War Management : l’Art de la Gouvernance de Guerre en 10 citations clés

war management

Un retour aux principes de gouvernance de guerre

C’est en relisant un billet publié en 2018 sur l’intelligence économique que je réalise le chemin parcouru entre les premiers articles de ce blog et l’accélération historique sans précédent depuis la Deuxième Guerre mondiale qui nous a précipités jusqu’à aujourd’hui dans un monde controversé, détraqué.

Le temps passe et se défile ; le temps file et nous dépasse…y aurait-il pour nos économies comme une suite d’évènements annonciateurs d’un avenir incertain ? À l’état embryonnaire avancé, le futur immédiat nous réserve quelques surprises et un nombre non négligeable de ruptures.

Prendre du recul, c’est prendre de l’avance

Jamais nos sociétés n’ont été autant impactées depuis ces deux dernières années par des évènements inscrits à la page des cas de force majeurs aux symptômes connus des sociologues et économistes : ces ruptures sociétales et économiques sans précédent qui façonnent déjà le monde des entreprises et nos modèles de gouvernance pour demain.

D’une pandémie en forme de hordes barbares invisibles aux conséquences immédiates d’un conflit de haute intensité en Ukraine, l’Art de la guerre de Sun Tzu – ouvrage intemporel de stratégie – est aujourd’hui, et plus que jamais, d’un emploi exponentiel pour tout dirigeant stratège. Jamais la devise suivante n’a été aussi juste :

Lorsque le monde est en paix, un homme de bien garde son épée à son côté

En voici quelques courtes réflexions :

Les aspects financiers ne sont qu’une partie de la solution

“Dans la guerre, le nombre seul ne procure aucun avantage. N’avancez pas en vous reposant exclusivement sur la puissance militaire“.

Le renseignement économique n’a jamais été aussi vital

“Qui connaît l’autre et se connaît lui-même peut livrer cent batailles sans jamais être en péril. Qui ne connaît pas l’autre mais se connaît lui-même, pour chaque victoire, connaîtra une défaite. Qui ne connaît ni l’autre ni lui-même perdra inéluctablement toutes les batailles.“

« Un prince avisé et un brillant capitaine sortent toujours victorieux de leurs campagnes et se couvrent d’une gloire qui éclipse leurs rivaux grâce à leur capacité de prévision. Or la prévision ne vient ni des esprits ni des dieux ; elle n’est pas tirée de l’analogie avec le passé pas plus qu’elle n’est le fruit des conjectures. Elle provient uniquement des renseignements obtenus auprès de ceux qui connaissent la situation de l’adversaire . »

« Connais ton ennemi et connais-toi toi-même ; eussiez-vous cent guerres à soutenir, cent fois vous serez victorieux. »

Substituer le comité de direction au comité stratégique

« Tout le succès d’une opération réside dans sa préparation. »

« Sois subtil jusqu’à l’invisible; sois mystérieux jusqu’à l’inaudible; alors tu pourras maîtriser le destin de tes adversaires. »

« Qui ignore les objectifs stratégiques des autres princes ne peut conclure d’alliances. »

« Celui qui excelle à résoudre les difficultés le fait avant qu’elles ne surviennent. »

« […] vaincre l’ennemi sans même se battre, voilà le fin du fin. »

Car en final, les victoires se gagnent toujours avant les guerres !

Retrouver l’article complet avec ses analyses sur le lien suivant :

L’Art de la guerre : 20 citations clés pour mieux comprendre l’intelligence économique en affaire

Sun Tzu et l’entreprise stratégique : retrouver du sens en Post-Pandemia

Dépasser la confusion

Sun Tzu and dealing with the future

C’est un constat, le monde économique est en pleine réorganisation. Réorganisations sectorielles, structurelles et sociétales. A la période de repli et d’incertitude se profile une ère de confusion.

Un ‘rien ne va plus’ économique …

Valeurs et nombres s’entrechoquent de manière chaotique comme des électrons libres dans le vide stellaire. Priorités et urgences s’amalgament puis se détachent dans une course irrationnelle à la recherche d’une solution stable : celle d’une société apaisée par un projet économique et social viable pour tous et surtout durable.

Voilà deux ans bientôt qu’un virus s’est invité à la table – transformant nos enjeux économiques en jeux de casino. D‘un côté, l’économie réelle dont le socle est devenu le plateau d’une roulette qui semble perdre des numéros à chacun de ses tours ; de l’autre – dans la salle Black Jack des Bourses – des néo-capitalistes désinhibés tentent leur va-tout à la fortune du désespoir : la fortune promise d’un monde virtuel de blocs et de chaînes où l’entreprise n’est plus un projet commun de croissance, mais un amalgame d’avatars digitalisés où les seules valeurs collectives partagées sont l’individualisme et la quête du jackpot.

Un monde meilleur ou un meilleur des mondes ?

Ce ‘Meilleur des mondes’ d’Aldous Huxley s’est enfin invité chez nous avec les traits anxiogènes d’une ‘révolution ultime’ sans que le fracas d’un seul canon ait été entendu. En un temps record, subrepticement, nous avons été contraints de nous téléporter de l’entreprise à «l’USS Enterprise » de Star Trek. Du Temps des incertitudes, le monde semble avoir hérité celui de la confusion, de la dilution du sens commun.

Un pays dont l’armée est désemparée et traverse une crise de confiance sera victime de tentatives de subversion de la part de ses rivaux. C’est là le sens du proverbe : « la confusion et le désordre dans une armée offrent la victoire à l’adversaire. » (Sun Tzu)

Et une fois de plus, les anciens nous rappellent à l’ordre.

Dirigeants stratèges, voici quelques réflexions pour ne pas céder aux doutes :

1- Réévaluer son objet et ses projets : cartographier sa situation

Une réalisation ne dépasse celle du commun que par la capacité d’anticipation, de prévision. Le recueil d’informations préalables à ces prévisions n’est ni le fruit de quelconques conjectures divinatoires ni celui de prédictions tirées d’analogies trompeuses de précédents historiques.
La capacité de prévision provient uniquement d’hommes renseignés connaissant la situation de l’adversaire qui par leurs rapports fidèles vous informent des dispositions de celui-ci.

2- S’informer – se renseigner

Un stratège doit comprendre les desseins des princes locaux afin de nouer des alliances profitables en amont de tout engagement. Qui ignore les objectifs stratégiques des autres princes ne peut conclure d’alliances.

Un général stratège doit connaître parfaitement le terrain et sa topographie avant d’y conduire son armée ; afin d’en tirer parti au mieux il recourt aux services de guides locaux et d’éclaireurs. Qui néglige un seul de ces points n’est pas digne de conduire une armée.

C’est pourquoi seuls un souverain stratège et un habile général en mesure de recruter comme agents les personnes les plus intelligentes seront assurés d’accomplir de grands faits. Les opérations secrètes sont essentielles à la pérennisation d’un État et la bonne conduite de son armée.

3- Motiver ses troupes

La doctrine politique fait naître l’unité de pensée ; l’harmonie est la cohésion des valeurs partagées entre la population et ses dirigeants, supérieurs et inférieurs ; elle inspire la confiance de ces derniers à partager un même destin avec leurs chefs dans la vie comme dans la mort.

On traite l’armée comme un seul homme à qui l’on montre l’exemple par son efficace et non par des discours. On motive ses troupes par des perspectives avantageuses, non par les risques encourus.

4- S’engager

La victoire est l’objectif principal de la guerre. Quand les armées s’engagent dans des campagnes prolongées, que les opérations traînent en longueur sans apporter de victoire décisive, les armes comme le moral de vos troupes s’émousseront ; en usant leurs nerfs dans des sièges sans fin, le courage et les ardeurs de vos soldats s’évanouiront ; les provisions se consumeront et les coffres du prince que vous servez s’épuiseront.

Voilà pourquoi une armée doit viser la victoire immédiate et non une guerre d’usure basée sur des opérations prolongées.

En règle générale, après que le général ait reçu du souverain l’ordre de tenir la campagne, il mobilise ses troupes et prépare la population. Il organise harmonieusement ses forces avec homogénéité en portant une attention particulière à leur procurer un campement avantageux, car c’est de là principalement que dépend la réussite de ses projets et de toute son entreprise.

Ceux qui possèdent les vrais principes de l’art militaire ne s’y prennent pas à deux fois ni ne procèdent jamais à deux levées consécutives en hommes ou en vivres. Dès la première campagne, tout est fini ; ils ne consomment pas de vivres inutilement pendant plusieurs années de suite, leurs ressources propres leur suffisent.

5- Organiser – déléguer

Maîtriser l’art de l’organisation afin de renforcer la coordination et l’efficacité de ses hommes ; savoir hiérarchiser et promouvoir les officiers au rang qui convient. Ne négliger aucun maillon de la chaîne et être instruit des devoirs particuliers de chacun, du plus haut jusqu’à sa logistique d’approvisionnement afin de pourvoir aux besoins essentiels.

Si l’alignement des effectifs paraît important dans les plans, ne surestimez pas ce seul paramètre : une trop grande quantité de personnels est souvent plus nuisible qu’elle n’est utile. Une petite armée bien disciplinée est invincible sous un bon général.

