Les trois leurres de la loi sur le CO2

 

 

Le propre des grandes crises est d’exacerber les inégalités  déjà existantes jusqu’à les rendre visibles. Ainsi il a fallu  distribuer des colis de nourritures à Genève, une des villes les plus riches du monde car les travailleurs précaires ne pouvaient supporter le confinement qui les privait de toute ressource.

Le parlement fédéral vient de discuter la future loi sur le CO2 qui repose essentiellement sur un mécanisme fiscal, augmenter les taxes sur toute pollution : carburants et combustibles, voyages en avion. Résultat  : les riches auront davantage de place dans les avions qui  circuleront beaucoup moins ; soit dit en passant si on avait voulu vraiment diminuer le trafic aérien, il n’aurait pas fallu sauver Swiss en le subventionnant à hauteur de deux milliards

Dans la France de 2018, le mouvement des gilets jaunes a réagi à une augmentation des taxes sur l’essence, programmée en vue d’en diminuer la consommation. Cette initiative négligeait le fait que, pour beaucoup de travailleurs, la voiture est le seul moyen d’accéder à leur emploi et qu’ils n’ont pas la possibilité de supporter des taxes accrues avec de faibles salaires. Augmenter les taxes sur l’essence n’empêchera pas ceux qui peuvent les payer de rouler sans nécessité et ceux qui doivent rouler pour gagner leur vie de ne plus y parvenir.

On retrouvera cette constante partout : les inconvénients de la transition climatique affecteront surtout les moins favorisés. Toute modification de l’environnement agit comme un filtre. Elle avantage les plus évolués pour qu’ils survivent en conformité à la cruelle logique de l’évolution selon Darwin. La sauvegarde de l’environnement et la justice sociale ne coïncident pas spontanément. Toute politique saine devrait donc prendre en compte deux objectifs difficilement conciliables : sauver la planète ; protéger les populations défavorisées. Dans l’optique de l’évolution biologique naturelle, elles seraient éliminées. L’évolution de l’espèce humaine exige peut-être de dépasser cette logique. Dans quelle mesure, avec quels moyens, selon quels critères ? Personne n’y a réfléchi. Le parlement fédéral pas plus que les autres.

Car il y a encore plus vicieux dans la loi. Elle vise à ramener les émissions de gaz de serre à zéro en 2050. Pas les émissions de la Suisse à vrai dire car nous achèterons des droits à polluer pour 25% du bilan. En effet il existe un vaste marché des droits à polluer où les pays sous-développés qui émettent peu de gaz peuvent vendre leur quota à ceux qui polluent le plus. On reproduit ainsi entre pays la dialectique exposée plus haut pour les personnes : un pays riche qui pollue beaucoup achète le droit de continuer. Cette institution bizarre est typique de la politique internationale. Alors que la seule réaction saine des conférences sur le sujet eût été de réduire au plus vite, partout où cela est possible, la production de CO2, elles se sont ingéniées à créer un marché des droits à polluer.

Il fonctionne comme suit. A chaque pollueur, une centrale à charbon par exemple, un quota de pollution est attribué. S’il est dépassé, une taxe de 100 Euros par tonne de carbone émise en trop est appliquée, sauf si l’entreprise polluante achète des droits de polluer à une autre entreprise, qui ne les a pas tous utilisés. Au départ, ce système n’a pas fonctionné du tout, car les quotas avaient été fixés trop haut : tout le monde pouvait continuer à polluer sans être imposé. En 2007, le prix de la tonne s’est donc effondré jusqu’à zéro. Après correction, il s’est depuis stabilisé aux alentours de 13 Euros.

En Suisse, les mesures d’économie déjà prises ont fait diminuer la consommation d’énergie par personne de près de 6% depuis 1990. C’est bien. Mais la population a simultanément cru de 20%. Au total, la consommation d’énergie du pays augmente au rythme de 0.5% par an. En achetant des droits à polluer, la Suisse « émet » théoriquement moins de gaz à effet de serre qu’en 1990, mais en réalité elle en émet toujours trop.

