S’endetter pour investir?

Selon Info-RTS, : « Les perspectives financières sont sombres pour la Confédération, qui clôt 2022 dans le rouge avec un déficit structurel d’1,6 milliard de francs. Le déficit de financement du compte de l’année 2022 s’élève à 4,3 milliards de francs, soit un écart de 1,9 milliard par rapport au budget. Le frein à l’endettement permettant un déficit conjoncturel de 300 millions de francs pour 2022, la Confédération se retrouve donc avec un déficit structurel de 1,6 milliard. »

Les budgets de certains départements seront réduits en conséquence. L’orthodoxie reste de mise. C’est un choix qu’il faut considérer.

Trop souvent on parle des « finances de l’Etat », fédéral ou cantonal, alors qu’elles ne sont, selon l’usage anglo-saxon, que « l’argent du contribuable » et qu’en moyenne on ne peut en dépenser plus que ce qui a été collecté. A écouter la gauche plaider pour des débours sans limites, on a parfois le sentiment que, dans certains esprits, la Confédération n’aurait qu’à imprimer des billets pour disposer de tout l’argent du monde. Plus sérieusement, la même aile politique prône l’endettement comme si les dettes n’étaient pas une charge léguée par une génération à la suivante. La dépense sans provision est un réflexe bien ancré dans des partis élus par une majorité de citoyens, qui ne paient pas d’impôts du tout. La fiscalité, jadis conçue pour financer les dépenses publiques, s’est muée petit à petit en un outil de redistribution des revenus entre classes sociales.  C’est un système aberrant où l’on compense a posteriori l’inégalité des revenus par la progressivité de impôts.

La dette de la Confédération s’est accrue en raison d’un accident, de la lutte contre la pandémie de COVID-19. En Suisse, la dette est passée de 149 milliards à 246 milliards entre 1995 et 2020. Par rapport au PIB, de 41% à 31% au cours de la même période. Malgré le déficit de 2022, le niveau d’endettement de la Suisse reste faible en comparaison internationale. Exprimée en parité de pouvoir d’achat, la dette par habitant en Suisse s’élève à 26 367$, bien moins que celle de la France 60 790$ ou de la plupart des pays européens. La Suisse a réussi à moins s’endetter sans pour autant négliger les investissements nécessaires.

La rigueur du Conseil fédéral s’impose-t-elle maintenant ? Ou bien les défis actuels exigeraient-ils de s’endetter pour investir ? Et dans quoi ?

Tout d’abord dans la transition climatique. Celle-ci menace de plus en plus ouvertement par une météo en désordre. Il faut donc investir en isolation des bâtiments, en panneaux solaires, en éoliennes, en véhicules électriques ou à hydrogène avec toute l’infrastructure que cela suppose. Cette menace planétaire a la priorité absolue, d’autant plus que bien trop peu a été fait. La production de CO2 n’a cessé d’augmenter, encore d’un pourcent en 2022..

Mais les caprices de l’histoire ajoutent du malheur au malheur. La guerre se poursuit depuis un an sur notre continent et rien n’indique qu’elle pourrait s’arrêter, tout tend plutôt à son extension. Le risque d’une guerre mondiale qui adviendrait presque par inadvertance, n’est pas négligeable. Que fait la Suisse pour s’y préparer comme l’ont entrepris les pays scandinaves et baltes en première ligne ? Est-ce le moment de limiter le budget militaire ? Ou bien de le mettre en mesure d’organiser une défense fondée sur les enseignements de la guerre d’Ukraine, à base d’artillerie de précision, de drones et de missiles ? De renforcer la protection civile. De constituer des stocks aussi bien de matériel militaire que d’approvisionnement en aliments, en médicaments et en énergie.

Ce sont les deux défis les plus urgents. Il y en a probablement d’autres en réserve dans l’avenir que nous ne pouvons même pas imaginer. La parcimonie est-elle la meilleure réponse ?

 

 

 

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.

56 réponses à “S’endetter pour investir?

