Depuis novembre 2016 et sa défaite choc face à Donald Trump, Hillary Clinton était devenue discrète sur ses intentions de conquête du pouvoir. Mieux encore, l’ancienne sénatrice semblait s’être définitivement fait une raison sur ses envies présidentielles. Or, de plus en plus de folles rumeurs circulent sur un improbable retour. Alors, ira ou n’ira pas ?
Nous sommes le 8 novembre 2016 et ce que personne ne pensait possible (tout au moins en Europe) vient de se produire. Longtemps sous-estimé, l’improbable Donald Trump créait la surprise, au grand dam des médias et instituts de sondages. La stupeur et l’incompréhension du côté démocrate font face à la jubilation et le goût de revanche dans le camp républicain. Hillary Clinton, est-elle littéralement à terre, incrédule face à ce dénouement inattendu et ce scénario qu’elle n’avait certainement pas envisagé.
Ce n’est en effet, que près d’un jour plus tard qu’elle reconnaîtra sa défaite en public. Concédant la victoire à Trump certes, mais ne pouvant s’avouer vaincue face à son propre esprit. Elle mettra d’ailleurs plusieurs jours, plusieurs mois voire plusieurs années à s’en remettre et à l’accepter.
L’a-t-elle en fait réellement digérée ? On aurait eu tendance à répondre que oui au regard du début 2019 (annonçant qu’elle ne se présentera pas), mais revoilà l’ancienne Sénatrice de New York qui refait parler d’elle depuis quelques mois. Ne pouvant d’ailleurs “s’empêcher de se mêler de l’impeachment”. Alors, Hillary Clinton aurait-elle quelque chose derrière la tête ? Voici 10 raisons pourquoi les candidats (pour ne pas dire “ses adversaires”) à la primaire démocrate feraient bien de se méfier d’elle.
1. En promotion médiatique pour son livre
Sorti le 1er octobre, son livre the book of Gutsy Women (le livre des femmes courageuses) coécrit avec sa fille Chelsea a quelque peu coïncidé avec son retour sur la scène médiatique. Normal me direz-vous, surtout lorsque l’on fait la promotion de son ouvrage. Toutefois, pourquoi avoir choisi cette date-ci en plein débat démocrate, alors qu’elle aurait pu le sortir bien avant ou pour les fêtes de Noël ? En vérité, elle n’aurait pu faire mieux au niveau timing afin que l’on parle d’elle. Et aussi que l’on se rappelle d’elle. Assez en tous cas pour se faire inviter sur la plupart des plateaux de télévisions et remplir des salles de dédicace avec levée de fonds pour la fondation Clinton. Ce pourrait presque avoir l’air d’un début de campagne, mais cela ne l’est pas, restons sérieux.
2. Omniprésence dans la campagne
On l’a soulevé lors du premier point, qui dit présence médiatique et shows télévisés, dit aussi questions politiques et par conséquence repositionnement dans une campagne démocrate à laquelle elle ne participe pas précisons-le. En effet, si elle était restée peu bavarde lors des premiers débats, Hillary Clinton ne se gêne plus pour donner son avis, attaquer et se faire interviewer. Cela a commencé par des affirmations et attaques peu justifiées contre la sénatrice de Hawaii et candidate à l’investiture démocrate Tulsi Gabbard. S’en est suivi des règlements de compte avec Bernie Sanders sur son faible soutien en 2016, puis des mots de compassion à Kamala Harris lorsque celle-ci s’est retirée de la course à la nomination. Tout ceci ne constitue bien sûr aucune preuve d’une éventuelle entrée en course, mais sa première présence en 20 ans dans le matinale radio de Howard Stern (la radio-matinale la plus écoutée à New York) a laissé songeur, tant elle faisait le show et souffler le chaud et le froid.
3. En tête des sondages
Lors d’un sondage réalisé en ligne par Harris Poll survey le 9 décembre dernier, Hillary Clinton figurait en tête des intentions de vote à la primaire démocrate. Devançant ainsi avec 21%, Joe Biden(20%) et Bernie Sanders (12%). Un très bon résultat pour quelqu’un qui n’est candidat à rien. Surtout que la femme de 72 ans s’est dit très flattée d’apprendre ces résultats tout en rappelant qu’elle n’est pas dans la course. Ou pas encore, diront les mauvaises langues. Quoi qu’il en soit, les sondages ne vous garantissent pas la victoire, et Hillary en sait quelque chose depuis 4 ans.