En matière martiale, le grand nombre seul ne confère pas l’avantage ; n’avancez jamais en comptant sur la seule puissance militaire. Une armée composée des mêmes hommes peut-être très méprisable commandée par tel général, tandis qu’elle sera invincible sous les ordres d’un autre :
– Savoir être prévoyant et savoir correctement estimer la situation en concentrant ses forces pour attirer à soi vos adversaires au moment propice et à l’endroit voulu ;
– Savoir ne jamais sous-estimer votre adversaire ;
– Savoir gagner le cœur des hommes en les enflammant d’une ardeur combative ;
– S’assurer d’une discipline sans failles ; d’instructions claires et justifiées ; d’ordres efficaces et parfaitement exécutés, afin d’éviter désobéissances et indiscipline, car, on instruit les hommes par les institutions civiles, on les unit par la discipline militaire.
Ainsi, les instructions et les ordres étant en toutes circonstances justifiés seront parfaitement exécutés pour leur efficacité formant un liant naturel de confiance entre dirigeants et subordonnés.
Telles sont les attentions que vous devez à toutes les démarches, tant les vôtres que celles de vos adversaires. Une telle minutie dans les détails peut paraître superflue, mais elle procède d’un constat : que rien de tout ce qui peut contribuer à vous faire triompher n’est négligeable.

Le commandement du grand nombre est généralement le même que pour le petit nombre, ce n’est qu’une question d’organisation et de communication. Contrôler grands et petits nombres n’est qu’une seule et même chose en manœuvre : c’est avant tout une question d’organisation et de disposition des effectifs, de précision des ordres et de transmission des signaux.

Un grand général doit savoir l’art des changements. S’il s’en tient à une connaissance vague de certains principes ; à une application routinière des règles de l’art et une certaine connaissance de la topographie ; si ses méthodes de commandement sont dépourvues de souplesse, s’il examine les situations conformément à quelques schémas, s’il prend ses résolutions d’une manière mécanique, il ne mérite pas de commander.

En conclusion

Apprendre à se renseigner, bâtir et partager une vision commune 

Une armée peut connaître six infortunes : la fuite, l’insubordination, l’enlisement, l’effondrement, la confusion et la déroute, mais aucun de ces désastres ne peut être attribué à des causes naturelles ; sinon aux seules erreurs de commandement.

En matière de gouvernance, retrouver le sens commun est un art : celui de l’intelligence collective.

C’est ainsi qu’un général ne cherche pas à rééditer ses exploits,

mais s’emploie à répondre aux circonstances selon une variété infinie de voies.

Bonne nouvelle année à tous !

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Découverte : pour aller plus loin !

Rentrée littéraire 2021 : le dernier ouvrage de l’auteur

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jerome gabriel - blog Le Temps - Sun Tzu - Intelligence et cultures stratégiques

 

Entreprise, gouvernance et stratégie : se préparer aux pires scénarios en 2022

Personne ne nait ‘dirigeant’ : on le devient en apprenant à identifier ces combinaisons de signes invisibles qui engendrent les pires scénarios.

#intelligencestratégique ; #arcanastrategia - la créativité et le stratégique

     Anticiper les crises économiques, prévoir les disruptions technologiques et environnementales, veiller aux nouveaux acteurs sectoriels ? Comment continuer d’exister quand les événements économiques semblent se dérober sous nos pas ?

Mais par quoi et comment élaborer une stratégie d’anticipation ?

      Voici un rappel synthétique des fondamentaux derrière la notion de ‘stratégie’ – notion largement galvaudée et élimée par les gourous du Net à la bienveillance douteuse. Car ici, on marche toujours sur ses deux jambes et on apprend à tomber ; que ce soit pour dépasser le mode ‘survie’, devenir, conquérir puis réussir, la règle est la même pour tous : sans objectif, pas de stratégie ; sans vigilance, pas de victoire.

     Réussir : La bonne grille de lecture n’est pas seulement celle qui consiste à regarder le succès des autres. C’est aussi celle qui consiste à comprendre la nature des échecs des ‘autres’. En stratégie pure, le modèle d’analyse occidental se présente donc sous deux angles distincts : analyser les succès sous le prisme de leurs forces ; soit sous celui de leurs faiblesses. Pourtant, tout est une question de contexte, de circonstances fluctuantes qui nous obligent à prendre une approche analytique plus ‘holistique’ si l’on veut véritablement comprendre pourquoi et comment une entreprise a abouti et une autre a failli. Réussir c’est avant tout apprendre à ne pas périr…

     Pourtant en opposant systématiquement ces 2 concepts réducteurs de ‘force’ et de ‘faiblesse’, on perd de vue la plus importante notion philosophique dont les stratèges asiatiques comme Sun Tzu sont adeptes : la force d’un impact se mesure à la fragilité de son objectif, . En termes économiques, ce principe se traduit par l’exploitation du vide par le plein ; savoir rapidement saisir une opportunité au bon moment et au bon endroit.

 

‘Stratégie’ : Késaco ?

#Stratégie #entreprises #Intelligence-économique

STRATÉGIE, subst. fém.

[P. oppos. à tactique]

Ensemble d’actions coordonnées, d’opérations habiles,

de manœuvres en vue d’atteindre un but précis.

     Du latin ‘strategia‘ qui définissait le gouvernement militaire d’une province romaine, le mot est emprunt du grec « στρατηγι’α » ‘strategía’ dont l’utilisation initiale indiquait le « commandement d’une armée » où « l’aptitude à commander une armée, les qualités d’un général » et « manœuvre ou ruse de guerre » (art de stratège). Plus récemment, au 19° siècle, le terme a été adapté à l’art militaire comme «la science des mouvements d’une armée éloignée d’une autre. » (Boiste)

Dans cette version militaire de la stratégie, tout est affaire d’anticipation logistique et de préparation matérielle en amont de la survenance d’un évènement guerrier.

Des synonymes surprenants !

#strategie #synonymes
la stratégie dans l’inconscient collectif

     Dans l’ordre d’apparition, le mot stratégie possède plusieurs synonymes dont les sens nous rappellent invariablement la réflexion devant l’inconnu, soit pour en maîtriser les subtiles intrigues, soit pour en exploiter le terrain à des fins d’objectifs.

     Dans les proximités sémantiques, le mot ‘stratégie’ est utilisé le plus souvent quand le cadre de réflexion implique un objectif à atteindre par des moyens ou manœuvres diverses (plan) impliquant des actions tactiques (ruses, politiques, diplomatiques) afin, soit : de déjouer une intrigue (renseignement, contre-espionnage) ; soit pour gagner un jeu, une guerre.

Dirigeant stratège : entreprendre un objectif stratégique

#artdelaguerre #clausewitz
Carl Philipp Gottfried von Clausewitz (1780 – 1831)

Clausewitz, un Général Prussien face aux limites de la seule doctrine militaire

     Pour les militaires, la stratégie est la parti qui traite de la coordination des forces armées (en intégrant les aspects politiques, logistiques et économiques) dans la conduite d’une guerre ou dans l’organisation de la défense d’une nation, d’une coalition. C’est l’art d’organiser et de conduire un ensemble d’opérations militaires prévisionnelles et de coordonner l’action des forces armées sur le théâtre des opérations jusqu’au moment où elles sont en contact avec l’ennemi.

     Pour Carl von Clausewitz, la stratégie est exclusivement un art militaire et le terme n’est porté que dans le cadre de la conduite d’une guerre : « si la tactique est la théorie relative à l’usage des forces armées dans l’engagement, alors La stratégie est la théorie relative à l’usage des engagements au service de la guerre. »

     Si celle-ci reste un classique, la vision purement Clausewitzienne de la stratégie reste l’une des plus réductrice face aux enjeux contemporains, car les doctrines guerrières frontales du 19° siècle n’ont plus cours de nos jours.

La doctrine stratégique et la notion de valeurs intangibles

     Pour le monde économique, la notion de stratégie est l’ensemble des choix d’objectifs et de moyens qui orientent à moyen et long terme les activités d’une organisation, d’un groupe. Elle est souvent liée à la stratégie financière de l’ entreprise et n’est pourtant qu’un aspect de sa stratégie globale; elle inclut les choix à moyen et long terme d’objectifs et de moyens financiers.

    Si les objectifs commerciaux restent souvent clairement ambitieux, composer avec les moyens à mettre en place est une bataille quotidienne qui ne se juge qu’en termes économiques : paramètres comptables de gains ou de pertes ; politiques de prix ; échéances à court ou moyen terme ; C.A vs profits. Pourtant – et c’est un fait – en matière économique, les paramètres les plus importants à prendre en compte afin de bâtir une stratégie sont pour le moins intangibles ; invisibles même, aux yeux des dirigeants d’entreprises puisqu’ils ne rentrent pas dans les cases d’un bilan…

Découvrir les éléments concrets d’un bilan ‘invisible’

#capital_immateriel #entreprises #dirigeants #stratèges
Capital immatériel : Plus de 60% de la valeur stratégique d’une entreprise est invisible selon les normes comptables internationales….

     Pour la plupart des entreprises, l’option stratégique la plus souvent pratiquée est de nature ‘offensive’ et avec elle, son cortège de capital immatériel : ses ressources invisibles. Selon le cabinet Ernst & Young, à l’âge de l’économie de la connaissance, plus de 63% de la valeur des firmes sont constitués de capital immatériel.. la même étude relevait également que la valeur de l’immatériel non inscrit au bilan des entreprises pouvait représenter jusqu’à 3’500 milliards d’euros. Si environ les 2/3 des actifs invisibles des firmes ne figurent pas dans leurs états financiers, il est donc difficile d’évaluer la nature des ressources combinées favorisant ou non la croissance économique d’une entreprise.

     Ceci explique pourquoi durant la dernière décennie, l’écart existant entre la capitalisation boursière des firmes cotées et la valeur comptable de leurs fonds propres a oscillé entre 400 et 500%.