Selon l’inventaire de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), les émissions de gaz à effet de serre en Suisse se sont élevées en 2018 à 46,4 millions de tonnes d’équivalents CO2, soit environ 1,5 million de tonnes de moins qu’en 2017. En 2018, les émissions se sont révélées inférieures d’environ 14 % à celles de 1990. La baisse par rapport à 2017 s’explique par une nette diminution de la consommation de combustibles en raison d’un hiver doux. Le secteur des transports n’affiche quant à lui aucune baisse notable des émissions en 2018. Selon les estimations actuelles, la Suisse manquera son objectif climatique national pour 2020 de -20 % par rapport à 1990.

Ce système de droits à polluer revient à attribuer à un pays riche le privilège de faire moins d’efforts que les autres, alors que les pays développés possèdent la capacité technique et financière de cesser complètement d’émettre, tandis que les pays en voie de développement ont besoin d’augmenter leur production d’énergie à bon marché, en polluant si nécessaire. L’existence de ce marché a été stigmatisé par le pape François qui en exprime bien le caractère immoral  :     « La stratégie d’achat et de vente de “crédits de carbone” peut donner lieu à une nouvelle forme de spéculation, et cela ne servirait pas à réduire l’émission globale des gaz polluants. Ce système semble être une solution rapide et facile, sous l’apparence d’un certain engagement pour l’environnement, mais qui n’implique, en aucune manière, de changement radical à la hauteur des circonstances. Au contraire, il peut devenir un expédient qui permet de soutenir la surconsommation de certains pays et secteurs. » (Laudato si, 171)

Ce n’est pas tout. La Suisse devrait encore tenir compte des “émissions grises”,  ces gaz à effet de serre émis pour produire les biens de consommation importés de l’étranger. La réduction des émissions territoriales de la Suisse depuis 1990 ne tient pas compte d’une augmentation de 44% si l’on prend en compte le CO2 des biens importés La Suisse délocalise de la sorte une seconde fois son empreinte climatique à l’étranger. L’Office fédéral de l’environnement estime que l’impact total de la Suisse, pas uniquement climatique, se manifeste à 73% à l’étranger.

On n’échappe pas au destin d’un des pays les plus riche du monde, qui forcément consomme beaucoup et pollue en conséquence. Sinon à quoi servirait l’argent? Il permet d’acheter le superflu. Taxer les riches d’un pays riche revient à se donner bonne conscience à bon compte. C’est l’équivalent de la piécette que la bourgeoise donne au mendiant en sortant de l’église

Une véritable politique consisterait à prendre des mesures positives qui impliquent uniquement la production d’énergie renouvelable sur le territoire national. Nous devrions bien cesser d’importer du pétrole en 2050 si on voulait vraiment être sérieux. On ne fait que semblant d’y croire en espérant bien que ce ne sera pas le cas.

 

 

 

 

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.

30 réponses à “Les trois leurres de la loi sur le CO2

  1. J’ai le sentiment que vous avez bien résumé la voie étroite et sans issue votée par nos élus. Avoir choisi dans le passé de cibler politiquement le CO2 comme responsable majeur du réchauffement climatique avéré a probablement été une erreur de casting. La pollution, multiple et variée, de notre environnement continue et est bien pire. Hormis des constats répétés et inquiétants des ONG, quasiment rien n’a été entrepris concrètement par nos élus pour qui il est difficile de comprendre les enjeux surtout s’ils continuent à écouter certains lobbyistes. Par contre nos élus ont très bien organisé juridiquement le business du droit de polluer par le CO2. Et pourtant de nombreuses entreprises prennent le problème au sérieux. On est donc pas encore sorti de l’auberge.

  2. Autre leurre? on fait prendre pour des certitudes les projections de mathématitiens relatives au réchauffement climatique. Leurs bases de données principales : la comparaison d’abaques relatives à l’augmentation de la température et simultanément du CO2. Quelle que soit celle qui précède l’autre rien ne prouve que le CO2 soit la cause majeure du réchauffement. Connaissez-vous un essai en laboratoire, comme il se devrait, prouvant la réalité des projections des mathématiciens? Qu’est-ce qui l’empêcherait? Les physiciens concernés par les satellites tournant actuellement autour du soleil ont admis s’être plantés après avoir vérifié les températures escomptées dans la région (La Recherche, juin 2020).

