Avant qu’il soit trop tard

 

Deux élections cantonales viennent de dévoiler une réussite inattendue de l’écologie, aussi bien pour les Verts historiques que pour les Verts libéraux. Il n’est pas exclu que, lors des prochaines élections fédérales, la somme de leurs sièges dépasse les 10% au Conseil national et les propulse au Conseil fédéral, qui en aura bien besoin. Cela dépendra des canicules de l’été, des typhons et des incendies de forêt. La transition climatique s’invite comme question posée par le peuple aux exécutifs. Les manifestations étudiantes ont servi de signal déclencheur, mais l’inquiétude déborde la jeune génération.

La réponse aux questions latentes est loin d’être évidente. En France, une modeste tentative de gérer la transition climatique en augmentant les taxes de l’essence a mené à la révolte des gilets jaunes. Les manifestants sont affrontés à une situation invivable : le prix de l’essence pèse trop lourd sur leur budget puisqu’ils sont obligés de se déplacer en voiture pour leur emploi. Leur problème n’est pas la fin du monde, mais la fin du mois. Mal payés, trop taxés, soumis à la dictature d’un centre parisien, les Français ont répondu par une de ces insurrections dont ils ont le secret. Les Champs-Elysées, siège du commerce de luxe, a subi de véritables émeutes qui ont culminé avec la désacralisation de l’Arc de triomphe. En essayant timidement de considérer la transition climatique, le gouvernement français a dû finalement lâcher une rançon de dix milliards pour apaiser la révolte.

Effectivement, la transition énergétique est soumise à plusieurs couples d’impératifs contradictoires. Il faut en même temps :
Agir sur les prix pour réduire la consommation d’énergie, sans dégrader le pouvoir d’achat des plus démunis.
Faire croitre les secteurs verts, avant de faire décroître des secteurs traditionnels, pour ne pas susciter le chômage.
Agir résolument au niveau national, bien qu’un effort planétaire gouverné par une instance exécutive internationale soit seul efficace.
Limiter l’immigration, sans renoncer à l’accueil des réfugiés, et faire décroître modérément la population du pays.

A titre de test pour les prochaines élections de toute nature , voici quatre mesures emblématiques, sur lesquelles partis et candidats devraient s’engager.
1/Fixer une date limite pour la circulation de véhicules qui consomment des carburants pétroliers.
2/Déterminer le moment auquel les chauffages au fuel ou au gaz ne seront plus autorisés.
3/Confirmer la sortie définitive du nucléaire.
4/Renoncer à la construction de centrale à gaz.

Si elles sont adoptées, les autres mesures s’ensuivront comme conséquences. Face à ces défis, on ne peut que souhaiter la présence des écologistes aux affaires. En particulier, les Verts libéraux, spécialité helvétique, promettent de concilier économie et écologie : c’est bien le but et ce ne sera pas facile. Mais à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.

12 réponses à “Avant qu’il soit trop tard

  1. Tout ceci est bel et bon : ces 4 mesures sont bourrées de bonnes intentions. Plus concrètement, je serais intéressé de connaître quelles solutions miraculeuses nous permettront de financer et réaliser ces renoncements. La méthode Coué ?

    1. Il y faudra le temps et des sacrifices. Mais au terme de cette mutation dans notre production et consommation d’énergie, on se retrouvera avec un système plus stable qu’aujourd’hui. Si la Suisse produit son énergie sur son territoire, elle ne sera plus obligée d’en importer 80% et de la payer. Ce n’est pas la première fois que le système technique change. Nous avons bien trouvé le financement des chemins de fer, des tunnels et des barrages.

      1. La sortie du nucléaire est d’un obscurantisme rare : produire une énergie dans notre propre pays, disponible à grande échelle, centralisée, sans impact paysager, pour notre indépendance, cela tombe sous le sens. Il faut revenir à la raison et travailler sur cette nouvelle technologie. Le solaire est sympathique pour faire joli, l’éolien une foutaise de grande envergure.

