L’instant de vérité

Chaque être humain, chaque institution, chaque pays rencontre des instants de vérité, où la réussite et l’échec ont de pareilles chances d’advenir : il suffit d’une parole, d’un geste, d’une décision pour que le futur bascule d’un côté ou de l’autre, selon que cette action se conforme ou non à la réalité, à la vérité du moment. Si la personne ne la connait pas, ne la comprend pas ou ne l’admet pas, elle se trompe, elle échoue, elle perd sa place dans le monde.

Le 18 juin 1940, Charles de Gaulle prononça un appel sur les ondes de la BBC qui créa la Résistance et rendit à la France son honneur. Le 25 juillet, le général Guisan tint sur la prairie du Grütli un rapport d’armée qui souda la Suisse dans la résistance à la menace nazie. C’est l’instant où le matador plonge l’épée dans la nuque du taureau : s’il flanche, il est mort. A une autre échelle, cela est aussi vrai pour un chirurgien, un commerçant, un paysan, un comédien, un magistrat, un père ou une mère. Tout dépend d’une perception aigüe de la réalité dans toutes ses dimensions, matérielle et spirituelle, du rapport avec les êtres, de la connaissance de la vérité.

Dans ces circonstances, la moindre des choses est de se préoccuper de la vérité elle-même, dans la mesure où on peut y accéder. Tout tient dans la question prêtée à Pilate lors de l’interrogatoire de Jésus : « Qu’est-ce que la vérité ? ». Pour un fonctionnaire impérial sceptique, qui a lu tous les philosophes et rencontré toutes les religions, cette question est légitime. Quelle aurait pu être la source d’une vérité certaine ? A l’époque il n’y avait rien qui puisse être considéré comme une science. Tout n’était que mythes, racontars et discours. Au fond personne ne savait rien de certain.

Depuis il y a eu l’émergence de la Science. L’histoire des sciences n’est pas seulement le récit d’une série de découvertes. C’est aussi celui de l’évolution d’une pensée et d’institutions qui offrent à cette pensée les moyens d’influencer l’histoire. L’Emergence de la Science fut l’œuvre de la Renaissance qui débuta avec Copernic, Kepler, Galilée et Newton, en établissant le premier modèle mécanique de la circulation des planètes. Elle changea notre vision du monde : la pandémie qui se passe maintenant n’est pas une punition divine pour nos péchés, mais la multiplication d’un virus dans les cellules infectées. Elle ne peut avoir que le sens que nous lui donnerons.
La Science disposerait ainsi d’une vraisemblance qui dépasse celle des croyances. Pourquoi ? Alors que tous les dogmes religieux ou idéologiques demeurent douteux et controversés, pourquoi certains énoncés seraient-ils indiscutables ? La différence est dans la nature de l’énoncé : la Science n’émet pas des dogmes, mais une prudente approche de la vérité, toujours modifiable.
En Science, un modèle mathématique est significatif au point de vue scientifique dans la mesure où il est falsifiable, c’est-à-dire que l’on peut imaginer une expérience qui contredirait le modèle, qui ne vérifierait pas l’équation. En revanche, un énoncé dont on ne peut prouver la fausseté n’est ni vrai, ni faux : c’est une conjecture, ce n’est pas un résultat scientifique. Quoique les sciences naturelles n’émettent pas de dogmes à un moment donné, c’est la moins mauvaise approximation de la vérité, c’est le meilleur fondement disponible pour une politique réaliste et véridique.
Pour l’opinion publique, cette distinction n’est pas claire. Les mensonges de Trump, à la cadence de deux par heure, relèvent de cette ignorance implantée : toutes les paroles sont bonnes à dire, elles ont le même rapport à la réalité, aucune n’est plus sûre qu’une autre, sinon que le Président a toujours un peu plus raison, car il a été élu par le peuple. Il profère les mensonges que les ignorants espéraient. Cela explique que les avis des experts, dûment mandatés par le pouvoir politique, ne soient pas suivis d’effet en temps voulu, seulement à la longue quand la réalité saute au visage.
Exemple : on sait enfin ce qui s’est passé lors d’un instant de vérité décisif en Suisse. En juin 2017, l’Office fédéral de l’approvisionnement économique (OFAE) constate que le stock de masques n’est fourni qu’à 70% de la norme prévue. Sa réaction est typique : au lieu de corriger lui-même il annonce aux cantons et aux hôpitaux que c’est à eux de s’en occuper désormais, sans vérification, ni sanction. A la même époque, ce fut exactement même réaction du pouvoir en France : c’est aux entreprises de prévoir un stock pour leurs employés, plus à l’Etat. Si bien qu’en janvier 2020 les masques manquent. Depuis six semaines, l’honnête Daniel Koch, sous la férule d’Alain Berset, couvrit cette fausse décision en prétendant face à la télévision que les masques ne servent à rien pour la population, en mentant alors qu’il connaissait la vérité.
Dans les deux pays, les recommandations des experts, dûment notifiées, ont été négligées par l’Etat pour des raisons budgétaires : cela coûte moins cher d’en charger d’autres. Ce qui est vrai pour les masques, l’est pour tout le reste : respirateurs, désinfectants, anesthésiques, matériel de test, déclenchement du confinement. Résultat :  la France compte à ce jour 14393 morts, la Suisse 1000 et l’Allemagne 2799. L’impéritie de l’administration et du pouvoir politique ont coûté des milliers de morts supplémentaires, victimes d’un déni de réalité.
Il en fut de même en août 2003 : la canicule a tué 15000 personnes en France et 1000 en Suisse : pour la raison simple que, dans le premier pays, les infirmières libérales indispensables pour hydrater les personnes âgées et isolées étaient limitées dans leurs heures de travail par la loi et devaient laisser mourir les patients en détresse plutôt que de violer le Code du Travail, sous peine de sanctions.
A Taïwan, la pandémie a fait six morts et 388 cas, parce que la vérité était connue dès le 31 décembre et les mesures conformes prises aussitôt. Or, le 14 janvier, l’OMS soutenait encore la thèse chinoise selon laquelle il n’y a pas de contamination entre humains, en manquant à son devoir élémentaire d’avertissement de l’Europe et des Etats-Unis.
Le déconfinement s’échelonnera selon le degré de préparation et de gestion des différents pays. Cela conditionnera la reprise économique qui sera – par hasard ! – avancée dans certains pays au détriment des autres. Avec les séquelles de l’endettement, du chômage, des faillites, de l’appauvrissement des moins favorisés. Avec l’accroissement de l’inégalité sociale par la fermeture des écoles.

