Une politique de recherche et d’innovation ambitieuse pour la Suisse

Chère Jessica,

Le weekend dernier, un institut de renommée mondiale situé dans le canton de Vaud célébrait ses 50 ans d’existence, en organisant des journées portes ouvertes. Au même moment, un autre poids lourd de la recherche scientifique, situé dans le canton de Genève, a profité de l’arrêt technique de son accélérateur de particules, le Grand collisionneur de hadrons, pour ouvrir ses portes au public.

Tu auras deviné que je fais référence à l’EPFL et au CERN, dont les journées portes ouvertes m’ont donné l’occasion d’aborder dans ce billet une thématique qui suscite une moindre attention politique, mais qui est pourtant essentielle pour la prospérité de la Suisse et les échanges scientifiques internationaux.

Avant cela, j’aimerais néanmoins te dire combien je suis heureux de pouvoir échanger avec toi dans le respect et l’ouverture au dialogue.

En effet, au cours de cette semaine, un parti représenté au Conseil fédéral a défrayé la chronique en tombant dans ce qu’il y a de plus lamentable en politique : s’attaquer aux personnes au lieu de débattre des idées.

Cette démarche a tellement choqué que certaines sections romandes de ce parti s’en sont désolidarisées avec autant de courage que de sévérité. Qu’elles en soient remerciées et félicitées !

Revenons-en au thème que je me propose d’aborder ce jour.

Tu sais que dans notre pays, notre principale matière première, c’est la matière grise.

En juillet dernier, pour la neuvième année consécutive, l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) a décerné à la Suisse le titre de championne du monde de l’innovation.

Nous pouvons en être fiers. Nous le devons en grande partie à nos hautes écoles, à nos universités, à nos écoles polytechniques fédérales et à nos chercheurs, mais aussi aux cerveaux venus du monde entier en Suisse pour participer à la recherche, au développement et à l’innovation dans notre pays.

En effet, la recherche de pointe ne se conduit pas de manière isolée, chacun dans son coin. Elle se nourrit des échanges d’idées entre scientifiques du monde entier. Par exemple, le CERN met ses laboratoires et outils à disposition de plus de 10’000 scientifiques de 100 nationalités différentes et le succès de nos écoles polytechniques fédérales est aussi dû à nombre de professeurs et chercheurs internationaux.

Une étude publiée dans la revue scientifique « Nature » a montré que plus les pays sont ouverts sur le monde, plus l’impact de leur recherche scientifique est fort. Une proportion de chercheurs étrangers élevée, les possibilités pour les chercheurs nationaux d’effectuer des recherches à l’étranger et les équipes de chercheurs issus de plusieurs pays aboutissent à des études scientifiques plus souvent citées, et donc plus influentes.

La Suisse est un pays ouvert en matière de recherche et doit le rester. Elle participe depuis de nombreuses années aux programmes cadres de recherche et d’innovation de l’Union européenne (PCR). Depuis 2017, notre pays est un associé à part entière du 8ème programme de ce type, Horizon 2020.

La Suisse participe également à d’autres programmes internationaux (AAL2, Eurostars 2, EDCTP2, EMPIR, EURATOM et ITER), qui revêtent eux aussi une importance capitale.

Cependant, l’acceptation de l’initiative « contre l’immigration de masse » le 9 février 2014 a jeté un froid sur nos échanges scientifiques avec l’étranger. Entre 2014 et 2016, notre pays n’a en effet été associé que de manière partielle à Horizon 2020. Ce qui montre que cet équilibre est fragile et dépend de nos bonnes relations avec le reste du monde, y compris avec l’Union européenne.

La qualité de la recherche scientifique de notre pays, ainsi que la réputation de la Suisse comme centre de recherche, de même que les prochains succès de l’EPFL et du CERN, dépendent des échanges scientifiques internationaux, dont l’importance est parfois sous-estimée lorsqu’il s’agit de conclure de nouveaux accords de libre-échange.

C’est pourquoi je pense que la Suisse aurait beaucoup à gagner en s’engageant en faveur de mesures et d’accords qui stimulent les échanges scientifiques internationaux.

Qu’en penses-tu ?

On en reparle autour d’un café ?

Amicalement,

Murat

Murat Julian Alder

Murat Julian Alder est né en 1981 à Bâle, a grandi aux quatre coins du monde et vit à Genève depuis 1999. Avocat au Barreau de Genève, il est député libéral-radical au Grand Conseil genevois depuis 2013. Il a été vice-président du PLR genevois entre 2011 et 2015.

Une réponse à “Une politique de recherche et d’innovation ambitieuse pour la Suisse

  1. Sur le fond vous avez bien évidemment raison. Mais, en face de vous lors de la négociation des accords envisagés sur la recherche, il y aura probablement des politiciens ou représentants de ces derniers, qui pourront s’imaginer en position de force pour exercer diverses pressions (je n’en dirai pas plus). Du coup, l’élan et l’ideal de la recherche scientifique en Suisse (EPF, CERN, Uni, etc.), risque de se retrouver une nouvelle fois freinée par des exigences politiciennes « dogmatiques » et dépassée par la réalité (l’actualité l’illustre à merveille). Restons optimistes.

Les commentaires sont clos.