Sebastian Kurz, un ami autrichien qui nous veut du bien

Après la visite officielle de la Présidente Simonetta Sommaruga à Vienne en début d’année, une impressionnante délégation du Conseil fédéral a accueilli avec honneurs militaires et hymnes nationaux le Chancelier autrichien Sebastian Kurz. Les deux pays ont fait le point sur la situation sanitaire, les relations entre la Suisse et l’UE ainsi que plusieurs dossiers internationaux. Cette visite souligne les relations diplomatiques exceptionnelles qu’entretiennent la Suisse et l’Autriche. Jean-Yves Le Drian, Ministre français des affaires étrangères, était attendu à Berne le même jour mais a dû annuler sa visite pour une raison inconnue.

Le jeune Chancelier fédéral de la République d’Autriche, Sebastian Kurz, a été accueilli vendredi à Berne pour une visite officielle. La Présidente de la Confédération, Simonetta Sommaruga, lui a déroulé le tapis rouge au domaine du Lohn. Il s’agit d’un des trois bâtiments prestigieux avec la Maison Béatrice de Watteville et l’hôtel Bellevue Palace que le Conseil fédéral utilise pour recevoir les chefs d’Etats et de Gouvernement. Durant les entretiens officiels entre les deux délégations, Simonetta Sommaruga et Sebastian Kurz ont abordé plusieurs sujets : la gestion de la crise sanitaire dans leur pays respectif, la protection des Alpes, les relations entre la Suisse et l’Autriche et entre la Suisse et l’Union européenne ainsi que quelques dossiers internationaux. Dommage que les deux dirigeants n’ont pas évoqué le fameux accord-cadre. Le soir, Sebastian Kurz a rencontré brièvement Gerhard Pfister, par ailleurs président de mon parti le PDC, dans les jardins de l’Ambassade autrichienne. Le Parti populaire autrichien (ÖVP) et le Parti démocrate-chrétien (PDC) sont proches puisque les deux partis ont une orientation chrétienne-démocrate et libérale-conservatrice.

La Présidente suisse Simonetta Sommaruga et le Chancelier autrichien Sebastian Kurz en pleine discussion au domaine du Lohn, lors de la visite officielle de ce dernier à Berne, le 18 septembre 2020.

De solides relations bilatérales entre Berne et Vienne

Les relations ente Berne et Vienne sont plus qu’excellentes. A l’image de la relation spéciale entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, la Suisse aussi a sa relation spéciale avec l’Autriche. La récente visite du Chancelier Kurz en témoigne. Ce n’est pas moins de cinq Conseillers fédéraux qui étaient présents autour de la table. Outre évidemment la Présidente Sommaruga, Alain Berset, Karin Keller-Sutter, Ignazio Cassis et Ueli Maurer ont pu échanger avec la délégation autrichienne. La coopération économique entre les deux pays se chiffre à plus de 20 milliards d’euros selon le DFAE. On est en droit de se demander pourquoi Guy Parmelin, Ministre en charge de l’économie, n’était pas présent au Lohn. Probablement parce qu’il est membre de l’UDC et donc de facto, il est contre tout ce qui vient de l’UE. La visite de Sebastian Kurz en Suisse est un renvoi d’ascenseur. Simonetta Sommaruga s’était rendue en visite officielle en Autriche en début d’année. Elle y avait rencontrée le Chancelier conservateur Sebastian Kurz mais aussi son homologue, le Président écologiste Alexander van der Bellen. Une tradition de longue date veut que la ou le président(e) suisse en fonction effectue sa première visite dans la capitale autrichienne.

La Président suisse Simonetta Sommaruga est accueillie par son homologue autrichien Alexander van der Bellen au Palais Hofburg, Vienne, le 30 janvier 2020. Photo : compte Twitter officiel de la présidence autrichienne.

Une visite annule passée malheureusement inaperçue 

La capitale fédérale aurait dû vivre une intense journée diplomatique vendredi. En plus de la visite officielle du Chancelier fédéral autrichien, la Présidente Simonetta Sommaruga et le chef du DFAE Ignazio Cassis devaient s’entretenir avec le Ministre français de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Sa visite avait été annoncée dans la presse mais pour une raison inconnue, il n’est pas venu à Berne. En faisant quelques recherches sur Google, je suis tombé sur un article de Bote der Urschweiz. Celui-ci nous apprend l’annulation de la visite de Le Drian en Suisse. Je suis surpris que les principaux médias romands n’ont pas évoqué ou cherché à comprendre le pourquoi du comment. A ce stade, je suppose une volonté de Berne comme de Paris de reprogrammer cette visite manquée. Aussi, j’espère une rencontre tout bientôt entre Simonetta Sommaruga et Emmanuel Macron à Berne ou à Paris.