  1. L’avenir appartient aux pays qui ne sont pas endettés.
    C’est une des conséquences de la fin de l’ère du pétrole – qui signifie une décroissance progressive de l’économie globale.
    Les pays trop endettés vont connaître des mises sous tutelles dramatiques.
    Dès lors, économisons nos ressources, interdisons l’obsolescence programmée dans la vente et dépensons nos surplus (si on en a) à bon escient pour les générations futures.
    Bien sûr, il y a des investissements à effectuer, mais il y a surtout à changer de logique – et à passer de raisonnements construits sur le court terme (augmentation de la consommation de produits tout prêts) à une stratégie à long terme (définir des priorités pour notre économie, favoriser les circuits courts).

  2. Cela fait longtemps que votre plume n’a pas dévié aussi clairement à droite, ça fait plaisir de vous lire. Excellent article. A noter que les 246 M de dettes inclus les dettes des cantons.

  3. On retrouve le temps des priorités. L’armée et l’indépendance énergétique donc non fossile, sont les priorités premières.
    Au vu des turbulences internationales, on n’a pas le choix. En étant un pays occidental dans des antagonismes de civilisations, la bannière neutre ne vaut rien.

    Ensuite se greffent d’autres sujets à traiter en sujets européens comme l’indépendance alimentaire, de médicaments, d’armement, etc..
    On doit entrer dans une phase qui doit nous permettre de se protéger des conséquences d’une “guerre” globale militaire/économique civilisationnelle entre : Occident, Afrique, Inde, Chine.
    L’Angleterre, la Suisse, c’est aussi l’Europe, il est temps de balayer les rancunes et ego pour construire la nouvelle Europe ensemble.

    Bref.
    La patinoire pour 3 pelé à 500’000 .- pour 3 mois à la gare de Lausanne est un gadget qu’on ne peut plus se permettre.
    Il s’agit moins de limiter la dette que de se préparer à investir pour l’avenir stratégique et un avenir de résilience.

  4. Voyez ici la vitesse à laquelle croît la dette nationale de 31’572 milliards des USA (mais le cumul des dettes dans le pays est de 94’301 milliards…) dont 7’251 milliards sont en mains étrangères :
    https://www.usdebtclock.org/
    Ceci est 120% du PIB.
    Une dette qui ne sera jamais remboursée est-elle encore une dette ?

      1. Personne n’emprunte sans en pâtir à long terme. Cela n’existe pas.
        Le seul avantage des USA, c’est d’emprunter avec un taux d’intérêt plus bas que les autres, vu que la dette en USD est supportée en partie par le commerce international effectuée en dollars.
        Mais avec leur trajectoire économique et la récession au devant de nous, les USA vont finir en faillite, avec un dette insoutenable d’ici quelques années.
        https://fr.tradingeconomics.com/united-states/government-debt-to-gdp
        La stratégie économique américaine consiste donc à entraîner les autres pays dans une forme de surendettement pour faire illusion un peu plus longtemps. D’où les incitations à l’endettement “stratégique”.
        C’est une arnaque politique.

          1. Il y a des pays européens très endettés (Italie, France par exemple), mais aussi pas mal de pays européens dont la dette reste assez raisonnable. La Suisse en fait partie.
            Or, depuis la crise Covid, on entend souvent qu’il vaudrait mieux sortir de la logique du frein à l’endettement et s’endetter plus.
            Qui a intérêt à cela?

          2. La population suisse est l’un des peuples les plus endettés de la planète…. 128% du produit intérieur brut. A part les Etats-Unis (76,5%), l’Espagne (64%) et les Pays-Bas (107%), tous les pays industrialisés, France et Italie comprise, ont un niveau moins inquiétant: en dessous de 50% du PIB.

            Pourquoi cet emballement? Parce que les banques ont arrosé le bon peuple de crédits hypothécaires à taux bas. Et parce que ces crédits sont peu ou pas remboursés….

            https://bonpourlatete.com/actuel/la-suisse-championne-du-monde-de-la-dette-privee

            https://www.rts.ch/la-1ere/programmes/vacarme/13336064-endettement-la-vie-a-credit-.html

            Donc, please, arrêtons de mesurer l’endettement de la Suisse à celui de la Confédération.

