L’édition 2020 du salon des métiers et de la formation valaisan « Your Challenge » vient de fermer ses portes. De retour de Martigny, je vous propose de vous emmener dans une visite virtuelle de l’exposition « Au cœur de l’apprentissage » pour y découvrir le parcours de l’apprentissage.
Photo de l’entrée de l’expo, ©IFFP C. Chammartin
Posons le décor
Commençons la visite ! Nous entrons dans cet espace qui, de prime abord, ressemble à un labyrinthe. Rassurez-vous, il n’y pas de risques de s’y perdre, le parcours suivant la chronologie d’une formation : de l’embauche à l’obtention d’un diplôme. L’entrée invite les visiteurs à passer la tête dans un décor qui rappelle celui d’un appartement. Fauteuil, téléviseur, tableaux au mur et même un coucou. Tout rappelle l’implantation de la voie de l’apprentissage dans le quotidien helvétique. Cet espace introductif pose le décor en rappelant la longue histoire du système suisse, une galerie de photos permet ainsi de parcourir l’évolution de l’apprentissage, monde très masculin sur les premiers clichés. Plus récemment, des images de filles dans des métiers largement masculinisés illustrent certaines campagnes publicitaires.
Mécanicienne en maintenance d’automobiles CFC
©AGVS/UPSA, 2017
Dans ce premier espace, comme dans tous les suivants une porte fermée par une bâche permet d’entrer dans l’espace central qui vient présenter les zones d’ombre du système, les difficultés. Il est possible d’y accéder depuis chaque espace pour découvrir les difficultés en lien avec les thématiques abordées dans la salle précédente. La visite peut également se faire plus tard. Lire la section Angles morts ci-après.
Embauche
On quitte l’appartement pour entrer de plein pied dans le parcours : première étape, cruciale, l’embauche ! Apprentis et formateurs rappellent les enjeux : trouver une place d’apprentissage dans le « bon métier » dans un marché parfois tendu pour les uns. Trouver la « bonne » personne, qui fera de cette formation son métier, qui restera peut-être dans l’entreprise pour les autres. Un jeu invite à se mettre « Dans la peau d’un recruteur » et à choisir un-e apprenti-e, un-e seul-e, pour le métier que vous aurez sélectionné. La sensation est inconfortable, les informations insuffisantes, il faut évaluer au « feeling » qui sera ou non engagé-e. Malgré les notes, les tests et les stages, il y a bien quelque chose qui se joue dans le face à face de l’entretien d’embauche… Quelques personnages n’ont jamais passé la rampe de la « première impression ». Au moment de quitter cet espace, un graphique s’arrête sur les 20 métiers les plus choisis par les jeunes (top 5 : Commerce et administration ; Vente en gros et en détail ; Construction et génie civil ; Soins infirmiers ; Mécanique et technique apparentée). Cela rappelle à quel point la formation professionnelle est genrée. Et une jeune visiteuse de dire : « c’est pas vraiment une surprise, c’est l’éducation ».
Jeu « Dans la peau d’un recruteur », © Céline Ribordy
Apprentissage au quotidien
Une fois embauché-e, nous voilà dans le quotidien de l’apprentissage en entreprise. Un espace plus encombré, qui rappelle le travail et la spécificité de former en entreprise. Quatre films présentent les enjeux de cette transmission sur le lieu de travail, mais aussi d’autres : le jeune âge des apprenti-e-s, la transition vers le monde du travail, le passage à l’âge adulte, la pénibilité de certains métiers. Mais aussi l’envie, la motivation des jeunes et des personnes qui les forment.
Jeunes regardant les films sur la transmission, © IFFP C. Chammartin
L’accent est mis sur un point crucial de l’apprentissage : il faut à la fois former, se former et produire. Des graphiques illustrent comment dès la première année, de manière plus ou moins importante selon le métier, les apprenti-e-s participent à la production. Enfin, l’enjeu du temps ou plutôt de l’absence de temps est évoqué. Des témoignages sont présentés au travers d’un dispositif vidéo qui va en s’accélérant. Petit à petit on ressent à son tour cette pression typique de l’apprentissage dual.
