Précepte N° 3 : gouvernance et … “conformité” ?

Gouvernance et conformité dans “l’art de la guerre” ?

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     Lors d’une récente intervention auprès de professionnels du monde bancaire, l’un des participants me défia de trouver dans l’art de la guerre des exemples pouvant être assimilées à la notion de ‘conformité’.

L’idée que cet ancien traité Chinois – écrit approximativement vers le 4° siècle avant J.C. -, pouvait ou non intégrer des notions de ‘conformité’ – déjà, à cette époque -, me laissait un temps songeur.

#intelligence #economique #renseignements #affaires #suisse     La question était pourtant légitime : pouvons nous identifier une ligne de conduite ‘philosophique’ en matière de conformité – c’est à dire de l’existence de règles et de leurs applications – dans la gouvernance et la gestion des risques sur un plan stratégique et militaire ? Si la notion de conformité est devenue, en moins de 20 ans, le pare-feu ‘moral’ d’institutions et d’organisations occidentales (sur des bases morales et doctrinales principalement issues du monde judéo-chrétien), l’application de la ‘conformité’ pour un Général en campagne reste pour le moins de la science-fiction. Et pourtant… 

 

De la conformité réglementaire à “l’art de la guerre”

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Un rappel s’impose. L’objet premier de la « compliance » (conformité) est – dans le texte – de s’assurer du respect des règles, dispositions législatives et réglementaires établies au sein d’un groupe. Fréquemment employé dans le secteur financier ou assurantiel, il est de plus en plus présent dans tous les secteurs économiques confondus. Le pare-feu ‘moral’ porte la double responsabilité de protéger l’entité économique de risques de réputation, de pertes financières mais surtout ! de sanctions judiciaires.

Entre les notions de ‘bien’ et le ‘mal’ et le juste Vs. le légal.

La doctrine principale englobant le cadre fonctionnel de la ‘conformité’ procède naturellement d’une vision éthique et déontologique partiellement assimilable à celle pratiquée dans le cadre judiciaire, à une exception près… le judiciaire s’appuie sur le droit pour punir. Il est curatif.

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La conformité elle, intègre en plus les aspects préventifs liés à la gestion et la prévention des risques. Le codex de la conformité reste finalement inscrit dans le principe de moralité et d’éthique qui sépare le mal du bien… Il est inscrit dans un marbre intemporel qui, pour une organisation privée, se définit comme « un ensemble d’actions visant à rendre les mesures comme les comportements des dirigeants et personnel au sein d’organismes publics ou privés (associations à but non lucratif, entreprises, syndicats, etc.) comme vis-à-vis de tiers conformes à la norme externe et/ou interne applicable au lieu où ils opèrent ».

L’évaluation de la conformité par des processus internes permet aux banques de se prémunir contre d’éventuelles sanctions administratives ou judiciaires et de préserver leur image de marque. La conformité  reste ainsi et surtout un outil défensif de prévention des risques.

Bâle : quand la conformité façonne la gouvernance

Si l’on reprend le corpus de Bâle II et du Règlement 97-02 du CRBF (Comité de la réglementation bancaire et financière), on y retrouve les principes de base suivants (en synthèse) :

  • D’identifier et à jauger le degré de non-conformité d’une entité économique (régulée) par rapport à l’ensemble des règles de conduite qui lui sont applicables ;
  • De mesurer son taux d’exposition aux risques de sanction judiciaire et administrative et de réputation ;
  • D’évaluer les pertes financières significatives qu’elle pourrait subir. 

La réputation d’une organisation ne tient pas seulement à sa discipline et savoir-faire intrinsèque mais aussi à le faire savoir. Elle doit savoir communiquer sur son respect de la loi – il s’agît de son image publique -, mais aussi prouver sa différence vis-à-vis d’organisations similaires de manière préventive, voir en cas de risques – il s’agît bien ici de consolider tous les risques internes (sûreté) pour renforcer sa réputation externe.

Ces principes de contrôles internes modifient irrémédiablement la nature managériale imposée aux directions générales (états majors). Dans les chapitres de “l’art de la guerre” il faut procéder par synonymie pour retrouver les notions de conformité en lien à la gouvernance.

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Dans le cadre de notre ouvrage, la conformité implique un ensemble de règles en concordance avec une morale (doctrine). Elle impose avant tout l’intégrité de chacun.

L’art de la guerre n’est pas si loin des normes ‘Bâloises’… Une politique intègre de gouvernance juste, identifiable dans ses principes et équitable.

 

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Pour Sun Tzu la juste gouvernance est une combinaison d’intégrité hiérarchique,

de connaissance du terrain et d’adaptation.

