizo. Pourquoi ? Parce que nous avons tendance à lécher la main qui nous gifle et que nous perdons un peu trop souvent contact avec la réalité.

Petit exemple récent : Novartis, apprend-on, va payer jusqu’à 1 milliard de francs à GlaxoSmithKline pour les droits d’un médicament notamment lié au traitement de la sclérose en plaques, une maladie chronique qui affecte le système nerveux. Selon la banque Vontobel, le « marché » mondial de la sclérose en plaque – plus de 2 millions de malades – pèse 19 milliards. Donc, Hosannah au plus haut des cieux puisque Novartis pourrait se faire un saladier, ses actions prendre l’ascenseur et ses dividendes augmenter. Or, comme la plupart de nos caisses de pension ont des actions de cette société dans leur portefeuille, on est bien contents. Champagne !

Mais… car il y a un mais : il est probable que les quelque 10.000 personnes souffrant de cette maladie en Suisse achèteront ce médicament. Et si Novartis le paie un milliard, je doute qu’on le trouve en discount chez Aldi ou Lidl, Novartis ayant plutôt tendance à abuser d’une position dominante que faire œuvre de charité. Et donc, la dose risque fort de coûter bonbon. Vous ne vous sentez pas concernés ? Vous l’êtes cependant, car c'est grâce notamment à de tels « investissements » des Novartis, Roche et autres Bayer que le coût de la santé et celui des primes d’assurance, ne cesse d'augmenter. Cette année, ces dépenses atteindront quelque 800 francs par mois et par personne en moyenne (enfants inclus) et pour bien des ménages, ça coince déjà pas mal. Et et ce n’est pas près d’aller mieux.

Heureusement pour ces fleurons de notre industrie, le lobby de la santé (sic) reste très présent au parlement fédéral et entre les pharma et les caisses maladie, on peut dire – sans trop de risques d’être traîné devant la justice pour diffamation – que ce groupe de pression dispose de suffisamment de parlementaires inféodés (je n’ai pas dit achetés ou loués à l’année…) pour pouvoir mener ses petites affaires sans que quiconque ne s'en mêle.

En clair : Novartis investit l’argent de ses actionnaires (nous notamment, à travers nos caisses de pension), puis, va présenter son nouveau produit à des médecins (de préférence lors d’un congrès à Phuket en hiver, tous frais payés). Ces derniers, convaincus de son efficacité, vont le prescrire quel que soit son prix, puisque grâce au lobby de la santé, ce médicament sera approuvé au remboursement par nos aimables compagnies d’assurance maladie. Celles-ci paieront Novartis avec l’argent de nos primes (tout comme elles paient salaires, pub et autres magazines inutiles avec cet argent) et si tout va bien, les actions de Novartis grimperont (youpee) et les patrons de la boîte se feront voter des couilles en or, via augmentation de salaire et bonus.

Pas de doute, nous sommes donc bien schizo : contents que Novartis gagne de l’argent en oubliant que c’est sur notre dos ou ravis que UBS, Credit Suisse et autres payent des milliards d’amende pour s’être comportés comme des voyous, mais oubliant que c’est avec l’argent des actionnaires qu’elles sont payées.

Et nous sommes des veaux, car nous acceptons tout cela sans nous révolter !

Michael Wyler

Heureux retraité, Michael Wyler est un ex. Ex avocat, ex directeur de feu le Groupe Swissair en Chine et ex dircom. Au passé comme au présent, journaliste, chroniqueur, père de Jonathan et Julie, dont il est fier, tout autant qu'il l'est de son épouse Cécile, hypnothérapeute, enseignante en hypnose et PNL, auteur et conférencière.