Les deux géants américains du pétrole et du méthane (gaz naturel) ExxonMobil et Chevron vont certainement annoncer plus de $100 milliards de bénéfices pour l’année 2022. De son côté, le géant de l’Arabie Saoudite, Saudi Aramco va largement dépasser les $160 milliards de bénéfices. BP, Shell et Total boucleront la boucle pour dépasser les $300 milliards de profits.
Ainsi, l’arrivée de Cristiano Ronaldo à Ryad, Arabie Saoudite, et ses $200 millions de salaire pour les 2,5 années à venir, seront payés en moins de 6 heures de production pétrolière dans le Royaume. Vue sous cet angle, on pourrait se dire que Cristiano se la joue petit joueur.
De la pandémie à des chiffres record
ExxonMobil enregistre $56 milliards et Chevron $37 milliards de dollars. Comme les températures printanières de l’Europe, nous touchons des records pour les deux sociétés.
Durant la pandémie, la chute des prix et de la consommation pétrolière avaient remis en question le business model des pétroliers et méthaniers (gaz naturel). Certains actionnaires demandaient la prise en compte du réchauffement climatique par les énergies fossiles et un engagement dans les énergies propres.
ExxonMobil avait même perdu le contrôle de 3 sièges au conseil d’administration au profit du fonds spéculatif activiste Engine No. 1 en mai 2022.
Mais, la nouvelle hausse des prix et surtout des bénéfices permettent de conforter la stratégie du “tout pétrole”. Le PDG d’Exxon, Darren Woods, souligne que “l’année record de la société était la preuve qu’elle était “sur la bonne voie.” Du côté de Chevron, le tout pétrole n’a jamais été remis en question.
Du côté de Shell, le nouveau PDG, Wael Sawan, qui remplace Ben van Beurden, la grande question sera de savoir s’il orientera son entreprise dans les énergies alternatives où suivra-t-il le chemin tracé par les américains et les saoudiens.
On notera que la Banque Nationale Suisse n’a également pas remis en question sa stratégie d’achats d’actions des grandes majors pétrolières puisque ses investissements se chiffrent toujours en milliards $ et que le nouveau conseiller fédéral, Albert Rösti, n’est autre que l’ancien président du lobby pétrolier Swissoil. Est-ce que comme Exxon, la Suisse restera-t-elle dans le pétrole et le gaz ?
Le rachat d’actions et éviter de payer des impôts
La mission première des entreprises pétrolières est de générer des bénéfices pour distribuer des dividendes très élevés afin de trouver encore plus d’investisseurs et de continuer le cercles virtueux.
Comme pratiquement tous les pétroliers qui génèrent des bénéfices énormes, un rachat massif d’actions est devenu la mode. Ce système permet d’augmenter artificiellement le cours des actions à court et moyen terme, par ricochet de faire grimper le bonus des dirigeants, de faire augmenter le prix des bénéfices par actions et permet également de diminuer la pression des actionnaires qui sont tentés de regarder du côté vert des énergies.
Ainsi ExxonMobil va se racheter pour $50 milliards de ses propres actions d’ici à 2024. Elle a également augmenté son dividende au début de 2022. Chevron indique qu’elle rachètera environ $15 milliards de ses actions.
Du côté rigolo de la force, ExxonMobil vient de porter plainte contre l’Union Européenne pour éviter de payer la taxe sur les super profits des énergéticiens. Grâce aux traités commerciaux intercontinentaux entre les USA et l’Europe, il est devenu possible pour les multinationales de porter plaintes contre les Etats. Avant seuls les Etats pouvaient poursuivre un Etat.
Il faut savoir que les géants pétroliers comme BP, Exxon, Total ou Shell ne paient pratiquement pas d’impôts et au contraire, elles reçoivent des subsides importants des gouvernements.
Le rachat d’actions au lieu de payer des impôts est un tour de passe-passe qui commence à faire grincer des dents certains politiques, mais ils n’ont pratiquement aucune arme pour changer le cours.
Pourquoi les entreprises rachètent leurs actions ?
Perspectives pour les années à venir
L’action d’Exxon termine l’année à $110 dollars +80% sur un an. Celle de Chevron a augmenté de +53 %, clôturant à $180 dollars par action. La hausse est aussi importante pour les autres pétrolières. Avec le secteur de l’armement, ce sont les deux grands acteurs de 2022 et certainement de 2023.