“Dans quelque position que vous puissiez être, si pendant que vos soldats sont forts et pleins de valeur, vos officiers sont faibles et lâches, votre armée ne saurait manquer d’avoir le dessous; si, au contraire, la force et la valeur se trouve uniquement renfermées dans les officiers, tandis que la faiblesse et la lâcheté domineront dans le coeur des soldats, votre armée sera bientôt en déroute; car les soldats pleins de courage et de valeur ne voudront pas se déshonorer; ils ne voudront jamais que ce que des officiers lâches et timides ne sauraient leur accorder, de même des officiers vaillants et intrépides seront à coup sûr mal obéis par des soldats timides et poltrons.”

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XI’AN, CHINA – armies of Qin Shi Huang, the first Emperor of China

 

Il ne peut y avoir de juste conformité dans un environnement ou

la gouvernance est corrompue ou défaillante.

 

     Sur l’adaptation aux changements,  dans le chapitre VIII  (des neuf changements), il ajoute :

“Un grand général doit savoir l’art des changements [ex : économiques/ réglementaire]. S’il s’en tient à une connaissance vague de certains principes, à une application routinière des règles de l’art, si ses méthodes de commandement sont dépourvues de souplesse, s’il examine les situations conformément à quelques schémas, s’il prend ses résolutions d’une manière mécanique, il ne mérite pas de commander.”

     Et dans le chapitre VI (du plein et du vide) :

“Les cinq éléments ne sont pas partout ni toujours également purs; les quatre saisons ne se succèdent pas de la même manière chaque année; le lever et le coucher du soleil ne sont pas constamment au même point de l’horizon. Parmi les jours, certains sont longs, d’autres courts. La lune croît et décroît et n’est pas toujours également brillante. Une armée bien conduite et bien disciplinée imite à propos toutes ces variétés.”

Finalement, si la conformité devait être un champs de bataille, le vainqueur serait celui dont la gestion de la gouvernance ne serait pas simplement la mieux renseignée ou disciplinée, mais surtout, la mieux adaptée au terrain et la plus intègre.

“Vous donc, qui êtes à la tête des armées, n’oubliez rien pour vous rendre digne de l’emploi que vous exercez. Jetez les yeux sur les mesures qui contiennent les quantités, et sur celles qui déterminent les dimensions: rappelez-vous les règles de calcul; considérez les effets de la balance; la victoire n’est que le fruit d’une supputation exacte.”

(chapitre IV ; de la mesure dans la disposition des moyens).

En dernier ressort, rien n’est véritablement définitif en matière de gouvernance et de conformité. Chacun doit composer avec le temps et le terrain ; terrain législatif et moral pour les uns, géographique et climatique pour les autres … Mais en matière de conformité, pour reprendre le titre du dernier essai de l’avocat général à la cour d’appel de Paris, Philippe Courroye : “Reste la justice”.Pour autant que les règles soient claires…

Précepte n° 1 : mieux savoir pour mieux comprendre – le prix de l’ignorance marketing

 Quand la ‘fin’ justifie les moyens… d’anticipation.

Mei Yaochen by Kanō Tsunenobu (18th century)

« Après quelques années de guerre, les dommages infligés à l’économie par la mise à l’écart du secteur productif de 700 000 hommes sont considérables. Aussi est-ce faire preuve de la plus grande insensibilité que de vouloir épargner les trois sous qui permettraient, … ‘en pratiquant un renseignement économique’*, de tout connaître des intentions de l’ennemi et de remporter la victoire. »

*(Commentaire attribué à Mei Yao-Tch’en (梅堯臣 ), commentateurs de Sun Tzu au 2° siècle. La phrase initiale précise : ‘en soudoyant des espions’)

Le renseignement stratégique est assimilé à la capacité d’anticipation et donc de prévision. Or la prévision ne vient ni des esprits ni des dieux : « Elle n’est pas tirée d’analogies avec le passé ni le fruit de conjectures. » (Jean Lévi) 

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Parce qu’une conquête économique peut être périlleuse, la notion d’analyse du risque ne peut procéder que sur les bases de renseignements fiables.

Renseignement économique : quand le marketing existait encore…

Dans les années cinquante, de nombreuses entreprises étasuniennes engagées sur les nouveaux marchés internationaux d’après guerre entreprirent d’investir une partie de leurs ressources pour mieux comprendre et exploiter les nouvelles opportunités économiques existantes.

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La pérennisation par l’adaptation (reconversion) de l’incroyable machine militaro-industrielle américaine vers des applications civiles justifiaient quelques sérieuses études de marché…

L’application de la sciences du ‘marketing’ prenait alors tout son sens dans la mesure ou celle-ci répondait parfaitement à trois impératifs de conquête : comprendre les besoins, connaître la concurrence et protéger ses investissements. Ces principes de bon sens sont immémoriaux, intemporels et procèdent de notre condition humaine principale : la survie.