Six conclusions provisoires.
Tout d’abord, il n’est pas indifférent que le ministre de la Santé soit un médecin plutôt qu’un économiste.
Il existe des coupables pour les mauvaises décisions. Sans agiter le spectre d’une vengeance, il faut au minimum les mettre hors d’état de nuire : ils ne peuvent plus remplir une fonction dont ils ont été indignes.
Une catastrophe est le moment de vérité : il faut comprendre, puis apprendre, puis prévoir la prochaine pandémie. Les carences ne seront plus excusables dans l’avenir par l’incompétence des décideurs, mais pourront être sanctionnées au pénal.
Les experts à notre époque savent vraiment ce que la plupart ignorent : décider en ignorant leur avis est un moyen sûr de déclencher des catastrophes. C’est ce qui fut fait.
La Suisse doit impérativement former tout le personnel médical nécessaire dans les pires circonstances au lieu de le siphonner dans les pays voisins, parce qu’ainsi cela ne nous coûte rien pour le former. Et mieux payer les infirmières.
La revendication la plus lourde est la nécessaire autarcie : il ne suffit pas de soutenir le paysannat pour garantir l’approvisionnement alimentaire du pays. Il faut le même degré d’autonomie pour tout ce qui est vital, des médicaments à la production d’énergie. Irréalisable pour un pays de huit millions d’habitants, mais réalisable dans un continent de 500 millions. Vérité déplaisante, mais vérité tout de même.

Une tâche ultérieure :
Depuis cinquante ans, les experts répètent que la croissance indéfinie n’est pas un modèle économique viable. Nous finirons par manquer d’une ressource non renouvelable, en l’occurrence une planète habitable. Nous devons cesser de brûler du pétrole. C’est le conseil d’experts. Au pouvoir politique d’en trouver les moyens. Et cesser de prétendre que, puisque c’est difficile, ce n’est pas vrai. Si la sécheresse nous prive d’une récolte, la panique sera bien plus grave.

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.

34 réponses à “L’instant de vérité

  1. Merci pour cet excellent résumé de la situation. Le monde d’après la crise sanitaire sera vraisemblablement différent de celui d’avant. La science et ses humbles serviteurs se verra certainement enfin confier une place avec plus de reconnaissance et de responsabilités. Jusque là cette place était occupée par des associations de personnes plutôt soumises aux conventions financières, économiques et politiques. Il va falloir arriver à s’affranchir de ces croyances et cela ne sera malheureusement pas une mince affaire, car la soi-disante “main invisible du marché” va veiller au grain. Mais Homo sapiens y parviendra, je l’espère pour lui, pour nous.

