Après nous avoir sorti l’argument bullshit par excellence que cette réforme permettrait d’atteindre l’égalité, place maintenant au catastrophisme quant à la situation financière du fonds AVS21 ! Jugez plutôt: « Sacrifier les générations futures », « La montagne de dettes de l’AVS augmente d’année en année » ou encore « l’AVS est au bord de la faillite »… il ne manque que les nuages de sauterelles dans ces prédictions calamiteuses.
Alors, la caisse de l’AVS est-elle vraiment en si piteux état ? Sûr que non. Les chiffres le démontrent. D’après compenswiss, L’AVS clôt son exercice 2021 sur un résultat de répartition positif de 880 millions. Si on regarde les chiffres en comparaison avec les années précédentes, on observe une hausse depuis 2019. Ces chiffres pour le résultat de répartition sont la différence entre les cotisations encaissées et les rentes versées. Elles ne tiennent pas compte des placements. Cette évolution positive est principalement due à la réforme fiscale et de l’AVS (RFFA) acceptée en votation populaire. La réforme a fait augmenter les cotisations à l’AVS de 0,3%. Grâce à cette hausse, il y a un excédent de 570 millions de francs. Ce résultat positif s’est confirmé en 2021.
Ainsi, fin 2021, la fortune de l’AVS est proche des 50 milliards. Et elle augmentra encore les prochaines années. On est donc très loin des scénarios apocalyptiques que le Conseil fédéral et la droite prédisent depuis de nombreuses années pour justifier leurs réformes anti-sociales.
Vous me direz: mais alors que fait-on du vieillissement de la population ? Il est vrai que l’arrivée des baby-boomers à la retraite remet ce sujet sur la table – alors qu’il n’a rien de neuf. Le système de répartition fait que le nombre de retraités doit être mis en relation avec celui des actifs. L’argument brandi par la droite « les jeunes vont payer pour les seniors » est absurde, en ce sens que c’est ainsi qu’a été constituée l’AVS : les actifs cotisent pour les retraités. C’est donc sur le nombre d’actifs qu’il faut agir, notamment en partageant le temps de travail, ce qui permettrait de créer des emplois. Une baisse du temps de travail à salaire égal ne serait d’ailleurs que justice, attendu que la productivité des des travailleuses et travailleurs ne cesse d’augmenter depuis la création de l’AVS.
Et s’il est vrai que les actives et les actifs sont important-e-s pour alimenter le fonds, une chose est certaine: ce n’est pas en augmentant l’âge de la retraite des femmes, et de tout le monde, que l’on peut s’attendre à une amélioration. Au contraire. En effet, c’est augmenter artificiellement l’activité de personnes qui, dans leur tranche d’âge, connaissent un chômage 68% plus élevé que la moyenne. On comprend donc qu’augmenter l’âge de la retraite, c’est tout bonnement augmenter le chômage et le recours à l’aide sociale. Repousser le problème ailleurs, et tant pis pour celles qui finiront ainsi leur parcours professionnel.
Pour la bonne mesure, un petit rappel salutaire: la droite nous dit que l’égalité salariale est un autre sujet et qu’il ne faut pas le lier à l’AVS. Or, rien ne saurait être plus faux. Aujourd’hui, l’écart salarial est tel que le seul fait d’atteindre enfin l’égalité permettrait un apport de 825 millions au fonds AVS. Étonnant donc que ceux qui jouent les Cassandres sur les rentrées de l’AVS soient les mêmes qui refusent toute mesure concrète pour parvenir à cette égalité salariale. Étonnant… ou pas.
Alors oui, il y a urgence, urgence d’agir réellement pour l’égalité et surtout urgence d’augmenter les rentes, mais il n’y a aucune urgence à renforcer le financement de l’AVS par l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes ou par l’augmentation de la TVA – encore moins en cette période d’inflation galopante !