          3. C’est une dette privée d’origine artificielle. Comme les propriétaires de leur logement sont imposés sur base d’un loyer fictif, ils empruntent une hypothèque qui n’a d’autre but que de réduire leur revenu. Cette somme n’est pas dépensée mais placée en bourse.

  5. Il faut faire la différence entre un fonctionnement de l’État qui génère la dette parce que trop généreux, trop de fonctionnaires et une dette qui se créé par investissements ponctuels.
    Remettre à jour l’armée, ou investir dans les énergies non fossiles en s’endettant, ne veux pas dire mal fonctionnement de l’État. C’est de la bonne dette parce que ponctuel.
    La dette, c’est comme pour la neutralité, chez certain, la réflexion s’efface derrière une idéologie toute faite. Or, c’est la raison de la dette qui doit dicter nos choix.
    Bref, actuellement, plus vite on investit dans des investissements vitaux, plus vite on sera maître de la situation. Sortir des énergies fossiles, c’est bien pour le climat, mais c’est surtout bien stratégiquement.

    1. Lorsque l’on s’en va vers une période de vache maigre et de taux d’intérêts élevés, je ne crois pas que ce soit une bonne chose de s’endetter au delà de ce qui est raisonnable.

      1. Quand on va vers une période de difficultés, sécheresse, pénurie, guerre, c’est peut-être raisonnable de s’y préparer pour éviter de devoir dépenser bien plus dans l’impréparation et l’urgence.

        1. S’y préparer certes, mais en réorientant nos budgets, en changeant de priorités. Pas en ouvrant la porte au surendettement, qui est la pire manière d’y faire face.

          1. Quelle priorité abandonner? La santé, la formation, l’aide sociale, les routes, les transports publics? Réorienter est un mot flou.

          2. En matière de santé, il y a sûrement bcp d’économies à faire, si on acceptait de sortir de la logique actuelle!
            Personnellement, et nous en avons déjà discuté, je ne souhaite plus subventionner ce système à l’infini. Beaucoup de gens n’en peuvent plus de ces primes démentielles qui sont un impôt pour financer les médecins et les pharmas. Où est la liberté de choix? Où est la prévention? Où sont les génériques? On paie des milliards, et il n’y a même plus de médicaments, les réserves des assureurs partent en fumée à la bourse. C’est un scandale. Il faut mettre au pas les assureurs, les pharmas et les médecins. Ils sont payés par un prélèvement obligatoire sur les citoyens et devraient raser les murs et enlever le marbre de leurs façades.
            Quant à la formation et aux transports – on pourrait arrêter de construire des bâtiments pharaoniques partout en bétonnant à outrance, alors que se répand le télétravail.
            La croyance que d’investir dans le béton est intelligent est vraiment dépassée.
            Enfin, il faut aussi prendre l’argent où il se trouve: à la BNS, qui investit des milliards dans l’économie de l’UE et des USA, de Tesla à Google et Co, via la bourse et les devises.

          3. La formation en télétravail? Si c’était possible, faudrait-il fermer collèges, gymnases et universités?

          4. Pour les hautes écoles, Universités, EPFL, qui construisent encore à tout casser, vous n’êtes pas sans savoir qu’on ne construit pas uniquement des salles de cours, mais également des bureaux, salles pour les colloques, etc.
            C’est une anachronisme complet de multiplier ces bureaux toujours à moitié vides. Depuis 2020, bcp d’autres habitudes se sont mises en place. Les déplacements internationaux sont plus limités, et cela ne va pas revenir en arrière.
            Il faudrait en tenir compte a minima.
            Tout cela fait certes le bonheur des entreprises de construction, mais c’est devenu exagéré en plus de bétonner les sols de manière démesurée et de dépenser des milliards publics. Le dogme affirme que ce serait plus vertueux et honorable de bétonner des infrastructures que d’engager quelques chercheurs de plus.
            Est-ce vraiment le cas?
            Il serait temps de changer un peu de logiciel, vous ne croyez pas?

          5. Comment travailler sans bureaux pour les chercheurs et laboratoires et ateliers. Mon bureau a été occupé tous les jours en tout cas et je n’ai jamais eu l’impression que les autres étaient à moitié vide.