4. Son combat contre Trump n’est pas terminé
Si elle avait semblé avoir du mal à accepter d’être battue par Donald Trump (tout en reconnaissant sa défaite), leur haine réciproque à son paroxysme lors de la campagne 2016 n’a pas non plus semblé reculer d’un cran. Si les “lock her in” (jetez la en prison) ont quelques peu cessé lors des meetings de Donald Trump, “Crooked Hillary” (l’illégale) est bien encore présent dans la rhétorique trumpienne. Et la colère de Hillary également lorsque l’on regarde ses critiques et ses tweets envers l’actuel président. La plus belle passe d’armes pour les journalistes fut bien sûr celle du 8 octobre avec le locataire de la maison blanche poussant Hillary l’illégale à se représenter. Ce à quoi Clinton avait répondu : “Don’t tempt me. Do your job “. (Fais ton travail et ne me tente pas). Comme si elle prenait finalement plaisir à laisser planer le doute sur un remake de 2016 dont les médias raffoleraient.
"Don't tempt me. Do your job."
Former Secretary of State Hillary Clinton shot back at President Trump after he taunted her about entering the 2020 presidential election. https://t.co/WvGaOb8WLe
— CNN (@CNN) October 8, 2019
5. Active dans le processus d’impeachment
Comme le racontait très bien un article du Temps, l’ancienne Sénatrice a toujours été impliquée d’une manière ou d’une autre dans les différents impeachments de l’histoire. Cette fois, elle semble jouer le rôle de celle qui veut savourer le goût de la vengeance, tout en s’immisçant dans les plans démocrates. En poussant ainsi Nancy Pelosi et les représentants de la chambre à aller de l’avant pour un vote en décembre, elle s’est sans conteste approprié un rôle dans une hypothétique chute du président. D’un autre côté, on ne peut pas s’enlever de l’esprit qu’elle tentait aussi par là de se blanchir des accusations du candidat Trump et de se refaire une image saine auprès des sympathisants démocrates. Peut-être un peu trop tard.
6. Énorme pression
Comme elle l’a avoué à la BBC en novembre, elle se dit (ou se croit) sous une énorme pression. Et à la question qui devait forcément venir, la réponse quant à sa candidature à la primaire démocrate se fait longue et peu précise. Se contenant de répondre dans un premier temps par un “non pas maintenant”, elle se sent obligée de rajouter : “I never say never”. Rajoutant qu’énormément de monde lui demande d’y aller (je suis sous une énorme pression de pleins de personnes). Mais qui sont ces gens ? Ses supporters, beaucoup de femmes et des associations seraient derrière elle.
Si cette sortie a fait beaucoup de bruit à l’étranger, elle n’a cependant pas tellement eu de crédit aux Etats-Unis, cette déclaration se faisant sur une radio étrangère et en pleine audition d’impeachment.
Hillary on BBC Radio 5 Live.
Emma Barnett: "Are you going to run again?"
HRC: "No."
Emma Barnett: "So that is 100%?"
HRC: "Well you know, I never say never to anything." pic.twitter.com/3NCHDudopM— Hillary In Pictures (@HillaryPix) November 12, 2019
7. Elle n’a pas accepté sa défaite de 2016
Une autre raison pourquoi elle ne peut s’arrêter de penser à Trump et cette course à la maison blanche est peut-être qu’elle n’a finalement pas digéré sa défaite de 2016 face au milliardaire. Ou pour le moins seulement en public et non pour soi. Or soyons francs, si la campagne et le débat ont été tenus dans une ambiance exécrable voir immorale avec des coups bas de part et d’autres, Hillary Clinton a bien perdu sa présidentielle. Et elle a bien commis plusieurs erreurs stratégiques incroyables. Tout d’abord celle de rentrer dans la médiocrité et l’agressivité de Trump alors qu’elle aurait pu être bien supérieure. Puis, celle de considérer trop tôt comme acquis ces états dits “swings” comme l’Iowa et la Pennsylvanie. Elle n’a ainsi sans aucun doute pas passé assez de temps en fin de campagne dans ces états qu’elle finit par perdre. Constat semblable avec la Floride et l’électorat latino-américain qui lui a coûtèrent la présidentielle. Gageons qu’elle le rumine encore, bien qu’elle clame être fière d’avoir gagné le vote populaire…
8. Aucun candidat émergeant
Un autre élément qui pourrait lui laisser une porte d’entrée est le fait qu’aucun candidat des primaires ne sorte réellement du lot. Certes, il y a bien Joe Biden mais l’on sent sa candidature et sa personne fragile. Tous les autres semblent avoir un moment de gloire éphémère et ce début de primaire ressemble plus à une série éliminatoire qu’à une course à la candidature. Tout cela, l’ancienne Sénatrice l’a bien compris. Si Biden venait à faiblir ou pris dans une autre affaire (qui sait), Clinton sera là et n’hésitera pas à revenir. C’est d’ailleurs sa seule et unique chance de se présenter. Mais au fond, tous les démocrates le savent très bien.