  2. Je pense que la méfiance à l’égard des experts et des scientifiques peut être résumée par cette citation d’Einstein « La théorie, c’est quand on sait tout et que rien ne fonctionne. – La pratique, c’est quand tout fonctionne et que personne ne sait pourquoi. – Si la pratique et la théorie sont réunies, rien ne fonctionne et on ne sait pas pourquoi. »

    Souvent les experts et les scientifique travaillent en laboratoire et pensent que poser les données d’un problème et d’en énoncer les solutions suffit à considérer le problème comme résolu.

    Une fois confrontées à la réalités, les solutions peuvent vite devenir catastrophique si les conditions de leurs mise en œuvre n’ont pas été intelligemment préparées.
    C’est de ce risque-là dont les gens se méfient : que le remède soit pire que le mal.

    Si l’on rajoute à cela les conflits d’intérêts de certains scientifiques, voire des collusions avérées avec des industries ou des régimes politiques pas toujours recommandables, la méfiance face à la parole des experts peut être compréhensible.
    Il n’y a pas d’un côté de stupides ignorants et de l’autres des scientifiques éclairés. Les torts sont bien partagés.

    1. Les scientifiques sont moins sûrs d’eux-mêmes que les ignorants. Cette analyse renvoie dos à dos tout le monde comme si le mensonge avéré et délibéré d’un politicien façon Trump pesait du même poids que l’avis d’un expert en épidémies. Le peuple préfère Trump parce qu’il dit des mensonges conformes aux préjugés et croyances. Le peuple rejette les avis des experts parce qu’ils sont désagréables.

      1. Je vous trouve bien indulgent et je n’ose imaginer que vous préfériez, vous aussi, des informations conformes à vos préjugés.

        Ecouter les experts et les scientifiques ? Certainement !
        Aveuglément ? Certainement pas.

        Voici un article des Echos fort éclairant et qui devrait satisfaire votre goût pour les faits et les chiffres.

        https://www.lesechos.fr/idees-debats/sciences-prospective/le-fake-nouveau-casse-tete-pour-la-recherche-712735

        Extrait :
        – 2 % La proportion de fraudeurs supposés dans la communauté scientifique mondiale, soit 140.000 chercheurs. Les sciences de la vie sont les plus touchées par le phénomène.
        – 60.000 Le nombre de publications douteuses recensées en 2017 par la base de données Scopus. Dix ans auparavant, ce chiffre avoisinait 6.500. Selon d’autres sources, il circulerait sur Internet jusqu’à 400.000 articles douteux signés de scientifiques revendiqués comme tels.
        – 43,4 % Les fraudes biomédicales sont en tête des rétractations d’articles scientifiques constatées entre 1977 et 2012, selon « PNAS ». Sur 2.047 articles publiés et rétractés dans le secteur, plus de la moitié (53,2 %) l’ont été pour fraude ou plagiat.
        – 1.207 Le nombre record de citations reprises à partir d’un article jugé après coup falsifié. Les travaux, publiés dans « The Lancet » concernaient le lien entre l’autisme et les vaccins pour enfants.

        1. Je crois volontiers que la proportion de tricheurs scientifiques soit de l’ordre de 2%. Il y a donc 98% de scientifiques honnêtes. ON doit trouver la même proportion dans d’autres professions : avocats, notaires, prêtres, enseignants, commerçants. Cela ne signifie pas que ces professions soient corrompues au point de ne plus y avoir recours

          1. « Cela ne signifie pas que ces professions soient corrompues au point de ne plus y avoir recours »

            C’est exactement ce que je dis : il faut évidemment écouter les experts et le scientifiques mais pas leur faire confiance aveuglément.

          2. Si on leur fait pas confiance parce que l’on croit que c’est aveuglément, comment déterminer la limite de l’aveuglement? Certains refusent d’admettre le réchauffement climatique d’origine humaine parce qu’ils refusent l’avis des experts. D’autres refusent la PMA ou la GPA ou les OGM par méfiance à l’égard des scientifiques. Où placer la frontière?

  3. Vous donnez une vision de la réalité qui me parait un brin simpliste. Il y aurait des experts qui savent et des décideurs politiques qui ne savent pas. Il suffirait aux politiciens d’écouter les experts et de décider en conséquence. Facile. Question subsidiaire : pourquoi a-t-on besoin de politiciens, alors ?

    S’il y a une chose qui me frappe dans les débats actuels, quel que soit le sujet, c’est le recours systématique aux experts. Il y a des experts pour tout et surtout, il me semble, pour toutes les opinions et il n’est pas rare que plusieurs experts se contredisent (et je ne parle pas ici de l’utilité des masques !)