     En 2008, l’OCDE avait déjà définit le capital immatériel parmi cinq composants principaux : les investissements en technologie, les investissements qualifiants, les études et organisation de marché, les logiciels et les systèmes d’information. Depuis, la liste a été augmenté par d’autres économistes qui y ont ajouté ; le capital humain, le capital structurel et le capital client (ou relationnel). On se rapproche enfin des logiques du RSE avec son pendant ‘sociétal’. Ainsi, en complétant son bilan d’une analyse intégrale des risques, on apprend à se renforcer structurellement grâce à une meilleure compréhension de ses atouts humains ; atouts ‘invisibles’ et pourtant fondateurs de ses capacités réelles avant tout engagement.

    Si comme pour un général en campagne, le dirigeant a pour première priorité de connaitre ses propres forces et faiblesses, car ce sont souvent les Hommes qui composent la nature du terrain : leur compétence et leur discernement face aux difficultés et aux risques. Dans l’analyse, les impacts des risques en matière stratégique sont donc souvent relatifs à l’infrastructure elle même et à sa composition humaine (compétences, qualités managériales, motivations, intelligence collective). Car, finalement, ce n’est pas le terrain ni les circonstances qui font les Hommes, mais bien leur attitude et leur préparation face aux menaces.

En stratégie, le premier risque n’est pas la topographie du terrain, c’est vous.

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L’Art de la Confusion : Les 5 démons des entreprises

Confusion-Entreprises-cinq_démons-

Dans le monde économique, la confusion revêt plusieurs visages. Sur une échelle de probabilité de survenance, ils sont classés juste à la marge des risques cyber. Au nombre de 5, leur impact désorganise, fragilise et fracture les entreprises les plus solides. Apprendre à les reconnaître demande une vigilance humaine et managériale particulièrement préparée, car, l’homme reste un loup pour l’homme.

Confundere : un mélange en forme de ‘pot pourri’

Du latin confusus, de confundere: mélanger, la confusion est un véritable pot-pourri sensoriel et cognitif : un mélange des genres qui se manifeste à l’esprit et qui regroupe les caractéristiques psychologiques ressenties face à l’indistinction, le désordre ou l’incertitude. Pourtant, derrière ce brouillard de guerre et cette déroutante obscurité cognitive se cachent parfois des opérations aux intentions bien ciblées… L’art de brouiller les signaux n’est pas nouveau dans l’inénarrable répertoire humain des techniques de déstabilisation. D’ailleurs nous en somme souvent les premières victimes suite à des pertes de repères qui nous conduisent à nous autoparasiter nos neurotransmetteurs à grandes charges d’idées contradictoires… et notre cerveau de se lasser de cette recherche infructueuse qui sape les fondations mêmes de nos croyances ou convictions.

Encore une fois, c’est le ‘vide’ qui gagne. Celui qu’on ne discerne pas ou mal à qui l’on voudrait mettre une forme, un nom au sein d’un modèle palpable et démontrable. On explique la roue, mais pas le vide nécessaire qui la fait tourner sur son essieu… Et c’est souvent à cet endroit-là que la roue se déboîte ou se grippe.

5 démons de l'entreprise

Voici les 5 démons principaux des entreprises

Parmi la longue liste des risques principaux, la plupart des cabinets d’avocats d’affaires vous livreront leurs principaux clients sous les appellations techniques suivantes :

Le parasitisme

Selon la jurisprudence, le parasitisme est un ensemble de comportements par lesquels un
agent économique s’immisce dans le sillage de sa victime afin de tirer profit de ses efforts et son savoir-faire, sans rien dépenser. Dans la plupart des cas d’entreprises, il s’agit le plus souvent de ‘se coller’ à la notoriété d’un leader du marché pour en tirer profit sans effort. Suivez mon regard : reproduction d’ouvrages ou de sites internet, livrets techniques et argumentaires de vente, appellations, branding et logo similaires, etc. ; une forme d’entrisme furtif sans y avoir été invité au cœur même de la réception.

La désorganisation

La désorganisation regroupe plusieurs méthodes et techniques généralement portées sur le débauchage de compétences clés ou le détournement de clientèle d’un réseau commercial. Débaucher un salarié d’un concurrent en toute connaissance de cause de l’existence d’une clause de non-concurrence dans son contrat est une manœuvre frauduleuse et illicite ; il s’agit ici de concurrence déloyale dont le dessein le plus souvent est d’exploiter à moindres frais un portefeuille clientèle concurrent, ses stratégies voire, dans le secteur industriel, d’obtenir les secrets de fabrication. La loyauté n’est pas qu’une vertu, elle est aussi une valeur d’investissement.

Le dénigrement

Il s’agit ici d’un comportement commercial dont l’objectif est de jeter le discrédit sur un concurrent par la propagation d’informations malveillantes et malintentionnées. Il s’agit de critiques relatives à des prix, de la qualité d’un produit, des services ou aux méthodes commerciales d’un concurrent. C’est l’ampleur de sa diffusion qui en fera un casus belli.

L’imitation

Vieux comme le monde, le procédé d’imitation consiste à utiliser la réputation, le service ou le produit d’un concurrent en créant une confusion d’identité avec ce dernier. Le but d’une telle manœuvre est la captation de clientèle par l’appropriation de la propriété intellectuelle – ou signes distinctifs – liée à son image ou son produit. Mais attention, les avocats précisent : « Le simple fait de copier un produit concurrent qui n’est pas protégé par des droits de propriété intellectuelle ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale […] la recherche d’une
économie au détriment d’un concurrent n’est pas en tant que telle fautive, mais procède de la liberté du commerce et de la libre concurrence, sous réserve de respecter les usages loyaux du
commerce ». Ce procédé ne devient donc déloyal que lorsqu’il est démontré que la/les copies sont de nature à « engendrer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit et que les entreprises de même spécialité sont en concurrence. » En effet, il n’est pas forcément considéré qu’il puisse y avoir imitation si un concurrent agit sur un domaine d’activité différent.

La concurrence déloyale

Probablement le plus connu de tous les démons, la concurrence déloyale est techniquement considérée comme un abus des pratiques commerciales d’une société envers ses concurrents ; là encore, le rapport concurrentiel doit être démontré. Dans le cadre d’une poursuite invoquant des pratiques de concurrence déloyale, il est fondamental de pouvoir identifier avant de prouver qu’il y a eu un lien de causalité entre une faute et un préjudice.

 

Ces 5 démons sont les causes les plus fréquentes d’atteinte à l’image, de perte de notoriété, d’entrave aux affaires et à la réputation. Outre la baisse de votre chiffre d’affaires, les provisions judiciaires conséquentes, ce sont bien de ‘guerres silencieuses’ dont les techniques font l’objet ici ; ces guerres multiformes dont les dénominateurs communs sont la confusion et la furtivité opportune. Un silence aussi pesant qu’une ombre impalpable se mouvant dans les rouages d’une mécanique par ses interstices parfois les plus insignifiants…

A bon entendeur !

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Souveraineté numérique : résistance d’un cyber village suisse

Un cas parmi tant d’autres en Europe : Infomaniak.

Alors qu’en 2020 la société genevoise faisait l’objet d’articles dithyrambiques prenant la troisième place de la remise du prix SVC 2020, le premier hébergeur suisse considéré comme le ‘Google national’ dénonce aujourd’hui les conséquences d’un décrochage politique et les impacts d’un abandon de la souveraineté numérique du pays. Une leçon pour tous.

Entre l’empire et l’emprise numérique

Appel d’offres : Quand une stratégie de prix entrave les enjeux vitaux d’une Nation

Le 12 juillet dernier, Anouch Seydtaghia publiait pour le journal Le Temps, un article sous la forme d’une tribune intitulée : « La Suisse a abandonné sa souveraineté numérique, alerte Infomaniak ». Dans cet article, les deux fondateurs historiques de la société genevoise Marc Oehler et Boris Siegenthaler critiquaient avec véhémence la Confédération dans le cadre d’un appel d’offres de 110 millions de francs émis pour l’obtention auprès de Tiers privés d’un service cloud sans aucune contrainte de présence juridique en Suisse. C’est sans surprise que l’appel d’offres déboucha sur une logique purement comptable du ‘moins disant’ avec…, cinq sociétés étrangères (Oracle, IBM, Microsoft, Amazon et Alibaba). Écartée avec d’autres face à des rivaux à la puissance financière hors d’atteinte, la société Infomaniak – fleuron suisse, mais aussi européen d’une solution cloud sécurisée – déplorait cet échec en soulevant l’incapacité étatique à intégrer une compréhension stratégique à long terme.

Au-delà du cas Infomaniak, plus qu’une solution suisse : la recherche d’une solution stratégique européenne.

Premier concepteur d’une solution de stockage collaborative capable de rivaliser avec les solutions de Microsoft et de Google : la solution Kdrive, Infomaniak ambitionne de faciliter le stockage de données des PME grâce à une alternative cloud physiquement et juridiquement hébergée en Suisse – une concurrence européenne bienvenue face aux leaders exclusivement états-uniens du secteur. Mais qu’y a-t-il de si précieux dans la possession de son propre cloud ?

le cloud ou l'ordinateur d'un autre

La réponse est aussi simple que l’hébergement de vos données personnelles chez un inconnu… Le Cloud n’est autre que l’ordinateur (serveur) de quelqu’un d’autre.

Explication :

Lorsque particuliers et entreprises décident de délocaliser leur environnement digital hors site, nous avons le devoir et l’obligation juridique de nous poser qu’une seule question : quid de la protection de nos données ?

