Passé composé

Être archéologue, c’est avant tout répondre à quelques questions cruciales : non, nous n’apprenons pas à manier le fouet lors de nos études, les fossiles de tyrannosaures concernent nos collègues paléontologues et oui, il reste encore des vestiges antiques à découvrir. C’est le cas notamment à Crotone, à la pointe de la Botte italienne, où, sous le béton de la ville moderne, se cache une cité plurimillénaire fondée il y a 2’700 ans par des colons grecs.

Mais pourquoi donc un couple d’archéologues genevois se retrouve-t-il à Rome pour étudier les vestiges d’une cité grecque de Calabre ? Entre 2011 et 2014, plusieurs sites datant d’environ 350 av. J.-C.  y ont été découverts lors de fouilles de sauvetage effectuées par la Soprintendenza Archeologica della Calabria. Cependant, les fonds débloqués pour les fouilles archéologiques n’incluent pas l’étude du matériel. Voilà pourquoi, dans le cadre d’une collaboration entre la Surintendance et l’Université de Genève, deux chercheurs se sont vu proposer des sujets de thèse lié à ces découvertes. Elle se chargerait d’étudier la céramique retrouvée sur les différents site, tandis que lui s’occuperait de l’étude d’une nécropole mise au jour, l’odonymie faisant parfois bien les choses, le long de la Via dei Greci.

La première partie de nos recherches s’est déroulée dans les réserves du musée de Crotone, où il fallut mesurer, décrire, dessiner et photographier le matériel. La seconde étape comprend le traitement des informations ainsi accumulées et nécessite de longues sessions en bibliothèque. Nous avons donc décidé de nous rendre dans la plus grande bibliothèque consacrée à l’Antiquité : Rome. En plus d’abriter de vastes collections d’ouvrages nécessaires à nos recherches, la Ville éternelle nous permet de nous évader et de rêver. Chaque déplacement, promenades ou footing (ah ! la gastronomie italienne…) est une invitation au voyage dans le temps : ici un obélisque ramené d’Égypte par Auguste, là un temple bâti par Hadrien désormais inclus dans le bâtiment de la Bourse. Plus loin encore, des chats se prélassent sur les vestiges d’un portique édifié par Pompée. Ces moments sont l’occasion de sortir d’une certaine routine et de retrouver l’émerveillement qui nous a poussés à devenir archéologues.

Ces bouffées régulières d’air antique et le cadre de l’Institut Suisse nous permettront, d’ici un à deux ans, de dévoiler quelques chapitres de l’histoire de Crotone écrits il y a près de 2’400 ans.


Christine Pönitz-Hunziker (1983, Berne) – Archéologie, Rome
A étudié l’histoire et l’archéologie de la Méditerranée à l’Université de Berne. En 2014, elle a terminé un Master en archéologie de la Méditerranée et Histoire antique à l’Université de Berne. Depuis 2015, elle travaille à sa thèse de doctorat sur les céramiques des nécropoles Via dei Greci et Cimitero Sud de Crotone comme témoignage du développement socioculturel et économique de la ville du sud de l’Italie aux IIIe et IVe siècle av. J.-C. À Rome, elle se consacre à ses recherches pour la thèse de doctorat qui est soutenue par le Fonds National Suisse de la recherche Scientifique et bénéficie de la collaboration scientifique de Timothy Pönitz, lui aussi boursier à l’Institut Suisse, dont le projet porte également sur l’étude archéologique de la Crotone antique en Calabre.

Timothy Pönitz (1989, Ginevra) – Archéologie, Rome
A étudié l’archéologie classique et l’égyptologie à l’Université de Genève. En 2014, il a terminé un Master en archéologie classique à l’Université de Genève. Depuis 2016, il travaille à sa thèse de doctorat sur la nécropole Via dei Greci et le panorama funéraire de Crotone. À Rome, il entend approfondir ses recherches en travaillant en collaboration scientifique avec Christine Pönitz-Hunziker, elle aussi boursière de l’Institut Suisse, dont le projet porte également sur l’étude archéologique de la Crotone antique en Calabre.

Istituto Svizzero

L’Istituto svizzero a plus de 70 ans. Il souhaite se faire mieux connaître et illustrer, grâce aux récits de ses résidents de Rome, Milan ou Palerme, comment cette plateforme interdisciplinaire permet à des artistes et à des scientifiques venus de toute la Suisse de développer leurs projets en croisant leurs expériences et leurs pratiques. Sous l’impulsion d’une nouvelle équipe et de Joëlle Comé, sa directrice depuis quatre ans, l’institut a ouvert des résidences à Milan, la ville du design, de l’architecture et de la mode. Mais aussi à Palerme, la cité qui se situe depuis toujours au carrefour des civilisations et de la Méditerranée. Le blog donne la parole aux résidents et permettra de suivre ces chercheurs tout au long de leur séjour et de leur cohabitation inédite à l’Istituto svizzero. Il informera de l’avancée de leurs recherches qui vont, de l’archéologie à l’architecture, en passant par les arts visuels, la composition musicale ou l’histoire de l’art. Et ainsi de les accompagner dans leur découverte de l’Italie et des trois villes de résidence.