  3. Lorsque que l’on vit en Suisse et que l’on profite d’un certain niveau de vie, la critique du système et des solutions proposées est totalement hypocrite. Que fait dans les faits le dénonciateur pour améliorer la situation? C’est le seule chose qui comptera à la fin, les mots passeront, notre responsabilité personnelle restera. Celui qui depuis 10, 20 ans a réussi à réduire son empreinte carbone de 10 a 20% à le droit de dire quelque chose, les autres n’ont qu’à s’y mettre et se taire en attendant.

  4. Merci M. Neirynck pour ce rappel salutaire.
    Les pauvres paieront, tout simplement parce qu’ils n’ont aucune influence sur les politiques et qu’ils sont les plus nombreux à pouvoir être taxés.
    De plus, on peut aisément les stigmatiser, les insulter et les traiter de pollueurs sans risque de retour de bâton. Quant aux riches et aux puissants, qui s’y frotte s’y pique.

  5. Vous avez une source pour cette affirmation péremptoire?

    “une des villes les plus riches du monde”

    1. Zurich en n°1 et Genève en n°5 au niveau mondial pour le PIB par habitant: c’est le résultat d’une étude menée par la Brooking’s Insitution qui place les deux villes de Suisse au sommet du classement international.

      1. Normal.
        Cet institut prend le PIB et le divise par la population résidente… sans prendre en compte les travailleurs frontaliers et les dépenses européennes (en France).

        Cela signifie qu’ils répartissent le gâteau de 350000 équivalents pleins temps sur une population de 250000 personnes….

        Ils ont corrigé en créant une ville fictive “Genève-Annemasse”, ce qui place “Genève” en 63ème position.

        https://www.brookings.edu/research/global-metro-monitor/

  6. On ne dit pas “les leurres, mais un leurre”, surtout si vous parlez d’une loi, bon vous êtes écrivain, après tout.
    Vous commencez à zozoter, cher écrivain, comme votre collègue Suzette!
    Il y a un temps pour tout, même savoir se retirer humblement 🙂

    1. Selon mon dictionnaire rien n’empêche de mettre ce substantif au pluriel. Si on lit le blog, il y a trois leurres successifs.

      1. Bon, je vous propose une tentavive de conciliation, cher Jacques.
        TITRE
        La loi sur le CO2 est un leurre

        Réponse:
        Selon mon dictionnaire, rien n’empêche de mettre ce substantif au pluriel.
        Si on lit le blog, il y a trois leurres successifs.

        1. Ce n’est pas la même chose. La loi est un leurre parce qu’elle prétend résoudre la transition climatique à coup de taxe. Vient ensuite l’achat subreptice de droits à polluer qui est un second leurre. Enfin vient la dissimulation de l’énergie grise des produits importés qui constitue un troisième leurre. Cela impose le pluriel qui n’est certainement pas une faute de syntaxe.

        2. “On ne dit pas “les leurres, mais un leurre”…

          Selon le dictionnaire abrégé de l’Académie des Remoulados, peut-être. Partout ailleurs, le pluriel ne choque personne. Exemples:

          “L’incertitude de l’avenir m’a toujours fait regarder les projets de longue exécution comme des leurres de dupe.” J. J. Rousseau, Confessions, IV.

          “Il réduisait les conventions les plus sacrées des nations entre elles aux leurres d’une perfidie politique.” Raynal, Histoire philosophique, X, 14.

    2. Je ne trouve pas. Votre cher Jacques a toujours plus de patience envers les commentaires désobligeants. Et c’est un signe de sagesse, c’est au fond ce qui manque le plus cruellement à notre société.

      1. Monsieur le professeur Neyrinck sait que mes piques ne sont pas désobligeantes, du moins j’ose l’espérer, car je suis d’accord avec vous, c’est un sage émérite

        Sauf quand il supprime un de mes comments qui va dans son sens, mais égratigne une de ses collègues EPFL, mais c’est humain.