          6. “La formation en télétravail? Si c’était possible, faudrait-il fermer collèges, gymnases et universités?”

            Collèges, gymnases et universités existent-ils pour les étudiants ou ceux-ci pour ceux-là?

            L’école n’impose-t-elle pas déjà son diktat à la société par son calendrier? Quant aux bâtiments, certaines récentes réalisations pharaoniques de nos prestigieuses Académies du bassin lémanique n’ont-elles pas montré quelle était leur utilité réelle pendant le confinement? Désertées par leurs occupants, quelques mois de plus laissées à l’abandon ne les auraient-elles pas transformées en autant d’autres Duvalier-villes?

            Quant au télé-enseignement, s’il n’est sans doute pas la panacée, ne prend-il pas moins de l’importance? Sans lui et malgré les aléas dûs aux circonstances, écoles et universités auraient-elles pu assurer la continuité de leur enseignement pendant le confinement? Ce ne sont pas les MOOC (Massive Open On-Line Courses) dont l’EPFL est une des pionnIères en Suisse qui le démentent. L’Open University, à Londres, a des millions d’étudiant(e)s de par le monde inscrit(e)s à ses cours en ligne, qui peuvent les suivre à leur rythme et d’où ils le souhaitent. Ses services administratifs n’occupent que quelques pièces d’un appartement loué dans la banlieue de Londres. Peut-on en dire autant des administrations scolaires et académiques traditionnelles?

            La plupart des grandes universités offrent aujourd’hui le même type d’enseignement en ligne. Ce n’est sans doute pas aussi au “glamour” que de fréquenter un campus prestigieux, mais n’est-ce pas à coup sûr moins coûteux, tant pour les intéressé(e)s que pour le contribuable?

          7. Faute de présentiel, mieux vaux l’enseignement à distance. Mais c’est toute la différence entre une réunion autour d’une table et un zoom. Ce qui compte dans la communication, ce ne sont pas les mots mais aussi les attitudes. Ce n’est pas une séance formelle mais tout ce qui est autour. Dans un collège ou un gymnase, on ne fait pas que suivre des cours ensemble, on devient une génération. Les bâtiments ce n’est pas pour faire de l’esbrouffe, mais pour laisser le témoignage d’une civilisation.

          8. “Enfin, il faut aussi prendre l’argent où il se trouve: à la BNS,”

            Les USA ont déjà mis la Suisse sous surveillance à cause de son usage de la BNS. On va rigoler s’ils nous collent des sanctions…

            “Hormis la Suisse, le Trésor américain a annoncé qu’il continuerait d’observer avec attention les politiques économiques de la Chine et les mesures de Pékin pour influencer le cours de sa devise, ainsi que les politiques de change du Vietnam et de Taïwan.”

          9. Le bureau des chercheurs à présent – pour une très grande partie, c’est d’abord leur ordinateur personnel et leurs données.
            Il y a de plus en plus de travail qui se fait à distance.
            Cela ne signifie pas que des espaces physiques ne soient plus nécessaires sur site, mais autrement et certainement pas dans autant de m2 inutilisés, chauffés dans le vide, surveillés, etc.
            Or, comme pour chaque franc investi dans les locaux, il y a de l’argent qui est ajouté par la Confédération, cela n’incite pas à construire moins.
            C’est là qu’il y a un mécanisme pervers qui pousse à construire encore et encore, sans lien avec les besoins réels.
            Tout cela est considéré comme des investissements. Je ne crois pas que cela soit la “civilisation”. C’est un gâchis (de béton, de paysages, de ressources).

          10. En pratique, l’EPFL est sans cesse en pénurie de locaux. Avec 12000 étudiants, il faut beaucoup de place. Les restaurants sont saturés au point que certains mangent debout. On attend un afflux d’étudiants supplémentaires en septembre.
            On ne forme pas un ingénieur sans l’impliquer dans la pratique qui ne se fait pas du tout à distance. C’est pareil pour un médecin.

        2. “En pratique, l’EPFL est sans cesse en pénurie de locaux.”