    Pour le non-expert que je suis, c’est troublant. On me dira bien sûr que sur certains experts le sont plus que d’autres mais le problème c’est que le quidam que je suis n’est pas capable de faire la différence. L’être humain est doté d’un biais de confirmation qui lui fait écouter prioritairement les informations qui confirment son opinion préalable, quelle qu’elle soit.

    Je crois qu’il est nécessaire, une fois la crise passée, de faire le bilan avec humilité. Les experts sont dans une position relativement confortable, au pire ils auront eu tort mais sans conséquences. Les décideurs politiques, eux, doivent, analyser des informations contradictoires, peser des intérêts divergents et prendre des décisions qui ne peuvent qu’être mauvaises. Dans tout les cas, ils s’exposent à la vindicte populaire.

    Bien sur qu’il faudra établir les responsabilités mais de grâce ne tombons pas dans le simplisme du « je vous l’avait bien dit »

    1. Il y a des politiciens qui écoutent les experts et d’autres qui s’en moquent. L’exemple de Taïwan est clair : prévenu dès le 31 décembre les bonnes décisions sont prises, il y a assez d’équipement, les frontières sont fermées. Nous ne réagissons qu’à la mi-mars, nous n’avons pas stock suffisants, nos politiciens mentent pour dissimuler leurs erreurs. Nous avons mille morts et Taïwan six.

      1. L’avantage de Taïwan est que, même si sa souveraineté n’est pas reconnue par les Nations Unies, ce pays s’affirme indépendant et se comporte comme un état souverain. Ça fait une sacrée différence avec la Suisse, où la France, où les autorités sont des caniches de l’Union Européenne. Ce qui leur lie les mains et les empêche d’agir.

        1. La Suisse n’est pas un caniche de l’UE et les Etats-Unis n’en font pas partie. La réussite dans la lutte contre l’épidémie dépend des mesures pratiques que chaque pays prend. Au sein de l’UE l’Allemagne et l’Autriche ont parfaitement réagi. Cela n’a donc rien à voir

          1. Là je ne suis pas d’accord avec vous. J’ai parlé de caniches parce que – vous le savez bien – je suis à fond opposé à tout rapprochement de la Suisse avec l’UE. Nos autorités, selon moi, sont bien des caniches de cette organisation. C’est humiliant de les voir ramper devant le mannekenpis, qui leur urine dessus.

            Si on était gouverné par des gens à la Blocher, des durs, vraiment souverainistes, je suis convaincu qu’ils auraient mieux géré cette crise.

            Pourquoi la Suisse a-t-elle tant tardé à fermer ses frontières? Parce que nous gouvernés par des caniches de l’UE.

  4. Cette affaire va avoir l’effet d’une guerre mondiale et le monde ne sera pas le même après, en particulier le déni des experts et des intellectuels et surtout de la science, du savoir et de l’école, de l’état aussi. Les budgets de la santé et de l’éducation ne seront pas les mêmes et la mondialisation en prend un sacré coup. C’est probablement la fin des chaines de production qui ne dépendent que d’un ou deux pays et la prise plus au sérieux du besoin de plus d’autarcie.

    Cette crise marque la fin du libéralisme de Reagan et Thatcher. D’ailleurs à la Maison Blanche, c’est une lutte entre la science et l’obscurantisme et surtout, entre la science et l’économie.
    L’économie est en train de prendre une grosse claque de part son manque à peu près total de clairvoyance, de vision et de prévision à long terme, ce qui la distingue d’une science qu’elle n’est pas. Elle est, en effet, non prédictive et non expérimentale puisqu’on ne peut pas isoler un système pour tester une hypothèse. Cela explique le fait que les prévisions économiques sont la plupart du temps fausses et sont données avec des marges d’erreur qui font honte à tout scientifique digne de ce nom.
    Il y a ainsi beaucoup à dire sur la théorie économique qui est la seule “science” à ne pas avoir changé de paradigme depuis sa fondation. Elle est de plus basée sur l’hypothèse que la Terre est infinie, ce qui bien sur est faux et, d’autant plus dangereux que cette hypothèse est implicite, la plupart des économistes en sont inconscients: une théorie basée sur une hypothèse fausse ne peut être que fausse.

    Avant cette crise, les jeunes défilaient pour demander aux “vieux” de prendre les décisions écologiques qui s’imposent pour assurer leur avenir. Aujourd’hui, ils restent à la maison pour les protéger, leur font les courses, il va bien falloir qu’il y ai un retour d’ascenseur, en particulier par rapport au changement climatique qu’il ne sera plus possible de nier au vu de ce que la science peut nous apporter…

  5. Merci M. Neirynck. C’est toujours un plaisir de vous lire. Comme vous le mentionnez, c’est dans la tempête que se révèlent les bons capitaines.