        En tout cas, merci de me rappeler à l’ordre de manière courtoise, je fût, je suis et serai toujours un enfant impertinent 🙂

  7. l’été proche va voir sans doute les grandes transhumances habituelles, à l’image des migrations d’oiseaux, sinon que les oiseaux, eux, n’émettent pas de gaz à effet de serre ! ferroutage, trains de nuit, bref transports en commun amélioreront les choses, mais les boomers ont la vie dure ! il y a eu récemment des élections, avec une percée spectaculaire des verts, et avec un refus catégorique de voir une élue verte tout en haut de votre pyramide représentative de la démocratie helvète; ce n’est donc pas demain que cela va bouger, mais patience…

  8. Taxe sur l’essence. C’est niet!

    Il faudra tout simplement demander le référendum contre cette loi et que le peuple l’envoie par le fond.

    1. Mais il faudra aussi se demander si ce n’est pas un moindre mal. Très difficile à estimer.

  9. Je remercie Hervé de Rahm de nous signaler cet article dans La Recherche sur le rôle du soleil semble-t-il très mésestimé par le GIEC, et sur l’intérêt de l’étudier plus sérieusement.
    En retour, dans ce même numéro, on trouve une chronique très intéressante sur l’électricité. Où l’on apprend que l’Europe qui auto-soumet ses producteur d’électricité au marché du carbone, se retrouve maintenant à importer massivement de pays qui n’y sont pas soumis. Et la solution proposée rejoint la remarque de M. Neirynck sur les taxes et l’essence, à savoir mettre une taxe carbone à l’import, qui au final se répercutera sur le coût de l’électricité sur le consommateur. L’Europe est-elle l’idiot utile de la lutte contre le CO2 ?

    1. L’irradiation solaire est mesurée entre 1360 et 1364 watts/m2 par les satellites de dernière génération, ce qui donne une incertitude de 1 watt/m2 pour la surface totale de la Terre. L’albedo , partie de cette énergie réfléchie, est donné avec une précision de 1-2 watts/m2 . Il faut préciser que les nuages encore mal étudiés constituent la moitié de cette valeur (100 watts/m2).
      Et enfin l’effet de serre total se monte à environ 155 watts/m2 , mais avec une marge de plusieurs watts/m2 , aussi due à la présence des nuages .
      Quant au forçage radiatif anthropique , ou la partie de l’effet de serre du CO2 induit par l’homme, il est estimé à 2 watts/m2 , il n’est pas mesurable directement, étant noyé dans les 155 watts/m2 .
      On peut juger de l’influence de l’homme quand on connait ces chiffres …

      1. Le propre du climat est d’être instable. Les cycles de glaciation sont déclenchés par de petites variation d’irradiation dues à la précession des équinoxes ou à d’autres variables astronomiques.
        L’instabilité provient des effets cumulatifs comme la fonte de la banquise arctique et le dégel du permafrost. Si les cimatologues font preuve d’une prudence dans leurs affirmations, ils sont cependant dans un consensus sur l’influence humaine actuelle. On ne connait du reste pas d’autre cause possible au réchauffement actuel qui est une évidence.

  10. “La baisse par rapport à 2017 s’explique par une nette diminution de la consommation de combustibles en raison d’un hiver doux”… Donc grâce au réchauffement 😂

    On se marre de voir la puissance véritablement cosmiqie une molécule qui représente 0,04% de l’atmosphère et dont les humains sont responsables pour 4% (et les suisses, combien de % de 4% de 0,04%). Pour donner une idée de la concentration du co2 actuelle, la molécule de CO2 devant chez vous a sa plus proche copine trente mètres plus loin…

    1. De petites variations peuvent parfois avoir de grandes conséquences (“effet papillon”).
      De même pour de petites concentrations de gaz. Exemple pour le monoxyde de carbone (CO) :
      0,16 % : Maux de tête, vertiges, nausées apparaissant dans un délai de 20 minutes. Issue mortelle en moins de deux heures ;
      1,28 % : Perte de connaissance après 2 à 3 respirations. La mort survient en moins de trois minutes.