          A la différence des facultés de sciences humaines et sociales ou d’une HEC , avec sa vocation technologique et scientifique orientée vers la formation des futurs cadres de l’industrie, pas plus que les écoles de médecine L’EPFL ne peut se passer de laboratoires, d’équipements, de matériel et donc de locaux pour les accueillir, c’est évident. Mais quelle surface ses laboratoires, dont certains consistent surtout en bureaux, occupent-ils au nouveau “Rolex Learning Center”, qui fonctionne d’abord comme bibliothèque (sans parler de ses excellents restaurants)?

          Le Rolex Learning Center (aussi surnommé “Rolling Center”) abrite non seulement la bibliothèque de l’EPFL, mais aussi une salle de conférences, des espaces d’étude ainsi que de restauration. D’abord étudiant puis collaborateur de la recherche à l’EPFL quand la construction du “Rolling Center” a commencé en 2007, j’admirais l’ingéniosité des architectes et constructeurs qui avaient su concevoir ses deux coques convexes à la géométrie irrégulIère comprenant plusieurs patios, bétonner en un week-end les 4’086 m3 de sa grande coque et donner à l’ensemble l’air aussi léger que celui d’un tapis volant. Encore fallait-il prendre garde à ne pas se faire écraser par un des vingt camions chargés de leurs 577 livraisons de béton et lancés à toute allure sur le chantier, tout en gardant sa dignité académique quand on traversait les allées du site pour se rendre à ses cours ou à son laboratoire.

          Dans son espace de 22’000m 2 conçu en plateau ouvert pour répondre à la volonté louable de l’EPFL de stimuler les rencontres interdisciplinaires, je n’ai pas encore remarqué ni entendu dire qu’on y mangeait debout dans ses restaurants, ni qu’on devait s’asseoir les uns sur les autres dans ses patios aux nombreuses ouvertures.

          En revanche, livré à mes rêveries de promeneur solitaire entre les deux coques convexes aux géométries irrégulières comme un coulis de fraises entre deux crêtes Suzette et naviguant à vue parmi les îlots de ses nombreux patios ouverts, je me demande combien parmi les étudiantes, non moins solitaires et non moins rêveuses, assises aux tables des patios guettent de leur regard profond qui ne pense même pas à rien le prof d’écriture créative – les humanités digitales ont remplacé l’apprentissage de la règle de trois au Rolling Center – qui les inviteront à les violer avant de les assassiner dans son chalet des Pléiades, comme dans le thriller “L’amour est un crime parfait” de Philippe Dijan, situé dans ce fleuron architectural et fabuleux décor hollywoodien érigé à la gloire du “venture capitalism” et dont les plans inclinés, les transparences, les puits de lumière répondant aux trous d’ombre de la montagne ont coûté au contribuable la bagatelle de 55 millions de francs suisses, l’autre moitié étant financée par le secteur privé grâce au sponsoring de plusieurs entreprises suisses comme Rolex, Crédit suisse, Novartis, Logitech, Nestlé, Losinger et SICPA5. Quant au “learning”, il pourra toujours attendre.

          1. Ce qui me fait toujours rire, c’est quand on descend de la halte EPFL du M2, il y a un petit passage sous voie pour se rendre au campus.

            Et quand il pleut, il est inondé, comme les voies d’accès aux salles de cours…

            Y a pas à dire, on forme des ingénieurs dans cette école; dommage qu’il n’y en a pas un qui a pensé qu’il pleuvait en Suisse assez régulièrement et soumis une proposition lors de la mise à l’enquête des travaux.

            Mes gosses iront à l’EPFZ; de toute manière, les cours sont en anglais dans les deux écoles…

        3. Si vous parlez de restaurant au lieu de bureaux, c’est sûr que notre discussion tourne dans le vide. La question n’est pas celle des cafétérias.

          1. Si l’on additionne toutes les exigences d’un campus, auditoires, salles de séminaire, bureaux, laboratoires, animalerie, salles d’études, cafeteria, infrastructure technique, bibliothèques, on arrive forcément à des bâtisses imposantes. Les bâtiments actuels de l’EPFL ne sont pas trop grands, au contraire, et on ne pourrait pas s’en passer Tout discours prétendant qu’on aurait dû y faire des économies est irréaliste

          2. “Tout discours prétendant qu’on aurait dû y faire des économies est irréaliste”.
            Les habitudes changent avec le télétravail et encore une fois, vous mélangez tout pour noyer le poisson.

