WEF 2018 Édito : Globalisation et cultures authentiques

Je me demande souvent ce qu’est un État-nation. Qui doit y adhérer ? Le fait d’être né à un endroit nous donne-t-il des traits si fondamentalement différents de ceux d’un autre né quelques dizaines, centaines ou milliers de kilomètres plus loin ? Si différents que l’on n’aurait d’autre choix que de faire partie d’une seule et unique communauté qui est celle de notre lieu de naissance, seule doctrine correspondant à nos idéaux les plus profonds ? La France, mon Pays, ma Patrie… God bless the United States of America… Kurdes, Palestiniens et Massaï revendiquent également une culture à part entière, sans même faire partie d’un État. Ou bien faisons-nous tout pour s’auto-convaincre de la supériorité de la culture prônée par le royaume duquel nous faisons partie, pour se donner de l’importance et de la voix dans un jeu de coudes contre le reste de l’Humanité ? Chaud, chaud, on s’approche. Pourquoi les politiciens du monde entier se donnent-ils tant de peine à rendre leur pays « greater » ou « great again » ? Sans doute reste-t-il en nous un esprit de conquête datant de l’ère impériale ou de l’époque des croisades. « Notre pays, notre religion, notre idéologie est celui ou celle de la vérité. Nous nous devons de l’inculquer à nos voisins, aux pays limitrophes et au reste du monde. » Mais sans doute aussi l’Homme a-t-il toujours eu en lui une sorte d’égo, maladroitement interprété par un besoin d’importance, qui le pousse à se mettre au centre du monde et à penser avant tout à une chose : lui-même. Je n’ai rien contre l’égoïsme qui est probablement l’une des étapes de l’une des clés du bonheur : se connaître soi-même. J’ai par contre peine à comprendre l’égocentrisme qui méprise la différence et rejette l’hétérogène. Oui, c’est certainement cela qui m’intrigue le plus dans le concept d’État-nation. Son égocentrisme. Le 48ème sommet annuel du World Economic Forum ouvre ses portes ce mardi sur le thème Créer un avenir partagé dans un monde fracturé et je me demande, à tort ou à raison, si l’État-nation et son patriotisme sont compatibles avec ce noble et nécessaire dessein. Tant que les intérêts divergents et la peur de l’autre règnent, peut-on imaginer un avenir commun ? Tant que chaque nation fait tourner l’Univers et le Cosmos autour d’elle, peut-on dessiner les contours d’un futur collectif ? Ne serait-il pas temps d’admettre que nous faisons tous aujourd’hui partie d’une seule et unique population globale, aussi diverse et riche en cultures authentiques soit-elle ? Toutes nos activités et aspirations ont comme échelle le monde. Pourquoi pas l’identité ?

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J.G.

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Crédits photo : Picnic at the Border - JR

 

Julien Grange

Julien Grange a fait ses études d’économie entre HEC Lausanne et la Stern School of Business de NYU, New York. Il vit aujourd’hui à Londres et travaille pour une entreprise active dans le développement et le financement de projets immobiliers en Europe. Il se passionne pour le devenir du monde et celui de ses habitants. En tête de sa liste pour le Père Noël chaque année : une boule de crystal. Elle n'est pas encore arrivée, mais elle ne saurait tarder.