    Au-delà du blâme pour incompétence, il convient de s’interroger sur les erreurs de casting monumentales dans le leadership mondial et dont les conséquences sont dramatiques.

    C’est donc le système de selection qu’il faut remettre en question pour assurer le bon fonctionnement de notre démocratie déséquilibrée par le poids de la fortune de certains candidats ou d’une formidable puissance de feu apportée par des lobbys a certains élus.

    La même question pourrait se poser concernant les critères de choix des fameux “C” level (CEO, CFO, ..) dans les grandes entreprises où la préférence n’est plus forcément accordée à la compétence mais à la garantie de l’adhérence à certains dogmes censés assurer la profitabilité. Est-ce vraiment normal qu’un fond spéculatif, par exemple, influence ce choix ? Est-ce un gage de survie d’une entreprise à long terme ?

    Avec le temps, notre seuil de tolérance au scandale s’est modifié. Ce qui aurait provoqué la démission ou le placement en détention d’un dirigeant ou d’un responsable ne soulève plus guêre qu’un soulèvement d’épaule voire un sourire parfois jaune. Qu’est il arrivé aux responsables de 2008 ? …surtout de belles reconversions avec des promotions à la clé et les même bonus !

    Conflits d’intérêts, tricheries (Volkswagen, Boeing, etc) sont devenues monnaie courante et, en l’absence de réelles sanctions, ont modifié notre système de valeur au fil du temps reléguant les anciens codes d’honneur et d’éthique à des fins publicitaire pour promouvoir sa marque (“je communique beaucoup sur ce que je ne fais pas vraiment” aussi connu sous le terme de “washing”).

    A part dans certaines de nos PME, la compétence réelle n’est plus récompensée car nous produisons de moins en moins nous-même localement. La notion de danger est lointaine et nous n’aimons pas les lanceurs d’alerte qui nous dérangent et menacent ainsi la perennité d’un système qui nous convient bien dans le fond. Ce n’est pas nouveau, il suffit de lire la véritable histoire du Titanic pour être rassuré.

    Il n’est toutefois pas impossible, vu l’ampleur du tsunami annoncé, que des changements de casting aient lieu notamment pour les dirigeants qui persistent dans leur problème d’écoute et ne peuvent travailler avec les faits et les vrais experts. Car le danger et la peur modifie le comportement et les attentes. Chacun finit par suivre celui qui lui donnera les meilleures chances de survie, animé par l’instinct animal. La décision de chacun concernant le port du masque sera, par exemple, un bon indicateur du leader que nous aurons choisi de suivre même s’il ce n’est pas gourou officiellement désigné.

  6. La Suisse 1000 morts , la Belgique 4000 !!! quand ferez-vous des analyses plus étendues que le bout de votre nez ? vous prenez les chiffres qui vous arrangent pour donner une fois de plus vos leçons de grand professeur , mais n’y connaissez pas plus , vous radotez …

    1. Ce n’est pas parce qu’il y a pire que la Suisse que celle-ci n’aurait pas pu faire mieux. Il faut se comparer aux meilleurs pas aux pires. Parmi nos voisins à l’Allemagne et à l’Autriche pas à l’Italie ou à la France. S’inspirer des politiques qui ont réussi et non pas se glorifier de n’avoir pas échoué davantage.
      Je ne comprend toujours pas ce que la Belgique vient faire dans vos commentaires.

      1. Encore une fois, les chiffres donnent l’illusion de la simplicité. Moins de morts = meilleurs décisions prises!
        Sauf que la diffusion du covid-19 n’est pas homogène de par les nations du monde.
        Comment expliquer par exemple, que la Suède aie moins des morts en proportion que la Suisse alors qu’elle n’a pris presque aucune mesure de confinement et/ou de protection de sa population ?
        Même question de manière encore plus flagrante avec l’Allemagne qui a pris des mesures similaires à la Suisse mais a proportionnellement beaucoup moins de morts?
        Et pourquoi l’Italie? La propagation européenne aurait pu commencer en Autriche, la situation n’aurait pas été fondamentalement différente.
        Les comparaisons ne sont jamais aisées. Il y a des différences. Il y a des bonnes politiques et il y en a des mauvaises. Et surtout, il y a une certaine habitude des épidémies et des mesures nécessaires à leur éradications.
        Je persiste à dire que nous autres, occidentaux, politiques mais aussi citoyens, avons oubliés que nous ne maitrisons pas tout et que des mesures fortes et difficiles sont parfois nécessaire.
        Je ne crois pas que les politiciens taiwanais ou autrichiens ou allemand mentent moins que les suisses. La mise en forme de la vérité fait partie du “jeu” politique partout.

