L’humain ou la planète

Photo : leninscape

Consommation, alimentation et mode de vie : la transition écologique et le développement personnel vont-ils de pair ?

C’est une notion de plus en plus présente auprès des défenseurs d’une économie régénératrice en réponse à la crise environnementale : le bien-être humain. Le Forum des 100 a notamment porté la voix de Sofia de Meyer, fondatrice d’Opaline, qui a insisté sur « la valeur de la vie », mentionné les salaires linéaires respectant chacune des personnes participant à la vente de ses bouteilles de jus de fruit, puis dénoncé la tendance actuelle visant à « dominer, voire exploiter, l’humain et l’environnement ». Même son de cloche du côté de Julien Perrot, rédacteur en chef de La Salamandre, selon qui il faut « plus de lien avec nos proches et avec la nature, plus de sens, plus d’amour pour la vie ». L’évolution vers une société écologique passerait-elle par la recherche du bien-être ?

Méditer pour la planète

Les préoccupations environnementales et individuelles se joignent dans plusieurs habitudes de consommation, dont le végétarisme : en Suisse, si 58% des personnes ayant renoncé à la viande affirment être motivées par conscience écologique, 35% indiquent avoir fait ce choix pour des raisons de santé, selon Swissveg. Du côté des tendances minimalistes, ce mode de vie est avant tout défendu comme étant libérateur, permettant une harmonie intérieure et un épanouissement maximum – les bénéfices de l’alternative à un consumérisme endommageant les ressources épuisables de notre planète, bien qu’envisageables, apparaissent comme secondaires. Enfin, la pratique de la méditation serait également un moyen de s’aligner avec un mode de vie écologique, selon Sarah Koller, doctorante en géosciences et environnement : « la pleine conscience permet de comprendre les motivations de nos comportements, y compris concernant notre mode de consommation ». Convaincue de l’importance de sortir du déni pour se confronter sainement aux enjeux environnementaux, cette chercheuse co-organise également des ateliers d’écopsychologie. Ceux-ci permettent d’ancrer les connaissances de l’état de la planète dans le ressenti, tel que le décrit Lila Erard dans un article du Temps. Une fois l’information intégrée au niveau émotionnel, la nécessité d’agir s’inscrit plus profondément dans l’inconscient et augmente la motivation de modifier ses comportements. Cet effet ouvre la porte à un ensemble d’écogestes qui s’autoalimentent de par leurs effets bénéfiques sur le mode de vie des personnes qui les pratiquent.

Satisfaction écologique

Les connexions entre la santé de la planète et l’accueil des émotions s’avèrent de plus en plus pertinentes, notamment au sein des recherches en psychologie : selon plusieurs études menées sur le sujet, le lien de causalité entre consommation compulsive et état dépressif est véridique. Dans une société où le consumérisme constitue à peu de chose près la norme, force est de s’interroger sur ce lien. « Le matérialisme permet de se rassurer à travers un culte de l’image, très présent dans notre culture. Il offre des réponses faciles à des angoisses existentielles, mais il est important de différencier apaiser et assouvir » commente la doctorante. Il semblerait que la satisfaction provoquée lors d’un achat s’évapore très vite pour laisser place, de nouveau, à un sentiment de manque. L’activisme environnemental à travers le mode de vie s’avère alors doublement utile, malgré les questionnements sceptiques concernant l’impact des consommateurs sur la crise écologique. « Le déni et l’inaction fatiguent beaucoup, car la menace est toujours présente, mais on refuse de l’accepter et de s’y confronter » ajoute Sarah Koller. En choisissant d’agir pour son bien-être et pour celui de la planète, on s’engage dans un cercle vertueux pour son épanouissement personnel, mais cela permet également d’agir sur les références culturelles dans lesquelles on évolue, l’orientant vers une conscience collective de plus en plus écologique.

Le prix du bien-être

Qu’il s’agisse de comportements écoresponsables ou d’alimentation saine, les regards se tournent souvent vers les populations aisées, les achats bio et locaux affichant des prix vraisemblablement plus élevés. Est-il justifié de responsabiliser les consommateurs aux portemonnaies légers ? « Il semble nécessaire de nuancer ce débat, car il va aussi de pair avec l’évolution des besoins » affirme Sarah Koller. En témoignent les activités de la population de Detroit où, suite à la faillite de l’état en 2011, s’est élaboré un système de fermes urbaines respectueux de l’environnement qui a permis de répondre efficacement aux besoins des populations. Sans aller si loin, les ménages suisses incarnent deux paradoxes : d’une part, selon l’OFS, la proportion du salaire investi dans la nourriture a baissé de 40% en 1939 à 6,3% en 2014, ce qui révèle que l’alimentation occupe une place mineure dans les coûts de la vie sur le territoire helvétique, laissant place à des achats dans la technologie. D’autre part, 11% des aliments achetés en Suisse finissent à la poubelle, ce qui représente également une partie non négligeable du budget. Prendre soin de soi et de l’environnement ne serait pas qu’une question d’argent, il s’agirait avant tout d’un choix : celui de prendre le pouvoir qui nous est donné à travers les habitudes de consommation et le mode de vie. Soigner la planète pour aller mieux, un concept mêlant gratitude et proactivité.

Marion Marchetti

Marion Marchetti est hypnothérapeute. Son accompagnement et ses réflexions se focalisent sur l'hypersensibilité et l'environnement.

Une réponse à “L’humain ou la planète

  1. Ce n’est que la pointe de l’iceberg, le problème principal reste la surpopulation humaine qui envahit tous les biotopes avec ses habitats, ses moyens de transports ,…
    A moins que vous exigiez que l’homme retourne à l’époque où il ne connaissait pas encore le feu !

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