Petit préambule:
J’anticipe certaines réactions: “C’est quoi cette merde? Où sont les bastons entre ivrognes? Où sont les alus cramé dans les chiottes publics et les litres de bières gerbés sur des docs usés?”
C’est les chroniques de Charclo ou Martine à la ferme?
Ok c’est un peu fleur bleue mais bon c’est comme ça.
A la base la première fois que je l’ai écrit, ça a fini à la poubelle avant que je la récupère pour la mettre dans ma pile de papelard. Puis suite à un coup de téléphone, j’ai récupéré le brouillon, bossé dessus plusieurs heures, je l’ai affiné, affûté, raccourci puis mis au clair.
Quand à Lili, vu qu’elle est plus télégramme que FB, je lui envoyé le texte par mail. Ça lui a beaucoup plu et elle m’a laissé le publier.
C’est pas du Charclo, ça c’est sûr…voyez juste ça comme un exercice de style, pas évident à faire mais je trouve que m’en suis bien tiré .
En tout cas j’attends vos critiques positives comme négatives.
A plus.
Chroniques de Charclo:
Lili
Cet épisode se passe en France, plus précisément à la campagne, chez ma mère, il y a environ deux ans…
Lorsque j’ai franchi la porte de la poste où tu taffais, un vieux faisait son boulot de vieux en prenant un max de temps à te faire perdre le tien. Dans la file y avait un autre vieux, impatient à l’idée de se plaindre de la baisse du livret A ou du prix des timbres. Moi, je venais juste porter un courrier de ma mère.
À peine entré tu m’as salué d’un “- Bonjour vous devez être le fils A.? Vous allez bien?” Faute professionnelle N°1: ensuite tu passas du vouvoiement au tu. “-Toutes mes condoléances pour ton papa, il était très gentil”, “- Heu merci” (merci aussi de rouvrir une plaie encore vive et ça fait déjà 2 fautes professionnelles) tandis que le dernier client était à ton guichet, tu m’as lancé l’air de rien “-Et sinon tu as bien reçu les colis que ta maman a envoyé quant t’étais en prison?” (Et de 3!).
Ce fut mon tour d’être face à toi, si mon sourire était forcé le tien irradiait de chaleur, tes yeux verts brillaient comme de l’opale. J’étais le dernier client, tu savais déjà mon nom et me dis le tien d’une voix si douce qu’on aurait cru que le vent me le soufflait: Amélie. Deux, trois banalités plus tard, tu me racontais que toi non plus tu n’étais pas du coin mais de Lyon. J’ai sorti un compliment foireux, genre “-Je me disais aussi que t’étais trop belle pour une bressane”. Pas l’habitude d’aborder une fille, je devais avoir l’air gêné mais pas autant que toi qui as rougi et glousssé comme une gamine.
Je t’ai filé le papier de ma mère, t’ai dit que j’allais boire une bière dans le parc en face et t’ai proposé de venir me rejoindre. Sans hésitation tu m’as répondu que tu finissais dans 5 minutes. Je savais pas quoi te prendre alors j’ai pris un Oasis et deux Kro.
On a parlé de tout et de rien…du village, des plantes, des hirondelles, de l’air affectueux des vaches…une heure plus tard on se tenait la main.
Quand on s’est revu dans la soirée, on a fait des ricochets sur la Griotte et cueilli des mûres. Arrivé devant chez toi, je t’ai pris par la taille et embrassé.
La nuit suivante on échangea plus que de la salive. Tu étais belle (tu l’es toujours rassure toi!) une odeur de vanille, un corps fin, une peau laiteuse, des cheveux roux presque écarlates, j’aurais passé la nuit à compter tes tâches de rousseur.
Belle et gentille…Le premier hic: c’est que tu me semblais tellement…heu comment dire sans être méchant, disons “pas très futée”.