9. Un parti et une primaire démocrate trop à gauche ?
Outre le fait qu’il n’y ait aucun candidat émergeant, le parti semble pencher trop à gauche. Hormis Joe Biden, tous semblent plutôt alignés sur la ligne radicale Sanders-Warren. Les plus au centre ? Kamala Harris, a explosé. Betto O’Rourke a abandonné. Cory Booker n’a pas décollé. Ainsi parmi les modérés, il ne reste guère que le jeune Pete Buttigieg, la peu médiatique Amy Klobuchar et depuis décembre le milliardaire Michael Bloomberg. Cette entrée tardive serait d’ailleurs un bon test pour Clinton afin de voir son impact sur la campagne. Sauf qu’aucun des sénateurs démocrates et encore moins ses hypothétiques rivaux ne veulent revoir l’habitante de New-York retenter sa chance. Ce serait d’ailleurs une erreur de sa part que de croire qu’elle est attendue à bras ouverts. Alors, tente-elle d’appréhender le terrain ?
10. La cause des femmes
En filigrane de son livre avec Chelsea, la cause des femmes revient souvent également dans le parcours et la vie de l’habitante de Chappaqua. Et dire qu’elle aurait pu (ou dû) être la première femme présidente des Etats-Unis C’est bien ce qu’elle doit se dire en voyant maintenant Elizabteh Warren en position de tirer les marrons du feu. L’ancienne candidate à la maison blanche ne profiterait donc pas du mouvement pour les femmes en politique. Sa récente opération en chirurgie esthétique qui fit couler du bruit outre Atlantique en lien avec une candidature n’y changera d’ailleurs rien.
En conclusion, Hillary Clinton a dix raisons et mille et une autres de se présenter à l’investiture démocrate. Le fera-t-elle ? Nul ne le sait, mais plus le temps passe, plus cela semble irréaliste et démesuré. En effet, le premier vote aura lieu dès le 3 février en Iowa, suivi du crucial New Hampshire et de l’immense Californie en mars. A moins que l’habitante de Chappaqua que tout une région soutient le veuille vraiment ? Dans ce cas, une troisième défaite risquerait de faire d’elle une éternelle mauvaise perdante. Tout en divisant encore un peu plus l’Amérique, avec en cas d’investiture, un potentiel remake de 2016 plus qu’explosif. Avouons qu’elle n’en a ni l’envie ni l’intérêt. Alors Hillary, tu n’oseras point ?
“Nous sommes le 8 novembre 2016 et ce que personne ne pensait possible (tout au moins en Europe) vient de se produire.”
Inexact. Vous ne devez pas lire souvent la réinformation.
https://lesobservateurs.ch/2016/03/09/trump-engrange-les-victoires-laissant-ses-adversaires-loin-derriere/
https://lesobservateurs.ch/2016/03/17/trump-lemporte-en-floride-et-simpose-dans-la-campagne-pour-les-primaires-presidentielles-americaine/
https://lesobservateurs.ch/2016/03/17/sera-donald-trump/
https://lesobservateurs.ch/2016/04/27/donald-trump-a-t-deja-gagne/
Si vous vous êtes contenté de lire Le Temps et autre Tribune de Genève, en effet vous ne pouviez pas le savoir.
Bonne journée à vous
Effectivement, comme je l’écris certains médias européens ne l’ont pas vu venir. Et pour avoir été aux Etats-Unis pendant la campagne et les débats, la donne était sensiblement différente sur place. Tous n’étaient pas de l’avis de CNN et j’avais prédit la victoire de Donald Trump.
Néanmoins, vos liens d’un seul site ne font pas écho à la campagne présidentielle mais plus aux primaires républicaines…
Merci à vous pour votre aimable réponse.
Je viens de relire mon message. Il était virulent alors que je ne désirais pas répondre d’une telle manière. Désolé.
Il me tarde de lire vos autres analyses.