  7. Je ne sais pas si j’interprète bien l’article de M. Neirynck, mais il me semble que son raisonnement implique qu’Alain Berset doit démissionner. En effet les responsables doivent assumer leurs fautes. Et en l’occurrence c’est bien Berset le responsable. C’est lui qui a menti au peuple sur les masques. Daniel Koch n’est qu’un sous fifre. C’est donc à Berset d’assumer la responsabilité de l’échec.

    1. C’est bien cela. Un mensonge politique impliquant mort d’homme est grave surtout lorsqu’un expert est contraint de transmettre un message contraire à ce qu’il sait. C’est pervers.

      1. Ah vous êtes donc très clair. Vous appelez à la démission de Berset.

        Je crois que vous avez raison. C’est un politicien très surfait. Dans cette affaire il n’a pas brillé. Malheureusement en Suisse, il y a peu de chance qu’il se sente obligé de démissioner. Ce n’est pas dans la culture politique de ce régime où le gouvernement est irresponsable (au sens constitutionnel9. Donc, il restera bien confortablement sur so0n siège.

        Je ne comprends pas pourquoi il fait illusion à ce point. Il y a des tas de gens que je connais, même des gens très à droite, qui m’ont dit qu’ils lui trouvent des qualités d'”homme d’état”. C’est incroyable.

        Malheureusement, en Suisse, on a trop tendance à évaluer les dirigeants politiques comme si c’était des Miss Suisse. Berset il est très bien vraiment, il a bonne façon. Toujours bien habillé, et bon joueur de piano jazz. Le jugement politique de beaucoup de gens ne dépasse pas ce niveau là hélas.

        J’espère que vous allez donner plus de la voix plus fortement. Vous devriez donner une grande interview à la radio, à la télévision ou dans un grand journal en appelant publiquement à la démission de Berset. Vous n’arriverez pas à le dégommer, mais ça secouera un peu le cocotier. Accessoirement ça vous vaudra pas mal de commentaires mi figue mi raisin sur vos origines belges. Mais tant pis.

        1. Bien évidemment il n’y a aucune raison pour que les médias viennent m’interroger. Je ne vois toujours pas ce que mes origines viennent faire dans cette histoire. Dans un débat d’idée les interlocuteurs peuvent être repérés par leur formation, leur expérience, leurs emplois. La date et le lieu de leur naissance ne joue aucun rôle, sauf si on croit à l’horoscope.

          1. Je sais bien. Je voulais simplement vous encourager à demander la démission de Berset, puisque vous pensez qu’il doit démissionner. Et je souhaitais que votre appel à la démission ait une caisse de résonance plus grande qu’un simple blog. C’est pourquoi j’émettais le souhait que les grands medias vous donnent cette caisse de résonance. Bien sûr on ne nous tendra pas les micros, car le système voudra protéger Berset.

            En prévoyant qu’on vous reprocherait vos origines belges, je faisais de l’esprit. Bien sûr, rien ne serait plus stupide que ce genre d’insinuations. Mais si vous vous attaquiez à Berset la première arme que vos adversaires emploieraient contre vous, pour defendre Berset, ce serait celle-là. Ce serait ridicule évidemment.

          2. Merci de cette dernière précision.
            Un Conseiller fédéral en exercice peut démissionner pour libérer un siège de son parti. Je ne le vois pas démissionner pour avoir commis une erreur, contrairement à ce qui est la règle partout ailleurs. La responsabilité du CF est collégiale. Il n’y a donc qu’une possibilité de démission en bloc qui est évidemment impossible. Cela conforte ma thèse préférée : le CF n’est pas un gouvernement mais une délégation parlementaire, par définition irresponsable dans le cadre de ses fonctions.

    2. Totalement choqué par les rélévations de la Matinale TSR indiquant que des personnes à risque (certifié par un médecin) travaillant dans le tertiaire et qui pourraient travailler à distance sont obligées par leur employeur de travailler sur site avec licenciement à la clé.

      Le Conseil Fédéral a en fait modifié l’ordonnance initiale contrairement à ce qui avait été communiqué à tous en direct. ça c’est du mensonge agravé qui mérite quelques têtes coupées dans notre conseil fédéral !