Sécurité des données et réciprocité judiciaire : comprendre les enjeux

Si les solutions d’hébergement et les conditions contractuelles peuvent parfois garantir la non-divulgation des informations stockées sur des serveurs nationaux malgré les demandes de gouvernements étrangers, il existe néanmoins en Suisse et dans la plupart des pays européens deux cas de figure principaux faisant exception. Dans l’éventualité d’un mandat international, que vos données soient en Suisse, dans l’Union européenne ou aux États-Unis, les probabilités de subir une perquisition sont très similaires.

La LRens Suisse : votée en mars 2018, cette loi autorise le gouvernement à infiltrer les systèmes et les réseaux informatiques, voir les perturber (Art. 26 al. 1d) ; à l’insu des personnes concernées (Art. 5 al. 4) ; à transmettre les informations à des services étrangers (Art. 12 al. 1a). Inscrite dans une logique de sécurité nationale, elle rejoint la plupart des lois européennes en matière de protection des biens et des personnes, la lutte contre les réseaux terroristes ou les organisations criminelles.

Le CLOUD Act est une loi américaine facilitant l’accès aux données stockées chez des fournisseurs de services (hébergeurs et DC), qu’elles se situent sur le territoire américain ou à l’étranger. Cette loi n’accorde pas en substance un droit de facto dans la captation de données stockées à l’étranger ; elle procède d’une ambition de simplification des procédures bilatérales (réciprocités légales et policières) dans le cadre d’enquêtes pénales internationales.

En conclusion préliminaire et selon le volet purement juridique, lorsqu’un datacenter ou service cloud reçoit une demande de perquisition à travers le CLOUD Act, il peut la contester et y faire opposition. Si la perquisition est en conflit avec les lois locales, elle n’est simplement pas applicable. Voilà pour la théorie.

La pratique réelle : bienvenue dans le Far West digital

Cloud Act and The Empire

Il est néanmoins indiqué dans le CLOUD Act que les fournisseurs soumis à la législation américaine (telle une société exerçant des activités aux États-Unis, y compris les entités basées à l’étranger avec des filiales états-uniennes), peuvent être soumis à une ordonnance judiciaire pour fournir des données sous leur contrôle et ce : indépendamment du lieu de stockage de leurs données.

Ainsi, si le stockage de vos données est hébergé à l’étranger, soit par choix commercial, soit sans que vous en ayez connaissance via votre hébergeur local utilisant les services « économiques » de tiers étrangers (briques logicielles spécifiques, serveurs supplémentaires pour les redondances ou divers partenariats ‘techniques’, chiffrement, etc.) vos données ne sont plus garanties contre des intrusions légales ou illégitimes. D’ailleurs, qui vous en avertira ?… En matière de sécurité informatique, nombreuses sont les entreprises qui ignorent réellement où sont hébergés leurs sites et leurs données fiscales et sociales. Si le RGPD est censé corriger une partie du problème, il s’avère que bon nombre de nos dirigeants restent ignorants de leurs actifs stratégiques réels et ce faisant, contraignent conséquemment l’efficacité de leur propre DPO par des restrictions budgétaires injustifiées avec les mêmes incompétences politiques qui œuvrent derrière la plupart des appels d’offres européens. Alors, ne cherchez pas une quelconque manœuvre d’un GAFA puisqu’on leur donne les armes économiques pour nous envahir et se repaître sur la bête…

Souveraineté vs appel d’offres – Retour sur une logique stratégique d’expansion commerciale proche de celle de la guerre de l’opium : l’art de bâtir une allégeance par dépendance ou, comment servir pour mieux asservir.

Allez, un peu de Sun Tzu pour la route :

La campagne une fois commencée, présentez-vous à sa porte avec la timidité d’une jeune femme ; votre adversaire n’en sera que plus vacillant : ouvrant alors ses portes avec autant de fébrilité que de méfiance mitigée, il crée la faille par laquelle s’engouffreront vos forces avec la rapidité et la promptitude d’un lièvre. (Sun Tzu – Décryptage stratégique de la pensée Sun Tzu – Ch XI)

Ce que ne comprend pas le commun lors d’un appel d’offres est que si celui-ci est élaboré la plupart du temps dans une stricte logique budgétaire basée sur le ‘moins disant’ ; ici, c’est une pure logique économique qui l’emporte sur le stratégique. Si le stratégique est souvent assujetti à certaines contraintes économiques, celles-ci ne doivent jamais s’interposer comme une doctrine inaliénable.

Défense nationale et vie privée

cyberdéfense

Si la défense économique d’un pays devait se réduire à la seule logique du moins-disant, voilà longtemps que celui-ci aurait perdu et sa crédibilité et sa souveraineté ; au-delà des trois armes (terre, air, mer) et des services de renseignement composant le minimum d’une défense nationale, la cyberdéfense est aujourd’hui considérée comme la quatrième arme avant l’Espace. On ne peut donc brader le socle vital des données citoyennes et étatiques au profit exclusif d’intérêts tiers qui, de surcroît, ont développé un modèle économique basé sur la revente de données privées (individus et corporate). Devenue la première ressource stratégique pour et entre les états, la captation de renseignement numérique et l’accès administratif aux serveurs est une guerre silencieuse que nul ne peut ignorer.

En conclusion

L’art de la guerre de Sun Tzu n’a rien inventé… Il nous rappelle simplement à l’une des plus fondamentales des réflexions stratégiques pour tout État souverain : connais-toi toi-même, connais ton ennemi, ta victoire ne sera jamais mise en danger. Connais le terrain, connais ton temps, ta victoire sera alors totale ; mais encore : Qui ne connaît ni son ennemi ni lui-même sera toujours défait

À l’heure des Pegasus et d’un brave ‘nouveau’ Monde brutalement téléporté en post-pandémie, ces préceptes  de gouvernance stratégique sont à prendre au pied de la lettre.

DERNIERES INFORMATIONS JUDICIAIRES EN DATE DU 02 AOUT 2021

Selon le journal ICT : “l’adjudication du contrat cloud de 110 millions de la Confédération est suspendu. La Chancellerie fédérale a fait savoir qu’un recours a été déposé dans les délais contre la décision d’attribuer le deal à Alibaba, AWS, IBM, Microsoft et Oracle. Selon une information de l’agence Keystone-ATS, le recours provient de Google.” (Lien : https://is.gd/xyNovF)

Nature contradictoire de l’appel d’offre de la Confédération :

“Certains fournisseurs suisses dont Infomaniak avaient critiqué le fait que l’appel d’offres soit réservé aux fournisseurs cloud disposant de centres de données sur au moins trois continents différents et servant une clientèle internationale.”

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L’Entreprise Stratégique 2020-2040 | La Série Prospective : Le temps des bureaux augmentés

L'entreprise-stratégique 2020-2040-les-bureaux-augmentés

Téléportés ? Enfin nous y sommes !

Vous serez là-bas ou ailleurs mais toujours ici ; enfin partout… et surtout tout le temps.

D’ici à l’année prochaine – 2022 – vous allez apprendre la bonne nouvelle. Votre nouveau bureau virtuel n’aura plus besoins ni d’écran, ni de câbles, ni d’un espace de travail dédié : une paire de lunette suffira. Après les destructions-créatrices, vous découvrirez la “déconnection-connectée”.

Une progressive disparition du monde sensible au profit d’un monde virtuel. Les premières fractures sociétales opposent les techs et les no-techs.

Welcome onboard digital partners !

  Avec des connexions Internet plus rapides, des solutions cloud de plus en plus fiables et la quasi-instantanéité d’une 5G, l’évolution des postes de travail pour une partie toujours plus importante de la population se matérialisera par une transgression progressive du Home Office en Whole Office – ou bureau universel. Depuis 2020 – année que le magazine Time a récemment surnommé « la plus grande expérience de télétravail au monde » -, les restructurations techniques et technologiques des entreprises ont totalement modifié la nature des liens présentiels entre employeurs et employés. Le contrôle du temps de travail des salariés par la seule présence physique a enfin été résolu grâce aux technologies. Non seulement vos heures de travail sont intégrables à des statistiques de productivité quotidiennes mais en plus, vos employeurs pourront vous évaluer précisément selon des critères de bonnes pratiques et d’efficacité. Ce n’est pas du crédit social, mais encore mieux : vous devenez un paramètre d’analyse tangible d’un nouveau crédit : le crédit de productivité sociétal.

Lunettes connectés et crédit de productivité sociétal
Agent 01X278 : Monthly Target Achievement Potential : 98% – HR Observation : Fine Results = Stays onboard.

Les raisons de la nouvelle normalité : la “flexitualité” (flexibilité et virtualité)

Pour de nombreuses entreprises, la ‘plateformisation’ des équipes dispersées est devenue la « nouvelle normalité ». Le contexte global ainsi que les évolutions sociétales poussent nos sociétés tournées vers les services à rechercher un équilibre entre vie professionnelle et vie privée et des conditions de travail plus flexibles. Dans une étude mondiale de PwC sur les générations, il apparaît que de nombreux jeunes employés considèrent le travail comme une « chose » et non comme un « lieu ».