Bonne journée
Mme Clinton n’est pas meilleure en 2020 qu’en 2016, de plus elle aurait en face un président en exercice qui lui apporterait un atout décisif, d’autant que sa popularité est restée intacte . Cela fait déjà deux raisons pour rester à l’écart !
Elle n’a pas compté d’un iota dans le jeu politique au contraire des autres prétendants , sa popularité n’est que virtuelle vu qu’elle ne s’est pas engagée concrètement !
Cette analyse ne reflète qu’un jeu intellectuel complètement déconnecté de la réalité .
Merci pour votre commentaire. Effectivement, Hillary Clinton n’a pas changé sa ligne politique et comme je le dis dans l’article cet hypothétique (et enflammé) remake ferait plus de mal aux Etats-Unis qu’autre chose. Vous avez aussi raison en disant que la cote de popularité de Trump reste intacte. Néanmoins, vous ne pouvez nier qu’elle n’aurait pas envie de revanche et rien ne prédirait l’issue du score…cette fois-ci.
Si les Démocrates veulent espérer battre Trump, ils devraient jouer la carte de l’opposition de caractères, ce qui leur a souvent bien réussi par le passé; une femme, (relativement) jeune, pondérée et ayant de la classe, serait l’idéal. Mais qui? Michelle Obama pourrait répondre à ces critères, mais on sait qu’elle n’est pas intéressée.
Merci pour votre commentaire. Effectivement, la carte de l’opposition de caractères avec une femme relativement jeune (en âge et politique) pourrait être une bonne carte. Il y avait bien Kamala Harris mais elle a dû jeter l’éponge. Peut-être qu’un Pete Buttigieg pourrait créer la surprise sauf que tout indique pour l’instant un duel à l’ancienne avec Joe Biden…A vérifier.
Excellent article bien fondé. Deux sujets peuvent retenir Madame Clinton pour ne pas entrer dans la course pour la Maison Blanche, car ils l’exposent à la justice alors qu’elle préfère à mon avis se faire oublier :
1) L’énorme quantité d’argent reçu par la Fondation Clinton de sources et pour des objectifs différents, nombreux et variés
2) L’affaire des email effacés, qui pourrait ressurgir.
Et puis il y a l’effort physique excessif et nécessaire pour faire campagne dans cet immense pays.
A mon avis Alexandria Ocasio-Cortez (membre actuel du congrès), sera la première femme démocrate qui sera présidente, peut-être pas en 2022 contre Trump, mais plus tard.
Merci pour votre intervention. L’affaire sur les emails est une vraie bombe à retardement sur la tête de Madame Clinton. Et l’administration de Donald Trump ne se gênerait pas pour faire resurgir cette affaire, vous avez raison. Pour l’effort physique, mis à part Pete Buttigieg, tous les autres prétendants sont étrangement assez âgés (demandez à B.Sanders et son intervention au coeur).
Quant à une jeune femme, oui Alexandria Ocasio-Cortez a le profil type mais il faut être au moins âgé de 35 ans pour se présenter à l’élection présidentielle…
Pardon, veuillez lire 2020 au lieu de 2022 dans mon commentaire (en 22 c’est en France….)!
oui ou 2024…
La politique, cette drogue ultra addictive.
Je crois que la première Présidente des Etats-Unis sera Michelle Obama (vous connaissez la coquetterie féminine autant que politique:).
Ca nous changera du glouton infâme. Bon il y a en encore qui y croient, mais bonjour avec la Chine Nr1!
Elle aura fort à faire pour ramasser les débris d’un pays qui se croit en 1946.
P.S. J’ai ri, car le pays qui a inventé la poudre en… ? est le premier à inventer un feu d’artifice innovant avec des drones, alors vous voyez, il ne faut pas désespérer de la Chine 🙂
Ne trouvez-vous pas qu’il y a des problèmes de personnalité chez certaines femmes politiques de l’ère des boomers qui n’arrivent pas à disparaître, après avoir (mal) servi les intérêts de leur pays. Je pense à Hillary Clinton, bien sûr, mais aussi à Ségolène Royal, Micheline Calmy Rey ou Angela Merkel; comme si elles s’étaient consacrées pleinement à leur carrière et ne pouvaient en raison d’un défaut de caractère y renoncer (ce qui devrait pourtant être à mon avis la 1ère qualité d’un homme/femme politique dans une démocratie, à l’inverse d’une dictature). Servaient-elles l’intérêt de leur pays ou de leur égo?
Et, oui, je dis la même chose pour des hommes, Poutine en tête, mais cela les médias en parlent déjà…