          3. La question est simple : les locaux de l’EPFL sont-ils démesurés pour 12000étudiants? La réponse des usagers est non. De même il est impossible de former des ingénieurs ou des médecins par le télétravail. Ils traversent une forme d’apprentissage. Il serait absurde de prôner la formation d’un maçon ou d’un cuisinier par télétravail.

          4. @Samy,
            “Les habitudes changent avec le télétravail et encore une fois, vous mélangez tout pour noyer le poisson.”

            Si le télé-travail peut à la rigueur se concevoir dans des domaines non-techniques (lettres, droit, sciences humaines, etc.), et encore…, en revanche une infirmIère n’apprend pas à faire des piqûres ou une prise de sang, ni un plombier à réparer une canalisation, un chimiste à manipuler ses éprouvettes ou un ingénieur à faire des essais sur ses équipments et son matériel via Facebook ou Instagram. Est-ce si difficile à comprendre?

            Quant à l’EPFL, son site (je préfère ce mot à celui, par trop asservi au jargon anglo-saxon de “campus” – mot qui veut dire “champ de bataille” en latin) est loin d’être hors de proportions eu égard au nombre de ses étudiants. Nos hautes écoles ont ce mérite d’avoir su adopter le meilleur des universités américaines et d’en éviter le pire, dont le gigantisme. Ni l’EPFL, ni aucune université cantonale n’approchent par leur taille les grandes universités américaines, dont voici la liste des cinq premières par nom et par nombre d’étudiants:

            1 – Liberty University (Virginie): 75,044 (94’000 avec ses cours en ligne)
            2 – California State University (Fullerton, Calif.): 70,681 – Cette université n’est que l’une des 23 autres qui forment l’inimaginable ensemble du système des universités d’Etat en Californie, où j’ai commencé mes études universitaires dans les années soixante.
            3 – Texas A&M University (College Station, Texas) : 67,580
            4 – University of Central Florida: 66,183
            5 – The Ohio State University (Columbus, Ohio): 59,837

            Parmi les universités qui comptent le plus grand nombre d’étudiants étrangers, l’Université de Californie du Sud à Los Angeles, l’une des premières universités privées des Etats-Unis, compte 8,615 étudiant(e)s inscrit(e)s, soit plus des deux-tiers du corps estudiantin de l’EPFL.

            (Je vous fais grâce des cinq suivantes, dont la plus “petite”, l’Université du Texas à Austin, n’a pas moins de 51,525 étudiant(e)s.

            Sources: “10 Largest Universities in the United States by Enrollment” (https://www.stilt.com/blog/2018/01/americas-10-largest-universities-enrollment/).

            En comparaison, nos universités sont encore de taille quasi familiale. Et pour avoir été formé aux deux systèmes (américain et suisse), croyez-moi, c’est tant mieux!

          5. Prenons que les meilleurs, plutôt que toujours plus pousser les murs.

            Faisons en sorte que le Bac et la matu soient réellement sélectifs. Et faisons passer un examen sélectif aux non résidents.

            Poussons vers l’excellence plutôt que vers toujours plus de dépenses et de médiocrité.

          6. Je parlais des bureaux inutilisés au quotidien.
            Vous parlez du nombre d’étudiants, de cafétérias, des cours pratiques donnés en présentiel, de labos, des méga-campus des USA, etc.
            Bref d’autres sujets.

          7. Je ne connais pas de statistique démontrant que les bureaux seraient inutilisés au quotidien. Selon mon expérience vécue, ils sont utilisés tous les jours ouvrables et parfois le WE. Le personnel universitaire est largement composé de doctorants soumis à une pression constante et travaillant bien plus que d’autres catégories. Il n’est pas honnête de laisser entendre que l’université serait un mieu de négligence et de paresse.