Habitués aux applications de visioconférences et massivement consommateurs d’écrans portables, la génération Z préfigure ce que l’ensemble de toutes les générations devront intégrer de manière globale dans les mois et années à venir. D’ailleurs, un croisement d’études comprenant des recherches prospectives effectuées par Forbes et PWC montrent ce que l’on peut déjà anticiper de manière sûre :

  • D’ici à 2028, la plupart des secteurs compteront jusqu’à 73 % de leurs équipes dans leurs rangs de télétravailleurs.
  • Selon les prévisions de Regus, d’ici 2030 l’économie américaine pourrait bénéficier d’un coup de pouce de 4 500 milliards de dollars grâce au travail flexible
  • Aux États-Unis, 80 % des travailleurs déclarent qu’ils refuseraient un emploi si le travail flexible n’en faisait pas partie
  • Dans un sondage réalisé auprès de 880 travailleurs du savoir basés aux États-Unis, 74 % ont déclaré qu’ils seraient prêts à quitter leur emploi pour travailler à distance
  • D’ici 2030, la demande pour le télétravail augmentera de 30 % lorsque la Génération Z entrera pleinement dans la vie active
  • 50 % des télétravailleurs prévoient d’être leur propre patron un jour
  • 34 % des personnes interrogées dans le cadre d’une enquête ont déclaré qu’elles accepteraient une baisse de salaire de 5 % pour travailler à distance

Télétravail et réalité virtuelle

Ce que déclarent les néo-télétravailleurs : Épanouissement personnel et gain de productivité

Concernant les gains de productivité : avec moins de distractions sur le lieu de travail et des solutions de collaboration intégrée (plateformes), les employés déclarent être en mesure de mieux gérer leur charge de travail et de rester en contact avec leurs équipes. Si 85 % des entreprises affirment que la productivité a augmenté « en raison de la flexibilité accrue », une étude de l’université de Stanford a révélé que, dans le cadre d’une expérience, le télétravail avait conduit à une hausse de 13 % des performances individuelles. Alors que les employés de bureau passent en moyenne 66 minutes par jour à discuter de sujets non liés au travail (courtoisies de couloir et rituel de la machine à café), les télétravailleurs ne passent que 29 minutes par jour à faire de même avec leurs collègues.

Concernant le bien-être : C’est un fait, les télétravailleurs passent moins de temps à produire du CO2 dans les embouteillages, passent plus de temps en famille, et prennent moins de jours de maladie que leurs homologues basés au bureau.

  • 75 % des employés à distance déclarent que le travail hors site a amélioré leur équilibre entre vie professionnelle et vie privée
  • 71 % des télétravailleurs disent être heureux dans leur emploi actuel, contre 55 % des employés sur site
  • 36 % des retraités révèlent qu’ils auraient continué à travailler si on leur avait donné la possibilité de travailler à domicile ou à temps partiel
  • 40 % des employés à distance indiquent qu’ils ne sont généralement « pas stressés » lors d’une journée de travail normale
  • 57 % des employeurs déclarent que la flexibilité du télétravail a amélioré le moral et réduit le renouvellement du personnel

(Toutes les statistiques sont accessibles sur les sites d’Indeed, Owllabs et Globalworkplaceanalytics)

L’heure des nouvelles souffrances et le nouveau paradoxe : de la déconnection sociale par la connexion digitale

Télétravail et dépression
Télétravail et dépression

Une stratégie exclusivement basée sur le numérique ne contient-elle que des avantages ? Il en ressort une étonnante volte-face des mêmes télétravailleurs lorsqu’ils font face à une situation d’obligation : qu’elle soit réglementaire, contractuelle ou sanitaire, nous ne sommes visiblement pas tous logés ni préparés à la même enseigne ; entre solitude et fragilisation des liens d’appartenance au groupe.

Une enquête réalisée par Harris Interactive du 4 au 8 novembre 2020 pour le ministère français du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion auprès d’un échantillon de 2049 personnes majeures confirme que tous les actifs ne peuvent pas télétravailler à plein temps. Si de nouvelles règles se sont imposées aux employeurs lors des reconfinements successifs, il en ressort qu’outre les contraintes et les limites technologiques ne sont pas les seules barrières au distanciel.

  • 39% des actifs en emploi déclarent que leur métier actuel ne peut pas être exercé en télétravail contre 36% qui disent pouvoir télétravailler sans difficulté.
  • 25% peuvent faire du télétravail mais avec des difficultés
  • 58% des salariés qui ont télétravaillé à 100% préféreraient venir sur leur lieu de travail au moins 1 jour par semaine.
  • 4 salariés sur 10 qui ont télétravaillé lors de la semaine de l’étude se sentent isolés, 3 sur 10 déclarent mal vivre le télétravail au quotidien.

Une synthèse en forme d’avertissement pour nos dirigeants stratèges, car le télétravail est aussi une forme d’isolement qui provoque un ressentiment d’abandon. La force du collectif est un atout majeur pour toute structure dynamique car chacune des parties joue un rôle charnière dans un projet commun. Si les lunettes connectées en mode ‘whole office’ seront un avantage certain pour la plupart, elles représentent aussi un piège psychologique en cassant cette barrière cognitive qui effectue le discernement entre réalité et désir ; matérialité et imagination… Sans cet espace, les connectés deviendront des néo-déconnectés : ici et ailleurs, présent et absent : lunatiques et incohérents. La productivité individuelle quantifiée par le crédit de productivité sociétal risque d’avoir du plomb dans l’aile.

Votre nouveau bureau
Future Office 2025-2040 – L’entreprise passe de l’open-space au salon.

Si les prospective sur les espaces de ‘bureaux’ et les ex- ‘open space’ ne sont pas optimistes pour les professionnels du secteur, il est néanmoins fort probable que se développeront de nouvelles prestations d’espaces de réunion ou de co-working exclusivement dédiés aux entreprises dans l’esprit des ‘salons’. Espaces d’échanges et de partage aménagés pour rappeler que nul Homme n’est une île et encore moins une machine.

Les dirigeants stratèges auront été prévenus.

Bon courage à toutes et tous !

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L’Entreprise Stratégique 2020-2040 | La Série Prospective : Le Protocole Red Team

Lentreprise stratégique-Jerome Gabriel

Red Team : Un état-major du futur au service d’une gouvernance stratégique

Placée sous l’égide de l’Agence de l’innovation de défense (AID) en coopération avec l’Etat-major des armées (EMA), la Direction générale de l’armement (DGA) et la Direction générale des relations internationales et de la stratégie (DGRIS), la RED TEAM offre une vision prospective afin d’anticiper les risques technologiques, économiques, sociétaux et environnementaux susceptibles d’engendrer de potentielles conflictualités à l’horizon 2030-2060.

Communiqué de Presse du Ministère des Armées
Paris, le 10 décembre 2020

Au cœur de toutes les meilleures gouvernances stratégiques : une cellule prospective en mode ‘red team’

Ici on pense l’avenir. Ou plutôt, on pense ‘l’homme à venir’. La prospective est une science en soi à la mi-chemin entre l’analyse factuelle et la projection créative. Projeter des perceptions d’une réalité pour créer des scénarios imaginaires fondés sur des probabilités possibles.

La prospective selon minority report
Minority Report

La prospective ne consiste donc pas simplement à prévoir l’avenir – ce qu’est la futurologie -, mais à déduire le futur selon une multitude d’options et de trajectoires combinant les environnements scientifiques et technologiques, les écosystèmes environnementaux et sociétaux, l’économie et la géopolitique. Chacun de ces environnements étant par lui-même subdivisé en une multitude de paramètres existants dont les interactions dans le temps et l’espace peuvent créer autant de ruptures bénéfiques que menaçantes, progressives ou brutales selon les combinaisons choisies. Le principe clef veut que ce ne soit pas l’Histoire qui se répète mais les comportements humains qui se reproduisent. Entre l’anthropologie et la sociopsychologie, l’intelligence prospective se pense entre nos deux hémisphères – le rationnel gauche et le créatif droit – pour envisager une cartographie sous la forme d’un damier à trois dimensions : une sorte de Rubik’s cube de combinaisons de risques faiblement probables ou fortement possibles – peu ou très impactants selon sa position stratégique.

La prospective stratégique : un outil de gouvernance et de management

L’entreprise stratégique se renforce principalement d’un outil managérial de prospective afin d’anticiper les risques liés aux ruptures de tendances, de technologies ou de modes. De nombreux cas marketing expliquent cette nécessité afin d’éviter les dénis et les ignorances courants au sein de directions générales coupées de toute réalité. Depuis l’année 2000, en effet, plus de 50 % des plus grandes sociétés listées à l’indice Fortune 500 ont disparu des écrans radars. Dès les années 1990, certains dirigeants avertis et stratèges développent en interne des cellules avancées avec pour objectif de déployer des stratégies de projection et de domination économique plus globales intégrant des veilles concurrentielles, sociétales et géopolitiques au sein d’un jeu de cartes augmenté de champs toujours plus vastes d’acteurs directs et indirects (institutions, influenceurs médiatiques, mœurs, associations militantes, règlements supranationaux etc …). Un seul objectif : protéger l’entreprise des incertitudes en accroissant sa résilience structurelle et sa capacité d’anticipation.