  8. Trump est si brillant et si imbu, qu’il est en train de vendre le système onusien aux chinois, qui évidemment n’en demandent pas plus. Exemple l’OMS, dont ils ont fait élire le directeur 🙂
    Ah lala 🙁
    America no more great, Asia will be the next Standard!

    1. Vous avez raison. Et alors, finalement pourquoi pas si puissance rime un peu plus avec sagesse. M. Trump aura alors été le fossoyeur des USA.
      Ce qui frustrant vu le contexte, c’est que l’Europe ne s’unisse pas enfin pour jouer son rôle dans le mode. Il est temps de remonter son pantalon: l’Europe reste le plus grand marché mondial, avec des infrastructures publiques enviées outre-atlantique ainsi qu’une tradition politique capable de relever le défi social post crise sanitaire.

    2. Bien sûr que Trump n’est que la marionette des GAFAM et autre prédateurs amerlocs, un imbécile qui s’enrichit en suivant leurs ordres, qu’ils soient démocrates ou républicains.

      Je veux simplement dire que les USA sont out du grand échiquier mondial, l’Europe, on n’en parle même plus. Elle n’a jamais été capable de construire le moindre réseau social.

      On attend toujours le génie éveillé qui va donner un sigle à Huawei, Ali baba et bla 🙂

  9. Je me délecte de votre philosophie réaliste: imaginer une expérience par laquelle la théorie pourra être invalidée, c’est dire que l’expérience décide, c’est-à-dire la réalité. C’est l’épistémologie d’Aristote et … de saint Thomas. Aussi je voudrais vous entendre un jour sur le théorème de Gödel, vous connaissez sûrement Jean Ladrière qui a dû étudier à peu près en même temps que vous à Leuven et qui en avait fait sa thèse de doctorat, dont j’ai pu, in illo tempore, profiter des résumés, en gros: un système axiomatisé peut rendre compte de tout sauf de lui-même, le fondement de la connaissance n’est pas dans la connaissance (mais dans la réalité), car on aboutit à un paradoxe (comme dans la théorie des ensembles): un ensemble qui contient tous les ensembles qui se contiennent eux-mêmes comme éléments ne peut se contenir lui-même comme élément, un catalogue de tous les livres qui parlent d’eux-mêmes ne peut pas figurer dans son propre catalogue (car il pourrait y avoir un autre catalogue qui parlerait de lui). Est-ce que vous avez des lumières sur ce paradoxe ?

    Je trouve curieux, par ailleurs, que vous soyez d’abord si indulgent pour les politiciens, puisque le vrai souverain est le peuple, mais si sévère maintenant que le crise éclate. Nous n’avons qu’à nous prendre à nous-mêmes, et c’est d’ailleurs cela que la religion dit quand elle parle de châtiment divin: Dieu étant le créateur, il a créé la loi qui veut qu’en cas d’abus, il y a une correction. “Mesure pour mesure”, dit Jésus (Mt. 7:2). Cela s’appelle la justice immanente.

  10. Pas d’accord avec votre analyse . Je partage beaucoup plus la ligne de Comte-Sponville :https://www.franceinter.fr/idees/le-coup-de-gueule-du-philosophe-andre-comte-sponville-sur-l-apres-confinement .
    Phrase choc : attention à ne pas faire de la valeur santé la valeur suprême de notre existence . Et puis reconnaissons aussi que bcp de pays que l’on cite en exemple sont des pays de vieux : Allemagne (taux de fécondité : 1.5 depuis 20 ans , Corée du Sud : 0.8 ( voila un peuple suicidaire ) Alors que la France , avec un taux voisin de 2 depuis 20 ans investit dans ses écoles , ses enseignants , les jeunes qui arrivent en nombre sur le marché du travail , elle n’ a pas les marges de manoeuvres d’autres pays pour investir pour le 3ième âge . Soyons clair : les vieux dans nos pays ont eu la chance de vivre un cycle de paix , de stabilité (75 ans ) , de progrès , de vie confortable . On laisse quoi à nos jeunes ? du chaos : sanitaire , climatique , épuisement des ressources , économie en chute libre , géopolitique prenant le parti de la confrontation plutôt que la coopération et des dettes , des montagnes de dettes : nous , les vieux (j’en fais partie ) devrions avoir honte , nous ne pensons qu’à nous .