          8. La pire des idées Si les étrangers constituent la majorité des doctorants cela signifie qu’en moyenne ils sont plus doués et motivés que les étudiants locaux. Ceux-ci ne sont pas assez nombreux pour fournir tous les chercheurs dont a besoin une telle école. Quant à faire payer plus les étrangers, cela reviendrait à les sélectionner selon la fortune des parents.
            Ce genre de proposition est donc bien la volonté de faire des économies sur la formation. Cela au moins est clair.

          9. “Selon mon expérience vécue” – de quand date cette expérience et quel est le rapport avec la réalité évoquée?
            Par ailleurs, personne n’a parlé de paresse ou de négligence de la part des chercheurs. Absolument pas.
            La négligence, est dans la mobilisation de moyens colossaux pour construire des bâtiments prétentieux qui ne sont parfois pas en lien avec les besoins des gens (bureau ou autre).
            Le Rolex est un bon exemple. Combien de surface au sol et de béton utilisés pour quoi?
            Une bonne partie du bâtiment est simplement inutilisable.
            Bien évidemment, cela augmente l’égo des dirigeants, très fiers de leurs réalisation architecturale ratée.
            Ils auraient pu profiter d’une partie de cet espace pour planter un potager et produire de beaux légumes pour les cafétérias, non?
            Au moins, les étudiants verraient ce qu’ils mangent et d’où cela vient.
            Chacun se fera son idée en allant sur place.

          10. Les étudiants ont besoin d’un endroit pour travailler telle est la première fonction qui est bien remplie. Il y a aussi un auditoire, des restaurants, la bibliothèque, la maison d’édition. Pour une architecture inutilisable, elle n’est pas moins utilisée et largement.

          11. Bien évidemment le Rolex est utilisé, les étudiants ont besoin d’étudier et de se nourrir, d’une bibliothèque, etc.
            La question est dans la démesure de béton sur 22’000m2 pour créer des courbes qui ne servent absolument à rien, sinon à montrer à tous les passants la puissance et richesse de l’EPFL.

          12. Les cathédrale gothiques constituaient aussi des dpenses exagérées pour démontrer la puissance des villes. Mais c’est ce qui nous reste de plus précieux.

          13. “la majorité des doctorants”

            Si seulement la masse des doctorants terminaient leur travail, plutôt que s’en servir pour prolonger leur séjour en Suisse, et qu’on disposait des chiffres de ceux qui débutent une thèse, la termine, et la met en pratique.

          14. “Ces ambitions sont tout à fait légitimes et même obligées pour les pouvoirs publics.”
            Ce type de politique de prestige pharaonique est ridicule.
            La modestie devrait être préférée à l’ambition en matière d’architecture, surtout avec les défis économiques/écologiques qui nous attendent.
            Préserver des espaces verts, un vieil arbre ou une ferme, a bien plus de valeur que de rajouter une énième verrue en béton pour frapper l’imagination des quidams.

        4. “Si les étrangers constituent la majorité des doctorants cela signifie qu’en moyenne ils sont plus doués et motivés que les étudiants locaux.”

          Sans vouloir jeter d’huile sur le feu, j’ai envisagé de faire un doctorat au moins à trois reprises, dont deux à l’UNIGE et une à l’EPFL. Chaque fois, comme assistant, j’ai reçu à peu de choses près la même réponse de la part de mes directeurs de projets: “Tu veux faire un doctorat? Pourquoi? Tu vois ce que je fais? Je ne passe plus mon temps qu’à gérer des projets et brasser de la paperasse. Un doctorat, ça sert à écrire des bouquins, rien de plus…

          Si les responsables de l’enseignement et de la recherche sont les premiers à décourager les Suisses qui aspirent à faire un doctorat, quoi de surprenant si les étrangers prennent la relève? Ceci d’autant plus qu’ils sont prêts à s’adapter aux exigences du poste et sont plus malléables, compte tenu de leur statut. Quant à celles et ceux que j’ai connu(e)s et qui ont obtenu leur doctorat, la plupart sont rentré(e)s dans leur pays sitôt leur titre en poche.

          Les voies de la recherche sont impénétrables.