    2. «Pour donner une idée de la concentration du co2 actuelle, la molécule de CO2 devant chez vous a sa plus proche copine trente mètres plus loin…»

      Ce serait plutôt de l’ordre de 50 nanomètres, à vrai dire. Mais on ne va pas laisser un bête facteur d’un milliard remettre en doute la crédibilité de vos propos, n’est-ce pas?

  11. Pour éviter les émissions de CO2 dans le transport, l’avenir est certainement à la mobilité électrique, les moteurs électriques ayant un rendement de 95% en comparaison des 25% d’un moteur thermique. Il y a deux solutions pour des véhicules électriques (VEL) : une batterie ou une pile à combustible (PAC, à ne pas confondre avec la pompe à chaleur !). Imaginons un futur parc de 4 millions de VEL en Suisse, avec batteries. Prenons une future batterie de type « lithium-air » qui sera la plus efficace possible en densité d’énergie stockée par kg de lithium. Actuellement on en est à 0,5 à tout juste 1 kWh/kg Li en laboratoire, une valeur cible étant peut-être à l’avenir 4 kWh/kg Li. Ces 4 millions de VEL avec une autonomie de, disons, 300 km par plein d’électricité, avec une consommation tout-terrain d’environ 20 kWh/100 km, parcourant chacun en moyenne 15’000 km par an, demanderont chacun 3’000 kWh/an, soit en tout 12 milliards de kWh par an (12 TWh/an), une électricité à produire en plus de la demande actuelle ! Cela requiert pour chaque VEL une batterie d’une capacité de 60 kWh, soit, à l’avenir, une masse de 15 kg de Li (actuellement plutôt 60 à 120 kg !). Ces 4 millions de VEL, demanderont en tout 60’000 tonnes de lithium (actuellement 240 à 480’000 tonnes !). En regard de ces chiffres, il faut savoir que le marché annuel mondial du lithium est de quelque 95’000 tonnes, les réserves prouvées étant de 17 millions de tonnes et les ressources estimées de 80 millions de tonnes. La Suisse à elle seule aurait donc besoin des 2/3 de l’équivalent du marché annuel mondial actuel !
    .
    L’autre voie est la PAC qui demande de l’hydrogène ou, mieux, un « porteur » d’hydrogène, une molécule hydrogénée comme le méthanol, l’acide formique ou le cyclohexane, ces molécules ayant l‘insigne avantage d’être à l’état liquide à température ambiante (cela permettrait un plein classique en quelques minutes). Mais il faut synthétiser ces molécules qui seraient alors des carburants de synthèse, à partir de CO2 et d’hydrogène, ce dernier étant lui aussi à produire, par exemple, à partir de l’eau par simple électrolyse. Le courant électrique nécessaire viendrait, par exemple, de la production excédentaire de sources renouvelables (REN), mais le rendement reste médiocre. Une autre voie est la thermolyse catalysée de l’eau vers 800 °C, bien plus efficace, nécessitant alors un réacteur à très haute température (VHTR), par exemple, un réacteur nucléaire de 4e génération. Mais toute la chaîne donnerait aussi un rendement inférieur à 50%.
    .
    En conclusion, pour « décarboner » la mobilité de la seule Suisse, il faudra soit avoir accès à plusieurs dizaines, voire centaines, de milliers de tonnes de lithium, soit avoir un parc de REN énorme pour avoir un excès de production d’électricité à stocker chimiquement dans des molécules hydrogénées, soit envisager un réacteur nucléaire, sachant que, dans le cas de 4 millions de VEL à PAC, une production industrielle d’hydrogène ne serait rentable que par thermolyse de l’eau, toute la difficulté résidant dans l’optimisation des rendements de chaque étape jusqu’aux ultimes kWh alimentant les moteurs électriques.

