Caffè al vetro

Les collaborateurs de l’ISR nous emmènent aussi dans leur Rome de tous les jours, à l’intérieur et hors des murs de l’institut. Avec humour ! Samuel Gross, responsable artistique et curateur de l’Istituto svizzero, nous offre un point de vue amusant et pédagogique sur la culture du café en Italie.


Très loin de moi l’idée de tenter d’écrire un essai sur la culture du café en Italie. Les guides de toute nature débordent de considérations sur ce sujet et sur l’évaluation à donner aux établissements dans les différentes villes italiennes. Celles-ci prétendent toutes, par ailleurs, avoir une culture propre de la boisson emblématique du pays.

Quatre préalables toutefois.

  1. Il n’y a rien de comparable en Suisse ou dans le monde à un café pris en Italie. Même si je tiens à rassurer notamment l’association suisse des cafetiers-restaurateurs, je consomme aussi de la caféine chaude en Suisse. Je considère simplement qu’il s’agit d’une autre boisson (pas désagréable par ailleurs).
  2. Un bon café ne se boit que debout, au bar et rapidement. Je penche pour l’idée que la construction de l’identité italienne s’étant faite contre celle, entre autres, de l’empire autrichien, tout porte l’italien à regarder avec mépris, l’alanguissement viennois dans les établissements publics…
  3. On ne met du lait dans son café que le matin ou si on est un enfant.
  4. Plus d’un euro le café, c’est douteux.

Passées ces quelques notions de base, la diversité existe. À chacun son bar préféré. Si on boit debout et rapidement, on échange toutefois toujours un petit mot, une petite histoire et, bien sûr, des regards complices (ce n’est pas là, le seul privilège des parisien(ne)s en terrasse).

Mais, il reste des élégances et des mystères dans la norme. Ainsi, le sucre. Faut-il sucrer son café ? À Naples, près de l’université on vous servira le café sucré, très sucré, sans discussion possible. Dans un de me établissement préféré de Rome, tenu par de jeunes passionnés siciliens, le nom de code d’accès au Wifi est, en italien dans le texte meglio senza zucchero (meilleur sans sucre)… Là, on discute moyennement le conseil. Plus généralement et usuellement vous aurez tout le choix à disposition au comptoir, sucre blanc ou brun, un vrac ou en sachet, faux sucre et… miel. L’Italie est un des pays qui perpétue l’usage classique du miel comme condiment.

Une élégance maintenant : pour vous faire passer pour un local demandez que l’on vous serve votre café al vetro. Le barista fera couler un expresso dans un petit verre conique sans anse. Vous essayerez ensuite de boire votre gorgée de café sans vous bruler les doigts et les lèvres. J’ai essayé assez vainement de trouver une explication, hormis celle de rentrer dans d’infinies polémiques gustatives de cette pratique, que l’on prête surtout à Rome aux personnes d’un certain âge. J’aime croire à celle-ci : si on aime tant le café, on aime aussi en voir toute la gamme colorée, la mousse, les nuances. Un café dans un verre, c’est un plaisir de plus.


Samuel Gross est responsable du programme artistique de l’Institut suisse. Il a obtenu un master en Histoire de l’art à l’Université de Genève en 2001. Depuis, il travaille comme commissaire d’exposition indépendant et critique d’art pour des magazines d’art et collabore à des livres d’artistes (éditeur et auteur de la monographie de Sylvie Fleury, 2015, publiée par jrp | Ringier). Parmi ses expériences de travail précédentes on retriendra notamment sa collaboration avec la Fondation Speerstra, Suisse, en tant que directeur jusqu’en 2014; la Galerie Evergreene, Genève, en tant que directeur artistique (2007-2012) et le MAMCO (Musée d’art moderne et contemporain), Genève, en tant qu’assistant du directeur. Parmi les expositions qu’il a récemment organisées, on peut citer ici: Roman Signer, Institut suisse, Rome; Balthasar Burkhard, Institut suisse, Milan; John M. Armleder, Institut suisse, Rome; Elizabeth Murray « Récit d’un temps court 2 », MAMCO, Genève. Samuel Gross a été aussi membre de différentes commissions artistiques, entre autres: Prix Manor, Artissima – section Present Future, et F.P. Journe.

Istituto Svizzero

L’Istituto svizzero a plus de 70 ans. Il souhaite se faire mieux connaître et illustrer, grâce aux récits de ses résidents de Rome, Milan ou Palerme, comment cette plateforme interdisciplinaire permet à des artistes et à des scientifiques venus de toute la Suisse de développer leurs projets en croisant leurs expériences et leurs pratiques. Sous l’impulsion d’une nouvelle équipe et de Joëlle Comé, sa directrice depuis quatre ans, l’institut a ouvert des résidences à Milan, la ville du design, de l’architecture et de la mode. Mais aussi à Palerme, la cité qui se situe depuis toujours au carrefour des civilisations et de la Méditerranée. Le blog donne la parole aux résidents et permettra de suivre ces chercheurs tout au long de leur séjour et de leur cohabitation inédite à l’Istituto svizzero. Il informera de l’avancée de leurs recherches qui vont, de l’archéologie à l’architecture, en passant par les arts visuels, la composition musicale ou l’histoire de l’art. Et ainsi de les accompagner dans leur découverte de l’Italie et des trois villes de résidence.