          1. On ne peut ériger une règle générale à partir d’un cas particulier. Certains professeurs n’ont pas ou presque de doctorats à leur actif. Pour compenser, il y en d’autres. Je n’ai trouvé un patron qu’à ma troisième requête. Sur 20 doctorants je n’en ai refusé qu’un seul.

          2. Bien entendu, mon propos ne prétendait pas ériger en règle générale un cas particulier. Permettez-moi en revanche de revenir à des considérations d’ordre plus universel. En réponse à un commentaire précédent, vous dites: “Les cathédrale gothiques constituaient aussi des dpenses exagérées pour démontrer la puissance des villes.” Tout à fait d’accord avec vous à cet égard, avec cette nuance toutefois: les cathédrales, comme les temples antiques et les pyramide d’Egypte, n’avaient-elles pas pour fonction première de symboliser le principe d’unité qu’est – ou devrait être – la religion et pas seulement la puissance des villes, comme le montrent les fréquents conflits entre pouvoirs spirituels et temporels?

            Comparer ces temples modernes du savoir, enjeu du pouvoir (“knowledge is power”), s’il en est un, que sont les technopoles universitaires aux cathédrales, n’est-ce pas faire un transfert de tropes un peu risqué du “credo in unam, sanctam, catholicam ecclesiam” à celui de “credo in unam, sanctam, academicam ecclesiam”?

            Avec le délitement actuel des certitudes religieuses et leur subversion par des ersatz de religions, la science serait-elle devenue le nouveau Credo, la nouvelle Vérité universelle?

            Pardonnez-moi la banalité de ma question, mais si tel est le cas, alors ne peut-on avoir quelques doutes quant à ses capacités unificatrices?

          3. Merci pour ce commentaire.
            Je crois en effet que la science a une vertu unificatrice en ce sens qu’il n’y a qu’une seule science répandue dans tous les pays du monde et qu’elle progresse de façon unificatrice. Point de schisme ou d’hérésie. Je n’ai donc pas souci quand un campus contient un bâtiment avec une ambition architecturale, au contraire.

          4. Effectivement, la science peut conduire à unir des personnes, à travers une méthode partagée et la probité qu’elle exige, à travers les recherches.
            Mais nul besoin de créer des symboles ou de mythes architecturaux (ou autres) pour cela – car ce ne sont que des mensonges destinés à impressionner les ignorants.
            Pourquoi la science devrait-elle promouvoir l’ignorance et la manipulation?
            Pour obtenir plus d’argent?
            Le but est noble, n’en faites pas une chimère du pouvoir!

          5. Une recherche esthétique ne signifie pas la recherche du pouvoir et de l’argent mais la volonté de susciter des sentiments d’admiration. L’architecture est au génie civil ce que la gastronomie est à la cuisine. Un appel au sens du beau.

          6. L’architecture publique est un art du pouvoir politique depuis toujours.
            Cela n’a rien affaire avec la gastronomie.
            Et quand on voit la grandiloquence de certains bâtiments sur les campus, je me pose des questions sur le sens de ce pouvoir à notre époque. Cela ne me provoque aucun sentiment esthétique, mais des questionnements sur l’hybris humaine.
            Mais visiblement, vous appréciez ce type d’ouvrages et sa symbolique.
            Raison pour laquelle nous ne sommes pas d’accord.

  6. Le financement de l’Etat se fait tant par les taxes que par l’impôt. Prétendre que certains y échappent est un mensonge. En Suisse, nous sommes largement adepte des taxes à taux fixe voire à montant unique. Tant que vous respirez et même après, vous devez payer. Avez-vous une fois fait la liste des taxes que vous devez payer? Elle est tout simplement impressionnante.
    Ensuite, lorsque l’on parle d’investir – en réalité de subvention à certaines entreprises -, on restraint les bénéficiaires de ces subventions et on évite soigneusement l’obligation de résultat. Une gestion sérieuse subventionnerait les résultats et non les dépenses faites dans telles entreprises.

  7. A l endettement de la Confédération il faudrait ajouter l endettement des Cantons et Communes .j aimerais connaître ce total qui pourrait être peu réjouissant et comparable à celui d autres pays européens

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