Les engrais verts avec Raphaël Maye, du Domaine Simon Maye et Fils.

Série avec mini-vidéo > Viticulture biologique, quels outils pour nos vignerons ?

Episode 1 > Les engrais verts avec Raphaël Maye, du Domaine Simon Maye et Fils.

 

Bienvenue dans cette nouvelle mini-série où vous retrouverez en vidéo 7 vignerons valaisans qui nous parlerons de leurs techniques pour gérer leurs vignes en culture biologique.

 

Ces épisodes sont issus d’une démarche de promotion de la culture biologique du comité de Bio Valais, organisation de membres de Bio Bourgeon Suisse.

Pour ce premier épisode, partons avec Raphaël Maye, jeune vigneron qui a repris les rennes du Domaine Simon Maye et fils à Chamoson/St-Pierre-de-Clages (Valais). Sa réputation n’est plus à faire. Sa Syrah Vieilles Vignes s’arrache et peut avec aise concurrencer les plus grands vins de ce noble cépage. N’ayez pas peur de le confronter à une belle Syrah des Côtes-du-Rhône Nord, région de France où la Syrah s’exprime à merveille solo (ou avec un micro-touche de Viognier) sur des appellations réputées telles que Cornas, St-Joseph, Côte-Rôtie, Hermitage ou Crozes-Hermitage.

À la vigne, Raphaël s’est amusé à planter des engrais verts. Il vous en parle dans cette mini-vidéo.

Qu’est-ce que c’est ? Et à quoi ça sert ?

 

Prenons quelques notions de base. Votre vigne requiert peut-être des nutriments pour s’épanouir pleinement. Elle a besoin de macronutriments et micronutriments. Vous pouvez donc ajouter des engrais de synthèse qui vont contenir tout ce dont vous avez besoin. Vous pouvez les appliquer sur votre vigne ou sur le sol selon le type d’engrais. Vous pouvez également apporter du fumier en automne et légèrement l’enfouir, ajouter du compost, du marc de raisin (qui est acide et donc adapté aux sols calcaires) ou mettre de la paille qui va également permettre de préserver l’humidité en été. En bref, il n’y a pas une solution, cela dépend dans un premier temps de vos besoins.

Les engrais verts, c’est un engrais apporté grâce à la nature. C’est-à-dire en plantant des graines de plantes bénéfiques à la vigne entre les rangs de cette dernière. Cela contribue à l’entretien du sol. Selon la région où vous vous trouvez, votre microclimat sera particulier. Par exemple, vous pourriez avoir trop d’eau et souhaitez avoir une plante qui va absorber cet excédent d’eau. Dans le cas du Valais, il fait souvent très chaud et sec en été (sauf l’été 2021). L’eau est donc plutôt une rareté et il faut la préserver. La vigne en a besoin. Donc afin d’éviter de lui faire une concurrence, nous allons faire un entretien des sols en enlevant l’herbe entre les rangs de vigne pour qu’elle ne prenne pas l’eau nécessaire à la croissance de notre vigne.

Il y a plusieurs façons de le faire : désherbage avec de l’herbicide, le fameux Round Up ou glyphosate. C’est la pire solution puisqu’il tue l’herbe mais aussi toute la vie des sols. Je comprends que dans certaines parcelles en coteaux c’est très compliqué de faire autrement ou que pour certaines adventices cela semble toujours la meilleure option.

Evidemment, d’autres techniques existent mais elles prennent plus de temps et sont donc également bien plus coûteuses. Analysons-les.

Le désherbage mécanique en est une. Il consiste à retourner les premières couches du sol. Selon la saison, différents outils sont à disposition du vigneron. Néanmoins, cela reste une technique coûteuse en temps et requiert un certain nombre d’investissement initiaux. Il est possible de faire du désherbage thermique à l’aide d’une flamme directe qui va brûler et donc détruire la partie aérienne de l’adventice. Il faut faire attention et bien utiliser ces techniques sur les jeunes plantes avant qu’elles ne deviennent trop robustes. Une autre technique consiste à utiliser de l’eau sous haute-pression. Cela consiste à faire une propulsion verticale de jets d’eau à température ambiante avec une pression de 1’100 bars. Il faut passer 3 à 4 fois par an. Cela détruit la partie aérienne des adventices et également la partie supérieure de leurs racines. Les résultats sont immédiatement visibles mais les coûts restent élevés. (Source : Agridea, fiches techniques viticulture pour les apprentis CFC).

Il est donc possible d’empêcher des mauvaises herbes de pousser en prenant l’espace disponible avec les engrais verts. Cela consiste à semer des plantes qui vont apporter des nutriments pour la vigne et qui, idéalement, vont pousser à des périodes différentes de l’année et donc, ne pas faire concurrence à la vigne. Cela contribue également à éviter l’érosion et maintenir des sols vivants.

Dans cette vidéo, Raphaël parle de trèfle. Cette plante apporte de l’azote qui est clé pour le développement végétatif de la vigne et sa vigueur. Il faut d’ailleurs éviter qu’il y en ai trop car sinon, il y aura trop de feuilles et cela augmentera potentiellement la pression des maladies.

Cela l’aide également à la cave puisque cela fournit de l’azote assimilable (YAN) directement utilisable pour les levures. Cela évite qu’elles « stressent » et créent des arômes issus de la réduction, comme les choux et œufs pourris par exemple.

On peut semer toute une série de plantes en fonction de ses besoins en micro-nutriments. On trouve souvent en Valais un mélange avec du seigle, de la luzerne, fétuque, orge des rats, brome des toits, trèfle, etc.

À Napa et en Toscane, j’ai souvent vu des mélanges riches en graminées avec notamment des haricots. La moutarde a aussi beaucoup de succès dans ces régions. Cela fait des magnifiques champs jaunes en février-mars.

En bref, il n’y a pas une solution pour pallier à la gestion de l’herbe dans les vignobles mais une multitude de solutions. Chaque vigneron aura des problématiques différentes en fonction de ses parcelles, leur orientation, le type de sol, l’ensoleillement, la capacité à stocker de l’eau, la saison viticole en question, etc. Il n’y a malheureusement pas de « one size fits all » mais c’est un domaine absolument passionnant à explorer. J’aime beaucoup cette notion d’engrais verts où finalement la nature s’aide grâce à la nature et qu’on vient seulement filer un coup de pouce à cette belle terre très intelligente.

On voit apparaître les premiers robots tondeurs mais ils sont onéreux et sont surtout adaptés à des sols plats. Pour l’instant, il va falloir continuer à gérer ça nous-même !

Johanna Dayer

Johanna Dayer est une des quatre associés du Clos de Tsampéhro, domaine viticole valaisan en culture biologique. En parallèle, elle enseigne les fameuses formations du WSET et d'autres cours dans différents cursus, principalement aux élèves de Master. Cette hédoniste, passionnée de vin essaie de terminer "Master of Wine", le titre plus difficile et reconnu dans le monde du vin obtenu par seulement 419 personnes dans le monde.