Engagez-vous en politique!

En 1983, mon premier enfant avait deux ans et j’attendais le deuxième : je n’en pouvais plus du trafic effréné à Genève et du peu de place laissé aux petits. J’ai donc décidé de m’engager, en choisissant une association écologique : l’association transports et environnement. Je faisais partie du comité, puis j’ai assumé des projets, complètement bénévolement. Même si je faisais également partie de diverses associations pour les droits humains ou pour la paix (Amnesty international ou les Femmes pour la paix, par exemple), j’ai compris à un moment donné que l’engagement au sein d’associations ne suffisait pas. Ma participation à diverses manifestations, dont celle contre la mort des forêts à Berne, me semblait soudain insuffisante pour contribuer un tant soit peu à un changement positif de ce monde. Je me suis donc engagée dans un parti politique pour rejoindre d’autres personnes soucieuses que Genève, la Suisse, voire le monde, restent vivables et souhaitant que les injustices et les inégalités soient éradiquées.
Pourquoi je vous raconte cette histoire ? Parce qu’il me semble qu’aujourd’hui, beaucoup de jeunes (et moins jeunes) souhaitent participer à un changement social. On leur dit qu’il faut changer de comportement, moins prendre l’avion, manger sainement et local, ne pas utiliser trop de plastique, etc. Tout cela est juste mais insuffisant. Je considère que l’action collective est indispensable pour amener un changement politique. Mais quelle est la différence entre un mouvement et un parti politique, et pourquoi choisir le second ? Les mouvements politiques sont souvent limités à un thème, dans la durée et dans leurs outils institutionnels. Or, un parti se positionne sur tous les sujets de société pour une durée illimitée, et peut recourir aux outils institutionnels notamment en présentant des candidat-e-s pour nos institutions démocratiques. Faut-il rappeler que les lois sont faites par les parlements, que les gouvernements doivent les appliquer, et qu’il n’y a rien de plus démocratique que d’élire celles et ceux qui élaborent ces lois ? L’alternative serait la loi du plus fort, mais j’imagine que les manifestant-e-s n’ont aucune envie de la voir appliquée.
Les médias, ainsi que certains mouvements politiques, évoquent une classe politique qui ne fait rien pour le climat. Personnellement, je ne me suis jamais sentie appartenir à une classe spécifique et il me semble qu’il faut nuancer. En effet dans notre démocratie, c’est la majorité élue par une majorité de la population qui décide des lois et des mesures à appliquer collectivement. Durant toute ma carrière politique, je me suis battue comme élue cantonale puis nationale, pour l’égalité entre femmes et hommes, pour une politique environnementale respectueuse de la nature et des êtres humains, pour davantage de justice sociale, pour l’accueil humain des personnes cherchant refuge chez nous, pour le respect des institutions, et j’en passe. Mais combien de fois ai-je été minorisée….! Pas seulement au parlement, mais aussi lors de votations où tous les citoyens et citoyennes peuvent s’exprimer. C’était assez désespérant ! Donc cette prétendue classe politique n’est pas homogène, à l’image des générations si différentes les unes des autres.
Nous venons de voter sur l’initiative contre le mitage, qui aurait dû mobiliser toutes les personnes, notamment les jeunes qui avaient manifesté pour une autre politique climatique, s’agissant d’un thème environnemental. Or qu’avons-nous constaté ? Moins de 50% de l’électoral s’est mobilisé. Conclusion : c’est une minorité qui prend les décisions ! Je me permets donc de dire à tous ces jeunes et moins jeunes : c’est bien d’aller manifester, c’est bien de faire des discours dans les médias, c’est excellent de faire partie d’un mouvement ou d’une association…. mais dans notre pays qui offre la possibilité de participer comme presque nulle part ailleurs, il est indispensable de s’engager dans les partis politiques et surtout d’aller voter !

Maria Bernasconi

En tant que députée au Grand-Conseil genevois puis conseillère nationale PS, Maria Bernasconi a défendu l'égalité entre femmes et hommes, la justice sociale et le service public. Née en 1955. Elle est mariée, deux enfants et 3 petits-enfants, elle est infirmière et juriste de formation. Elle a fini son parcours professionnel en tant que secrétaire générale d'un syndicat et est à la retraite depuis 2018.