  11. Vous nous parlez de science et de pragmatisme pour glisser quelques assertions démenties par les faits:
    -plus d’UE n’est pas le remède contre les pandémies. Nous avons une criante démonstration de l’absence de solidarité européenne, mettant en évidence le côté artificiel de cette entité. Plus concrètement, la pandémie est entrée massivement dans les cantons Tessin, Vaud et Genève par le biais de la libre circulation depuis les foyers situés en Lombardie et en Haute- Savoie. Si le CF avait rapidement instauré des filtres pour préserver ces cantons des travailleurs frontaliers potentiellement contaminés, il aurait alors été possible de se montrer plus solidaire en accueillant dans nos hôpitaux des malades de ces régions. Une partie des coûts humains et financiers de cette crise est donc à mettre sur le compte de la libre circulation. Finalement, une Suisse forte et solidaire est plus utile à l’Europe qu’une Suisse en remorque. Je me permets de citer l’intervention forte de Berlusconi en faveur de la Suisse dans l’affaire des otages Libyens, rappelant au passage sa reconnaissance pour avoir été accueilli dans notre pays comme enfant au sortir de la guerre.
    S’il est une chose que cette crise a rappelé, c’est qu’en temps de crise, il est vain de compter sur les autres. Donc, la solution évoquée par Berset quant à un partenariat pour être en mesure de produire localement des produits stratégiques est excellente. Produire localement avec de la main d’œuvre locale, voilà la solution sûre, écologique et sociale.
    – Nous avons eu une excellente démonstration de la capacité du CF à se présenter du jour au lendemain comme un gouvernement d’union nationale pour faire face à la crise. Il reste cependant un problème institutionnel à résoudre: un conseiller qui a été largement financé par les lobbies comme Cassis fait tache. C’est dans tous les cas une raison suffisante pour le laisser aux affaires étrangères où ses relations d’intérêt sont nettement moins dérangeantes. Du reste, dans ses prises de positions, on ne reconnait nullement le médecin. S’il est une chose que nous pouvons améliorer pour mieux armer nos institutions en cas de crises, c’est éloigner les lobbies de la vie politique.
    – Vous accusez Berset quant à la faiblesse des stocks sanitaires… peut-être. Mais vous savez sans doute qu’un conseiller fédéral peut rarement prendre ce genre de mesure seul. Il doit pourvoir disposer des finances nécessaires. Cela reste donc à voir.

  12. Je suis frappé à vous lire qu’il est plus important de trouver des responsables au manque de préparation à une pandémie, que d’imaginer un nouveau paradigme, de nouvelles solutions, pour sortir de l’impasse de notre fuite en avant. (Abus de pouvoir du capital, climat, biodiversité)
    Bien sûr, Monsieur Berset et le conseil fédéral n’ont pas fait tout juste. Mais reconnaissez que l’exercice est pour le moins inattendu dans son ampleur.
    Pour moi, le droit à l’erreur est fondamental. Avec la limite tout aussi importante que la répétition de l’erreur doit être sanctionnée. Supprimer cette opportunité et vous imposez un immobilisme coupable par peur de l’action.
    Renvoyer Berset dans le civil est une solution simpliste. Laissez-le en place pour la gestion de la suivante. Il a acquis une bonne expérience dans ce domaine. Vous pourrez revendiquer son remplacement si, par malheur, il ne prend pas le temps de relire les rapports et d’en tirer des actions concrètes Et, plus important encore, je souhaiterais qu’il s’affranchisse des dogmes du capitalisme et des promoteurs de rendements financiers à tout prix, au mépris du plus grand nombre, Et qu’il écoute les scientifiques qui depuis des décennies nous démontrent par des mesures concrètes (mesurables et contrôlables) et non de la science-fiction que nous allons droit dans le mur. Ne changeons pas une équipe qui selon toute vraisemblance a, jusque-là gagné.
    Et ma question : par qui le remplaceriez-vous qui ne fasse pas partie du système ?

    1. En pratique il est impossible de démettre un conseiller fédéral pour servir de fusible comme on le fait dans d’autres systèmes. En effet la responsabilité est collégiale et souvent un Conseiller fédéral en exprimant la position du CF va à l’encontre de sa propre conviction.
      Je ne reproche pas à Alain Berset d’avoir pris de mauvaises décisions mais d’avoir menti à la population en expliquant que le masque ne sert à rien. On va bientôt le rendre obligatoire dans certaines circonstances comme les transports publics. Il est détestable de communiquer à la population en changeant ainsi radicalement de recommandation. Dans les difficultés, la confiance est indispensable. Il faut donc dire la vérité, même déplaisante. A savoir : tout le monde serait protégé parce que chacun protègerait les autre, mais ce n’est pas possible parce que le stock de masques n’a pas été prévu. Un mensonge ne supprime pas une erreur mais l’aggrave.
      Il reste que nous avons en proportion de la population trois fois plus de morts qu’en Allemagne et en Autriche et ceci mérite de sérieuses explications. Ce n’est pas une petite erreur.

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