        1. J’ignorais que la Suisse soit productrice d’uranium. Où se trouvent nos mines?
          En Suisse, l’énergie éolienne reste inexploitée. Seules 34 éoliennes ont été installées en vingt ans. La Suisse dispose d’un potentiel estimé à 88% de la consommation d’électricité, mais il demeurera inexploité par suite de la multiplication des recours, au point que 160 projets sont actuellement en attente Le Conseil fédéral se résigne à une contribution de 10%.
          A titre de comparaison, un autre pays de même taille dans les mêmes conditions géographiques, l’Autriche en a installé 1016 pour une puissance totale de 2 095 MW. Le 25 décembre 2018, elles ont couvert 28% de la demande en électricité. En 2030, 24% des besoins en électricité seront couverts en Autriche. Ce n’est donc pas une foutaise.

  2. Je propose en plus de faire revenir la fusée qui fonce actuellement explorer le soleil : les instruments de cette célérate risquent de prouver que l’homme n’a pas sa place dans le grand jeu astrophysique et une influence si infime dans le réchauffement de la planète. Un grand merci à Monsieur Neirynck de ses piques suscitant le débat.

  3. L’entrée des Verts au Conseil fédéral implique la sortie du PDC selon la “Formule magique” et cela ne semble pas vous affectez, au moins pas publiquement, mais au fond vous êtes triste?, rassurez-nous que vous ne supportez pas la marginalisation d’un parti qui a tout pour être parmi les grands? Le C du PDC dérange, certains pensent à tort que le PDC est un parti papiste, alors qu’il s’agit d’un parti humaniste qui a contribué activement au succès de notre pays. La chute vertigineuse du PDC n’est pas l’oeuvre du Seigneur mais c’est l’oeuvre de certaines personnalités politiques du PDC, nuls & incapables, qui ne méritaient même pas d’y être membre.

    1. J’ai évoqué l’entrée des Verts et je n’ai pas parlé de la sortie du PDC. Rien n’empêche celui-ci de faire campagne pour une transition énergétique ordonnée.

  4. Les évaluations au niveau des bâtiments (www.toitsolaire.ch) montrent que l’apport photovoltaïque suffit à couvrir les besoins énergétiques électriques , la géothermie pour le chauffage , mais une source d’appoint restera nécessaire pour les prochaines décennies et les centrales à gaz pourraient remplir cette tache parce qu’elles sont faciles à mettre en oeuvre et bien moins dangereuses que des centrales nucléaires. Ces centrales pourraient plus tard consommer de l’hydrogène produit par le surplus d’énergie solaire .
    Il parait évident que les véhicules hybrides ou 100% électriques devront être l’unique moyen de déplacement dans le futur . L’aviation reste pour l’instant en quête d’une technologie plus renouvelable , les bio carburants sont pour l’instant la seule réponse possible.
    Les barrages serviront avant tout de réserve ou de stockage du surplus délivré par le solaire en fonctionnant selon le principe du pompage-turbinage .
    Les finances fédérales sont amplement saines pour investir dans ces infrastructures nécessaires pour l’avenir et qui amèneront du travail et par conséquent engrangeront des impôts .
    Les moyens existent, seule la volonté politique reste faible , la majorité bourgeoise toujours campée sur des arguments antédiluviens !
    Il faut avant tout se concentrer sur tous les avantages que procure la transition énergétique et pas se figer sur un hypothétique emballement climatique . Il faut par exemple relever la contradiction de l’UDC prônant l’indépendance de la Suisse tout en refusant son autonomie énergétique seulement possible avec les techniques vertes !
    Je crains qu’on se limite à des taxes supplémentaires complètement inefficaces , le marchandage du CO2 n’a pas fait progresser le sujet d’un iota depuis 1992 !!!

  5. La maîtrise de l’energie est une option incontournable et celle d’origine Solaire serait très bien placée (mais vous êtes bien mieux placé que moi pour le dire). Au TJ de la RTS hier soir, en tant que téléspectateur, j’apprend que si la majorité des toits suisses étaient recouvert de pannaux photovoltaïques l’energie produite suffirait aux besoins actuels de la Suisse. Reste le problème du financement et donc à définir si se seront des taxes ou des impôts ou des investissements personnels ou communautaires à consentir. Je subodore que la proche résolution de ces futures exigences seront complexes, mais pas impossibles.