Prospective - Prévoir le Future
Credit : Metropolis – 1927

En matière politique les choses sont beaucoup plus complexes. Si de tous temps l’anticipation s’est muée d’un art divinatoire prophétique vers une science raisonnée de probabilités élaborées sur la base d’une doctrine de domination politique et militaire et d’influence civilisationnelle, l’art prospectif d’un gouvernement est d’une toute autre matière. En effet, dans notre histoire contemporaine, la prospective aurait été instaurée aux États-Unis après Hiroshima en 1945 sur la base d’une rupture technologique militaire majeure dont l’impact sur les enjeux géopolitiques rabattait intégralement les cartes – La Rand Corporation en tant que Think Tank est sollicité par le département d’État américain afin de mettre des méthodes d’analyses prospectives dont la première modélisation apparaît sous la forme d’un système de scénarios interchangeables au nom de code Delphi. Les évolutions des méthodologies couplées à la puissance de calcul des supers ordinateurs de la CIA et de la NSA se sont depuis transformés en de puissants outils d’anticipation et de dissuasion. Car, qui anticipe le futur et ses tendances peut aussi en modifier le cours par le biais d’actions d’influences ou de contre-influences, mais aussi en créant des situations de rupture comme celui de la bombe H ou de manière plus actuelle avec la guerre des étoiles… La prospective est ainsi devenue l’écheveau divin des gouvernances ambitieuses dans leurs processus de préservation, d’autorité et de domination. Si les approches doctrinales peuvent diverger, il reste que la posture du ‘rain maker’ dans sa danse chamanique pour appeler de ses vœux la pluie bienfaitrice est aussi une manière d’engager un pari auto-prophétique sur l’avenir et de favoriser dans le temps ce qui est désirable.

Prospective et science-fiction : penser en mode red team

La Red Team Française
Une Red Team au service de l’Etat – Crédit Ministère des armées

Qui est la Red Team ?

Démarré en France dans le courant de l’année 2019, le programme RED TEAM a été instauré au sein du ministère des Armées dans le cadre d’une mission d’anticipation sur l’innovation. La Red Team défense est composée d’une dizaine d’auteurs et de scénaristes de science-fiction travaillant en étroite collaboration avec des experts scientifiques et militaires placés sous l’égide principale de l’Agence de l’innovation de défense. Son objectif premier est de permettre d’anticiper les aspects futurs de la technologie, de l’économie, de la société et de l’environnement qui pourraient engendrer des conflits à l’horizon 2030-2060. Dans ce jeu de combinaisons de rupture, aucune hypothèse ne peut être écartée – ce qui est d’autant plus nécessaire que toutes les précédentes modélisations ont volé en éclat avec la pandémie.

À l’heure pandémique : Les théories dystopiques du ‘grand reset’ et la fin de l’humanité

Les plateformes de streaming n’ont pas fini de nous abreuver avec les évènements récents. Autant jusqu’à 2020, les risques pandémiques n’étaient pas le paramètre central du ‘pire est à venir’, autant les risques majeurs traités par les réalisateurs de séries d’anticipation voient certaines de leurs œuvres reprendre du service. Car, dans les facteurs prépondérants à un monde dystopique, une pandémie est juste le pain béni commercial pour tout développement de théories complotistes. Bien au-delà des blockbusters que furent l’armée des 12 singes ou World War Z, la pandémie a été un accélérateur de particules impensables il y a encore quelques mois. Suivez mon regard : théories du génocide scientifique ; du contrôle répressif des populations ; du renforcement limitatif des mesures de déplacements individuels ; de l’emprise intégrale et démultipliée des GAFAM des flux d’informations numériques et de leurs contenus grâce à l’hyper-numérisation en distanciel des postes de travail et enfin, l’injection à grande échelle de substances antivirales dont les conséquences sur notre évolution à long terme restent inconnues… Alors, la réalité dépassera-t-elle la fiction ? Les premiers éco-réfugiés sont-ils réels ? Le crédit social Chinois un mythe mensonger distillée sous l’influence d’une dissidence antipatriotique ? Le tracking des individus via certaines applications mobiles une fiction ? La brutale polarisation des populations en deux catégories socio-économiques et technologiques distincts : l’abyssale fracture digitale qui servira les uns et asservira les autres ?

Où est votre Red Team ?
Où est votre Red Team ?

Plus que jamais dans notre histoire contemporaine, l’exercice prospectif n’a été nécessaire. Plus que jamais les choix de nos vingt prochaines années seront décisifs dans le maintien ou non de nos libertés individuelles et collectives. Entre une utopie naïve qui poursuivrait dans l’ignorance la poursuite irréfléchie d’un certain monde d’avant et celle, dystopique qui prendrait le parti de penser le pire pour s’en protéger, il ne tient qu’à nous de le décider collectivement. Ainsi l’ère nouvelle sera ou ne sera pas ‘spirituelle’, les néo-prophètes du ‘jour d’après’ auront misé sur le noir ou sur le blanc, les autres, peut être prendront la voie la plus difficile : celle de la Red Team.

En savoir plus : En amont des prochains articles sur l’entreprise stratégique 2020-2040, j’engage nos lecteurs à prendre connaissance du dernier rapport d’anticipation Vigie 2020 du cabinet Futuribles International intitulé ‘Scénarios de rupture à l’horizon 2040-2050′. Il nous permettra de jalonner ensemble les quelques réflexions et orientations tangibles à anticiper au plan des technologies (communications et transports), des écosystèmes environnementaux, des nouvelles dominations par blocs géopolitiques, des fractures économiques et sociétales.

En vous remerciant encore pour votre fidélité 🙂

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L’Entreprise Stratégique 2020-2040 | La Série Prospective : La Fracture Numérique

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Stratégie & Technologie – The Orville Space Station – Design by Nick Hiatt

L’Entreprise Stratégique – Introduction à la série

Repenser son organisation stratégique face au futur numérique : se projeter demain, en 2040.

Depuis la nuit des temps, les humains se sont principalement différenciés des animaux par leur capacité d’anticipation et de préservation : réduire les risques et les aléas afin d’augmenter ses chances de profit ou de succès. La pensée stratégique nous anime génétiquement depuis ces temps immémoriaux.

Récemment, notre humanité a connu une fracture inédite depuis celles – bien plus nombreuses -, du dernier conflit mondial. Les forces de la nature nous ont irrémédiablement engagées dans une nouvelle ère de rupture sociétale et économique dont la durée de transition reste une inconnue. Une ère de déséquilibre et d’incertitude qui touche tous les pans de nos sociétés. Pourtant, malgré les doutes passagers des uns et les incertitudes persistantes des autres, les ruptures et les crises nous apportent toujours une option majeure : celle du changement. Il ne tient qu’à nous d’en choisir les orientations, les moyens et les fins.

Le facteur RESET : la fin d’une Histoire et les premiers cyber-humains

Toutes les orientations prospectives récentes nous engagent de manière irréversible dans un âge cyber même si celui-ci était déjà omniprésent dans notre société civile sous une forme avancée depuis au moins vingt-cinq ans. Ce qui a changé récemment est que nous pensions qu’en nous connectant sur le web, nous ne laissions sur la toile que l’emprunte digitale de nos vies réelles ; ce qui était déjà faux en sois. Propulsés dans un monde confiné, nous prenons tout juste la mesure du facteur capital qui change la donne. Le ‘game changer’ est sous nos yeux et la perception s’est inversée, car c’est bien nous – les humains -, qui sommes devenus les empreintes de nos vies digitales. Les machines se vengeraient-elles déjà ? ou sommes nous devenus les complices impuissants d’un monde déshumanisé ?

L’entreprise stratégique face aux nouvelles donnes technologiques

L'entreprise stratégique - Evolution

Penser le futur n’est pas qu’un art divinatoire mais s’il reste à l’état embryonnaire dans notre présent, celui-ci peut être orienté selon les choix – bien humains ceux-là – que nous ferons pour demain. C’est précisément dans cet espace de temps que s’illustrent les entreprises stratégiques par leur capacité à influer sur nos sociétés en proposant des solutions innovantes voir ‘évolutionnaires’ pour servir l’Humanité. Une fois de plus, il ne tiendra qu’à nous de décider entre ce qui sera un service ou un asservissement. Vous l’aurez remarqué depuis un an maintenant, la nuance devient subtile…

Jusqu’à présent et depuis 1945, toutes les formations managériales aux affaires de type MBA ou similaires émanaient d’une doctrine unique, celle que toute création d’entreprise était basée sur un projet économique répondant à des besoins sociétaux identifiés et une logique de profit. Ce sont les technologies qui ont progressivement inversé le paradigme en créant des besoins nouveaux auprès d’une demande captivée par une certaine idée de la modernité couplée à celle de la facilité : la recherche du toujours plus rapide et du plus puissant.

Janus - Le passé et l'avenir stratégique
Janus : l’avenir est écrit dans le passé

Du premier véhicule à vapeur au dix-huitième siècle à la robotique contemporaine la plus avancée, les Hommes ont conclu un pacte scientifique irréversible afin d’opérer une course effrénée pour réduire toujours plus l’espace et le temps. Mais pourquoi ? Pour gagner un temps hypothétique de santé, de loisir et de plaisir pour les uns ; la puissance, la domination et le profit pour d’autres. L’Homo Economicus est un Janus à deux têtes, l’une s’éprend pour la longévité de l’espèce et le temps long et l’autre ne pense qu’à réduire la durée et maîtriser le temps court.

Mais les nouvelles donnes économiques ont franchi une nouvelle étape avec la sur-digitalisation de ce monde cyber en devenir : les frontières entre l’espace et le temps sont des concepts en voie de disparition. Nous assistons à la naissance d’un monde où le près et le loin s’effacent peu à peu, le court et le long se relativisent pour mieux s’annuler, les ‘ici’ et les ‘ailleurs’ sont en voie de disparition. Nous sommes déjà entrés dans l’ère de la téléportation.

L’entreprise stratégique de demain : une science-fiction économique entre utopie et dystopie.

