Voyage au bout de la nuit

Chronique de Charclo

(Interlude en mode flashback)

Manon est chez sa mère, elle m’a laissé ses clefs, histoire que je puisse dormir au chaud et qui plus est dans un vrai lit. Bon… après m’avoir trompé et foutu six ans de vie commune en l’air, c’est bien le moins qu’elle puisse faire…et pis, faut bien nourrir le chat.

Le problèmes c’est que je dors pas, j’y arrive pas… y’a trop de bordels dans ma tête. Je gamberge, je cir-convulse…mes pensées s’entrechoquent, mes convictions se cassent la gueule, une guerre civile se déroule sous mon crâne et mon sommeil en est un dommage collatéral…

Internet ne marche pas, et la télé semble se foutre de moi; entre les téléfilms de Noël, les énièmes documentaires sur l’aviation ou sur les nazis, des pubs me parlent de données numériques à stocker sur un Cloud, de frigos et de stores connectés, de crédit à 3% pour acheter une nouvelle cuisine. Vautré sur le canapé, je fume mon dernier joint, ressassant échecs et regrets.

Marre! Je mets mes fringues et reprends mon sac.

Avant de sortir je regarde le hall, ce n’est plus mon appart, ce n’est plus chez moi, c’est devenu…ailleurs. Je traverse le parc, ciel clair, les étoiles illuminent une nuit glaciale, je marche sur l’herbe blanchie par le givre.

Le voile noir est sur nos têtes, le linceul sous mes pas. Retour dans la rue, retour vers nulle part.

Renens, janvier 2016.

Gilles Adrian

Gilles Adrian est SDF, toxico, misanthrope et peu sociable mais il écrit pas trop mal. Auteur contemporain représentatif de toute une génération qu'en Suisse Romande on préfère cacher sous le tapis...

Une réponse à “Voyage au bout de la nuit

  1. Vous êtes sans doute un bon gars, ami Gilles.
    Mais si vous voulez qu’on reste ami, ne plagiez pas mon ami le génie Louis-Ferdinand Céline, alias Destouches.
    Il y a assez de merdeux pour lui chercher des noises, guel?

    Allez, sans rancune et au boulout 🙂

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