Du côté des prévisions, ExxonMobil annonce que la demande de pétrole continuera de croître au moins jusqu’à la fin de 2040. La consommation de méthane (gaz naturel) augmentera de près de 50%, même si Exxon n’explique pas s’il y aura du pétrole ou du gaz en suffisance. Cette annonce fait plus penser à une communication pour donner l’impression que l’entreprise possède un avenir radieux dans les énergies fossiles et de continuer à investir dans les énergies fossiles.
Du côté de BP ou de Shell ont pense que la demande de pétrole va diminuer dès 2030. Rystad Energie et l’Agence Internationale de l’Energie prévoient un pic d’extraction avant 2030.
Du côté des prix, l’année 2023 a le potentiel d’être aussi chahuté que 2022 avec en prime une récession mondiale qui pourrait faire chuter les prix. A suivre…
Le système libéral qui est le nôtre, me semble comporter encore pas mal d’incohérences économiques.
Le dessin dit déjà tout ce que vous désirez qu’on retienne, pourquoi ajouter un article ?
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A chaque fois que l’on voit votre pseudo, on sait déjà que vous allez balancer une pique méchante! Alors pourquoi mettre un texte dans vos commentaires ?
Bonne Année M. Doumont, peut-être qu’elle vous apportera une pointe de positivisme ou de bienveillance.
Le temps passe, l’économie trépasse, mais on revient encore et toujours à la case de départ du mécanisme des “profits sans prospérité” au prisme des rachats d’actions propres.
En effet, en 2018, j’écrivais cet extrait sur un blog d’expert: (…) N’assiste-t-on pas depuis plusieurs années à un mécanisme de “profits sans prospérité” qui annihile en grande partie la théorie qui porte son nom? Pour prendre une mesure du leurre, il n’est pas inintéressant de savoir que pas moins de 3’500 milliards de dollars ont été dépensés depuis 2010 par les entreprises US pour racheter en bourse leurs actions. En y rajoutant 2’000 milliards consentis à leurs actionnaires en guise de dividendes, ces 5’500 milliards de dollars sortis par les sociétés cotées américaines dépassent l’ensemble des programme de baisses de taux quantitatives de la Fed. L’étude de Harvard (Profits Without Prosperity) datant de septembre 2014 et dirigée par le professeur et économiste, William Lazonick est tout aussi révélatrice de ce profond malaise. A titre d’exemple, les sociétés cotées à l’indice S&P 500 ont, entre 2003 et 2012, utilisé 54% de leurs bénéfices pour racheter leurs actions, et 37% de leurs bénéfices en dividendes au profit de leurs actionnaires. Là aussi, nous sommes bien loin des investissements consacrés à la Recherche et au Développement.
https://hbr.org/2014/09/profits-without-prosperity
Comme l’a prédit aussi un macroéconomiste hétérodoxe et spécialiste des marchés, “il y a fort à parier que les réductions d’impôts substantielles décrétées par l’administration Trump n’offrent une manne supplémentaire qui sera recyclée dans ces rachats d’actions en lieu et place d’autoriser des investissements de la part de ces entreprises dans l’économie productive et dans la recherche. C’est simple : les 500 sociétés figurant à l’indice S&P ont dépensé 170 milliards en rachats de leurs propres actions depuis décembre 2017, comme par exemple Cisco qui a annoncé encore – courant février 2018 – son intention d’utiliser 25 milliards (soit environ 14% de sa capitalisation boursière) sur ses 70 milliards de réserves afin d’acheter en bourse ses propres titres”.
Dans ce marché de dupes, l’artifice fiscal du président américain ne fait que retarder un inéluctable. Rappelons au passage que la dette sur marge (Margin Debt) – correspondant au montant d’argent que les gens empruntent pour acheter des actions – sur le New York Stock Exchange (NYSE) atteignait des niveaux records en 2017, entre-autre, grâce à l’effet de levier induit par les mesures non conventionnelles des banques centrales. Plus la “Margin Debt” augmente et perdure dans le temps, plus le “sell-off” dans les actions pourrait être important lors de la croisée des chemins. Il n’est pas inintéressant aussi de constater – avec ce graph’ de 2017 – (…) – que les “insiders” (propriétaires/patrons/cadres de sociétés) vendent à titre personnel les titres des sociétés qu’ils dirigent tandis que les sociétés elles-mêmes, en tant qu’entités, continuent à racheter un nombre considérable d’actions avec de l’argent emprunté (et au passage, cet effet de manche soutien les cours). Dans ce contexte, est-il nécessaire de préciser que ces initiés ont plus de connaissances sur le fonctionnement interne de l’entreprise que les actionnaires eux-mêmes ? Hypocrisie, quand tu nous tiens, inutile de croire que le monde va changer.