L'entreprise stratégique - Stratégie et Technologies

La série proposée pour ce blog pour les semaines à venir proposera deux aspects de l’intelligence humaine dans la conduite des affaires : utopique ou dystopique selon le scénario ; démocrates éclairés ou sombres tyrans selon les acteurs qui y prendront leur rôle. Chacun pourra se projeter dans le temps – dans son temps – et décider de son libre arbitre de prendre parti pour les uns ou les autres. Nous postulerons sur un scénario futuriste et tenterons de nous projeter dans ses conséquences économiques et sociétales. Nous tenterons d’entrevoir les leaders de demain, les produits de consommation qui révolutionneront nos modes de vie, les influences politiques et réglementaires qui bouleverseront nos habitudes et bien sûr, ces secteurs économiques et ces modèles d’entreprises et de gouvernance qui survivront ou non aux dix prochaines années… Et bien sûr, ces technologies qui nous serviront, nous desserviront ou nous asserviront.

Nous nous projetterons pour cela en 2040 dans un monde divisé en deux populations : les Techs et les No-Techs (scénario de fracture et de communautarisme) vs les Vitaux et les Digitaux (scénario actuel de coexistence utilitariste).

Et plus que jamais, Sun Tzu ainsi que d’autres anciens stratèges et philosophes intemporels de l’ère antique nous accompagneront dans ce voyage contradictoire pour le meilleur ou pour le pire entre utopies possibles et dystopies probables. Fracture ou no-fracture, nous tenterons d’en poser les bases.

A très vite dans un autre espace-temps stratégique, car ici, ce sera à nous d’en décider les mutations.

 

En bonus cette au format Smartphone (sur Yumpu), le codex des cinquante préceptes stratégiques clefs pour tous dirigeants stratèges.

Sun Tzu - Maîtres et Dirigeants -Cinquante préceptes Clefs pour les Dirigeants

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Deux ouvrages de l’auteur pour développer sa pensée et ses réflexes stratégiques

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Sun Tzu : le Codex Strategia des Dirigeants en Vingt Citations Essentielles

Sun Tzu et les guerres médiévales
An imperial battle painting commemorating the campaign victories in the Northwestern region, 1862-1877, Qing dynasty, Guangxu

Vingt citations essentielles du Sun Tzu pour les dirigeants stratèges

      Profitons de ce court répit hivernal pour méditer autrement sur ces quelques citations suivantes.

  La puissance financière seule ne garanti pas le succès, car pour autant que certains espaces économiques peuvent se réduire drastiquement et conduire les protagonistes à user de la force et de moyens démesurés, ces derniers pourraient bien être symptomatiques d’un aveu d’échec par impréparation, mais aussi une bataille inappropriée engagée sous le coup de la colère et de l’orgueil.

 Dans la guerre, le nombre seul ne procure aucun avantage. N’avancez pas en vous reposant exclusivement sur la puissance militaire“.

  Au regard des adversités économiques, les préceptes suivants se transcrivent assez aisément en ressources financières et humaines ; innovations technologiques ; management et gouvernance ; marketing, communication et déploiement commercial. Il suffit d’y poser un œil critique et un certain bon sens.

I – La base de tout : Le renseignement et la cartographie des menaces

   Pour Sun Tzu, tout est dans la préparation, la coordination et la qualité des renseignements économiques recueillis : “Qui connaît l’autre et se connaît lui-même, peut livrer cent batailles sans jamais être en péril. Qui ne connaît pas l’autre mais se connaît lui-même, pour chaque victoire, connaîtra une défaite. Qui ne connaît ni l’autre ni lui-même, perdra inéluctablement toutes les batailles.“

 Percevoir le concurrent identifié comme un ou ‘seul‘ adversaire peut s‘avérer trompeur quand d‘aucuns agît en méconnaissance des facteurs clés que sont : la doctrine (le modèle économique) , le temps (l‘agenda des actions) , l’espace (le secteur d‘activité et ses acteurs) , le commandement (le management) , la discipline (la coordination et la préparation).

Que ce soit sur le plan des affaires, de la diplomatie ou de l’influence, il s’agît ici surtout de mieux savoir pour mieux agir…

Quelques citations :

  • « Un prince avisé et un brillant capitaine sortent toujours victorieux de leurs campagnes et se couvrent d’une gloire qui éclipse leurs rivaux grâce à leur capacité de prévision. Or la prévision ne vient ni des esprits ni des dieux ; elle n’est pas tirée de l’analogie avec le passé pas plus qu’elle n’est le fruit des conjectures. Elle provient uniquement des renseignements obtenus auprès de ceux qui connaissent la situation de l’adversaire . »

  • « Connais ton ennemi et connais-toi toi-même ; eussiez-vous cent guerres à soutenir, cent fois vous serez victorieux. »

  • « Tout le succès d’une opération réside dans sa préparation. »

  • « Qui connaît son ennemi comme il se connaît, en cent combats ne sera point défait. Qui se connaît mais ne connaît pas l’ennemi sera victorieux une fois sur deux. Que dire de ceux qui ne se connaissent pas plus que leurs ennemis ? »

  • « Connaissez l’ennemi et connaissez-vous vous-même ; en cent batailles vous ne courrez jamais aucun danger. »

  • « Si tu ignores à la fois ton ennemi et toi-même, tu ne compteras tes combats que par tes défaites. »

  • « Sois subtil jusqu’à l’invisible; sois mystérieux jusqu’à l’inaudible; alors tu pourras maîtriser le destin de tes adversaires. »

  • « Une armée sans agents secrets est exactement comme un homme sans yeux ni oreilles. »

  • « Qui ignore les objectifs stratégiques des autres princes ne peut conclure d’alliance. »

  • « Impalpable et immatériel, l’expert ne laisse pas de trace ; mystérieux comme une divinité, il est inaudible. C’est ainsi qu’il met l’ennemi à sa merci. »

II – Préparation et Protection du cœur de sa citadelle

     La protection des entreprises consiste à préserver et sécuriser son patrimoine. Il s’agît ici non seulement de veiller à ses actifs matériels, mais surtout à identifier et comprendre l’ensemble de ses actifs immatériels dont la valeur financière ‘invisible’ représente jusqu’à 75 % de la richesse d’une entreprise.

     Selon les différentes interprétations comptables internationales, le capital immatériel – aussi appelé ‘actifs intangibles’ – représente l’ensemble des actifs identifiables qui participent à la « rentabilité présente et future » de l’entreprise. Leurs valeurs restent pourtant ‘hors bilan’.

Aussi et selon la définition la plus acceptée en matière financière, le capital immatériel se décompose en trois catégories :

Le Capital Humain : expérience, formation, gouvernance, management, relations interpersonnelles, motivation, etc.) ;

Le Capital Structurel : la culture de l’entreprise, la communication interne, la sécurité de son patrimoine informationnel, l’organisation (management), l’innovation/ inventions, brevets, marques, franchises, licences et contrats, inventions, formules, processus, dessins, modèles et savoir faire, copyrights et droits d’auteur.

Le Capital Relationnel , ou l’environnement d’affaires : les relations avec les actionnaires, les partenaires, les clients (fidélisation, ancienneté, solvabilité …), les fournisseurs (solvabilité, réputation, diversifications …), la société (réputation, influence, communication…).

La valeur globale d’une entreprise repose donc avant tout sur un savant dosage de ces différents types de ressources productives, mais aussi sur l’intelligence collective (émotionnelle) en place à les combiner, les développer et surtout les exploiter de manière opérationnelle.

Ainsi, comme on peut le voir, ce n’est pas nécessairement l’entreprise la plus riche en ressources qui l’emporte et qui dispose de la plus grande valeur…

Quelques citations :

  • « Lorsque le monde est en paix, un homme de bien garde son épée à son côté. »

  • « […] vaincre l’ennemi sans même se battre, voilà le fin du fin. »

  • « Le meilleur savoir-faire n’est pas de gagner cent victoires dans cent batailles, mais plutôt de vaincre l’ennemi sans combattre. »

  • « Celui qui excelle à résoudre les difficultés le fait avant qu’elles ne surviennent. »

III – Diplomatie : de la communication à l’influence

     Dans l’ouvrage “L’influence, le noble art de l’intelligence économique” paru en 2012 sous les plumes averties d’Alain Juillet et Bruno Racouchot, l’influence passe principalement par deux formes de communications :

     « D’une part, une communication classique, ayant pour objet la diffusion de l’information vers des cibles extérieures, mais aussi en direction de ceux qui ont à la connaître en interne pour optimiser leurs actions. Envisagée sous l’angle sécurité, cette communication est aussi à visée pédagogique pour avertir des dangers potentiels, sensibiliser et apprendre à se protéger. »

Et d’autre part :

     « il y a la communication active et offensive sous la forme de l’influence. On va utiliser les informations recueillies pour déstabiliser l’adversaire ou le faire aller dans la direction où l’on souhaite qu’il aille. Aussi surprenant que cela puisse paraître pour des esprits non-avertis, la communication est – et ce dès l’origine – consubstantielle à la démarche d’intelligence économique. Celle-ci, bien loin de s’enfermer dans une conception strictement sécuritaire, doit au contraire explorer les ressources offertes par la logique communicationnelle. Il est de son intérêt de le faire, sur un mode offensif, via la mise en œuvre de stratégies d’influence. »

Quelques citations :

  • « La grande science est de faire vouloir à autrui tout ce que vous voulez qu’il fasse, et de lui fournir, sans qu’il s’en aperçoive, tous les moyens de vous seconder. »

  • « Vous profiterez de la dissension qui surgit chez vos ennemis pour attirer les mécontents dans votre parti en ne leur ménageant ni les promesses, ni les dons, ni les récompenses. »

  • « Entretenez des liaisons secrètes avec ce qu’il y a de plus vicieux chez les ennemis ; servez-vous-en pour aller à vos fins, en leur joignant d’autres vicieux. »

  • « l’appât de la vengeance, celui des richesses ou des postes éminents que vous leur promettez, suffiront amplement pour les gagner. »

Les plus belles batailles sont toujours silencieuses, et leurs succès rarement tapageurs…

 

En bonus cette semaine au format Smartphone (sur Yumpu), le codex des cinquante préceptes stratégiques clefs pour tous dirigeants stratèges.

