Ma meilleure amie.

 

Chroniques de Charclo:

Ma meilleure amie

Jeudi 7 janvier. Mon cul et moi sommes assis au resto de la Migros, les jours se suivent et se ressemblent, enfin pas tout à fait : je n’ai plus de tablette, je n’ai plus le moral non plus et c’est d’ailleurs lié.

La veille vers midi j’ai corrigé et publié ma dernière chronique. Après je me suis endormi, assis, la tête dans mes bras croisés, j’ai du dormir 45 minute, voir une heure.

Ensuite je suis allé faire des trucs et des machins… Le genre de trucs que font les zonards et les SDF. Je pourrais être plus précis mais j’ai pas envie de parler boulot.

Je me suis rendu compte qu’il me manquait quelque chose, je retourne au resto en courant.
Je l’ai cherchée, ma fidèle amie. J’ai demandé aux serveuses si elles l’avaient vu… ben non.

Ma jolie Sony Xperia…elle est plus là.

Soit on me l’a volé quand j’étais dans les limbes, soit je l’ai oublié en partant. Mais ça j’arrive pas à y croire, elle était ce que j’avais de plus précieux…Oui tablette je parle de toi! Je tenais à toi plus que tout! Comment aurais-je pu te laisser seule? On n’oublie pas sa femme au McDrive, alors non je te jure que ne t’ai pas abandonnée.

J’ai passé par les différentes phases du deuil: le choc, la colère, le déni puis la tristesse. Après y en a d’autres, la reconstruction étant la dernière phase mais je crois que je vais me contenter de rester triste, ça je le fais bien…

Ma tablette c’était ma musique, mes films, mes séries, mes jeux Android mes Ebooks, bref tout ce qui me permettait d’occuper ces putains de journées interminables.

Ce qui me chagrine le plus, c’est tout je que j’avais écrit. Et j’en ai écrit des trucs…des histoires plutôt courtes et relativement mal écrites genre : délires u-chroniques, post-apo à la Fallout et autres tentatives de SF foireuses. Souvent je me disais qu’il faudra un jour les peaufiner, en faire quelque chose de bien, de beau, bref de lisible…bon ben tant pis.

J’avais écrit pas mal de textes politiques aussi. Entre les slogans anars et les brûlots nihilistes improbables, y’avais quand même quelques trucs qui tenaient la route, sur l’économie, sur la dialectique, la religion, l’anarchisme bref ça aussi pour que dalle…

Et y avais aussi des poèmes. Que j’avais pas l’attention de publier parce que c’était personnel; des rimes sur mon ex, sur mon défunt père, sur moi-même…tout ça c’est perdu, foutu, écrit pour rien…

Peut-être que ce soir pendant que je greloterais dans le parking de la Coop, le bâtard qui m’a volé ma fidèle compagne, les lira tranquille sur son canapé en attendant le repas que lui prépare sa femme.

J’essaye de ne pas y penser, ça me donne envie de pleurer et de vomir en même temps…

Gilles Adrian

Gilles Adrian est SDF, toxico, misanthrope et peu sociable mais il écrit pas trop mal. Auteur contemporain représentatif de toute une génération qu'en Suisse Romande on préfère cacher sous le tapis...

14 réponses à “Ma meilleure amie.

  1. Bon, ami Gilles, mettez un panneau, cherche financement-vol pour l’Uruguay et venez dans la zone, je vais déjà vous remonter le moral et vous changer les idées, couper du bois, nourrir les animaux et bla 🙂

    1. P.S. Demandez à l’Etat de Vaud et au Temps, chacun, la moitié du financement, on va bien voir comment tous ces politeux.esses de mon ass voient l’affaire… vous leur faites un reportage d’enfer et votre condition change!
      (moi suis un vieux con comme le regretté Mocky 🙂 rien à braire

      1. P.S.2. Mais si vous n’avez aucune ambition de sortir de votre zone d’inconfort, le trottoir de rêve, please, ne faites pas perdre de temps à personne, les cloches, il faut voir à Pâques, éventuellement à Saint-Pierre, many thanks, gracias amigo 🙂

    2. Je suis sure que ça serait kiffant ça.
      Non Gillou?

      Après y a juste les histoires de pharmacie, d’espace Shengen et de pénalité du RI quand tu quitte le territoire.
      (Je sais que Gilles doit déjà rendre des tunes parce qu il est parti “trop” de jours sur France)

      On s en rend pas compte que souvent ici t es enchaîné par ton état économique…
      La pauvreté en Suisse c est notament des inégalités face à l’accès aux soins, aux transports et aussi à la zone de mobilité

      (Ex: Tu vis au RI sur Lausanne et t as trouvé un logement sur Fribourg? On te laisse signer le bail mais on te donne jamais le droit de t inscrire au contrôle des habitants…parce qu on veut que tu reste sur le canton dont.tu ea dépendant. Pas de liberté pour ce genre de citoyen)

      Bref…je m égare!
      Bises amicales Mister Olivier!
      J aime bien lire vos commentaires

      Et merci Gillou pour cette nouvelle publication sur le Temps! ❤

      1. J’aime être clair et ma proposition est sérieuse et honnête, car ici, pas de place pour les foutriquets.
        je le précise, car entre les jeunes à qui tu veux donner un coup de main et qui te volent et la bande de flibustiers suisses que j’ai accueilli une fois… .

        Oui c’était une association vaudoise qui aide, soi-disant les jeunes en difficulté, avec un bateau à voiles, en joignant Rio-Bas.
        Il y avait 5 marins et éducateurs pour 6 jeunes (la 7ème, ils l’avaient renvoyée en Suisse par avion depuis Rio).
        Enfin bref, ils n’ont pas décollé de leur cellulaire pour envoyer leurs selfies et n’ont rien vu, alors ce binzz, fini!!!

        1. C est vraiment une proposition pleine de sympathie

          Je laisse Gilles répondre et réfléchir à l’idée. Peut être que ça le tente. Il a grandi dans les Antilles avant d arriver a Renens.
          Les freins que j’ai évoqués plus haut sont par contre des difficultés réelles.

  2. Ces chroniques me plaisent… tablette, natel, papier, papyrus… peut importe, que l’on puisse vous lire tout simplement

  3. Quel vide, quelle douleur tu as dû éprouver en écrivant ces lignes… Je ne souhaite que la préservation de ta tablette et que les aléas de la vie la remettent entre tes mains.

    Je découvre ta chronique, j’annule mes activités du jour.

  4. Je promets de partager ce témoignage avec le monde entier une fois que mon mari sera revenu et aujourd’hui, avec tout le respect que je vous dois,

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