Simonetta Sommaruga reçue pour une visite présidentielle en Ukraine

La Présidente suisse a honoré l’invitation reçue à Davos de son homologue ukrainien Volodymyr Zelenskyy. Après la Pologne et l’Autriche en janvier, cette visite présidentielle est le premier déplacement officiel à l’étranger depuis l’apparition du coronavirus sur le continent européen. Retour sur ces trois jours de visite intenses qui ont permis de montrer l’importance des relations Suisse – Ukraine.

Le Président de l’Ukraine, Volodymyr Zelenskyy, a accueilli avec les honneurs militaires à Kiev Simonetta Sommaruga, Présidente de la Confédération suisse. Il s’agissait de la première visite d’un président suisse en fonction dans “le grenier à blé de l’Europe”. Durant les entretiens officiels entre les deux chefs d’Etat au Palais Mariinsky, ils ont mis en avant le potentiel économique qu’offre l’Ukraine pour les entreprises helvétiques. La Suisse est aujourd’hui pour l’Ukraine le cinquième donateur et le cinquième investisseur privé. Simonetta Sommaruga s’est aussi réjoui de voir l’Ukraine œuvrer en faveur du respect de l’Etat de droit et de la lutte contre la corruption. Berne organisera d’ailleurs en 2022 une conférence sur les réformes lancées par les autorités ukrainiennes (gouvernance, santé, développement durable, économie, etc.). Nos entreprises sont prêtes à investir mais il leur faut une sécurité juridique garantie. Avant de s’entretenir avec le Premier ministre Denys Shmyhal ainsi qu’avec des représentants de la société civile, elle a tenu à rappeler et à juste titre le point de vue de la Suisse sur l’annexion de la Crimée. Celle-ci est une violation claire du droit international.

Sommaruga et Zelenskyy dans le Donbass

Au troisième et dernier jour de sa visite, la Présidente Sommaruga s’est rendue avec le Président Zelenskyy à l’est de l’Ukraine. Cette région est en proie à des violences depuis 2014, elles opposent le pouvoir central (Kiev) à des séparatistes pro-russes soutenus par Moscou. La Suisse, à travers la mission de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), participe activement à trouver une solution durable et acceptable par les deux parties en conflit. Simonetta Sommaruga tenait à “visiter” le Donbass pour voir de ses propres yeux la souffrance des habitants de cette partie du pays en guerre. Elle a également assisté à la livraison par un convoi suisse d’aide humanitaire de matériel pour le traitement de l’eau potable. Particulièrement important en ces temps de coronavirus. J’espère sincèrement que Kiev et Moscou ou Moscou et Kiev, principe de neutralité oblige, trouveront une solution sur le long terme à ce conflit qui a déjà fait 10’000 morts et 1,7 millions de déplacés.

Après la Russie en 2019, l’Ukraine en 2020

Les mauvaises langues diront que la Russie de Vladimir Poutine pourrait remettre en cause la neutralité helvétique. L’argument avancé : la visite présidentielle de Simonetta Sommaruga en Ukraine. Et que c’est vrai, il n’y a eu pour l’heure aucun échange téléphonique entre Berne et Moscou. Ces mêmes mauvaises langues oublient que la dernière rencontre bilatérale Suisse – Russie remonte à seulement huit mois. En novembre dernier, après des entretiens exceptionnels avec des “grands” chefs d’Etat (Jair Bolsonaro, Xi Jinping, Donald Trump, Shinzo Abe ou encore deux monarques du Golfe), Ueli Maurer avait terminé son année présidentielle en se rendant à Moscou. Il y avait rencontré le maître du Kremlin, Vladimir Poutine, et ensemble ils avaient parlé des échanges commerciaux mais aussi de l’engagement de la Suisse en faveur de la paix dans le Donbass. Ainsi, personne ne pourra remettre en cause le respect de la neutralité suisse par le Conseil fédéral. Maurer à Moscou en 2019, Sommaruga à Kiev cette année. A chaque présidente ou président suisse ses sensibilités et ses valeurs, non?

Le Président russe Vladimir Poutine a visité en compagnie du Conseiller fédéral Ueli Maurer le quartier général de la délégation suisse au JO d’hiver en Russie, Sotchi, 15 février 2014. Photo : Copyright: House of Switzerland

Quelle différence entre “visite d’Etat” et “visite présidentielle”?

Une présidente / un président suisse se rend-t-il en “visite d’Etat” ou en “visite présidentielle”? Peut-elle ou peut-il être reçu(e) en visite d’Etat? J’ai lu et entendu cette semaine dans la presse que par exemple “Simonetta Sommaruga effectuait une visite officielle en Ukraine”. Ce terme de “visite officielle” est faux, la Présidente suisse était bel et bien en visite présidentielle en Ukraine. Afin de comprendre le pourquoi du comment, je vous propose de lire ou relire la définition d’une visite d’Etat et/ou d’une visite présidentielle, selon les termes de la Confédération.