Libye : 10 ans après la mort de Kadhafi, un pays toujours chaotique

Dix ans après la mort du dictateur libyen Mouammar Kadhafi, emporté par une révolte populaire lors des “Printemps arabes”, le pays est toujours en proie au chaos et à la violence. Le retour à la stabilité voulue par les pays voisins et par l’Union européenne se fait toujours attendre. Certains Libyens regrettent les années de “calme” sous l’ère Kadhafi. A l’image de Bachar Al-Assad en Syrie ou d’Abdel Fattah Al-Sissi en Egypte, ne faut-il pas continuer à soutenir ces régimes au nom d’une certaine stabilité pour l’Europe ?

Le 20 octobre 2011, Mouammar Kadhafi était traqué comme une bête à abattre dans son fief de Syrte par des révolutionnaires. Le même jour, il était exécuté. Il aura fallu presque 42 ans de règne sans partage avant que le dictateur tombe. C’est une intervention militaire internationale, lancée par le biais de l’OTAN (France, Royaume-Uni et Etats-Unis), qui a accéléré sa chute. Malheureusement, Paris, Londres et Washington n’ont jamais réfléchi aux conséquences néfastes de la chute brutale d’un personnage comme Kadhafi. Je condamne ici une certaine impréparation des services secrets des trois pays. Comment n’ont-ils pas pu voir que les islamistes allaient s’emparer du pouvoir et des richesses pétrolières? Cela reste encore un mystère pour moi.

Pas opposé à la chute d’un dictateur, mais…

Je ne m’oppose pas à un renversement d’un tyran, mais pour moi il y a deux conditions importantes. La première, c’est de prouver que le dictateur a l’intention de massacrer son peuple. Un chef d’Etat qui envoie la police ou l’armée assurer l’ordre n’est en rien une preuve que celui-ci cherche à provoquer une guerre civile. La deuxième, c’est d’avoir un plan pour préparer une transition pacifique. Ce que la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis n’ont pas fait dans le cas libyen. Ils ont simplement abandonné ce pays aux mains des milices islamistes. Comme ils font dans le dossier afghan, en laissant la population afghane déjà en souffrance aux mains des Talibans. Et ils ont bien-sûr profité pour ramasser tous les contrats de pétrole et de gaz. Aucune de ces trois nations n’a su répondre aux aspirations du peuple libyen qui demandait de la stabilité, un retour aux libertés et de la démocratie.

Parmi ces pays considérés comme des “dictatures” par certains, il ne faut jamais oublier que certains d’entre eux sont des pays stratégiques pour le commerce et la lutte contre l’islamisme politique. Par exemple l’Azerbaïdjan, Le Tadjikistan, la Syrie, le Turkménistan, le Kazakhstan ou encore la Chine.

Une Libye divisée entre Est et Ouest

Au contraire, on leur a livré un pays complètement morcelé. Peu de Libyens avaient prévu le chaos qui allait s’emparer du pays après la mort de Kadhafi. Aujourd’hui, après des années de dialogue sous l’égide de l’ONU, la Libye devrait organiser des élections au mois de décembre. Elles ont déjà été déplacées en janvier 2022, cela ne m’inspire pas confiance quant à une paix durable dans ce pays. Je doute fort que des élections sûres et transparentes auront lieu un jour. Malheureusement, les centres de pouvoir rivaux à l’est et à l’ouest du pays ne font rien pour faire progresser un dialogue constructif.

Bien que les Libyens luttent toujours pour un retour durable à la stabilité, nombreux sont ceux qui aujourd’hui viennent à regretter le temps de Mouammar Kadhafi. La vie était loin d’être rose mais les gens avaient de quoi se nourrir, de l’électricité, du travail et pouvaient se déplacer sans craindre d’être tués par des milices sauvages. C’est pourquoi aux yeux de l’Union européenne ou de la Suisse, les régimes syrien, égyptien, turc, tunisien ou encore algérien doivent être le plus stable possible.