Une «lecture» de Prometheus, dernier film de Ridley Scott

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Dimanche soir. La journée se termine avec Prometheus – le film qui narre comment les créatures xénomorphes de la quadrilogie Alien sont nées. Je l’avais déjà vu au cinéma, mais je souhaitais revoir un point qui m’avait étonné, m’assurer que j’avais bien saisi.

Le long-métrage s’achève et les effets spéciaux sont encore visibles autour de moi… Comment comprendre le message du film ? Parcourons-le rapidement : Prometheus commence par le sacrifice d’un « Ingénieur » qui, par son suicide, conduit à la création de l’espèce humaine. Puis, ellipse narrative oblige, on apprend que les humains, dans notre futur, partent à la recherche de leurs créateurs – la foi des savants s’appuyant sur des observations précises et des recoupements logiques. Avançons. Je passe les multiples péripéties ou les créatures libidinales de H. R. Giger, et me concentre sur la fin du récit. Les humains ont retrouvé la race qui les a « fabriqués », mais il s’avère que les « Ingénieurs » sont nettement moins sympathiques que prévu : un de leur représentant souhaite même se diriger sur Terre afin d’anéantir l’humanité grâce à l’arme ultime, une sorte de poulpe géant. Sale coup.

Bon les héros du récit arrivent empêcher l’Ingénieur de partir – nous voilà rassurés, les Terriens n’ont rien à craindre. S’ensuit alors une séquence étonnante, celle-là même qui m’avait surpris la première fois que j’avais découvert le film : la confrontation entre le poulpe – symbole de la bestialité – et l’Ingénieur, figure de la divinité. Le poulpe terrasse son rival par une stratégie reproductrice proche de celle avec laquelle les Aliens du film éponyme fécondent leurs proies. Et c’est de ce viol bestial que naît la créature qui, il y a trente-cinq ans, a horrifié ses spectateurs…

Donc, si on suit bien : les Aliens ne sont pas des extraterrestres qui ont évolué sur une planète et qui luttent pour leur survie contre l’humanité, mais ils sont symboliquement apparentés à l’homme puisqu’ils sont le fruit de l’union violente entre les dieux des hommes (les Ingénieurs) et le Mal qui aurait dû les détruire (le poulpe). Pour le dire autrement, les Hommes ont été créés par les Ingénieurs, les Ingénieurs décident un jour de tuer les Hommes grâce à un poulpe et le poulpe féconde un Ingénieur : les Aliens viennent de naître.

La science-fiction, une fois de plus, est un indicateur particulièrement lucide des paradigmes scientifiques et technologiques : elle réfléchit (à) notre manière de nous rapporter à nous-mêmes, à notre vie, à notre histoire… Les années 1970 pensaient la vie humaine selon le modèle darwiniste, le Ridley Scott des années 2000 semble plus intéressé par le paradigme biotechnologique : c’est le mélange du génome des Ingénieurs avec les éléments terrestres qui conduit à la naissance de l’humanité.

Mais, le plus surprenant, c’est quand même cette idée que tout acte démiurgique – manipulations génétiques comprises – est en même temps un acte mortifère. Prometheus nous convie donc, par le biais d’une esthétique science-fictionnelle, à éprouver émotionnellement la rencontre entre Eros et Thanatos. Alien devient freudien et subit sa première psychanalyse.

Marc Atallah

Marc Atallah est le Directeur de la Maison d'Ailleurs, musée de la science-fiction, de l'utopie et des voyages extraordinaires à Yverdon-les-Bains, et Maître d'enseignement et de recherche à l'Université de Lausanne. Il vient ici nous parler des frontières de plus en plus floues entre science et fiction.

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