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Cellules stratégiques : l’Art de maîtriser la déception

Cellules stratégiques-l_art de maitriser la déception

Comités Stratégiques : L’anticipation des menaces n’est pas un art divinatoire. La gestion des risques implique d’être constamment informé des réalités du terrain. Une gouvernance éclairée en matière de stratégie se différencie par sa capacité d’anticipation et d’adaptation aux aléas du temps.

Une réalisation ne dépasse celle du commun que par la capacité d’anticipation, de prévision. Le recueil d’informations préalables ou prévisions n’est ni le fruit de quelconques conjectures divinatoires ni celui de prédictions tirées d’analogies trompeuses de précédents historiques.

La capacité de prévision ne provient uniquement que des hommes renseignés connaissant la situation de l’adversaire qui, par leurs rapports fidèles vous informent des dispositions de celui-ci.

Sun Tzu – Chapitre XIII

Pour cela, tout dirigeant ou commandant doit avoir prévu une organisation adaptée et des compétences spécialisées – spécialisations à la fois rares et souvent ‘non-conventionnelles’ – rompues à la collecte du renseignement, à son analyse et à une culture d’entreprise préparée aux pratiques et méthodes managériales de rupture et d’anticipation.

Une arme est toujours chargée… La paix est une bataille quotidienne.

Chacun le sait, le coût du risque n’est pas le danger inhérent aux hasards de la vie mais notre impréparation à sa survenance. Ignorance, déni, incompétence ou négligence sont les caractéristiques principales du fertile terreau le plus favorable à la gravité des impacts des menaces non-décelées. Aucune doctrine de ‘conformité’ ni règlement – process dogmatiques par excellence – ne peuvent prévenir à elles seules une série d’évènements anodins (signaux faibles) dont les conséquences sous-jacentes cumulées provoqueront dans le temps une situation brutale et périlleuse. Ce sont les combinaisons et les mutations imprévisibles par nature qui engendrent les ‘cygnes noirs’ et les déceptions les plus brutales.

Sapiens et l’Art de maîtriser la déception

De la Mètis des Grecques aux Annales de Tacite ou du recueil en huit livres de stratagèmes de Polyen jusqu’au plus connu de tous, Le Prince de Machiavel, l’humanité n’a cessé de chercher des modèles de domination pérenne, d’anticipation et de contrôle des facteurs de risques et de menaces ; d’abord de nature divinatoire dans l’observation et l’interprétation de signes distinctifs et répétitifs au sein de l’ordre naturel (signes, présages et traces), puis progressivement au sein de l’ordre humain dans le cadre d’expertises techniques, de supputations tactiques et de savantes conjectures basées sur la connaissance et l’observation des Hommes.

En cela, que ce soit les quelques maîtres stratèges de la chine ancienne – dont le Sun Tzu, le Wou-tseu, le Ho-Kouan-tseu et les 36 stratagèmes parmi bien d’autres – le constat historique reste séculaire dans la mesure où toutes ces écoles de pensée composent les bases de toutes les cultures stratégiques. Dans ce creuset historique, elles sont encore aujourd’hui la quintessence opérante d’une efficace stratégique dans sa valeur absolue : Un Art de la gouvernance par l’anticipation.

« Les habiles guerriers ne trouvent pas plus de difficultés dans les combats, car ils font en sorte de remporter la bataille sans péril après avoir créé les conditions appropriées.

Les victoires se remportent sans errements, en s’assurant de vaincre un ennemi affaibli et déjà défait car, ce que ne comprend pas le commun est qu’une victoire puisse être obtenue avant que la situation ne se soit cristallisée. »

Sun Tzu – Chapitre IV

Les raisons derrière l’institutionnalisation régalienne de la pensée stratégique : la cartographie de la domination

La culture stratégique a été de tous temps et au premier chef portée à la connaissance des princes, dirigeants et haut fonctionnaires ‘divins’ des Royaumes bellicistes de l’époque médiévale. Certains rois et princes politiquement ambitieux mais philosophiquement avisés comprenaient que l’exercice du pouvoir ne pouvait se concevoir de manière pérenne par la seule force brutale et l’engagement onéreux d’hommes et de matériels dans des guerres prolongées. Le conflit étant d’une certaine manière perçu comme un aveu d’échec par l’incapacité politique des états à négocier une concorde avantageuse ou une alliance stratégique.

Sun Tzu - Cartographie chinoise ancestrale

Outre l’économie d’un engagement fratricide, les guerres médiévales évoluent progressivement dans leurs préparations grâce aux premières restitutions précises de cartographies territoriales des royaumes dont les contours permettaient d’apprécier la topographie, les distances relatives mais aussi et surtout, les limites. Passés maîtres dans la capacité à restituer visuellement l’étendue physique et patrimoniale des fiefs de leurs princes, les cartographes chinois rivalisaient aussi de savoir faire quand il s’agissait de vendre leurs compétences à d’autres royaumes en leur proposant les cartes de leurs anciens seigneurs. Si la carte n’est pas le territoire, elle recèle à elle seule les renseignements essentiels en amont de toute entreprise conquérante. Les cartes étaient ainsi partagées dans le plus grand secret parmi les princes entre militaires, stratèges et conseillers politiques. Les premiers comités stratégiques pouvaient enfin matérialiser leurs positions offensives ou défensives en amont de leurs interventions bellicistes ou diplomatiques. Calculs et supputations pouvaient ainsi être plus facilement partagés selon les compétences techniques de chacun.

Du temple ancestral aux cellules stratégiques modernes

L’action se prépare donc avant tout à cette époque au sein des arcanes du ‘temple ancestral’ où se décide le juste moment de l’action punitive ou régulatrice (arbitrale). Haut lieu du renseignement, le ‘temple’ – cœur de l’état stratège ou templum dans sa terminologie antique – évolue dans le temps pour devenir le premier rempart ‘raisonné’ du prince face aux tentations périlleuses d’une guerre sans issue et aux risques d’une défaite frontale et d’un gâchis humain et matériel inutile. On n’écarte pas les risques, on apprend à les diminuer.

En anticipant l’espace tactique de l’adversaire et en se préparant à des manœuvres favorisées par une topographie territoriale avantageuse ou dangereuse, on ajuste au mieux ses propres défenses et ses ressources humaines et matérielles. Armé et investi d’une juste connaissance de ses propres capacités, on pare ainsi aux conjectures les plus funestes.

Les composantes majeures d’une cellule stratégique

Aujourd’hui appelés ‘Comités stratégiques’ (ou cellule) dans le privé au ‘Conseils de défense’ pour le public, ces appellations sont de nos jours les formes modernes de ces premiers centres névralgiques. De tous les temps, une cellule stratégique possède les attributs suivants : Un regroupement intelligent de personnes aux compétences complémentaires bénéficiant de renseignements solides avec pour seul but de favoriser une position collective dans le temps ; domination pour les uns, notoriété, prestige ou autorité pour les autres. Que ce soit à l’échelle d’un pays ou d’une entreprise, les méthodes d’analyses restent les mêmes même si les composants cartographiés émanent de renseignements plus ou moins riches selon les sources ou les objectifs requis.

Cellule stratégique et war room
De la Cellule Stratégique au War Room

Chaque entreprise se doit de posséder son comité stratégique

C’est un prérequis à toute action maîtrisée. Mais une confusion règne dans de nombreuses structures équipées de comités de direction – ou ‘ comités exécutifs’ – dont les compétences et fonctions ne sont pas comparables aux cellules stratégiques – non-conventionnelles pas essence. Les différences sont nombreuses, car les cellules stratégiques les plus performantes n’intègrent jamais dans un premier temps les contraintes financières dans leurs analyses prospectives. Ce sont les objectifs, les ambitions ou les opportunités qui conditionnent les levées de fonds et non le contraire…

Enfin, une cellule stratégique a pour fonction prioritaire de déceler les risques mais aussi à identifier les bruits favorisants la confusion, les doutes et les déceptions. En cela, elle balise et clarifie la voie commune avant tout engagement.

L’anticipation et l’adaptation sont les deux valeurs génétiques fondamentales derrière chaque cellule stratégique. De nos jours, les plus importants investissements sont portés sur la maîtrise des aléas et des opportunités par le recours massif au recueil de data numérique. Toutes ces recherches actuelles en matière d’intelligence artificielle n’ont qu’un but : Maîtriser l’avenir pour en assurer la conduite, afin de mieux servir les hommes ou de les asservir… Il en va à chacun d’en discerner la différence d’où l’importance de savoir s’armer soit pour se renforcer, soit pour s’en défendre, car si les empires d’hier se sont façonnés grâce à ces renseignements cartographiés, les cartographes des temps modernes de la Silicon Valley ont eux, bien appris leurs leçons de calcul – calculs algorithmiques bien sûr, car pour dominer il ne suffit pas de recueillir l’information, il faut avant tout savoir la contrôler.

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