Un bref guide aux parents pour gérer l’identité numérique (et l’avenir) de nos enfants

Il est bien compris que le rythme des améliorations technologiques a maintenant dépassé la capacité des humains à s’adapter assez rapidement. En conséquence, si nous ne pouvons pas changer assez vite, les institutions le peuvent encore moins. Je discute dans cet article la façon dont ce phénomène pose des défis envers la gestion de l’identité numérique de nos enfants.

La parentalité a aussi besoin d’accélération

L’accélération des changements technologiques combinée à l’accélération de la mondialisation et du changement climatique a donné naissance à une crise identitaire mondiale. Cela s’est traduit par la montée du populisme et un double penchant de l’électorat vers les extrêmes (extrême droite et extrême gauche). Tous ces phénomènes sont discutés dans la littérature récente. En tant que parent de deux préadolescents, ma préoccupation immédiate est de savoir si je devrais aussi accélérer mon rôle parental?

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L’accélération parentale doit s’aligner sur les trois accélérations que j’ai mentionnées ci-dessus, à savoir la mondialisation, le changement climatique et la technologie. Dans cet article, je me concentre sur une seule d’entre elles: la technologie. Une approche du problème consiste à considérer ce qui constitue une éducation numérique précoce pour nos enfants qui aborde ce qui contribue à la crise identitaire.

Le pont entre deux identités

Il existe de nombreux guides parentaux et ils n’ont jamais été aussi populaires que récemment. Rares sont les parents qui ne souhaitent pas avoir d’enfants qui réussissent. La mondialisation est l’une des forces qui vient à exacerber le besoin d’être compétitif, d’où l’épanouissement des guides «recettes de génie». Pourtant, peu, voire aucun, ont comblé le fossé entre la psychologie des enfants et les enseignements nécessaires de l’identité numérique du jeune âge.

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En somme, l’accélération parentale nécessaire doit s’attaquer aux racines du malaise identitaire (plus à ce sujet ci-dessous) et fournir un rempart contre la vaste surface d’attaque encourue par nos enfants en ligne.

J’ai mentionné dans l’introduction que les institutions ne font que commencer leur voyage vers l’accélération de l’éducation numérique. Dans l’école de mes enfants, une fois par an, la police locale organise des séminaires sur les dangers des réseaux sociaux liés au harcèlement et à l’intimidation. J’ai même été invité l’année dernière à donner un cours de cybersécurité où j’ai appris aux enfants à créer des mots de passe complexes mais mémorables. Ces efforts sporadiques sont bien accueillis mais ils ne fournissent pas un programme cohérent.

Parents en accélération  

Heureusement, certains citoyens concernés mettent en place des initiatives à partir de zéro. Un exemple marquant est l’association non gouvernementale iCON basée à Genève en Suisse et cofondée par Lennig Pedron et Aris Adamantiadis, des parents conscients du problème doublés d’experts en cybersécurité.

L’organisation non gouvernementale propose des cours pour les enfants à une échelle significative et participe à des événements majeurs tels que la semaine des droits de l’homme organisée chaque année à Genève.

L’Organisation Non Gouvernementale iCON

L’ampleur des activités couvertes par l’association est assez impressionnante et ne répond pas uniquement aux besoins des enfants. Elle est active dans une série d’événements liés à la cybersécurité dans son ensemble.

Où commencer

Avant de choisir un programme pour les besoins de vos enfants, il est important de comprendre les racines de la crise identitaire actuelle. Une analyse approfondie est donnée par Heather E. McGowan et Chris Shipley dans le chapitre 2 de leur livre The Adaptation Advantage. Plusieurs facettes de leur analyse ayant un impact sur l’identité des gens sont ici pertinentes: l’érosion de la vérité, de la confiance et la fin de des distances physiques qui remodèlent les relations humaines.

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Internet et en particulier les réseaux sociaux ont donné une voix aux opinions les plus extrêmes et ont polarisé le discours politique. Cela rend difficile la distinction entre les opinions et les faits et entraîne une érosion de la confiance. Par exemple, une étude réalisée en 2016 par la Stanford Graduate School of Education révèle que «les étudiants ont du mal à juger de la crédibilité des informations en ligne».

Les communautés physiques sont remplacées par des associations en ligne. Selon une enquête de l’assureur Cigna, la génération Z (enfants nés entre 1997 et 2015) est la génération la plus connectée et aussi la plus solitaire.

Un programme sur l’identité numérique doit s’attaquer de front aux maux ci-dessus.

Où aller

Au minimum, un bon programme devrait inclure l’enseignement de méthodes de recherche d’informations de manière à développer la pensée critique. Dans la mesure du possible, savoir discerner opinions et faits est une compétence essentielle à acquérir. Un mécanisme pour développer des relations plus significatives en ligne est également un défi.

 

Le programme proposé par l’ONG Icon est un bon modèle pour les institutions

Le curriculum publié par l’association iCON semble être une instance qui couvre les besoins que j’ai identifiés ci-dessus. D’autres améliorations intéressantes sont l’inclusion des parents dans le processus d’apprentissage et la segmentation des classes par groupe d’âge.

Dans l’ensemble, suivant le modèle d’iCON pour l’éducation numérique des enfants et d’autres initiatives similaires, un programme adéquat devrait généralement inclure:

  • Hygiène informatique générale: enseignements de base sur la gestion des mots de passe, paramètres sécurisés pour les comptes en ligne, notions d’informatique verte, etc..
  • Information et confiance numérique: développer des compétences pour différencier les types de désinformation, y compris les “fake news”, les théories du complot, les chatbots, les modèles et algorithmes d’IA, etc.
  • Gestion de la confidentialité: enseigner la visibilité des informations sur les réseaux sociaux, des concepts tels que le classement social, la gestion des problèmes de confidentialité en ligne, etc.

L’inclusion des parents dans la classe permet un renforcement du processus et la possibilité qu’il se poursuive à la maison. Une segmentation par tranches d’âge permet un suivi à travers les différentes étapes de l’enfance jusqu’à ce que les participants atteignent l’âge de jeunes adultes.

Le salut de la pensée critique

Le principal résultat attendu d’un programme d’études sur l’identité numérique de nos enfants est le développement de leur esprit critique. Ceci est largement reconnu comme l’un des antidotes aux effets secondaires néfastes de la technologie qui remodèlent notre société, tel que le fléau de la désinformation. La pensée critique (“Critical Thinking” en anglais, mais également appelée “Sense Making”) est également l’une des compétences essentielles nécessaires à l’avenir du travail, telles que répertoriées par l’Institute for the Future (IFTF.org) dans le document Future Work Skills 2020.

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Une initiative comme celle lancée par Pedron et Adamantiadis fournit un modèle pour que les institutions soient plus résilientes et adaptables au changement. Tout le monde, et à plus long terme, nos enfants doivent concilier leur identité physique avec leur identité numérique. La date limite pour mettre en œuvre un programme solide est malheureusement déjà dépassée depuis longtemps.

Souvenons-nous que le rythme de changement le plus lent est aujourd’hui.

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