    1. “Si la majorité des toits suisses étaient recouverte de pannaux photovoltaïques l’energie produite suffirait aux besoins actuels de la Suisse”. En moyenne annuelle peut-être, mais en hiver?! J’ai des panneaux PV sur ma maison et en décembre 2017 par exemple, ceux-ci n’ont pratiquement rien produit. L’histoire de la moyenne, me rappelle un professeur de physique qui illustrait les limites de cette notion en nous disant qu’un homme avec un bras dans le réfrigérateur et l’autre sur le fourneau se trouvait “en moyenne” dans une position confortable :-)!

  6. Effectivement si les Verts dépassent les 10% ils pourront demander un siège au CF. Le demander, oui. L’obtenir? C’est une autre affaire, compte tenu de la résistance de l’establishment. Ceci dit, admettons qu’ils l’obtiennent. Qui sera le maillon faible? Hum hum! Tout le monde a deviné.

    Cela sera le châtiment final, et mérité, du PDC, qui sera puni par le ciel pour avoir trahi sa mission de parti chrétien, catholique et conservateur, défendant les vraies valeurs de la Suisse éternelle.

    Depuis une génération le PDC avait perdu sa boussole et ne savait plus à quel saint se vouer. Il avait changé de couleur, adoptant l’orange, couleur complémentaire du bleu des libéraux, au lieu du noir des catholiques. En mal d’inspiration il avait tenté des campagnes gadget avec comme images choc des brosses à dents ou des bouteilles de gel de douche. Mais cela n’avait rien donné.

    Puis il trouva la femme providentielle qui lui permit de renouer avec le succès: Doris Leuthard était une belle femme, malgré un léger strabisme. Elle avait commencé sa carrière dans son Argovie natale, avec des affiches sur le thème “duschen mit Doris”, c’est à dire sous la douche avec Doris. Evidemment avec un slogan aussi génial elle avait tout de suite été élue, car tout le monde voulai être sous la douche avec elle et se faire frotter le dos.

    Ce fut le début d’une grande carrière de femme d’état internationale au cours de laquelle elle se fît remarquer par son zèle à en surajouter, avec son grand sourire et son sympathique accent Suisse allemand à couper au couteau, sur les foutaises écolos à la mode, comme la “transition énergétique” et l’accord de Paris sur le climat, des impostures, des inepties qui sont les dadas des mondialistes. Pas étonnant qu’elle se soit fait bien voir.

    À part ça rien, aucune vision. Aucune notion de l’intérêt national de son pays. Quand le parlement a violé honteusement la Constitution Fédérale pour ne pas appliquer les quotas d’immigration voulus par le peuple, elle s’en est même félicitée.

    Dans ces conditions il est évident que le PDC ne sert plus à rien. Pire, il est nuisible. Il a trahi ses valeurs et, pour l’écologie, il a eu tort de se faire le porteur d’eau des Verts. Le peuple, comme toujours, préférera l’original (Vert) à la copie (noire, ou plutôt orange). Donc le PDC, avec la belle Doris Leuthard, n’aurait pas dû servir la soupe au parti qui le supplantera au CF. Mais maintenant c’est trop tard. Le PDC descendra dans sa tombe, qu’il a creusée lui-même.

    C’est un peu dommage pour Madame Au Foyer (Amherd en allemand signifie “Au Foyer”, Viola Amherd la femme au foyer) qui aurait pu faire des choses bien pour l’armée. Mais pour remplacer Doris Leuthard, dans le genre gravure de mode Lisa Mazzone fera l’affaire. Quelle différence entre les deux? Il n’y en aucune. Sauf que Lisa Mazzone est plus jeune. Avec elle aussi on aimerait bien aller sous la douche.

    Sic transit gloria mundi.

    Hic jacet PDC.

    Resquiat in pace!

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