Elle se résume par la définition la plus universelle suivante : “un ensemble des techniques qui ont pour objet la stratégie commerciale et notamment les études de marché.”

Il n’est pas simplement question ici d’une politique systématique d’expansion maladive liée à une croissance impérialiste de type ‘grandir ou périr’ – une infantile vue de l’esprit dans la plupart des cas d’entreprises -, mais bien de consolider ses propres bases avant d’engager des actions d’influence économique pertinentes, efficaces et ciblées. Il s’agît moins ici de sacrifier aveuglément des hommes et des ‘munitions’ financières mais bien d‘identifier les besoins exploitables – ou les ‘espaces vides’ – pour conquérir efficacement les marchés les plus captifs, quitte à réadapter ses outils de production et ses services.

Études de marché : analyses stratégiques et gestion des risques

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Risques : probabilités et impacts

Le macro-environnement marketing d’une entreprise consiste en une variété de facteurs externes qui se manifestent sur une grande échelle (ou macro).

Se renseigner pour mieux comprendre : une méthode courante d’évaluation du ‘macro-environnement’ d’une entreprise consiste à effectuer une analyse ‘PESTEL’. Les analyses de marché macro-économiques comprennent un ensemble de points vitaux que sont les aspects politiques, économiques, sociaux, technologiques, juridiques (réglementaires) et écologiques.

Dans le cadre d’une analyse de marché, une entreprise analysera donc les questions de politiques nationales, de réglementation, de culture et le climat des affaires, les tendances économiques et les évolutions comportementales et sociétales. Viendront ensuite l’adaptation des processus commerciaux en interne puis en dernier ressort, la politique de communication [l’influence] la mieux adaptée.

Dans le cadre des entreprises et des institutions financières, l’analyse ‘macro’ porte exclusivement sur l’environnement des risques, leurs natures, leurs probabilités et l’analyse des impacts réels et sérieux dans le cas de leurs survenances.

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Années 1980, la fin d’une logique : Le marketing n’est plus… Vive la communication !

Pourtant, à l’aube des années 80 pour des raisons liées entre autre à une rupture générationnelle, la définition initiale se trouva amputée de sa doctrine la plus élémentaire – le renseignement économique-, pour devenir, selon l’American Marketing Association : « une activité, un ensemble d’institutions et de processus de création, de communication, de diffusion et d’échange d’offres qui ont de la valeur pour les clients, les partenaires et la société en général. »

Ces 30 dernières années ont vu fleurir une nouvelle génération de managers et ‘experts’ marketing plus souvent portés par la communication du contenant que la composition du contenu.

Entre esthétique et pratique

L’expansion et l’accessibilité des moyens de communications virtuels par le plus grand nombre jouent en leur faveur. Les aspects visuels et esthétiques que sont le design et la communication ont progressivement phagocytés les plus gros budgets de fonctionnement des entreprises au détriment de leurs surveillance des marchés.

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Esthétique Vs. Pratique

Pour les entreprises les plus importantes, ces choix esthétiques plutôt que pratiques n’ont pas été immédiatement perçus comme des causes d’échecs. Les coupables par contre sont d’office désignés d’avance : le manque de budget publicitaire couplé à des ‘errements’ de choix dans le positionnement auprès de supports/relais médias.

Il n’en va que trop rarement des raisons liées à une mauvaise segmentation de marché ; du manque d’anticipation de la survenance d’une crise politique ou économique ; d’un affaiblissement du pouvoir d’achat ; d’une concurrence mieux implanté (réseaux de distribution ou référencement internet) et plus réactive ; de changements réglementaires conséquents ; de ruptures technologiques prévisibles… La plupart du temps, des signaux pourtant ‘forts’, quand on veut les voir… le terrain

Si chaque année les meilleurs ‘flops marketing’ s’alignent avec autant d’entrain sur les blogs d’experts de la chose ‘mercatique’, les raisons ‘techniques’ invoquées ne doivent pas occulter le manque de pragmatisme et les déficiences constatées dans la compréhension du terrain à occuper.

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Intelligence(s) : information et compréhension

Si la digitalisation de nos moyens de communication a certes, porté un coup sérieux au marketing dit ‘traditionnel’ – plus ‘grégaire’ et moins sexy -, il n’empêche que le bon sens en matière d’affaires – par la pratique (à temps plein) de veilles et d’analyses -, ne peut que mieux renforcer le poids d’influence et la pérennité d’un acteur économique sur son terrain de prédilection.

Dans le cadre de la préparation d’une stratégie d’influence ‘marketing’ et de renforcement de sa réputation, Sun Tzu nous rappelle bien que « le plus important, est le peuple [le marché]. Obtient sa confiance et son soutient et tu obtiendras tout ce que tu voudras. »

‘Écouter le marché’ n’est pas qu’une vaine expression…, pour être mieux entendu.

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