Aviron, leçon de vie n°3 : Les amitiés nées dans la sueur vivent à jamais

Tout comme la famille, un club d’aviron t’apporte des amis que tu ne choisis pas. Et, tout comme la famille, ces amis restent pour la vie.

De mon expérience en tout cas, les relations tissées au sein du club d’aviron sont particulièrement solides. Même plusieurs années après avoir arrêté de ramer, je ne compte pas le nombre d’anciens co-équipiers qui se mettent en collocation, qui traversent des continents pour des retrouvailles, qui se rassemblent tous les vendredis pour Koh Lanta (pas de jugements) ou, même, qui se marient.

Mais qu’est-ce qui rend ces relations si fortes ? A mon avis, trois explications principales :

  • La première est tout simplement le temps passé ensemble. L’aviron est un sport qui exige beaucoup d’entraînements et après un certain nombre d’heures de cohabitation, on a, au fond, pas vraiment le choix de s’aimer ou pas. On finit par rire aux mêmes blagues que l’autre, à s’approprier ses habitudes bizarres et à s’intéresser à son quotidien le plus basique.
  • Un deuxième facteur est de voir son coéquipier dans tous ses états : transpirant et grognant sur la machine à ramer à côté de soi ; complétement nu dans la douche ; ronflant toute la nuit pendant un stage d’entraînement, etc. Quand on a plus rien à cacher, comment ne pas faire totalement confiance ?
  • Et finalement, troisième élément : l’intensité des moments partagés. L’euphorie de la ligne d’arrivée, la frustration de l’entraînement décevant, l’excitation de l’esprit d’équipe, l’inébranlable certitude que l’autre s’investit autant que soi… Quand on traverse ensemble tant d’émotions qui prennent aux tripes, une complicité solide est inévitable.

Naissent alors des amitiés non seulement pérennes, mais également de nature particulière. Les barrières tombent complétement et l’on se retrouve à passer tout son temps ensemble, à tutoyer les parents les uns des autres, à ne plus avoir aucune retenue. L’une des légendes urbaines qui circulait dans mon club en est un bon exemple : il était question d’un bateau de huit rameuses et une barreuse qui s’entraînaient pour les championnats américains et qui, au moment de la pause, se passaient une éponge pour pisser dessus, l’essorer dans l’eau, et la passer à la co-équipière de derrière. Est-ce que l’on peut imaginer plus grande intimité ? (Dans ce cas précis, est-ce que l’on veut imaginer plus grande intimité ?)

Qu’en est-il de « l’après aviron » ? Il est clair qu’au moment où l’on cesse de s’entraîner, certaines amitiés gardent leur intensité et d’autres se détendent inévitablement. Mais il reste toujours ce sentiment d’appartenir à une communauté (qui peut parfois faire une peu secte, vue de l’extérieur) où tout le monde se connaît et s’entraide à l’occasion (mobiliser ses amis rameurs pour un déménagement, par exemple, c’est pratique).

En tout cas, j’ai personnellement hérité de tout cela l’envie et le besoin de m’entourer d’une sorte de tribu. Pas forcément une tribu de sportifs, mais des personnes avec qui j’ai envie de passer beaucoup de temps et d’impliquer dans presque tous les aspects de ma vie, les meilleures comme les plus pénibles.

Car, à mon avis, une amitié inaltérable se reconnait à l’authenticité des moments partagés.

Juliette Jeannet

Juliette hérite de sa passion du sport de son grand-père, ancien rameur olympique. Grâce à un esprit de club stimulant, elle s’engage dans la compétition internationale en aviron (2011 à 2013). Très active au sein du LS aviron, elle pratique et côtoie une multitude d’autres sports. En parallèle, elle vulgarise et promeut des thématiques de la transition écologique à travers des vidéos pour la Fondation Zoein.