Le quotidien, © IFFP C. Chammartin
Zones d’ombre
Avant d’arriver à la fin de la formation, entrons dans l’espace central, où sont présentées les difficultés. Fermé par des bâches, il est plus petit et légèrement oppressant. Tout d’abord, le rappel de l’allongement et des difficultés liées à la transition école-travail, les temps d’attente, les inquiétudes. Face à l’embauche, la réalité de la discrimination des jeunes immigrés, mais aussi des filles visant un métier où elles sont minoritaires. Rappel également du décalage qualitatif entre offres et demandes de places d’apprentissage (des places, oui, mais pas dans les métiers rêvés des jeunes !). On découvre les chiffres des arrêts prématurés (22%) et les raisons de ceux-ci (orientation et performances certes, mais aussi relations au travail, conditions de travail et de formation). Enfin, retour sur la réalité des échecs finaux ou encore sur l’attente avant de trouver un premier emploi. Les témoignages sont cachés sous un clapet, rappelant qu’en Suisse, on aime la discrétion quand il s’agit des limites du système d’apprentissage. A nous de le soulever et de découvrir ce qui s’y cache ! Cet espace, véritable réplique au discours vantant le « meilleur système au monde », se veut également un lieu d’approfondissement et de réflexion.
Les difficultés cachées, © Céline Ribordy
Obtention du diplôme
Nous voilà presqu’au terme du parcours. Entrons dans le dernier espace à l’ambiance plus festive. Au mur d’innombrables diplômes : de très anciens, des métiers ayant disparus, des curiosités, mais surtout des AFP, des CFC, des maturités professionnelles et autres brevets, maîtrises, bref toute la palette des diplômes de la formation professionnelle. Derrière ces diplômes, on trouve des histoires, celles des pionnières ayant bravé les bastions masculins, celles des mobilités sociales rendues possibles par une maîtrise après un CFC, celles aussi de familles où trois générations ont en commun d’avoir fait un CFC. Ces histoires renvoient au premier espace, où le décor a été posé, et soulignent encore une fois l’importance du système dans la réalité et le quotidien de notre pays.
A la croisée des chemins…
Pour quitter l’expo, un dernier dispositif interactif. Au sol, un cercle nous invite à nous positionner face à quatre sorties, autant de voies après un apprentissage : entrer sur le marché du travail, poursuivre vers la formation professionnelle supérieure et ouvrir son entreprise, poursuivre vers des études dans une haute école ou retourner dans l’expo et démarrer un nouvel apprentissage. Laquelle choisirez-vous ?
Sortie de l’expo, © IFFP C. Chammartin
Prochaines dates de l’expo
Vous avez raté l’exposition à Martigny ? Ou au contraire, vous l’avez adorée ? Alors vous pourrez la (re)voir dans différents salons des métiers et de la formation en Suisse romande et aux Swiss Skills aux dates suivantes :
- Salon interjurassien de la formation, Delémont : 1er – 5 avril 2020
- Swiss Skills, Berne : 9 – 13 septembre 2020
- Salon des métiers et de la formation, Lausanne : 24 – 29 novembre 2020
- Start! Forum des métiers, Fribourg : 2 – 7 février 2021
Fiche signalétique
L’exposition « Au cœur de l’apprentissage » est un projet réalisé dans le cadre d’un financement FNS-Agora pour la vulgarisation et le transfert scientifique. Elle est le fruit de différentes recherches menées à l’IFFP par Prof. Nadia Lamamra et son équipe sur les arrêts d’apprentissage, les parcours de transition et le quotidien des formateurs et formatrices en entreprise. Elle est produite par l’IFFP et le Collège du travail à Genève et est soutenue par le FNS, la Loterie romande et divers fonds professionnels cantonaux.
Auteurs
L’exposition a été conçue par Nadia Lamamra, Barbara Duc et Isabelle Dauner, avec Stéphane Klaefiger (scénographie), KO Production (graphisme), Katharine Dominicé (films) et Isabelle Closuit Chouadra (médiation).