L’autre problème venait de moi: question relations humaines je suis complètement à côté de la plaque. Une psy m’avait donné son diagnostic en ces mots: “- Concernant vos relations avec les autres vous êtes à la limite de l’autisme” en clair ça veut dire que je comprends pas trop ce que me veulent mes semblables, il faut qu’une femme se déshabille devant moi pour que je me dise “tiens, je dois lui plaire”. Et encore la dernière fois j’ai téléphoné à la Fac de médecine pour savoir si j’avais pas passé un doctorat sans m’en rendre compte et si je pouvais avoir des relations sexuelles avec ma patiente. Réponse : négative…dans les deux cas!
J’avais à peine raccroché que je l’ai entendu claquer ma porte et courir dans l’escalier. Note pour plus tard: il n’y a qu’au cinéma que la jolie fille craque pour le malade mental.
Cette fois ça s’est passé naturellement, facilement…tellement facile, qu’à un moment je me suis demandé si un ami perdu de vu avait engagé une escort girl pour me remonter le moral et éviter potentiel suicide… Ben non t’étais juste une belle fille à qui je plaisais et réciproquement.
Et encore une fois j’ai tout foiré…Je commençais à comprendre les différences entre aimer passer du temps avec toi et être amoureux, j’ai fini par piger que toi tu m’aimais. Tu m’aimais d’un amour aussi pur, qu’inconditionnel, alors que moi de mon côté j’aimais nos étreintes, j’aimais passer du temps avec toi…mais seulement un peu. En fait au bout de 12 heures ça me devenait difficile de supporter nos différences.
La beauté et l’intelligence, on peut pas tout avoir…Moi par exemple quand j’étais bébé une fée s’est penchée sur mon berceau, elle était foncdé, elle a vomi dedans, résultat je suis pas spécialement beau, n’ai aucune qualité mais une putain de résistance aux drogues.
Je m’égare…mais bref je m’étais promis 4 choses: Ne pas lui faire de peine, ne pas profiter d’elle, ne pas lui mentir et lui être fidèle.
Si j’ai foiré la quatrième, au moins j’aurais tenu la troisième.
Un jour tu m’as appelé depuis la France, ta voix étais dure, c’était la première fois que je te sentais énervée. T’avais trouvé mon compte Facebook et voulais savoir pourquoi je t’avais dis que je n’en n’avais pas.
Ce jours là j’ai craqué. Je ne voulais justement pas te mentir alors je t’ai dit la vérité: que je voulais pas te parler sur messenger.
Elle: ” -Pourquoi?”
Là j’ai du te crier, te hurler même: à savoir que tu étais la fille la plus stupide, la plus malléable, la plus conne, la plus influençable que j’avais connu…
Elle entre deux sanglots: “-C’est vraiment ce que tu penses de moi?”
Moi: “- Heu oui c’est ce que je pense mais je voulais pas te le dire. Par contre je veux aussi te dire…”
Merde elle a raccroché.
Je voulais aussi te dire que j’aimais ta douceur, que je respectais ta foi et les principes qui allaient avec, que tu ne m’avais jamais jugé ni critiqué…
Alors que je tournais en rond mon portable à la main, je prends soudain conscience qu’au final j’étais trop orgueilleux pour l’avouer et qu’en fait je l’aimais. Si c’est pas le cas alors pourquoi ce pincement au coeur? Merde un infarctus! Non c’est juste mon coeur qui se brise…
La semaine suivante j’ai pris le TGV, pas de ticket, pas de papier Schengen pour ma métha, arrivé à Dole, autostop jusqu’à Louans, vélo volé jusqu’à Mervans. Je suis devant sa poste, je rampe sous la fenêtre, un coup d’oeil, oui c’est elle et non sa collègue. L’office ferme dans 30 minutes, un gamin gare sa 125 et entre, il a une gueule à se nommer Kevin, à écouter du Jul et être fan de tuning. Non! Dites-moi pas qu’elle m’a remplacé par ce truc! Ok je suis pas un mec bien, mes péchés s’accumulent mais là, la punition est trop sévère…ouf je le vois sortir un paquet à la main avant de remonter sur sa monture en me regardant d’un sale oeil, à vrai dire c’est le regard que me jettent tout les fachos de ce bled à la con. Elle sort…cloué sur place, je peux plus bouger, c’est comme une apparition, elle s’avance, ne m’a pas encore vu, sort un paquet de clope et s’en allume une. Tiens! Ça c’est nouveau et je dois y être pour quelque chose.
