Démocratie: mode d’emploi à rappeler!

La démocratie suisse est un trésor précieux. Elle nous réserver son lot de satisfactions et, parfois, de mésaventures. Cela fait partie du jeu que de l’accepter. En ce sens, l’acceptation de l’initiative « contre l’immigration de masse » ne doit pas laisser la place à l’amertume – même si la tentation est grande – mais à l’acceptation du résultat quel qu’il soit.

Et là, s’agissant de notre politique à l’égard de l’immigration, il reste tout à faire ! Trois ans pour faire une loi d’application, moins bien sûr pour trouver des solutions avec l’Union européenne. Le retour aux contingents apporte avec lui de bien mauvais souvenirs car certains ont oublié les marchandages difficiles pour obtenir les emplois nécessaires, la bureaucratie et la lenteur inhérente au système, les incertitudes pour les entreprises et particulièrement dans des branches à succès comme l’horlogerie, mais aussi dans les services publics…

Inutile de s’étendre sur les difficultés mais il est temps de relever une déviance du système démocratique. Les vainqueurs de ce vote du 9 février – car vainqueurs ils sont – rappellent à qui veut l’entendre qu’il s’agit avant tout d’un signal ! Mais de quel signal parle-t-on dans un système démocratique où ce que l’on accepte comme initiative populaire s’inscrit directement dans la Constitution?

J’ai le fort sentiment que les auteurs de l’initiative eux-mêmes ne souhaitaient pas forcément un succès mais surtout un de ces résultats où les cantons acceptent mais le peuple refuse ! Cela aurait été le rêve, un succès d’estime mais aucune responsabilité à assumer… Quant à ceux qui pensent vraiment qu’en votant oui ils donnent un signal, il est temps qu’ils sachent que le vote n’est pas seulement un signal, il entraîne l’acceptation ou le refus d’une norme constitutionnelle.

Le droit de vote, en Suisse, ne se confronte que très rarement au scrutin consultatif. Et le scrutin du 9 février n’en était pas un. Ce n’est pas un signal que les citoyens ont émis, c’est une instruction de changer de pratique en matière d’immigration. Quelles qu’en soient les conséquences, il faudra s’y conformer. C’est bien moins confortable pour les initiants mais personne n’a dit que gagner était toujours un avantage!

Martine Brunschwig Graf

Martine Brunschwig Graf est une femme politique suisse membre du Parti libéral-radical (PLR). En octobre 2003, elle est élue au Conseil national et intègre la commission de la science, de l'éducation et de la culture. En 2012, elle préside la Commission fédérale contre le racisme.