    1. Votre analyse Christophe est pertinente pour quelques valeurs mais, comme toujours, les hypothèses sont souvent arbitraires.
      Voici des chiffres concrets
      J’ai installé 55 panneaux photovoltaïques (91m2) de 300W sur mon toit, soit 16,5 KW plein soleil.
      Je roule en 100% électrique, ZOE de Renault, depuis le 1er juin 2020
      Du 1er au 16 juin j’ai acheté 162 KWh sur le réseau (230Vac) pour alimenter ma ZOE et parcourir 1632 Km
      Ces 162 KWh n’étaient pas couvert par le solaire pour 2 raisons,
      1) juin 2020 n’est pas un bon mois pour le photovoltaïque,
      2) je n’ai pas encore toutes les bonnes façons de charger.
      En résumé et en réfléchissant quelques peu (et sans avoir un diplôme de l’EPFL) je dois arriver à me passer du réseau pour effectuer env. 15 à 20’000 Km/an en 100% électrique.
      J’habite à 850m d’altitude au pied du Jura (montées et descentes fréquentes) sans avoir fait beaucoup d’autoroute. Ma consommation moyenne à ce jour est de 13 KWh/100Km. En ECO
      (Et non pas 20 KWh/100)
      Selon une étude de l’EPFL plus de la moitié des 9,6 millions de toits recensés en Suisse sont capables de recevoir des panneaux photovoltaïques, soit env. 40% de la demande d’électricité annuelle.
      Un autre point d’optimisme. Une solution, dont on parle peu, est l’utilisation de la batterie de la voiture pour alimenter, de nuit, sa propre maison. Cette technologie, en développement, permettra d’être totalement indépendant du réseau.

  12. Cher M. Neirynck, nous sommes en démocratie, et en démocratie directe en plus ! L’approbation par le peuple des mesurettes fiscales envisagées est incertain: qu’en serait-il de mesures coercitives plus musclées et touchant de la même façon toutes les couches sociales ? Voter vert, c’est tendance, mais changer de comportement – volontairement ou sur injonction légale – c’est une toute autre histoire.
    Pour ma part je suis très imparfait mais je n’ai jamais pris l’avion et n’ai jamais eu de voiture. Faites-en autant et vous m’en direz des nouvelles.

  13. Un paquet de lois pour réduire le CO2 émis par la Suisse – donc des mesures pénalisant les investissements polluants et encourageant les investissements verts ?
    Pas du tout ! De telles mesures auraient certes un vrai effet – l’impact de la place financière suisse sur le climat dépasse de plus de 20 fois celle de ses habitants ! Mais les mesures fortes ne correspondent pas à la tradition suisse.
    Alors des sanctions pour l’obsolescence programmée qui booste la consommation de CO2 ? Des mesures contre la Fast Fashion au bilan écologique désastreux ? Des taxes pour les marchandises qui font le tour du continent pour être transformées à moindre frais ? Un aménagement du territoire qui rapproche les logements des emplois ? Des mesures contre la prolifération des livraisons à domicile qui polluent et engorgent le réseau routier ?
    Mais non – les Suisses ne veulent pas d’une politique cohérente, pour le climat pas plus que pour autre chose ! Ce qu’ils veulent, c’est participer eux-mêmes, personnellement, à améliorer le monde, y apporter chacun régulièrement son petit sacrifice personnel, un peu comme le tri des déchets ou le don aux bonnes œuvres. Pour le climat ce sera une taxe modeste à chaque plein d’essence et une autre à l’achat d’un billet d’avion.
    Mais quel sera l’effet sur le climat ?
    On s’en fiche, c’est ça ou rien ! On ne change pas une population qui regarde le monde sous l’angle des fourmis et qui a l’habitude de répondre aux problèmes par l’autoflagellation.

    1. C’est vrai sauf si: les étés secs et les hivers diluviaux deviennent la règle; les abeilles disparaissent; les cancers dus à la malbouffe continuent d’augmenter au point d’asphyxier le financement du système de santé; les craintes liées à l’avenir et les inégalités sociales font descendre dans la rue de plus en plus de gens; etc. Je ne crois que ce n’est plus être un prophète de malheurs de dire que nous entrons dans une ère cataclysmique. Enfin, nos enfants, car je ne doute pas que vous soyez pensionné.

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