Elle me voit, s’avance puis s’arrête à un mètre de moi…
” – Lili (c’est la première fois que je l’appelle ainsi)…je suis désolé…je suis qu’un connard et je t’ai traité comme une merde…je voulais juste que tu saches que tu es importante pour moi…”
Elle me coupe: – T’es passé chez ta mère avant de venir?
– Non je suis passé par Louans
– Tu veux passer chez elle avant?
– Non, je suis venu pour te voir
Machinalement on s’est dirigé vers l’étang, en silence, tu as pris ma main.
Chez toi j’ai fait une omelette au fromage avec des champis, perso j’aime pas mais comme toi t’adores…
3 heures du matin, on a fais l’amour 2 fois. La deuxième elle a jouit coup sur coup, me serrant à m’en casser les vertèbres, plantant ses ongles dans mon dos. Là elle est à plat ventre, elle ronfle et bave sur son oreiller mais elle est si belle…je retire lentement sa couverture, lui caresse le dos de mes deux doigts, elle frissonne, je caresse ses fesses, elle se tourne, m’embrasse, je passe ma main sur son sein, descends, elle écarte ses jambes, elle gémit, mouille, je me remets sur elle, la pénètre lentement…une union brève mais intense, on jouit en même temps, sa petite main serrant la mienne.
Un peu plus tard elle sort des toilettes, nue, belle et c’est d’une démarche gracieuse qu’elle vient se coucher, sa tête sur mon épaule, son bras m’enlaçant… Un instant de bonheur que j’aimerais mettre dans une boîte que j’ouvrirais à chaque baisse de moral. En fait cette boîte c’est ma mémoire, et ça me suffit.
Il y a 10 jours:
Ma situation administrative se règle. Après des semaines de dénuement et d’angoisse, je vois enfin le bout du tunnel et j’ai enfin reçu mon RI (la moitié, désormais c’est toutes les quinzaine). Mais voilà quitte à looser autant le faire à fond, du coup j’ai paumé ma Postcart le jour ou j’avais touché mon fric…ma carte me revient mais à la mauvaise adresse, un formulaire de perte et un changement d’adresse plus tard… j’attends! Cette nuit j’ai pioncé chez Giovani, bien dormis d’ailleurs, 22h-12h sans intermittence. On sort, je l’accompagne à la banque, il exulte, il a reçu ses tunes. Moi aussi mais c’était y a 2 semaines et peux pas y toucher, énervant? Non plus que ça. J’ai pas trouvé de mot assez dur dans le dico pour exprimer ma frustration. Giovani me donne un billet, avec le reste de monnaie d’hier j’ai dans les 30.-
Premier achat : une fiasque de cognac, premier vol: des sachets de café. Petit-dej’ à coup de gniole, de Stilnox et de méthadone. Je remarque que j’ai rien pris la veille et que je me sens pas en manque, c’est marrant depuis que je suis à la rue je consomme beaucoup moins.
De deux : nourrir mon phone. 10 balles, tiens avale ça raclure! Bon déjà j’appelle ma mère, histoire de lui dire que je vais bien et qu’elle ne s’inquiète pas (dans la bible on parle de “pieux mensonge”). Ensuite, la Poste: prise de tête, incompréhension et dialogue de sourds… bref mon correspondant me jure que je recevrais un nouveau NIP dans les 48h et une nouvelle carte dans les 2 a 4 jours bref encore une bonne semaine sans un rond.
De trois: après une courte hésitation je joins Amélie.
– Salut ma jolie, ça va? (reste du dialogue privé) je lui raconte mes péripéties et lui demande si elle peut m’envoyer 50 euros en courrier A.
Deux jours plus tard je n’ai reçu ni mon NIP, ni ma carte mais une enveloppe venue du 71, à l’intérieur, le “monde libertaire”, l’hebdo de la fédération anarchiste, planqué entre les pages 150€.
Un jour tu m’avais dit de croire aux anges gardiens, je m’étais foutu de ta gueule, ben j’avais tord une fois de plus.
Ma belle renarde, mon ange, ma belette, ma Lili…