Déshabillez-vous, cela n’engage à rien!

C'est lundi, cet après-midi, on va tout savoir ou presque! Tout savoir sur quoi? Sur le patrimoine de chaque ministre du gouvernement Hollande-Ayrault. Cette opération "striptease" est censée paraît-il rassurer les Français sur l'honnêteté de leurs politiciens. La transparence est le maître mot. Les citroyens ont le droit de savoir. La question est, qu'apprennent-ils avec cette opération "déshabillage"?

La première chose à remarquer:  les ministres français, contrairement aux "ministres" suisses, ne sont pas élus par les citoyens ou le parlement – mais choisis par le président de la République et le premier ministre. C'est donc à eux qu'ils sont censés rendre des comptes, c'est à eux qu'ils devraient fournir les informations nécessaires au contrôle de leur "probité". Le fait que l'on crée un site internet pour informer le monde entier des détails de la vie personnelle des ministres français n'a de ce fait aucun sens. Pire encore, cela est l'expression d'un formidable aveu d'impuissance. Car enfin, la question qui vient à l'esprit est la suivante: qu'a-t-on demandé à ces ministres avant de le nommer? Apparemment rien qui touche au déballage auquel ils doivent se livrer maintenant.

Cela fera-t-il d'eux des personnes plus honnêtes? Certainement pas. Ceux qui le sont vont le rester, ceux qui pourraient ne pas l'être ne vont pas progresser sur la voie de l'honnêteté pour autant… Les citoyens seront-ils rassurés? On peut sérieusemente en douter car personne n'est dupe. La France est en train d'inventer la politico-réalité. On connaissait la téléréalité, elle a ses pseudo-vedettes et ses scénarios truqués. Mais ce que sont en train de mettre en place le président et le premier ministre français ne vaut pas mieux. Mauvais scénario auquel personne ne croit, pseudo-honnêteté dont personne ne peut finalement se porter garant, spectacle affligeant qui décrédibilise la fonction politique dont l'image est déjà bien abïmée.

 

Et vient enfin la question qui tue: que feront les dirigeants français en cas de nouveau scandale, jamais à exclure dans cette ambiance délétère? Après le patrimoine de chacun, que faudra-t-il livrer en pâture pour réconforter des citoyens qui n'attendent en fait qu'une chose, que la France retrouve la voie de la croissance économique et de l'envie d'entreprendre. L'opération de striptease en cours va exactement dans le sens opposé.

Martine Brunschwig Graf

Martine Brunschwig Graf est une femme politique suisse membre du Parti libéral-radical (PLR). En octobre 2003, elle est élue au Conseil national et intègre la commission de la science, de l'éducation et de la culture. En 2012, elle préside la Commission fédérale contre le racisme.